Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

I ROIS. — II CHRONIQUES (Suite).

CXXXII. — Premiers actes du règne de Salomon.

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1766. (1 Rois 2: 12). Salomon, né l’an 1033 avant Jésus-Christ, n'avait que dix-huit ans lorsqu'il monta sur le trône. Tout présageait que le commencement de son règne serait fort orageux; car il avait dans son cousin Joab, dans le sacrificateur Abiathar, dans le malheureux Scimhi et surtout dans son frère Adonija, des adversaires redoutables. Mais Dieu lui inspira la ferme volonté de faire sentir la vigueur de son bras aux ennemis de l'ordre, et de fonder la sûreté de sa couronne sur le châtiment exemplaire des méchants. C'est aussi ce que fera notre Seigneur quand il reviendra pour prendre possession de son règne.

1767. (13-25.) Ce fut d'abord sur Adonija que dut s'exercer la justice du nouveau roi. Oubliant la condition que son frère avait mise à la grâce qu'il lui avait accordée lors de sa révolte [1600], Adonija osa présenter à Bathscébah une requête dont l'objet et le ton montraient assez qu'il n'avait point abandonné ses pensées ambitieuses [1484, 1570]. Salomon ayant donc appris cette démarche d'Adonija et démêlant des vues secrètes qui avaient échappé à Bathscébah, chargea Bénaja de le faire mourir. Comme Absçalom, ce prince périt victime de son ambition, ou, pour mieux dire, de sa révolte contre l'Éternel, car c'était par la volonté de Dieu que Salomon s'était assis sur le trône de David son père. Adonija ne pouvait avoir aucun doute à ce sujet.

1768. (26, 27.) Quant au sacrificateur Abiathar, qui, après avoir été si fidèle à David, s'était rangé du parti du coupable Adonija, Salomon le relégua dans sa maison d'Hanatoth, ville d'où nous verrons plus tard sortir un grand prophète. De cette manière, non seulement Abiathar cessa d'exercer la sacrificature, mais encore il fut le dernier des descendants d'Héli qui ait revêtu l'Éphod [814], et il termina ses jours dans l'obscurité et dans le dénuement. Ainsi encore s'accomplit la prophétie prononcée cent treize ans auparavant [1309].

1769. (28-35.) Au récit de ces événements, Joab, que sa conscience ne devait pas laisser tranquille; Joab, qui avait partagé et favorisé avec Abiathar le crime d'Adonija; Joab, l'homme de sang, qui s'était couvert de celui d'Abner et de celui d'Hamasa; Joab, dis-je, sentant que le jour des rétributions était venu pour lui, s'enfuit au tabernacle et y saisit les cornes de l'autel [1600]. Peut-être fut-ce par un sentiment de repentance qu'il voulut mourir en ce lieu même. Quoi qu'il en soit, Bénaja, par ordre de Salomon, l'y suivit, et l'y frappa du coup qu'il méritait. — Dès ce moment, Bénaja remplaça Joab dans le commandement en chef des armées, comme Tsadok avait remplacé Abiathar dans la charge de souverain sacrificateur.

1770. (36-46.) Restait encore un homme que David mourant avait signalé à la vigilance du jeune roi: c'était Scimhi. La manière dont Salomon le traita d'abord était bien propre, semble-t-il, à toucher son cœur. Il fixa Jérusalem pour sa demeure, l'autorisant à s'y bâtir une maison; tout en lui déclarant que s'il dépassait le torrent de Cédron, il s'exposerait à une mort certaine. Scimhi donna sa parole à Salomon; mais, trois ans après, saisissant une occasion qu'il avait peut-être concertée lui-même, il se rendit à Gath, chez les Philistins, au mépris de ses engagements. Par la rupture volontaire de son ban, il avait prononcé l'arrêt de sa propre mort. Peut-être Salomon fut-il fondé à croire que cet homme incorrigible tramait quelque complot contre la sûreté du royaume. Il le fit mourir comme il le lui avait annoncé, et Scimhi vint montrer à son tour que l'Éternel châtiera tôt ou tard ses ennemis et ceux de son Oint.

1771. (3: 1.) Dans ce même temps ou quelque peu auparavant (car il est probable que la mort de Scimhi est racontée au chapitre 2 par anticipation), Salomon épousa une fille du pharaon qui régnait alors en Égypte. Très jeune encore, il s'était uni à une Hammonite nommée Nahama (1 Rois 14: 31), et il en avait eu un fils peu avant la mort de David. Ce fils est Roboam, qui monta sur le trône. L'union de Salomon avec une princesse égyptienne ne fut donc pas son premier mariage, et nous le voyons entrer ainsi dans une voie qui lui fut encore plus funeste qu'elle ne l'avait été à son père ou à Jacob, le père de tout Israël. Quelle que fût la piété de Salomon à cette époque, il est permis de croire qu'en contractant cette alliance, il céda surtout à la vanité; mais le consentement qu'y donna Pharaon nous montre que David s'était placé par son glorieux règne au niveau des plus grands princes de son temps. Je dis David, parce que Salomon n'avait pas encore exécuté les travaux qui lui donnèrent, aux yeux des hommes, une illustration plus grande que celle dont avait joui le premier roi de Juda.

1772. (2-4.) Je viens de mentionner la piété du jeune prince, et l'Écriture m'y autorisait, car elle nous dit qu'il aima l'Éternel et qu'il se conduisit d'abord selon les préceptes de son père. À l'exemple d'Abraham et de tous les hommes pieux d'Israël, il offrait à l'Éternel de fréquents sacrifices; mais il se permettait de le faire (comme au reste la généralité des Israélites en ce temps-là) ailleurs que dans le lieu même où reposait l'arche de l'alliance. C'était, semble-t-il, une infraction formelle aux lois de l'Éternel, infraction qu'avait pu légitimer parfois l'état précaire de la nation; mais l'arche étant alors à Jérusalem, on ne voit pas pourquoi l'on offrait autre part le culte que Dieu requérait de son peuple. Il faut dire cependant à la décharge de Salomon, que si l'arche était à Jérusalem, sous une tente que David lui avait arrangée, l'ancienne tente, le tabernacle du désert se trouvait à Gabaon, ainsi que l'antique autel d'airain fondu par Betsaléel (2 Chron. 1: 3-6). On comprend donc que Salomon pût aimer à servir l'Éternel dans ce lieu sacré, et que l'Éternel prît plaisir à y exaucer ses prières»

1773. (5-15.) Un jour donc qu'il avait offert à Gabaon mille holocaustes pour lui et pour le peuple nombreux qui l'y avait accompagné, le Seigneur lé favorisa d'une vision dans laquelle il lui promit de lui accorder toutes ses demandes. Salomon, pénétré de respect pour la mémoire de son père, jaloux de lui succéder dignement, plein de défiance de lui-même et comme effrayé de la tâche que lui imposait la royauté, Salomon, dis-je, fit une prière qui montre combien l'Esprit de Dieu avait déjà mis de sagesse dans son cœur. Au lieu de demander une longue vie, ou d'abondantes richesses, ou une grande gloire, ou même le succès de ses armes contre ses ennemis, il se borne à supplier le Seigneur de lui accorder un cœur sage et intelligent, afin de bien gouverner le peuple remis à ses soins. Une telle prière, vous le comprenez, ne pouvait qu'être exaucée, car c'était le Seigneur lui-même qui l'avait dictée. Or Celui qui a dit: «Cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et toutes choses vous seront données par-dessus» (Matth. 6: 33), ne se contenta pas de promettre à Salomon la sagesse: il lui déclara qu'il lui donnerait en outre ce qu'il n'avait pas demandé, si bien que nul monarque ne pourrait jamais lui être comparé, pourvu toutefois qu'il persévérât dans la droite voie. — Salomon, réveillé de son sommeil et joyeux de la vision dont il avait été favorisé, courut à Jérusalem, et, cette fois devant l'arche de l'alliance, il offrit de nouveaux holocaustes et des sacrifices de prospérité, avec les fêtes usitées en pareille circonstance.

1774. Les récits contenus dans la fin de ce chapitre et au chapitre suivant, sont destinés à montrer comment s'accomplit la promesse de Gabaon. Nous y avons d'abord (16-28) un jugement que Salomon rendit dans une affaire où il était bien difficile de démêler le vrai d'avec le faux, mais où il manifesta une connaissance remarquable du cœur humain. Il comprit qu'une mère, même la plus dépravée, «aimera mieux céder son enfant à une autre que de le voir massacrer sous ses yeux. Nous pouvons, par cet exemple, nous faire une idée de la sagesse que Salomon avait reçue pour rendre la justice à son peuple.

1775. (4: 1-25). La sagesse du gouvernement de Salomon se voit encore par l'ordre qu'il établit dans son royaume. Il ne s'entoura pas de généraux en grand nombre comme David, car il n'eut pas à livrer des batailles; mais il était secondé dans le gouvernement de son peuple par douze intendants préposés à autant de divisions territoriales. Israël s'accrut rapidement sous le règne du roi pacifique [1541]; il jouit d'une grande prospérité d'un bout du pays à l'autre, et le territoire sur lequel il s'étendit allait de l'Euphrate à la frontière d'Égypte. Ainsi s'accomplit la promesse faite à Abraham près de neuf siècles auparavant [297].

1776. (26-34.) Quant à Salomon lui-même, rien n'égale la splendeur de sa cour. Elle était si nombreuse qu'il lui fallait chaque jour d'immenses provisions, et ces provisions lui arrivaient de toutes parts avec un ordre admirable. On peut d'ailleurs apprécier ses richesses par le nombre des chevaux qu'il avait dans ses écuries. Mais ce qui est plus digne d'attention, ce sont les lumières que Dieu lui donna; en sorte que, s'il ne fut pas le plus grand roi de son temps par l'étendue de ses domaines et par le nombre de ses sujets, il n'y en eut point, ni avant ni après lui, d'aussi illustre par sa science. Plus sage qu'Ethan et qu'Héman [1610], il prononça trois mille paraboles ou proverbes, composa un nombre considérable de cantiques, et fut profondément versé dans l'histoire naturelle; aussi venait-on de toutes parts s'instruire auprès de lui.

1777. Telle fut la gloire de Salomon. Tout ce tableau se rapporte à l'ensemble de son règne, et il ne faut pas grand effort pour y voir un type du règne glorieux de Celui qui s'est comparé à Salomon, tout en se disant plus grand que lui (Matth. 12: 42). C'est notre Seigneur Jésus-Christ qui est le vrai prince de la paix; c'est lui qui, jugeant avec justice, est le roi de son Église, peuple à la fois petit et grand; lui qui administre ce peuple avec une infinie sagesse et qui nourrit ses serviteurs des richesses de sa grâce. Puis, quand il reparaîtra dans sa gloire, alors se réalisera de la manière la plus parfaite tout ce qui ne fut qu'en figure sous Salomon.


CXXXIII. — Le temple de Salomon.


1778. (1 Rois 5: 1-12.) Parmi les princes auxquels le souvenir de David était cher et qui reportèrent sur Salomon l'affection qu'ils avaient eue pour son prédécesseur, il faut remarquer, avec l'Écriture, Hiram, roi de Tyr. Ce prince phénicien, dont les possessions avaient pour limites méridionales le pays de Canaan et s'étendaient le long de la Méditerranée, avec le Liban à l'est, gouvernait un peuple de commerçants qui, à cette époque déjà, marchait au premier rang des nations civilisées. Hiram ayant fait complimenter Salomon à l'occasion de son avènement au trône, le jeune monarque, de son côté, lui envoya une ambassade, pour lui exposer le dessein qu'il formait d'élever un temple à Jéhovah son Dieu et pour réclamer l'assistance des Tyriens. Non seulement il lui fallait les bois qui croissaient sur le Liban, mais encore personne ne pouvait les préparer aussi bien que les charpentiers phéniciens, habitués à manier la scie et la hache pour leurs constructions navales. Hiram, joyeux de tout ce qui pouvait concourir à la grandeur du Dieu de David, son ancien allié; Hiram, qui avait peut-être quelque connaissance et quelque crainte de l'Éternel, et qui, d'ailleurs, pouvait voir en cette affaire une bonne opération commerciale; Hiram consentit à tout ce que Salomon lui demanda. Il fut convenu que le roi d'Israël prendrait au Liban le bois qui lui était nécessaire, que les ouvriers phéniciens aideraient ceux de Salomon pour l'exploitation et la fabrication des poutres et des planches, qu'Hiram ferait conduire ces matériaux de Tyr à Joppé, le port le plus rapproché de Jérusalem, et qu'il donnerait des hommes habiles dans l'art de bâtir. Par compensation, Salomon devait payer à Hiram, en froment et en huile, un tribut annuel assez considérable.

1779. (13-18.) Aussitôt on mit la main à l'œuvre. Tout se fit avec un ordre parfait et une grande célérité, grâce à l'esprit éminemment administrateur du jeune Salomon et au nombre immense d'ouvriers dont il put disposer. Sous les ordres d'un nommé Adoniram et dirigés par trois mille six cents inspecteurs, cent cinquante mille Cananéens furent chargés des travaux les plus pénibles, de concert avec trente mille Israélites qui se relevaient de mois en mois par tiers. Dans ces temps, il fallait, à défaut de machines, force bras pour effectuer de grands ouvrages. D'ailleurs, outre la fabrication du bois, il y avait d'énormes blocs à sortir des carrières, des routes à construire pour les transporter, des chantiers à établir en divers lieux; chacun sait de combien d'opérations diverses se compose une entreprise de cette nature.

1780. (6: 1-38.) Quand toutes choses furent prêtes, mais non auparavant, on posa les fondements du saint édifice. Ce fut (la date m est précise), le second jour du second mois de l'année, celui de Ziph [681], quatre cent quatre-vingts ans après la sortie d'Égypte, ou l'an 1011 avant l'ère chrétienne. L'érection du temple eut quelque chose d'extrêmement majestueux par le silence plein de respect qu'on y observa (1 Rois 6:7). Les pierres étant toutes taillées, il n'y avait plus qu'à les poser, et les bois s'assemblaient avec le moins de bruit possible; belle image, en vérité, du recueillement avec lequel notre âme doit s'édifier dans le Seigneur, comme un temple consacré à sa gloire.

1781. Je ne m'arrêterai pas d'ailleurs à décrire le palais qui remplaça la tente du désert. En lisant la description que nous en fait la Parole de Dieu, vous verrez que, sur des proportions agrandies, la nouvelle Maison était fort semblable au Sanctuaire par la distribution intérieure, par les autels, les tables, les chandeliers, sans parler de l'arche sainte avec son propitiatoire et ses chérubins. Quant à la magnificence, elle surpassait la première demeure, puisque le sol même fut recouvert d'or. Puis, au lieu d'un seul parvis, on traversait, avant d'atteindre le temple proprement dit, plusieurs cours entourées de portiques et de bâtiments d'habitation, en sorte que les constructions occupaient un terrain considérable. C'était sur la montagne de Morija, en ce lieu saint où Abraham offrit jadis son fils Isaac [356, 362] et où David avait acheté l'aire d'Arauna le Jébusien [1595, 1596]. Malgré l’immensité du travail, la construction du temple de Salomon, réputé une des merveilles du monde, ne dura toutefois que sept années et demie, tant la bénédiction de Dieu fut avec le royal architecte (37, 38).

1782. Ils furent nombreux sans doute les témoignages qu'eut Salomon de l'approbation de l'Éternel son Dieu. Il en est un surtout dont la Bible fait mention et que je livre à votre étude (11, 12). Cette maison, dit l'Éternel, sera le signe et le gage de la présence du Seigneur au milieu de son peuple, une attestation perpétuelle de la fidélité avec laquelle il tiendra les promesses faites à David; mais ce qui, à ses yeux, vaut mieux que le temple le plus splendide, c'est l'obéissance à ses statuts, à ses ordonnances et à ses commandements. Rien ne saurait la remplacer; c'est à ce terme que la vraie foi conduit, c'est le fruit que doit porter le culte qu'on rend à Dieu.

1783. (7: 1-12.) Après cela, Salomon mit treize ans à se bâtir plusieurs palais fort magnifiques. L'un d'eux entre autres était destiné à la fille de Pharaon [1771]; palais dont la beauté ne donne qu'une faible idée de l'habitation céleste que le Seigneur Jésus, de qui Salomon est le type, prépare à l'Église, son heureuse épouse. Il érigea aussi un portique où fut placé le trône sur lequel il s'asseyait pour rendre la justice; on l'appela le Portique du jugement. Ce portique et son trône figuraient le tribunal auguste devant lequel il nous faut tous comparaître.

1784. (13-51.) Revenant au temple, l'historien nous parle de deux superbes ouvrages qui furent coulés en fonte par les soins d'un habile Tyrien dont le nom, Hiram ou Huram, était le même que celui du roi de Tyr. D'abord, deux colonnes pareilles, hautes d'environ trente-deux pieds, qu'on érigea dans le portique du temple. On pourrait les appeler des colonnes prophétiques, car l'une fut nommée Jakin (il établira), l'autre Boaz (en Lui est la force). Le second ouvrage était une immense cuve d'airain portée par douze bœufs de même métal que la cuve. Elle fut placée près de l'autel des holocaustes; c'était là que les sacrificateurs faisaient leurs ablutions.

1785. (8: 1-11; 62-66). Ce qui est plus remarquable encore, c'est la manière dont se fit la dédicace du temple. L'an 1004 ou 1003 avant Jésus-Christ, au mois d'Ethanim ou Tisri (septembre) [681], à l'époque même où les Israélites célébraient la grande fête des Expiations et ensuite celle des Feuillées ou des tabernacles [887, 910], Salomon ayant atteint sa trentième année, il y eut à Jérusalem, sur la convocation du roi, un immense concours de peuple. La fête dura deux semaines, et ce fut, à ce qu'il paraît, le dernier jour de la première qu'eut lieu la consécration de la maison de l'Éternel. De Sion, où l'on avait momentanément déposé l'arche, les sacrificateurs et les Lévites transportèrent cet illustre symbole de l'alliance [883], en chantant le psaume 136: «Célébrez l'Éternel, car il est bon, et sa miséricorde dure éternellement» (2 Chron. 7: 3,6). Aussitôt que l’arche, dans laquelle se trouvaient encore les tables de la loi, eut été placée sous les chérubins, qui, de leurs ailes d'or étendues d'une paroi à l'autre, formaient comme une voûte céleste à l'intérieur du sanctuaire, les sacrificateurs se retirèrent respectueusement pour faire place à l'Éternel, et, en ce moment, une nuée remplit toute la sainte maison; c'était la nuée même qui se tenait jadis sur le sanctuaire [931]. Le Seigneur montrait ainsi qu'il acceptait cette demeure et qu'il y faisait actuellement son entrée.

1786. (12-53.) Alors Salomon, pour lequel on avait construit une estrade au-devant de l'autel des holocaustes, et qui de là suivait des yeux la marche des sacrificateurs (2 Chron. 6: 13), prononça d’une voix haute ces simples paroles, où l'on voit toute l'émotion de son âme: «L'Éternel a dit qu'il habiterait l'obscurité. 0 Éternel, Jéhovah, j'ai achevé de bâtir une maison pour ta demeure et un domicile arrêté pour que tu y habites à toujours!» Après quoi, se tournant du côté de la foule, il bénit le peuple, il rendit grâces à Dieu, et, se mettant à genoux, il termina par une longue prière de consécration.

1787. Quelle joie c'eût été pour David de voir toutes ces merveilles! Mais il les contempla de loin par la foi; le Saint-Esprit lui avait donné de les prophétiser et de les célébrer d'avance par ses cantiques. Lisez en particulier le psaume 132 et arrêtez-vous sur les versets 8 et 16: «Lève-toi, ô Éternel, pour venir dans ton repos, toi et l'arche de ta force.» «Je revêtirai ses sacrificateurs de délivrance, et ses saints chanteront d'une grande joie»

1788. Remarquez, après cela, les grandes vérités que Salomon fut chargé de proclamer en cette occasion solennelle. Pour le dire d'une autre manière, voyez les dogmes qui faisaient le fond de sa foi ou de son culte. À l'aspect de la nuée qui remplissait la maison: «L'Éternel, dit-il, habite l'obscurité» (12). Sa nature et ses voies sont incompréhensibles pour de pauvres créatures telles que nous. C'est ce que le Psalmiste avait déjà déclaré: «La nuée et l'obscurité sont autour de lui; la justice et le jugement sont la base de son trône» (Ps. 97:2). «O Éternel, Dieu d'Israël, dit encore Salomon, il n'y a point de Dieu semblable à toi dans les cieux en haut, ni sur la terre en bas; c'est toi qui gardes l'alliance et la miséricorde à tes serviteurs, lesquels marchent devant ta face de tout leur cœur, etc.» (23), proclamation de l'unité de Dieu et de sa fidélité à tenir les promesses de sa grâce. «Mais serait-il vrai que Dieu habite sur la terre? Voilà, les cieux, même les cieux des cieux ne peuvent le contenir; combien moins cette maison que j'ai bâtie!» (27.) Salomon ne pensait donc pas, comme les idolâtres, que la divinité puisse être renfermée dans les murs d'un temple. «Ton nom, dit-il, ton nom sera sur cette maison; il y aura de grandes bénédictions pour ceux qui t'y adresseront leurs prières; quoi qu'il en soit, ô Éternel, tu n'habites pas une maison faite par la main des hommes» (29).

1789. Observez, de plus, que Salomon n'attribue pas à de telles prières une valeur indépendante des dispositions de ceux qui les font. Car voici ce qu'il dit: «Si quelqu'un connaît la plaie de son cœur» (38) et qu'il vienne t'invoquer dans cette maison, tu l'exauceras, toi, ô Éternel, «qui es le seul qui connaisse le cœur de tous les hommes» (39). Et puis, qu'est-ce que Salomon déclare que nous sommes tous devant Dieu? des pécheurs, «car il n'y a personne qui ne pèche» (46), vérité si souvent méconnue ou éludée et qui est la base de la connaissance de soi-même. Enfin, que donne-t-il comme un des traits distinctifs du caractère des enfants de Dieu? une obéissance du cœur, droite et sincère (61).

1790. Après cela, pour bien comprendre la prière de Salomon, il faut se rappeler de quoi le temple et tout son contenu offraient le type. Le propitiatoire, le chandelier, les deux autels, les sacrificateurs avec leurs sacrifices et leurs offrandes: tout cela prophétisait le Christ en figures si frappantes, que le temple, dans son ensemble même, est un type du Sauveur [853-861]. Aussi l'entendrons-nous dire au sujet de son corps: «Abattez ce temple et en trois jours je le relèverai» (Jean2: 19, 21). On peut donc affirmer qu'il n'y eut jamais sur la terre aucun édifice qui ait réellement mérité le nom de maison de Dieu, si ce n'est le temple bâti et consacré par le fils de David.

1791. Quant à l'ensemble de sa prière, il est facile de le résumer en peu de mots. Salomon voit prophétiquement les diverses circonstances dans lesquelles le peuple d'Israël ou quelqu'un de ceux qui appartenaient à ce peuple, aurait particulièrement besoin de la grâce de Dieu, et il supplie le Seigneur d'exaucer les prières qui lui seraient alors adressées dans cette maison ou en dirigeant ses regards de ce côté, si l'on se trouvait éloigné de Jérusalem. À ce propos, Salomon prédit avec une grande clarté, bien que par voie indirecte, les désordres que commettrait bientôt Israël, la captivité qu'il aurait à essuyer en punition de ses crimes et son retour dans le pays de Canaan, par un effet de la miséricorde du Seigneur (46-53).

1792. Ce ne fut donc pas en sa qualité de roi que Salomon prononça cette belle prière de consécration: ce fut en qualité de roi-prophète, de type du Messie, comme l'avait été David son père; pour le dire autrement, le Saint-Esprit parla par sa bouche. En conséquence, ses invocations renferment des promesses de Dieu, et nous pouvons nous tenir pour assurés de la grâce d'en haut si, dans nos misères, dans nos peines, dans nos péchés, nous invoquons l'Éternel en tournant notre cœur vers Celui qui est, par excellence, le temple auguste de la Divinité, savoir notre Seigneur Jésus-Christ.


CXXXIV. — Fin du règne de Salomon.


1793. (2 Chron. 7: 1-10; I Rois 9: 1-9.) Quand Salomon eut achevé sa prière, une flamme descendant du ciel consuma l'holocauste, et le peuple, rempli de joie à la vue de cette merveille, répéta tout d'un cœur les paroles du psaume: «Célébrez l'Éternel, car il est bon, et sa miséricorde demeure à toujours.» Après quoi le Seigneur se manifesta personnellement au fils de David, comme il l'avait fait douze ans auparavant [1773]; mais cette fois, il lui apporta des paroles qui étaient propres à le rendre sérieux. Tout en lui promettant de le bénir, lui et sa postérité, s'il marchait dans la droiture à l'exemple de David son père, l'Éternel lui dénonce, pour le cas inverse, des châtiments qui pouvaient sembler impossibles. Israël ne sera pas seulement asservi aux étrangers, comme du temps des Juges, mais encore il se verra chasser du pays de la promesse; cette maison même qui venait d'être consacrée au Seigneur, ce temple de sa gloire, sera détruit et ignominieusement outragé par les infidèles. Eh quoi! Dieu aurait-il conduit les fils d'Israël dans le pays de Canaan pour les en chasser? aurait-il ordonné la construction d'un temple pour le détruire? Eh! non, pas plus qu'il ne nous a créés pour nous perdre. Mais si nous demeurons dans le péché, nous nous perdons, de même que l'idolâtrie et les iniquités des Israélites devaient amener leur ruine. Or, nous verrons que la menace de l'Éternel n'eut que trop tôt son accomplissement.

1794. (11-28.) Le règne de Salomon, principalement remarquable par l'édification du temple, l'est encore par un grand nombre d'ouvrages analogues que ce prince fit exécuter. Non seulement il entoura Jérusalem d'une muraille pour en compléter les moyens de défense, mais encore il construisit quelques forteresses et bâtit plusieurs villes. Il en fonda même jusque dans le désert, où ses possessions s'étendirent assez pour avoir un port sur la mer Rouge. On donnait ce nom aux deux mers qui embrassent la péninsule de l'Arabie. De ce port, nommé Hetsjonguèber, et qui était au fond du golfe arabique, il faisait partir, de concert avec ses amis les Tyriens, des flottes qui lui apportaient d'Ophir, c'est-à-dire probablement de l'île de Ceylan ou des Indes orientales, une grande quantité d'or et tous les produits de ces riches contrées. Ce fut ainsi que l'opulence et la gloire de Salomon allèrent croissant; mais il s'en faut bien que ses sujets fussent par là plus heureux. S'ils durent à Salomon de se voir affranchis de tout esclavage aussi bien que du joug étranger (22), s'ils étendirent leurs possessions dans le vaste territoire que Dieu leur avait promis autrefois [297], ils eurent à supporter, outre des impôts proprement dits (15), des corvées fort onéreuses [1779]. Quant aux Cananéens qui étaient demeurés dans le pays, jamais peut-être ils ne furent plus à plaindre (20, 21). Il est permis d'envisager ce dernier fait comme une image de ce qui arrivera quand notre Seigneur entrera dans son règne; toujours est-il que l'ensemble de ce tableau est un exemple frappant des larmes que la gloire et les somptuosités des princes coûtent si souvent à leurs peuples.

1795. (10: 1-10.) Du reste, et pour le redire [1776], la grandeur du fils de David consista plus encore dans les lumières dont Dieu l'avait enrichi, que dans ses trésors et la magnificence de ses palais. Ce fut aussi là ce qui fit surtout sa renommée. Des princes se rendaient à Jérusalem pour le consulter, et, comme on le voit par la reine de Scébah, il ne manquait pas de leur raconter la gloire de l'Éternel son Dieu. Cette reine venait de l'Arabie, elle apportait avec elle de riches présents, et son but était de s'éclairer sur une foule de questions difficiles. Salomon lui fit part des connaissances que Dieu lui avait données; et quand elle l'eut ouï, quand elle eut vu l'ordre merveilleux qui présidait à l'administration du monarque hébreu, elle prononça des paroles qui attestent que son cœur s'était tourné vers l'Éternel, paroles que nul chrétien n'hésite à entendre de Jésus-Christ. Ces rois, en effet, qui viennent de loin consulter Salomon, la reine de Scébah tout particulièrement, sont le type des peuples idolâtres convertis à l'Évangile ou qui s'y convertiront plus tard. Notre Seigneur lui-même y a fait allusion (Matth. 12: 42). C'est donc à nous de dire avec la reine du Midi, mais en regardant au vrai Salomon: «Oh! qu'heureux sont tes gens! Oh! qu'heureux sont tes serviteurs qui assistent continuellement devant toi et qui écoutent ta sagesse! Béni soit l'Éternel ton Dieu qui t'a eu pour agréable, pour te mettre sur le trône d'Israël, parce que l'Éternel a aimé Israël pour toujours, et qu'il t'a établi roi afin de rendre le droit et la justice» (8, 9).

1796. (11-29.) Parmi les magnificences de Salomon, il faut admirer avec la Bible ce bois d'Almugghim dont il embellit le temple et son propre palais, bois que l'on croit avoir été le bois de santal; puis les cinq cents boucliers d'or déposés par lui dans sa maison du parc du Liban; enfin, un grand trône d'ivoire qui devait être tout ce qu'on peut imaginer de plus splendide, mais qui ne l'était pas trop pour figurer le trône glorieux de notre Sauveur. Des lions, symbole de la force et de la royauté, décoraient les marches du trône; le lion était d'ailleurs l'emblème de la tribu de Juda [592]. — Quant à ce pays de Tarsis où Salomon et les Tyriens envoyaient tous les trois ans une flotte, on ne sait pas au juste quelle contrée il faut entendre par là. Tarsis, dans la Bible, signifie quelquefois l'Espagne; mais c'est un mot qui paraît avoir désigné, en général, les pays d'outre-mer; or, quand on considère quel genre de produits la flotte de Tarsis rapportait à Salomon (22), l'on doit penser qu'elle revenait des Indes, comme celle d'Ophir, mais de plus loin peut-être que cette dernière.

1797. (11: 1-3.) Ici, l'histoire du fils de David change tout à coup de caractère. Ce roi d'abord si pieux, ce roi qui, par sa sagesse, par sa gloire, par ses richesses, par les travaux mêmes de son règne, a pu servir de type à notre Seigneur Jésus-Christ, ce roi-prophète en un mot, va nous donner le spectacle d'égarements qu'on aurait peine à croire si la Parole de Dieu ne nous les racontait. En vérité, il n'est aucun Israélite qui eût employé sa plume à les décrire s'ils n'eussent été parfaitement avérés, et même si le Saint-Esprit ne l'eût comme contraint à le faire; car cette histoire imprime une grande flétrissure sur celui de tous leurs rois dont les Juifs avaient le plus intérêt à ménager la mémoire. En effet, ils lui devaient le temple, édifice qu'ils vénéraient à juste titre, sans parler des saints Écrits dont ce prince-prophète augmenta le livre des révélations du Très-Haut.

1798. Or, non seulement le fils de David eut plusieurs femmes comme son père, mais encore il commit la faute grave de les prendre surtout parmi les peuples étrangers, même parmi ceux que l'Éternel avait maudits pour leur idolâtrie et pour leurs crimes. Il s'y attacha avec passion, nous dit l'Écriture; non pas à chacune d'elles assurément, car, dans sa vanité, il voulut surpasser tous les princes par son sérail comme par la multitude de ses chevaux et par l'opulence de sa maison. Quelle pratique odieuse que la polygamie! Comme elle dégrade la femme, cette aide, cette compagne donnée à l'homme, et combien elle est peu propre à procurer le bonheur domestique! Dire que Salomon avait sept cents femmes et trois cents concubines, c'est dire qu'il n'avait pas d'épouse, pas d'amie digne de ce nom; c'est dire qu'il s'était condamné à ignorer les douceurs de la vie de famille; c'est dire en un mot qu'il prépara lui-même son malheur.

1799. (4-8.) Si du moins il avait d'autant plus cherché Dieu! Mais non, l'amour de Dieu ne saurait subsister à côté d'une passion quelconque. Salomon se laissa finalement entraîner à l'idolâtrie par l'idolâtrie de ses femmes et par celle des gens de leur pays qui les avaient sans doute accompagnées. Quelques-unes peut-être, au commencement de son règne, s'attachèrent au culte de l'Éternel; mais il n'en fut pas toujours ainsi. À cette époque-là, Salomon se montrait si jaloux de la gloire de Dieu, qu'il ne permit pas à la fille de Pharaon d'habiter le palais de David, parce que l'arche y avait fait sa demeure (2 Chron. 8: 11). Peu à peu, le monarque crut devoir aux relations qu'il avait formées avec tant de familles royales, de permettre à ses femmes étrangères la célébration de leur culte. Il est probable que ce fut d'abord sans y participer lui-même; mais à la longue il sut se familiariser avec cet horrible péché, et, bien qu'on ne puisse pas affirmer qu'il ait jamais abandonné complètement le culte qui se célébrait dans le temple, il est du moins incontestable qu'il y joignit celui des divinités les plus impures, telles qu'Astaroth, sous le patronage de laquelle les Sidoniens plaçaient leurs infâmes débauches, et Moloc, à qui les Hammonites sacrifiaient jusqu'à leurs propres enfants. — Quelle leçon que cette décadence de Salomon! Jamais, et sous aucun prétexte, ni par attachement pour personne, nous ne devons fréquenter un culte que notre conscience réprouve. Ce qu'on fait d'abord par condescendance, on peut le faire bientôt par complaisance, puis avec plaisir; le sentiment de la sainteté de Dieu et de la souveraine importance de la vérité va s'affaiblissant de plus en plus, jusqu'à ce qu'il s'évanouisse tout à fait et qu'on en vienne à se séparer entièrement du Seigneur.

1800. (9-13.) De tels désordres ne pouvaient demeurer sans punition. Aussi le Seigneur fit-il savoir au fils de David que son royaume, si uni, si fort, si florissant, serait divisé peu après lui, le châtiment n'étant différé que pour l'amour de son père. Nous verrons, en traitant du livre de l'Ecclésiaste, l'effet que produisit sur Salomon cette juste sentence. En attendant, admirons par quelles voies toutes divines, un règne jusque-là profondément paisible vit toutes sortes d'agitations s'apprêter à lui déchirer le sein.

1801. (14-25.) Un Iduméen nommé Hadad, avec quelques-uns de ses gens, avait échappé dans son enfance au massacre des hommes de sa nation (2 Sam. 8: 13,14). Il s'était retiré en Égypte, où il épousa •une belle-sœur de Pharaon. Rentré plus tard dans son pays, Hadad avait fait alliance avec Rezon, roi de Syrie, qui résidait à Damas. Ces deux hommes, animés d'une égale haine contre Israël, furent les premiers instruments dont Dieu se servit pour inquiéter et harceler Salomon vers la fin de ses jours.

1802. (26-43.) Mais l'Éternel lui préparait un adversaire plus dangereux dans la personne d'un nommé Jéroboam, auquel le prophète Ahija fut chargé d'annoncer qu'il régnerait sur dix tribus d'Israël, lui recommandant expressément de servir Jéhovah, s'il voulait que le trône passât à sa postérité. La prophétie d'Ahija fut à la fois en parole et en action, celle-ci ayant pour but de rendre la parole plus expressive. C'est ce qu'on appelle une prophétie symbolique, et nous en verrons plusieurs dans la suite. Jéroboam apprit donc que l'Éternel abaisserait la famille de David à cause de Salomon; mais ce ne serait pas à toujours, puisque d'elle devait sortir le Christ. — Il paraît que le malheureux monarque eut avis de ce qui venait de se passer, car il voulut faire mourir Jéroboam, preuve que son cœur n'était pas encore humilié [1387]. Le fils de Nébat s'enfuit en Égypte, où, recueilli parle pharaon Scisçak, il vécut jusqu'à la mort de Salomon.

1803. Cet événement ne se fit pas longtemps attendre. Il eut lieu l'an 975 avant l'ère chrétienne. Salomon avait régné quarante ans comme son père; il pouvait être âgé de cinquante-huit ou cinquante-neuf ans quand il mourut. L'étude que nous allons faire des écrits de ce prince, achèvera de nous dépeindre cet homme de Dieu, remarquable par tant de piété et toutefois par tant d'égarements.

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