Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

NOMBRES.


LXVIII. Préparatifs de départ et premières marches. Lois diverses.

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Chap. 1-3
§ 920. Les enfants d'Israël étaient arrivés au pied de Sinaï le premier jour du troisième mois (Exode XIX, vers. 1 ). Onze mois après, l'Éternel ordonna de faire le dénombrement de tous ceux qui, âgés de vingt ans et plus, étaient en état de porter les armes. Il y en eut 603,550, y compris les étrangers qui s'étaient joints à eux en grand nombre et qu'on avait incorporés dans les diverses tribus (§ 690). Il se fit aussi un dénombrement particulier pour la tribu de Lévi. Elle se trouva de beaucoup la plus petite, par la raison sans doute qu'on n'avait point admis d'étrangers dans son sein. — Voilà ce qu'on lit aux premières pages du livre que nous allons étudier. On l'a, par ce motif, appelé le livre des Nombres ou des dénombrements. Cependant, ce livre est essentiellement historique. Il nous raconte les événements qui se passèrent dans le désert durant une période de trente-huit ans et neuf mois

4:
§ 921. Nous avons aussi dans le livre des Nombres, diverses ordonnances que je dois vous faire remarquer. Ainsi, le chapitre IV nous apprend que les sacrificateurs n'entraient pas en charge avant l'âge de trente ans et que leur service durait seulement vingt ans. Notre Seigneur, non plus, n'a voulu commencer son ministère qu'à l'âge requis par la loi; c'est lui, vous le savez, qui a exercé le vrai sacerdoce, le sacerdoce éternel.

4: 4-16
§ 922. On voit en outre, dans ce même chapitre, de quelle manière on s'y prenait pour démonter le tabernacle et transporter tout ce qui appartenait au sanctuaire, chaque fois qu'Israël devait établir ailleurs son campement. Il fallait beaucoup d'ordre pour que cela se fît avec promptitude et sans confusion. Le Seigneur y pourvut par son ordonnance.

Chap. 5
§ 923. Le chapitre V renferme diverses lois destinées à inspirer aux enfants d'Israël une grande horreur pour toutes les souillures de la chair et de l'esprit, particulièrement pour celles qui attentent à la pureté et à la sainteté des relations conjugales.

6: 1-21
§ 924. Le suivant traite de deux sujets fort intéressants: le vœu du Nazaréat et la bénédiction sacerdotale.

§ 925. Un Israélite, homme ou femme, pouvait se consacrer d'une façon particulière à l'Éternel et pour un certain temps. C'était une manière de s'engager à une vie plus sérieuse, plus retirée, plus sainte. Comme signes extérieurs de cette consécration, le Nazarien, ou consacré, laissait croître ses cheveux, s'abstenait de toute liqueur enivrante, évitait de se mettre en contact avec les choses que la loi déclarait souillées, notamment avec un corps mort. Lorsque les jours de son Nazaréat étaient achevés, il présentait à l'Éternel certains sacrifices et certaines offrandes à teneur de la loi. Vous vous rappelez sans doute ce que Jacob dit à Joseph en le bénissant (§§ 596, 597), et vous voyez toujours mieux comment notre Seigneur, dont Joseph a été le type, se trouve être le Nazarien par excellence.

6: 22-27
§ 926. Un des principaux offices des sacrificateurs était de bénir le peuple de la part de l'Éternel. C'est ce qu'ils faisaient en suivant la formule que vous lisez ici. Elles sont belles ces paroles de bénédiction! Il n'est pas étonnant que, dans beaucoup d'églises, on s'en serve à la fin du service religieux pour congédier le peuple. Vous avez là le nom de l'Éternel par trois fois répété, parce qu'il est le Père, le Fils et le Saint-Esprit. C'est comme lorsque les Apôtres écrivaient aux fidèles: «La grâce et la paix du Seigneur Jésus-Christ, l'amour de Dieu et la communication du Saint-Esprit soient avec vous!» D'ailleurs, il est dit que le Père nous a donné son saint Fils Jésus pour nous Bénir; en sorte que nous retrouvons toujours en Lui, et pour toutes choses, celui qui possède et exerce la vraie sacrificature.

7: 1-88
§ 927. Outre les offrandes que le peuple avait faites pour la construction du tabernacle (§§ 799, 861), il en eut encore à présenter lors de la dédicace de l'autel. Il le fit avec une grande libéralité, Dieu voulant qu'il nous servît en cela de modèle. Du reste, il est plus facile d'offrir son or et son bétail que de faire le sacrifice de ses passions. Nous verrons hélas! que ce pauvre peuple était loin d'avoir donné son cœur à Dieu.

7: 1-89
§ 928. Il nous a été dit en plusieurs endroits que l'Éternel continua de faire entendre sa voix à Moïse, même après que celui-ci fut descendu du Sinaï. Voici comment la chose se passait. Moïse entrait dans le sanctuaire; et la Parole lui était adressée de dessus le Propitiatoire, qui était comme le trône de la miséricorde et de la gloire de Jéhovah (§ 802).

Chap. 8
§ 929. Consécration des Lévites. — Ils devaient faire le service du tabernacle depuis l'âge de vingt-cinq ans à cinquante. Après qu'ils s'étaient purifiés et qu’ils avaient offert certains sacrifices, on les conduisait au tabernacle devant tout le peuple; là, ils étaient consacrés par l'imposition des mains des enfants d'Israël. C'est-à-dire que le peuple, dans la personne de ses anciens peut-être, posait ses mains sur leurs têtes et qu'il leur conférait ainsi lui-même la charge à laquelle les appelait le Seigneur. La chose se passait de la sorte parce que les Lévites se dévouaient au service particulier des autels à la place des fils aînés. Ceux-ci, selon l'institution patriarcale, auraient dû, comme Abraham, Isaac et Jacob, célébrer eux-mêmes le culte de l'Éternel; mais actuellement qu’ils formaient un si grand nombre de maisons, il était nécessaire pour plus d'unité qu'une classe d'hommes à part fissent, dans l'assemblée générale, les fonctions de chefs de famille. C'est encore à peu près la position qu'occupent au sein de l'Église chrétienne les pasteurs ou anciens; il semblerait donc fort convenable qu'ils fussent établis et consacrés à la manière des Lévites.

9: 1-14
§ 930. Moïse, revenant quelque peu en arrière, nous raconte comment les Israélites avaient célébré, au désert de Sinaï, leur seconde Pâque. À cette occasion, il rapporte les ordonnances supplémentaires qu'il avait reçues du Seigneur. L'une était que même ceux qui avaient sur eux quelque souillure légale, notamment pour avoir été en contact avec un mort, et ceux aussi qui se trouvaient en voyage ne devaient pas laisser de faire la Pâque. Une seconde ordonnance admettait les étrangers à y participer. C'est ce qui ne leur avait pas été permis la première fois (Exode XII, 45). Par ce moyen, la Pâque des Juifs est toujours plus un type de notre Seigneur Jésus-Christ. Il nous offre sa chair et son sang, afin de nous purifier de nos souillures, et pour lui, il n'y a d'étrangers que ceux qui refusent absolument de recevoir sa grâce et de se ranger sous ses lois.

9: 15-23
§ 931. Nous avons vu (Exode XL, 34) que la nuée s'était posée sur le tabernacle le jour qu'on en avait fait l'inauguration; c'est ce qui est rappelé dans cet endroit. Puis il nous est dit que les Israélites marchaient et s'arrêtaient suivant les directions que l'Éternel leur donnait au moyen de cette nuée. Rien ne leur manquait donc pour les convaincre que c'était Jéhovah lui-même et non Moïse qui les conduisait. Comme ils auraient dû être dociles! Mais il est aussi beaucoup de chrétiens qui sont parfaitement convaincus que la Bible est la Parole de Dieu, et qui toutefois sont loin de faire sans hésiter ce qu'elle commande!

10: 1-10
§ 932. Ce n'était pas au son des cloches, invention beaucoup plus récente, mais au son de deux trompettes d'argent, que les assemblées du peuple étaient convoquées. On en sonnait avec éclat pour le départ et pour marcher à l'ennemi, si l'on était attaqué. L'on en faisait aussi entendre le son, mais sur un ton plus doux, lorsqu'il s'agissait des assemblées du peuple, des fêtes solennelles et de la nouvelle lune, premier jour du mois. Dans tous les cas, le son des trompettes était comme la voix même de l'Éternel, à laquelle nous devons être constamment attentifs et dociles, pour marcher ou nous arrêter, pour combattre ou faire éclater notre joie, suivant le langage qu'elle nous tient.

10: 11-28
§ 933. Le vingtième jour du second mois de la seconde année, après une année moins dix jours passée aux pieds du Sinaï, les Israélites partirent enfin, se dirigeant du côté de Canaan, droit au nord, et la nuée ne s'arrêta pas qu'ils ne fussent arrivés au désert de Paran. Voici quel était l'ordre des tribus dans la marche. D'abord Juda, Issachar et Zabulon. Après eux, six chariots contenant le tabernacle désassemblé et conduits par les Guersçonites et les Mérarites descendants de Lévi. Les tribus de Ruben, de Siméon et de Gad suivaient les chariots. Puis venaient les Kéhatites portant sur leurs épaules l'arche, les autels, le chandelier et la table. Enfin Ephraïm, Benjamin , Manassé; plus loin, à l'arrière-garde, Dan, Ascer et Nephtali.

10: 29-36
§ 934. Au moment de partir, Moïse engagea Hobab, ou Jéthro son beau-père, fils de Réhuel (§ 633), à aller avec lui, en lui promettant un bon établissement dans le pays que l'Éternel leur avait donné. La raison que Moïse allégua doit un peu nous surprendre. Il désirait que Jéthro leur servît de guide au travers du désert, comme si la nuée pouvait les tromper. Je ne saurais trop comment justifier entièrement Moïse, qui me paraît avoir voulu s'appuyer sur l'homme lorsque l'Éternel devait lui suffire. C'est une tentation à laquelle même les meilleurs peuvent se laisser prendre; or, bien que Moïse ait été un des plus excellents serviteurs de Dieu, encore est-il qu'il eut sa part d'infirmité. Ce même Moïse toutefois ne manquait jamais, soit au départ de l'arche, soit au moment où l'on faisait halte, de proclamer la présence de l'Éternel au milieu de son peuple.

11: 1-15
§ 935. Le tort dont Moïse se rendit coupable en cette occasion, fut moins grave que celui qu'il confesse avec tant d'ingénuité quelques lignes plus bas. Le peuple, fatigué de la route, murmura contre l'Éternel; et bien que, sur l'intercession de Moïse, le Seigneur eût arrêté le terrible fléau par lequel il se disposait à châtier les enfants d'Israël, ces malheureux recommencèrent bientôt leurs murmures et leurs lamentations. Ils étaient ennuyés de cette manne toujours la même, ils regrettaient les excellents légumes de l'Égypte; or il paraît que Moïse lui-même éprouva quelque sympathie pour le péché de ses frères, car il ne comprit pas cette fois l'indignation de l'Éternel. Avec des accents dont on ne peut excuser la violence, il se plaignit de la tâche que Dieu lui avait imposée, et, en homme qui est tout à fait découragé, il invoqua la mort. Sans doute que la tâche de Moïse était difficile, comme l'est bien souvent celle de tout chrétien; mais, en présence du Seigneur et de ses promesses, est-il jamais permis de se désespérer?

11: 16-20
§ 936. Toujours plein de compassion pour les faiblesses de ses enfants, mais aussi toujours décidé à les châtier quand ils le méritent, le Seigneur reprit et exauça Moïse tout à la fois: il le reprit en lui ôtant une partie de son autorité et de ses prérogatives de conducteur d'Israël; il l'exauça en lui donnant pour aides soixante-dix anciens, dont Moïse fit le choix et sur lesquels le Seigneur mit son Esprit. Après quoi, il promit d'envoyer au peuple de la viande à manger, et même en telle quantité et pendant si longtemps qu'ils finiraient par s'en dégoûter.

11: 21-24
§ 937. À l'ouïe de ces paroles, Moïse céda à un de ces mouvements d'incrédulité que Satan sait avec tant de malice exciter dans nos méchants cœurs. De la viande en surabondance, pour tout un peuple, dans la solitude du désert! Cela ne lui semblait pas possible, parce qu'il oubliait la toute-puissance du Créateur et ses œuvres précédentes. Aussi l'Éternel lui dit-il: «Ma main est-elle raccourcie?» Ai-je perdu quelque chose du grand pouvoir dont je t'ai donné tant de preuves?

11: 25-30
§ 938. Cependant, selon la parole de Dieu, les anciens que Moïse avait appelés auprès de lui se mirent à prophétiser, au moins pendant un certain temps; ce qui signifie que l'Éternel leur dicta des paroles d'exhortation de reproche, d'encouragement et de louanges qu'ils eussent été d'eux-mêmes incapables de proférer. Tout cela se passait au Tabernacle et avait entre autres pour but de montrer toujours mieux au peuple que Moïse n'était qu'un instrument, et qu'au lieu d'un Moïse, Dieu pouvait en avoir soixante-dix s'il le voulait. Mais deux de ces anciens, Eldad et Médad, sont demeurés dans le camp où ils prophétisent comme les autres. On le rapporte à Moïse , dans la pensée qu'il réprimera ce désordre apparent. Josué lui-même jugeait que ces hommes en agissaient mal. Mais Moïse, retrouvant par la grâce de Dieu toute sa foi et toute sa piété: «Es-tu jaloux pour moi, s'écrie-t-il? Ah! si seulement tout le peuple de l'Éternel était prophète et que l'Éternel mît son Esprit sur eux!» Quelle différence entre ce grand serviteur de Dieu, Moïse, et tant de prétendus ministres de Jésus-Christ qui s'irritent lorsque l'Évangile, même prêché fidèlement, l'est par d'autres que par eux!

11: 31-35
§ 939. Alors l'Éternel fit un miracle semblable à celui de l'année précédente (§ 718), et même il paraîtrait que l'aliment qu'il envoya fut plus abondant que la première fois. Les Israélites qui, après cela, auraient dû mettre en Dieu une parfaite confiance, ne se bornèrent pas à recueillir leur nourriture avec une avidité dégoûtante, mais encore ils voulurent faire des provisions en séchant les cailles sur le sable du désert. Pour les punir de leur incrédulité et de leur avare défiance, l'Éternel les frappa d'un fléau qui en fit mourir un grand nombre. Peut-être l'épidémie fut-elle le résultat même de leur gloutonnerie. Quoi qu'il en soit, ce lieu fut appelé Kibroth-taava; c'est-à-dire les sépulcres des convoitises.


LXIX. Révolte d'Aaron et de Marie. — Les Espions.


12: 1-8
§ 940. Ce n'était pas assez que Moïse souffrît tant de contradictions de la part de son peuple, il eut la douleur de voir sa sœur et son frère se tourner contre lui. Il paraîtrait que, Séphora étant morte, il avait épousé une éthiopienne, à moins que, par une confusion qui se faisait quelquefois, ou en signe de mépris, Marie et Aaron n'appelassent ainsi la femme de Moïse, bien que Madianite d'origine. Peut-être quelqu'un de ces démêlés, si fréquents, hélas! dans les familles, avait-il réveillé le mauvais vouloir qu'ils portaient à Séphora, et Moïse avait-il dû prendre la défense de sa femme. Il n'y avait pas mis d'emportement, car Moïse était un homme parfaitement doux et bon, quoique d'un cœur chaleureux et d'un esprit plein de vivacité; nous en avons eu plus d'une preuve; mais Marie et Aaron en étaient venus jusqu'à contester l'autorité de leur frère et sa mission divine.

12: 4-15
§ 941. Il importait de rétablir cette autorité, pour la gloire de Dieu, et personne ne pouvait le faire que l'Éternel. Il appela donc les deux frères et la sœur au tabernacle, où il déclara de nouveau qu'il avait établi Moïse dans une charge supérieure à celle d'un prophète (Exode IV, 16; XXIV, 2). Pour mettre le sceau à sa parole, il retira momentanément la nuée de dessus le sanctuaire et frappa Marie d'une affreuse lèpre: Marie était probablement la plus coupable. Nouvelle occasion pour Moïse de montrer sa charité envers ceux qui l'offensaient, et, pour le Seigneur, de faire voir qu'il acceptait la médiation de Moïse. Cependant, il fallait faire un exemple. Marie, lépreuse durant une semaine, dut être séquestrée, selon la loi du Seigneur (§ 883).

13: 1-17
§ 942. De Kibroth-taava, les Israélites, après avoir fait une station à Hatséroth, arrivèrent dans le désert de Paran, sur la frontière méridionale du pays de Canaan. C'était là qu'Ismaël avait formé, quatre siècles plus tôt, son premier établissement, car nous sommes arrivés à l'an 1489 avant la naissance de notre Seigneur. Il semblait donc que les Israélites allaient bientôt entrer dans le pays de la promesse. Combien ne devait-il pas leur tarder de voir les contrées qu'avaient foulées de leurs pieds Abraham , Isaac et Jacob, de visiter leurs sépulcres, d'y enfermer les restes vénérés de Joseph, de paître leurs troupeaux dans les pâturages où ce patriarche et ses frères, leurs ancêtres, avaient si souvent conduit les leurs! C'était là d'ailleurs que tant d'autels avaient été dressés par eux à l'Éternel; là que le repos et toutes sortes de biens étaient assurés à leurs enfants. C'était, pour ceux-ci, l'image même du ciel.

§ 943. Afin de les encourager d'autant mieux à faire la conquête de cette terre à la fois belle et sainte, l'Éternel enjoignit à Moïse d'envoyer douze Israélites, chefs de familles dans chaque tribu, avec charge de l'explorer. Il semblait qu'ils ne pourraient faire à leurs frères qu'un rapport avantageux sur ce qu'ils auraient vu. Parmi ces douze explorateurs du pays de Canaan se trouvaient, pour la tribu de Juda, un nommé Caleb avec qui nous ferons bientôt plus ample connaissance, et pour celle d'Ephraïm, Osée, fils de Nun, ce serviteur, cet aide de Moïse auquel il avait donné le nom de Josué, qui est le nom même de Jésus, et veut dire Sauveur (§ 732). Jacob avait prédit que la tribu d'Ephraïm, aussi bien que celle de Juda, jouerait un rôle distingué en Israël (§ 587), et ce n'a pas été sa moindre gloire que d'avoir donné le jour à Josué, comme nous le verrons surtout par la suite.

13: 18-26
§ 944. Munis des instructions de Moïse , ces hommes mirent quarante jours à leur voyage. Ils pénétrèrent jusqu'à Hébron; par conséquent, ils virent la caverne de Macpéla qui recelait la dépouille mortelle de leurs pères (§ 373). Frappés de la magnificence des fruits du pays, ils cueillirent dans la vallée d'Escol une grappe de raisins si grande et si belle que, pour ne pas la gâter, autant qu'à raison de son poids, ils la suspendirent à un bâton que deux d'entre eux portèrent sur leurs épaules. D'autres avaient pris des grenades et des figues comme échantillons des riches produits de la contrée qu'ils avaient parcourue.

13: 27-34
§ 945. De retour auprès des leurs, ils convinrent de l'excellence du pays, mais ils ne trouvèrent pas de termes assez forts pour exprimer l'effroi que leur avaient causé les habitants. D'abord, disaient-ils, il y aura peut-être à repousser les attaques redoutables des Hamalékites avec lesquels ils avaient eu affaire l'année précédente (§ 731); puis les Cananéens des diverses tribus sont nombreux, vaillants; ils habitent des villes très forte à leur avis, et il se trouve là une race d'hommes gigantesques auprès desquels ils n'étaient pas plus grands que des sauterelles! Voilà bien les exagérations de la peur, triste passion qui fait voir les choses tout autrement qu'elles ne sont. Pour dire encore mieux, voilà le langage de l'incrédulité, car l'incrédulité est pleine de mensonge. Les espions n'allaient-ils pas jusqu'à prétendre que ce beau et bon pays de Canaan était malsain et qu'il consumait ses habitants; comme si l'Éternel ne voulait les y introduire que pour les faire périr! Bien des gens aussi pensent qu'il est triste de se convertir et de se donner à Dieu; mais, ne l'oublions pas, c'est le langage d'un cœur incrédule.

§ 946. Cependant, tous ne parlèrent pas de même. Caleb, tant en son nom qu'au nom de Josué, prononça de belles paroles: «Montons hardiment,» dit-il, «et possédons ce pays-là; car, pour certain, nous y serons les plus forts.» C'était un homme de foi et de cœur que ce descendant de Juda. Il savait que, lorsque Dieu fait des promesses. Il n'y a qu'à aller et l'on arrive, qu'à vouloir et l'on réussit, qu'à occuper le terrain et on le possède. Ainsi en est-il de la promesse qui nous est faite de la vie éternelle en notre Seigneur Jésus-Christ. Nulle difficulté, nul obstacle, nul ennemi ne doit nous empêcher de la saisir. «Montons hardiment et possédons ce pays-là; car, pour certain, nous y serons les plus forts.»

14: 1-4
§ 947. Les paroles de l'incrédulité trouvent un plus facile accès dans le cœur mauvais de l'homme que les paroles de la foi; il suffit des accents passionnés de quelques meneurs pour émouvoir les passions de tout un peuple. Sourds aux exhortations de Caleb, les Israélites poussèrent de grands cris, et, après avoir passé la nuit dans la consternation, ils se portèrent le lendemain à une révolte plus complète qu'aucune des précédentes. Ils résolurent de retourner en Égypte. Mais, comme ils pensaient bien que Moïse n'y consentirait pas, ils se disposèrent à se donner un chef de leur choix, abandonnant ainsi l'Éternel pour faire leur propre volonté.

14: 5-10
§ 948. À la vue de ce spectacle, Moïse et Aaron se prosternèrent contre terre devant toute l'assemblée. Tandis que, dans cette humble attitude, ils suppliaient leurs frères et encore plus l'Éternel, Josué et Caleb, déchirant leurs vêtements, sollicitèrent le peuple de renoncer à son dessein. «Le pays est excellent,» s'écriaient-ils; «nulle difficulté ne sera invincible si l'Éternel est avec nous; soyons-lui seulement fidèles et il nous donnera notre pain en Canaan!» Oh! qu'est-ce donc qu'une multitude égarée? Au lieu d'écouter la voix de la sagesse, ces malheureux ne parlent-ils pas de lapider Caleb et Josué; peut-être, Aaron et Moïse avec eux!

14: 10-38
§ 949. Si l'Éternel lui-même n'eût pris en main la cause de ses serviteurs, c'en était fait d'eux et de tout le peuple; car, que serait-il devenu après s'être privé lui-même de ses chefs! Mais, au moment où les choses en étaient à la dernière extrémité, la gloire de l'Éternel (peut-être une éclatante lumière) parut au-dessus du tabernacle et attira tous les regards. Alors le Seigneur fit à Moïse la même offre que précédemment (§ 843), et Moïse à son tour, infatigable dans sa charité et dans son zèle pour Dieu, répéta sa même prière, en y ajoutant les belles paroles que l'Éternel avait proclamées lorsqu'il avait fait passer sa bonté devant son fidèle serviteur (§ 856). Comme toujours, ce Dieu compatissant daigna pardonner, en laissant aux pécheurs le temps de se convertir. Cependant, il déclara qu'à l'exception de Caleb et de Josué, tous ceux des Israélites qui, à l'époque de la sortie d'Égypte, avaient eu vingt ans ou plus, mourraient dans le désert; que leurs enfants et leurs petits-enfants entreraient seuls au pays de la promesse; que, par conséquent, ils devaient tous retourner en arrière et demeurer au fond des déserts et des montagnes de l'Arabie, jusqu'à ce qu'il se fût écoulé autant d'années que les espions avaient mis de jours à leur voyage. De cette manière, la génération d'alors aurait le temps de se renouveler et de se formera l'obéissance de l'Éternel.

§ 950. Quand Moïse eut communiqué cette redoutable sentence au peuple qu'il conduisait, celui-ci, passant d'un extrême à l'autre, prit la résolution d'attaquer ce jour même les Cananéens, comptant ainsi racheter son péché par une démonstration de zèle. En vain Moïse représenta-l-il aux Israélites qu'ils agiraient contre la volonté suprême de l'Éternel, en vain leur déclara-t-il que l'Éternel ne serait point avec eux pour les secourir, ils voulurent faire à leur tète et ils furent battus par les Hamalékites et par les Cananéens; oui, par les mêmes Hamalékites dont la grâce de Dieu les avait fait triompher si peu de temps auparavant, par les Cananéens qui devaient plus tard se fondre en quelque sorte devant leurs descendants. Quelle leçon! Comme on y voit que tout effort humain est inutile si l'on n'a pas Dieu avec soi, que Dieu n'est pas avec nous tant que nous avons pour règle notre propre volonté et non la sienne, surtout qu'il y a une repentance qui est toute différente de la vraie. Or, à quoi reconnaîtra-t-on si l'on se repent d'une repentance selon Dieu? Le signe le plus certain est qu'on soit rentré dans les voies de l'obéissance et qu'on acquiesce du cœur au châtiment! à défaut de quoi l'on ajoute le péché d'un repentir tout humain au péché qu'on reconnaît avoir commis. Ce fut là ce qui arriva aux Israélites. Souvenons-nous donc toujours de la déroute d'Horma.


LXX. Diverses ordonnances. — Révolte de Coré. — Mort de Marie et d'Aaron.


15: 1-2
§ 951. Cependant, l'Éternel ne voulait pas que son peuple pût se croire abandonné dans le désert, ni que le retard apporté à l'accomplissement de la promesse parût l'annulation de la promesse même. Dans ce but, il fit répéter par Moïse quelques-unes de ses ordonnances, avec certains détails de plus. Vous remarquerez notamment ces mots significatifs: «Quand vous serez entrés au pays où vous devez demeurer et que je vous donne.» C'était leur dire qu'il ne retirait pas sa parole et que leurs enfants posséderaient certainement le pays de Canaan.

§ 952. Ce qu'on voit surtout dans ce chapitre, c'est que les étrangers étaient admis pleinement aux privilèges de l'alliance. Il ne faut donc pas croire qu'avant la venue de notre Sauveur, le peuple de Dieu n'ait été composé que des fils d'Abraham. Seulement, il fallait que l'étranger s'incorporât au peuple juif et qu'il fût adopté dans l'une des tribus; dès lors, il était envisagé comme fils de Ruben, ou de Juda, ou de Nephtali, etc.

§ 953. Nous retrouvons ici la règle à suivre pour les péchés d'ignorance, qu'ils fussent le fait d'un Israélite ou celui d'un étranger (§§ 871, 872). Mais, à cette occasion, il est parlé de péchés commis par fierté, c'est-à-dire de péchés commis volontairement, continués avec obstination, sans tenir aucun compte de la loi de Dieu et en se moquant de sa Parole et de ses jugements; de ces péchés, hélas! qui sont si communs et dont nul de nous n'est entièrement innocent. Pour les expier, il faut plus que le sang des victimes, comme, au reste, pour toute transgression; et si quelqu'un demeure résolument dans le mal, son âme est perdue. C'est ce que signifiait la punition sans miséricorde qui devait se faire des péchés commis par fierté.

15: 32-36
§ 954. Précisément à cette époque, il se commit en Israël un péché de cette odieuse nature. Un individu fut trouvé ramassant du bois le jour du sabbat. Il n'y avait nulle nécessité à la chose, puisqu'en ce jour on n'allumait pas de feu en sa demeure (Exode XXXV, 3). Cet homme avait pris plaisir à violer le commandement de Dieu, pour le braver et pour voir ce qu'il lui en arriverait. Personne ne dira: Quel mal faisait-il? Il faisait le mal que font les jureurs, le mal que font ceux qui ne prient pas Dieu et qui ne lisent pas la Bible. Point de mal direct à leur prochain, mais des actes qui prouvent l'absence de toute piété. Le violateur du sabbat fut mis à mort par l'ordre de l'Éternel. Ainsi en doit-il être, au dernier jour, de tous ceux qui, d'un cœur impie, auront volontairement persévéré dans le mal.

15: 37-41
§ 955. Voici une institution d'un genre tout particulier. Les Israélites devaient porter au bas de leur robe une bande retenue par un cordon de couleur hyacinthe, ou plutôt de couleur bleue, la même qui se détachait avec un éclat si doux au milieu des trois couleurs du pavillon, du voile, des tapisseries, du parvis et des vêtements d'Aaron. C'était le signe extérieur de la consécration des fils de Jacob. Pour nous, chrétiens, la marque de notre consécration c'est la charité, cette fille du ciel, qui est douce, pure et paisible comme l'azur de l'eau, quand aucun nuage n'obscurcit l'air et que nul vent ne remue le fond des ondes.

16: 1-40
§ 956. Dix-neuf ans, pense-t-on, s'écoulèrent pendant lesquels le peuple d'Israël passa dans le désert une vie monotone qu'aucun grave incident ne vint agiter; le récit du moins ne nous en est pas fait par Moïse. Des milliers d'Israélites moururent, chacun en son temps, et il ne nous est pas ordonné de croire que tous soient morts dans l'impénitence. Cependant, vers l'an 1471 avant notre Seigneur, Moïse vit encore une de ces révoltes qui avaient rendu son ministère si difficile, et il n'était pas au bout. Un lévite nommé Coré, fit avec deux Rubénites, Dathan et Abiram, une conjuration dans laquelle ils entraînèrent deux cent cinquante des principaux du peuple. Il s'agissait de renverser l'autorité de Moïse et d'Aaron. Coré disait: pourquoi tous les lévites ne seraient-ils pas sacrificateurs? De leur côté, les fils de Ruben étaient choqués de ce que la tribu aînée n'avait pas la prééminence (§ 590). Chez les uns comme chez les autres, il y avait mépris des volontés souveraines du Seigneur, révolte ouverte contre lui. Ce crime ne pouvait demeurer impuni, d'autant que les coupables n'avaient réellement aucun sujet de plainte contre Moïse (verset 15). Lisez tout ce chapitre et vous verrez de quoi l'homme est capable lorsqu'il se laisse aller à son impiété, mais aussi avec quelle puissance et quelle sainteté Dieu réprime ses adversaires. Coré, Dathan, Abiram, les deux cent cinquante rebelles périrent de diverses façons, mais tous avec des signes manifestes de l'intervention même du Seigneur.

16: 41-50
§ 957. Il semble que les jugements de Dieu devraient assez épouvanter les méchants pour dompter la malice de leurs pensées. Or il s'en faut bien qu'il en arrive toujours ainsi. Ces vieux Israélites de col roide et de cœur incrédule, s'obstinaient à oublier que Moïse n'était qu'un instrument entre les mains de l'Éternel. Aussi se mirent-ils à lui reprocher, de même qu'à Aaron, la mort de leurs frères, comme on voit des gens accuser les chrétiens de damner leur prochain. Alors un terrible fléau, une épidémie, une peste, que sais-je, frappa le peuple En très peu de temps il y eut 14,700 personnes qui furent appelées devant le tribunal de Dieu? La plaie eut été bien plus grande si le Seigneur n'avait eu pitié des coupables. Aaron, type de notre Sauveur, comme vous le savez, et Moïse aussi, prièrent ardemment pour les pécheurs; ils firent leur réconciliation avec l'Éternel; le peuple probablement cria miséricorde et le fléau s'arrêta.

Chap. 17
§ 958. Après ce qui s'était passé, il fallait que le Seigneur attestât par quelque nouveau miracle qu'il avait bien réellement choisi Aaron pour son sacrificateur, à l'exclusion des autres fils d'Abraham. Tous les chefs de famille déposèrent dans le tabernacle une branche d'amandier avec leur nom écrit dessus, et le lendemain celle d'Aaron se trouva toute en fleur. Ainsi Dieu se plaît à distinguer ses élus. La branche d'Aaron demeura dans le tabernacle en témoignage du choix que le Seigneur avait daigné faire de lui et de sa race pour exercer la sainte sacrificature.

Chap. 18
§ 959. Non seulement cela, mais encore les lévites furent donnés à Aaron, c'est-à-dire que Dieu les mit entièrement sous ses ordres. Vous voyez que Moïse ne réservait rien pour lui, ni pour ses descendants; c'est que la loi émanait de l'Éternel et non pas de Moïse. Ce fut aussi l'Éternel qui régla tout ce qui concernait la subsistance des sacrificateurs et des lévites. Ils ne devaient point avoir de part au territoire. Celui-ci serait tout entier l’héritage des autres tribus: mais comme dédommagement et d'ailleurs pour pouvoir vivre, ils auraient une portion des sacrifices de prospérité (§ 864, et Lévit. X, 15) et de plus la dîme de ce que leurs frères récolteraient en huile, en vin et en graisse (§ 918). Les Lévites à leur tour, devaient donner la dîme de leur dîme au Seigneur, dans la personne d'Aaron et de ses fils. — Il est des pays où le clergé est entretenu par le moyen de la dîme qu'on lève sur tout le peuple, à l'imitation de ce qui se faisait en Israël. Mais, pour que l'imitation fût exacte, il faudrait que les ministres de l'Évangile renonçassent à leur patrimoine et qu'on fût ministre de père en fils; puis il y a une grande différence entre une dîme que, la loi de Dieu exige sans clause comminatoire, et un impôt que la loi humaine établit et qu'elle contraint d'acquitter; enfin, tandis qu'il n'y avait qu'un culte en Israël, il y en a souvent plusieurs dans les pays où l'on paie la dîme, et toutefois c'est un seul culte qui en profite.

19: 11-17
§ 960. Nous avons vu ailleurs (§ 909) que l'attouchement d'un mort imprimait une souillure légale; ce chapitre-ci complète le sujet. Nous y remarquons avec quel saint respect Dieu veut que nous envisagions la mort, redoutable conséquence du péché. Mort et péché sont deux idées que la Bible réunit constamment. Pour se purifier de la souillure, non pas du péché proprement, mais du contact avec la mort, il fallait user d'une eau préparée suivant les prescriptions que nous lisons en cet endroit et sur lesquelles nous dirons quelques mots seulement. Éléazar, et non pas Aaron , devait immoler une vache rousse, la brûler, en recueillir les cendres; puis on jetait de l'eau dessus et cette eau servait à la purification. Le sacrifice de la vache rousse était à tous égards fort différent des autres, différence fondée sur ce que, dans les autres sacrifices, la victime était substituée au pécheur, tandis que la vache rousse était pour ainsi dire la personnification du péché lui-même.

20: 1
§ 961. Dix-neuf années s'étant encore écoulées, les Israélites, après avoir erré dans le désert, arrivèrent le premier mois de l'an 1452 avant Jésus-Christ, au désert de Tsin. Ils s'arrêtèrent à Kadès. Là mourut et fut enterrée Marie, la sœur de Moïse et d'Aaron. Elle aussi, par sa révolte, (§ 940) s'était rendue indigne d'entrer au pays de Canaan, et pourtant elle avait reçu bien des grâces de Dieu! (§§ 711, 941).

20: 1-13
§ 962. Il y eut là de nouveaux murmures contre Moïse et une demi-révolte dont les conséquences furent bien humiliantes pour ce serviteur de Dieu. Le peuple manquait d'eau. Il paraît que, même après avoir invoqué l'Éternel et réuni l'assemblée, devant laquelle il n'y avait plus qu'à manifester la puissance et la bonté du Seigneur, Moïse hésita par dépit et par un coupable mouvement d'incrédulité. Il parla à ses frères comme s'il dépendait absolument de lui qu'il y eût de l'eau ou non; puis il frappa le rocher une première fois sans succès, preuve que l'Éternel était irrité; enfin l'eau jaillit avec abondance, car le Seigneur se plaît souvent à répandre sa grâce malgré la profonde indignité de ses serviteurs. Cependant, il voulut que Moïse aussi servît de leçon à son peuple et à la postérité la plus reculée. Il lui fut déclaré que ni lui, ni Aaron n'introduiraient les Israélites dans le pays de Canaan.

20: 14-21
§ 963. Près du désert de Tsin se trouve une contrée qui était alors occupée par les Edomites ou Iduméens, peuple issu du frère de Jacob (§ 500). Nous avons vu (§ 731) qu'ils n'aimaient pas leurs frères d'Israël; aussi quand Moïse leur eut fait demander de les laisser traverser paisiblement leur territoire, ils le refusèrent: mais, au lieu de les contraindre, les Israélites se détournèrent de leur pays, conduite digne du peuple de Dieu.

20: 23-29
§ 964. À cette même époque mourut Aaron. Il devait avoir alors 121 ou 122 ans. Par ordre de l'Éternel, il monta avec Moïse et Éléazar sur la montagne de Hor. Là, en présence du Dieu vivant, il remit ses vêtements sacerdotaux à son fils et son âme au Seigneur. Ce fut une grande douleur pour tout le peuple qui, dans la personne d'Aaron, perdait non seulement le plus âgé de ses vieillards, mais encore un homme bon et pieux dont les torts les plus graves avaient été des péchés de faiblesse et non de méchanceté. Depuis trente-sept ans on avait vu ce vénérable patriarche porter sur son front la SAINTETÉ A L'ÉTERNEL (§ 818), sur ses épaules et son cœur les douze tribus d'Israël (§§ 814, 816); on l'avait vu priant pour le peuple, faisant l'expiation des péchés, arrêtant par sa prière les fléaux qui les désolaient (§ 957); aussi, à l'occasion de sa mort, tous prirent le deuil, un mois entier. Cependant, Aaron, comme Moïse et comme Marie, plus qu'eux peut-être (§ 848), avait failli d'une manière grave. Aussi dut-il mourir dans le désert. Ce n'est pas à dire assurément qu'il ait été rejeté de Dieu; car après tout, il crut en ses promesses et sa foi se montra par une obéissance habituelle et par sa charité; mais l'Éternel voulut faire voir en lui que le péché est toujours le péché, qui que ce soit qui le commette, et que ceux qui conduisent leurs frères vers le pays de Canaan doivent prendre garde à eux-mêmes, quelle que soit la charge dont ils sont revêtus.


LXXI. Le serpent d'airain. — Balaam.


21: 1-3
§ 965. Nous en sommes toujours à l'an 1452. Les Israélites avaient atteint de nouveau la frontière méridionale du pays de Canaan. Afin d'éprouver leur foi et de rendre plus remarquables leurs victoires subséquentes, Dieu permit que, dans une première bataille, ils essuyassent quelques revers. Peut-être aussi fallait-il cela pour faire comprendre à Israël quel genre de guerre serait la sienne. Il devait conquérir le pays de Canaan, mais non subjuguer ses habitants, ni s'emparer de leurs propriétés mobilières. Par un terrible et juste jugement de Dieu, les Cananéens et leurs biens étaient voués à l'interdit (§ 917). Les Israélites devaient, non pas se les approprier, mais les détruire. Aussi après avoir mis en pièces, dans cette localité, les Cananéens qui ne leur cédèrent pas le terrain, ils l'appelèrent Horma, ce qui signifie interdit ou anathème, ou destruction. C'est en ce même endroit que les Israélites avaient été défaits 38 ans auparavant (§ 950). Il ne portait pas alors ce nom, d'où nous voyons que le livre des Nombres n'a pas été écrit par Moïse jour par jour, mais qu'il doit l'avoir rédigé dans son entier peu de temps avant de mourir.

21: 4-9
§ 966. Les murmures perpétuels des enfants d'Israël ont, au premier abord, quelque chose qui étonne; mais, en y réfléchissant un peu, l'on voit qu'ils ne faisaient pas autre chose que tant et tant de pécheurs de nos jours, qui ne cessent de se plaindre de Dieu et des voies de sa Providence ou de sa grâce. Un nouveau fléau et d’une nature particulière vint châtier les Israélites, tout en continuant leur épuration par la mort des hommes dont Dieu avait dit qu'ils n'entreraient pas au pays de Canaan. Dieu suscita contre eux des serpents auxquels la Bible donne le nom de Saraphs, ce qu'on a traduit par brûlants, peut-être sans trop de raison. Ces reptiles faisaient des morsures cuisantes et mortelles; beaucoup de gens périrent. Mais il y avait là une génération d'hommes nouveaux que Dieu destinait à valoir mieux que leurs pères. Ils allèrent à Moïse en confessant leur péché, ce qui ne s'était guère fait auparavant. Moïse intercéda pour le peuple. L'Éternel lui ordonna de placer au haut d'une perche un serpent d'airain, et quiconque regardait vers le serpent était guéri sur-le-champ.

§ 967. C'est un beau type du salut que notre Seigneur Jésus-Christ est venu acquérir aux pécheurs. Nous ne pouvons douter que l'Éternel ne l'ait entendu de la sorte, puisque notre Seigneur lui-même nous le dit expressément (Jean III, 14). Ainsi, dans ces Israélites qui murmurèrent contre Dieu, nous voyons les pécheurs non convertis; les Saraphs, de qui ils reçoivent une plaie mortelle, sont (en image et en figure) l'ancien serpent, Satan, par qui la mort est entrée dans le monde avec le péché. Le serpent d'airain, c'est Jésus-Christ, qui a pris une chair de péché et pour le péché, et qui, maudit à la place du péché et du pécheur, a été cloué sur une croix, comme le serpent d'airain sur une perche. Quiconque regardait vers le serpent d'airain était guéri: de même quiconque croit en Jésus-Christ, ou regarde du cœur vers lui, est sauvé. Il y eut probablement des Israélites qui, s'endurcissant contre toute crainte de la mort, refusèrent de regarder vers le serpent, en traitant tout cela de fable, comme il y a tant de pécheurs hélas! qui refusent d'aller à Christ pour avoir la vie. Cependant, ils devaient avouer que ceux qui le regardaient étaient rétablis; mais ils s'obstinaient peut-être à attribuer leur guérison à autre chose, de même qu'on voit les incrédules traiter d'imaginations et de chimères la foi et la paix des enfants de Dieu. En attendant, ceux qui tournaient leurs regards vers le serpent, même de loin, même d'un œil affaibli, même sans le voir bien distinctement, tous ceux-là, dis-je, étaient guéris, parce que c'était, au fond, la grâce de Dieu qui les guérissait, et non pas l'acte de regarder vers le serpent. Voilà comment une foi simple nous sauve avec certitude, lors même qu'elle n'est peut-être pas encore très-éclairée ni très-affermie. Elle nous fait avoir part à Jésus-Christ; car, qu'on le touche du bout du doigt, ou de la main tout entière, on n'en est pas moins en contact avec lui. Ce qui ne veut pas dire que nous ne devions pas l'embrasser de tout notre cœur et de toute notre âme.

21: 10-31
§ 968. Après ce grand châtiment et cette délivrance non moins éclatante, les Israélites arrivèrent de campements en campements sur la rive gauche ou orientale du Jourdain. Ayant battu les Amorrhéens et le roi de Basçan, ils occupèrent toute la contrée jusqu'au torrent de Jabbok, près duquel Jacob, leur père, avait eu sa lutte mystérieuse avec l'ange de l'Éternel environ trois siècles auparavant (§ 478). Ce dut être une grande joie pour les Israélites pieux que de se trouver enfin campés dans les lieux que leurs ancêtres avaient habités jadis! Ils pouvaient dès ce moment être sûrs qu'ils y occuperaient une toute autre position. Car tandis qu'Abraham, Isaac et Jacob avaient vécu en étrangers au milieu des Cananéens, leurs fils voyaient les Cananéens se fondre devant eux pour leur laisser le champ libre. Hog, roi de Baçan, et tout son peuple furent ou tués, ou dispersés, laissant aux Israélites l'entière possession de leur territoire.

22: 1-3
§ 969. Cependant, les enfants d'Israël n'avaient pas encore atteint le pays de Canaan proprement dit (car la Parole de Dieu entend surtout sous ce nom la contrée qui s'étend du Jourdain à la mer Méditerranée); ils n'étaient donc pas au bout de leurs épreuves. Les Moabites, peuple issu de Lot, ainsi que les Hammonites (§ 344), habitaient dans le voisinage, et, craignant que ce peuple venu du désert ne voulût aussi s'emparer de leurs possessions, ils se hâtèrent de prendre l'offensive. Près des Moabites existaient aussi quelques tribus de Madianites avec lesquelles ils s'allièrent. Pour commencer, Balak, roi de Moab, eut l'idée de conjurer l'orage, comme le feraient encore de nos jours des peuples idolâtres.

22: 4-7
§ 970. Il y avait sur les bords de l'Euphrate un homme nommé Balaam qui passait pour un grand devin, puissant par ses sortilèges. C'est qu'en effet il lui avait été donné quelquefois d'annoncer l'avenir et que, d'ailleurs, il parlait avec une profonde science du Dieu Créateur des cieux et de la terre. Ce Balaam descendait de Sem. Il était du nombre de ceux qui avaient conservé la connaissance de l'Éternel, malgré l'idolâtrie régnante; de plus, il avait été chargé de parler aux hommes en son nom. Cela ne veut pas dire qu'il fût converti dans le fond de l'âme; car on peut être un habile docteur, même faire des miracles par la puissance de Dieu, tout en restant l'esclave de ses passions. Ce fut à cet homme que Balak envoya des messagers pour qu'il vînt maudire les Israélites de la part du Dieu qu'il prêchait et dont on n'ignorait pas la puissance. Afin de l'y déterminer, Balak lui fit offrir de grands présents.

22: 8-18
§ 971. Les premiers actes de Balaam sont tout à fait d'un homme pieux. Il consulta l'Éternel, et l'Éternel lui ayant dit de ne point aller avec ces gens, Balaam leur déclara formellement qu'il n'irait point. Bien plus, les messagers de Balak étant revenus avec des présents plus considérables et des promesses encore plus magnifiques, il leur répéta positivement que tout l'or et tout l'argent du monde ne lui feraient pas transgresser le commandement du Seigneur. Mais Balaam était-il droit de cœur? S'il avait d'abord refusé d'aller, c'était sans doute parce que l'Éternel le lui avait défendu, mais n'était-ce pas H.;8 aussi dans l'espoir de voir arriver de plus beaux présents? Et maintenant qu'il se donne l’air d'être au-dessus de la tentation, n'a-t-il pas au fond un désir puissant de gagner cet argent et cet or?

22: 19-20
§ 972. Il est permis de répondre affirmativement à ces questions, puisque la Parole de Dieu nous déclare que Balaam aima le salaire de l'iniquité (2 Pier. Il, 15). S'il ne l'avait pas aimé, il n'aurait pas consulté de nouveau l'Éternel. Avons-nous besoin, en effet, de lui demander s'il nous est permis d'honorer notre père et notre mère? Non, car sa bouche a parlé. De même, il avait dit: Balaam, tu n'iras point; et il n'y avait plus à l'interroger là-dessus. L'Éternel avait ajouté: Tu ne maudiras point ce peuple, car il est béni; et Balaam devait comprendre qu'il ne pouvait y avoir de changement en Dieu. Mais il aimait l'argent; mais il aurait voulu obtenir la permission de maudire ce que Dieu avait béni! Pour commencer le châtiment du prophète prévaricateur, le Seigneur lui dit: Eh bien! va; quoi qu'il en soit, tu feras ma volonté et non la tienne. C'est ainsi que l'Éternel donne quelquefois libre carrière aux méchants; mais en définitive ils ne peuvent maudire ceux que Dieu a bénis, et leur méchanceté tourne à la gloire de Dieu.

22: 21-33
§ 973. Il semble que lorsque Dieu a dit: Va, l'on ne risque rien d'aller; mais je suppose qu'un père, après avoir cherché inutilement à détourner son enfant d'une mauvaise action, lui dise: Eh bien, fais à ta tête ! l'enfant ne comprendra-t-il pas que cette permission équivaut encore à une défense? Aussi, quand Balaam se fut mis en route, le Seigneur ne le laissa pas achever sans lui témoigner son indignation, et encore le fit-il de la manière la plus propre à l'humilier. L'Ange de l'Éternel, cet Ange sans doute qui gardait Israël (§ 788), se présenta devant Balaam en lui barrant le passage. Ni le prophète, ni aucun de ceux qui étaient avec lui ne l'aperçurent; mais l'ânesse qui servait de monture à Balaam vit, Dieu l'ayant voulu, le personnage extraordinaire qui se tenait là avec son épée nue. Et comme Balaam maltraitait l'ânesse parce qu'elle s'était couchée sous lui plutôt que d'avancer, une voix sortant de l'animal stupide reprocha au prophète sa folie et son emportement. Alors, l'Ange lui-même se montra à Balaam, et, tout en lui faisant sentir la miséricorde et la patience dont il était l'indigne objet, il lui adressa les remontrances qu'il avait méritées.

22: 34-35
§ 974. Effrayé de cette apparition, Balaam confessa son péché, ce qui ne signifie pas qu'il le sentît bien profondément, et il offrit de rebrousser chemin. Mais, au point où en étaient les choses, il plut au Seigneur que le prophète poursuivît sa route. Toutefois, il lui tint un langage propre à lui faire comprendre que son péché subsistait tout entier.


LXXII. Balaam, suite. — Josué.


22: 36-41
§ 975. Balaam dut éprouver un grand malaise en approchant du pays de Moab, et de Balak qui venait à sa rencontre. Subjugué parla puissance de Dieu, il devra remplir un ministère tout différent de celui qu'on attend et agir en opposition formelle avec ses convoitises. Aussi le voyons-nous se servir avec Balak de termes assez ambigus. Il n'ose pas lui dire: «Je vais bénir ceux que tu veux que je maudisse; il est inutile que tu offres des holocaustes, ni à Jéhovah, ni à Bahal, le dieu des Cananéens.» Au lieu de cela, il se borne à déclarer qu'il dira ce que Dieu lui mettra dans la bouche; puis il invite Balak à offrir des sacrifices. Pendant ce temps il se retire à l'écart, pour voir si peut-être le Seigneur lui accordera quelque vision.

23: 1-10
§ 976. Revenu près du roi de Moab, le prophète ouvre la bouche et, dans un langage élevé, il proteste qu'Israël n'étant point maudit de Dieu, il ne saurait non plus le maudire. Bien plus, il déclare que ce peuple formerait une nation à part, une nation considérable (§§ 367, 312, 274), et il termine par un vœu qui exprime moins l'état de son âme que l'excellence des promesses faites à Israël: «Que mon âme meure de la mort des justes et que ma fin soit semblable à la leur!» — Je dis que ce vœu fait allusion aux promesses de Dieu, puisque, en effet, il ne saurait y avoir de justice et d'heureuse mort que dans son alliance; j'ai ajouté qu'il ne faut pas y chercher l'expression complète des sentiments de Balaam, d'abord parce que Balaam était un méchant, ensuite, parce qu'il prophétisait malgré lui. Cependant, il n'est pas rare de voir l'incrédule et le mondain souhaiter de faire une bonne mort; mais pour bien mourir, il faut bien vivre, et pour bien vivre, il faut marcher dans la grâce et dans la vérité.

23: 11-24
§ 977. Balak, mécontent, comme il est facile de le concevoir, imagina de conduire Balaam dans un autre lieu, pour le soustraire, s'il était possible, à l'influence à laquelle il avait dû obéir. On offre de nouveaux holocaustes, Balaam se retire une seconde fois, Balak espère que la vue entière du camp d'Israël enflammera la passion du prophète; mais celui-ci, revenant au roi de Moab, fait entendre des paroles encore plus solennelles et plus significatives: «Dieu ne ment pas; Dieu ne se repent pas; ce qu'il a dit, il le fait; il ne retire point sa parole donnée. Sa grâce est avec Israël pour lui pardonner ses iniquités; Israël est béni: l'Éternel l'a déjà montré par une foule de délivrances; bientôt on verra la force que le Seigneur donne aux siens.» Ce qui avait été dit de Juda (§ 592) est appliqué ici à tout Israël, or Israël est le type du peuple élu, c'est-à-dire des fidèles de tous les temps.

23: 25-30
§ 978. Dans ses espérances superstitieuses, Balak tente encore le moyen qui venait de lui faire défaut. Il veut à toute force que Balaam maudisse ceux que Dieu a bénis, semblable à tant de princes et de nations qui ont cru que leurs anathèmes pouvaient atteindre le peuple de Dieu. Cette fois, Balaam ne cherche plus à échapper à l'inspiration divine. Il tourne ses regards du côté d'Israël; le Seigneur lui fait voir les scènes des siècles à venir; le prophète se prosterne contre terre; puis, se relevant, il célèbre dans une belle poésie la prospérité dont le peuple de Dieu jouira bientôt et les victoires éclatantes qu'il remportera sur ses ennemis.

24: 1-9
§ 979. À l'ouïe de ces paroles, Balak entra dans une grande colère; et comme il faisait au prophète les plus vifs reproches, celui-ci reprit le cours de ses prophéties et prononça des paroles plus remarquables encore que les précédentes. Il voit, pour un temps éloigné, une étoile venant de Jacob, un roi issu d'Israël auquel appartient le jugement des ennemis de Dieu. — Ce roi, c'est David peut-être; dans tous les cas, ce n'est lui qu'en partie. La Bible entière nous atteste qu'il s'agit ici de notre Sauveur. C'est lui qui, fils de David et par là d'Israël, est venu comme un astre resplendissant au sein des ténèbres; lui qui est le Roi des rois, le Juge des vivants et des morts; lui aussi par qui Israël a été béni et à cause de qui ce peuple est devenu une bénédiction pour tous les peuples (§§ 367, 313).

24: 10-25
§ 980. Cette prophétie est rendue encore plus remarquable par l'annonce qu'elle fait de la domination successive des Assyriens (Assur) et des Grecs (Kittim) (§ 237). Une puissance venant de la mer Méditerranée devait un jour subjuguer à la fois les Assyriens et les Hébreux, puis se voir elle-même détruite. Or, tout cela s'est accompli en son temps, mais plusieurs siècles après Balaam, comme nous le verrons dans une autre partie de l'Histoire Sainte.

§ 981. Quand Balaam eut achevé son ministère, non point comme il l'aurait voulu, mais comme Dieu l'entendait, il se leva, est-il dit, pour retourner en son pays. Il s'en allait, sans doute, le cœur plein de tristesse et de haine; de tristesse, parce qu'il avait perdu l'occasion de gagner beaucoup d'argent, et de haine contre le peuple d'Israël qu'il aurait voulu maudire, ou autrement contre le Dieu d'Israël lui-même. Hélas! ce malheureux prophète ne devait pas revoir sa famille et bientôt, par un juste jugement de Dieu, il périt d'une manière misérable.

25: 1-18
§ 982. Ce que Balak n'avait pu obtenir par ses enchantements, Satan le fit par ses abominables séductions. Il paraît que, lorsque Balaam fut parti, les Moabites et les tribus madianites de leur voisinage recherchèrent et obtinrent trop facilement l'amitié des enfants d'Israël. Ceux-ci, se mêlant à leurs fêtes, comme autrefois les fils de Jacob s'étaient mêlés à celles des Sichémites (§ 487), se laissèrent entraîner par eux à l'idolâtrie, crime que l'Écriture flétrit du nom de paillardise (§§ 889, 773). Dans ces fêtes impures, en effet, ils commirent avec les étrangers toutes sortes de débauches. Mais l'Éternel est le Dieu fort et jaloux. Il ne voulut point laisser de tels crimes impunis. Phinées, fils d'Éléazar, châtia de sa propre main un des plus coupables; les Anciens du peuple mirent à exécution la loi du Seigneur (Lév. XX, v. 23); à cela peut-être vint s'ajouter une épidémie meurtrière, et vingt-quatre mille personnes payèrent de leur vie les désordres auxquels on s'était livré.

Chap. 26
§ 983. Ce fut après cela que, par l'ordre de l'Éternel, il se fit un nouveau recensement du peuple. À cette époque, il ne restait plus aucun de ceux qui, à la sortie d'Égypte, étaient âgés de plus de vingt ans, sauf pourtant Caleb et Josué, auxquels il avait été promis qu'ils entreraient dans le pays de Canaan. Quant à Moïse, qui vivait encore, le moment de sa mort était proche. Voilà de quelle manière la parole de Dieu se réalisa de point en point! Mais si elle s'accomplit alors d'une manière si éclatante, comment douter qu'elle ne s'accomplisse toujours de même?

27: 1-11
§ 984. Parmi le grand nombre d'orphelins qui avaient vu mourir leurs pères avant qu'ils eussent atteint l'extrême vieillesse, se trouvaient les filles d'un descendant de Manassé nommé Tselophcad. Elles n'avaient point de frères, circonstance unique probablement à une époque où l'Éternel, fidèle exécuteur de ses promesses, donnait à tous les enfants d'Abraham et des fils et des filles. Or on mit en question si les filles de Tselophcad auraient un lot dans le partage du pays de Canaan. Elles en firent elles-mêmes la demande à Moïse, afin, dirent-elles, que le nom de leur père ne fût point retranché. Par la volonté de Dieu, elles obtinrent l'objet de leur requête, et cela devint une loi générale en Israël: un homme mourait-il ne laissant que des filles, celles-ci le représentaient, et ses possessions continuaient de porter le nom du père et de sa famille.

7: 12-27
§ 985. Cependant, la vie et le ministère de Moïse tendaient à leur terme. Averti par le Seigneur que le moment du départ approchait, le serviteur de Dieu se montra tel qu'il avait toujours été, plus occupé de son peuple que de lui-même. Il fit à l'Éternel une prière dont chaque mot est d'une grande valeur. D'abord il nomme Jéhovah le Dieu des esprits de toute chair, belle expression qui nous rappelle non seulement que c'est Dieu qui a créé nos âmes, mais encore qu'il faut que nous le servions en esprit et en vérité. Puis Moïse, sentant bien que l'assemblée, c'est-à-dire le peuple, ne pouvait rester sans conducteur dans les circonstances critiques où il se trouvait, demande à l'Éternel qu'il lui donne un successeur, afin que sous sa direction les enfants d'Israël sortent du désert, qu'ils entrent au pays de Canaan, et que l'assemblée de l'Éternel ne soit pas comme des brebis qui n'ont point de berger. Moïse oubliait-il donc le Bon Berger, l'Ange de l'alliance? Non sans doute; mais il savait que le Seigneur, qui est le Chef de l'assemblée, conduit son peuple au moyen de ses serviteurs ou ministres. Quoi qu'il en soit, la manière dont il s'exprima doit tout naturellement nous faire présumer que le successeur de Moïse était destiné à être, comme Moïse lui-même, le type de ce Jésus qui, étant le Berger des brebis, les fait sortir du péché et les introduit dans la vie éternelle.

§ 986. Quel sera donc l'homme aimé du Seigneur à qui reviendra une charge si grande et si belle? L'Éternel va le désigner lui-même. Ce sera Josué, fils de Nun; ce même Josué que nous avons vu, quarante ans auparavant, à la tête des armées d'Israël contre les Hamalékites, puis si fidèle, avec le fidèle Caleb, entre les explorateurs du pays de Canaan, toujours à côté de Moïse dans la mauvaise comme dans la bonne fortune. Josué avait donc été préparé de longue main par le Seigneur. Il possédait tout ce qu'il fallait pour son œuvre: maturité de l'âge, longue expérience, lumière acquise dans le commerce de Moïse; surtout il avait part aux dons extraordinaires du Saint-Esprit.

§ 987. Outre cette vocation spirituelle et divine, Dieu voulut que Josué en eût une autre, bien inférieure, mais nécessaire aussi. Moïse lui imposa les mains devant tout le peuple; c'est-à-dire qu'il plaça ses mains sur lui, comme pour indiquer que son ministère passait de lui à Josué, et que de la sorte toute l'assemblée devait l'écouter. C'est encore ainsi que se doit faire la consécration des anciens et ministres de l'Église chrétienne. Il faut que leur vocation vienne tout premièrement de Dieu, mais aussi qu'elle soit ratifiée devant l'Église et reconnue par elle. — Du reste il était bien entendu que Josué ne cumulerait pas tous les pouvoirs. Éléazar, fils d'Aaron, le souverain sacrificateur, demeurait seul chargé de consulter l'Éternel par la voie de l'Urim et du Thummim (§ 816).


LXXIII. Diverses lois. — Victoires et conquêtes.


Chap. 28-29
§ 988. Ces chapitres contiennent quelques ordonnances supplémentaires au sujet des holocaustes. On devait en offrir chaque jour, particulièrement le jour du sabbat, puis à chacune des fêtes que le Seigneur avait instituées. Ces ordonnances ne présentent d'ailleurs aucune difficulté d'interprétation. Après ce que nous avons dit en plusieurs lieux, notamment §§ 864-870, nous n'avons pas de nouvelles réflexions à ajouter.

Chap. 30
§ 989. Loi sur les vœux. Quand un homme s'était engagé à quelque acte de culte envers Dieu, ou à quelque prestation civile envers son prochain, rien ne pouvait le dispenser de tenir sa parole. Mais si une femme vivant encore sous le toit paternel, ou liée à un mari, faisait un vœu, ou prenait un engagement quelconque, elle n'était tenue à l'observer que moyennant le consentement de son père, ou de son mari. Pour mieux dire, elle était liée par sa parole, si le père ou le mari, ayant eu connaissance du vœu qu'elle avait fait, ne s'y était pas formellement opposé le jour même où la chose était venue à sa connaissance. Loi pleine de sagesse, à laquelle la plupart des peuples civilisés ont emprunté quelque chose.

31: 1-6
§ 990. Moïse reprenant ici le fil de son histoire, nous raconte les terribles jugements que Dieu fit tomber sur les Madianites par le ministère des enfants d'Israël. Nous avons vu dernièrement (§ 982) de quelle manière ces tribus idolâtres avaient entraîné les Israélites dans les plus horribles désordres, et comment Dieu avait châtié son peuple. Il fallait aussi, pour rendre la leçon complète, que les Madianites à leur tour ressentissent la juste colère du Très-Haut. C'est pourquoi, et par l'ordre de l'Éternel, Moïse envoya contre eux douze mille hommes armés, mille de chaque tribu, sous la conduite de Phinées, fils d'Éléazar; puis, afin de bien montrer que c'était au nom de l'Éternel qu'ils faisaient cette expédition, ils prirent avec eux les meubles, ou la vaisselle du sanctuaire, et tout premièrement sans doute l'arche de l'alliance avec les trompettes consacrées.

31: 7-18
§ 991. La destruction de Madian fut terrible, mais elle ne le fut pas plus que ne sera celle des ennemis de Dieu au dernier jour. Alors nul ne pourra fuir, tandis qu'il y eut probablement bien des Madianites qui échappèrent au glaive des enfants d'Israël. Ceux-ci, après avoir passé au fil de l'épée tous les hommes et cinq de leurs chefs, ou rois, emmenèrent avec eux les femmes et leurs petits enfants, avec un immense butin, car avant de mettre le feu aux habitations, ils avaient conservé ce qui était susceptible d'être transporté. Tout ceci assurément ne fut pas l'affaire d'un jour. Mais quand Moïse vit que l'armée conduisait des femmes avec elle, ces mêmes femmes qui avaient été pour Israël la cause de tant de péchés et d'un si grand châtiment (§ 982), il fut ému d'une sainte colère, et, fidèle exécuteur des jugements de Dieu, il ordonna que ces coupables femmes subissent aussi la peine de leurs iniquités. Les fils partagèrent le sort de leurs mères; on ne conserva l'existence qu'aux filles en bas âge. Il y avait moins d'inconvénients à ce que les Israélites les adoptassent dans leurs familles, que s'ils avaient accordé la même faveur aux fils des Madianites.

§ 992. Quoi qu'il en soit, et sans reproduire les réflexions que nous avons faites à l'occasion du déluge et de l'Ancien Monde (§ 210). de Sodome et des villes de la plaine (§ 339), de Pharaon et de son peuple (§710), nous voyons encore ici combien c'est une chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivant! Pécheurs et instigateurs du péché, les Madianites idolâtres, d'autant plus criminels qu'ils étaient aussi fils d'Abraham et les frères des Israélites, reçurent en cette rencontre le juste châtiment de leurs prévarications. Quel avertissement hélas! pour tant de soi-disant chrétiens, qui, éclairés de la lumière de l'Évangile, vivent dans le péché, s'excitent au mal les uns les autres et approuvent ceux qui le font!

31: 8-16
§ 993. Parmi les malheureux qui tombèrent sous les coups du Très-Haut, vous aurez remarqué l'indigne Balaam, que nous avons laissé faisant mine de retourner chez lui. Il paraît qu'irrité contre Dieu du rôle qu'il avait dû jouer malgré lui, froissé dans sa passion d'avarice, il avait cherché à se venger par la plus épouvantable trahison. Ce fut à son conseil que les Madianites tendirent aux enfants d'Israël le piège où leur foi et leur moralité succombèrent; aussi trouva-t-il des premiers la mort (et quelle triste mort!), dans la guerre qui fut faite à Madian. Vous le voyez donc, mes chers lecteurs, il ne suffit pas de s'écrier: «Que je meure de la mort des justes!» (§ 976). Il faut, pour bien mourir, vivre à la manière des justes; comme Abraham, par la foi; comme Enoch, en la présence de Dieu, et non pas comme Balaam, en faisant de l'argent son idole. Vous voyez de plus qu'on peut avoir parlé de la part de Dieu et dit ce que Dieu voulait, sans être toutefois converti. Or, l'on aurait beau être prophète, si l'on n'est pas converti, on est sur le chemin de la perdition.

31: 19-24
§ 994. Bien que les Israélites n'eussent fait qu'exécuter le Jugement du Très-Haut, il ne se pouvait sans doute qu'il ne s'y fût mêlé beaucoup de péché; d'ailleurs, après tant de sang répandu, il fallait une purification. Il fallait même purifier ce qui avait appartenu aux Madianites, avant que le peuple pût se l'approprier. C'est ce qu'on fit par ordonnance de l'Éternel, afin d'imprimer dans les cœurs une horreur croissante pour le mal.

31: 25-54
§ 995. Après cela, il fut question de partager l'immense butin qu'on avait emporté, et voici comment la chose se passa. La moitié des captures appartint à ceux qui avaient été à la guerre, sauf le 2 p. 1000 qui dut revenir au sanctuaire; l'autre moitié fut dévolue au reste de l'assemblée, moins le 2 p, % qu'Éléazar reçut aussi pour le service du tabernacle. Quant à l'or en lingot et à l'or ouvré, il fut déposé dans le trésor public, en reconnaissance de ce que, par une protection remarquable, aucun Israélite n'avait péri dans cette expédition. Ce que c'est que d'aller au nom du Seigneur et de l'avoir avec soi! Quelle différence de ce résultat avec ce qui s'était passé jadis à Horma (§ 950)!

Chap. 32
§ 996. Par la destruction des tribus madianites qui occupaient la rive gauche du Jourdain, une vaste contrée se trouvait dès ce moment à la disposition des enfants d'Israël; ils en avaient déjà chassé les Amorrhéens et les Moabites. C'est pourquoi les descendants de Ruben et de Gad demandèrent à Moïse qu'il leur fût permis de former leurs établissements dans ce pays. Les Rubénites, issus du fils aîné de Jacob, estimaient sans doute devoir être servis les premiers. Mais comme le territoire qui est sur la rive gauche du Jourdain n'était pas, à proprement parler, le pays de Canaan, Moïse éprouva quelque indignation à l'ouïe de cette demande. C'était à ses yeux comme si les Rubénites et les Gadites renonçaient à leur héritage et répudiaient les promesses de Dieu. Eh quoi donc, semble-t-il leur dire, vous ne voulez pas entrer au pays qu'Abraham, Isaac et Jacob ont habité! Mais cette difficulté fut bientôt arrangée; car il entrait dans les vues du Seigneur que la chose se passât ainsi. Les Rubénites et les Gadites promirent d'aider leurs frères à conquérir Canaan, et, sous cette condition, ils obtinrent ce qu'ils désiraient. La tribu de Ruben eut en partage le canton le plus méridional, borné au midi par la rivière d'Arnon, à l'ouest par la mer Morte et quelque peu du Jourdain, au nord par la tribu de Gad. Ses frontières à l'est, peut-être, n'eurent pas de limites bien déterminées. Là vivaient les Hammonites et les restes des Madianites, tribus qui redevinrent plus tard fort puissantes; tout comme on vit les Moabites reformer des établissements au sud de l'Arnon. Quant à la tribu de Gad, elle occupa le canton qui était au nord de la tribu de Ruben; elle porta sa population sur les bords du Jourdain, jusqu'à la mer de Galilée, et, touchant par son extrémité sud-est les Hammonites, elle avait au nord et à l'est la moitié de la tribu de Manassé, qui reçut aussi une part dans ce vaste territoire. Vous vous souvenez que, par la volonté de Dieu (§ 588), Jacob en avait ainsi disposé sur son lit de mort.

Chap. 33-34
§ 997. Après avoir, dans le Chap. XXXIII, donné le tableau général des campements du peuple d'Israël, depuis son départ de l'Égypte jusqu'au moment où l'on eut atteint le Jourdain en face de Jéricho, Moïse nous dit comment il renouvela la défense de se mêler avec les Cananéens. Puis il décrit les limites générales du pays que les Israélites avaient à conquérir. Enfin il désigne les hommes (un de chaque tribu), qui, sous la direction d'Éléazar et de Josué, en effectueraient le partage.

Chap. 35
§ 998. Les Lévites, nous l'avons vu ailleurs (§ 591), ne devaient pas, comme les autres tribus, être cantonnés dans un territoire à part: il fallait, pour l'exercice même de leur ministère, qu'ils fussent établis un peu partout. Moïse ordonna donc qu'on leur destinât quarante-huit villes, avec des faubourgs dont la longueur était déterminée; c'était là qu'ils auraient leurs jardins et leurs vergers. De ces quarante-huit villes il devait y en avoir six, trois d'un côté du Jourdain et trois de l'autre, qui, désignées sous le nom de Villes de refuge, serviraient d'asile à ceux qui s'étaient involontaire involontairement rendus coupables de meurtre (§ 768).

§ 999. Selon un usage très antique et dont on comprend assez facilement la raison, lorsqu'un homme tombait sous les coups d'un autre homme, c'était le plus proche parent de la victime qui avait vocation à poursuivre le coupable en qualité de vengeur: on l'appelait en hébreu le Goël. Or, Dieu, voulant imprimer fortement la pensée de l'inviolabilité de la vie humaine, et empêcher toutefois que le meurtrier involontaire ne fût puni comme un criminel, établit qu'en pareil cas on pourrait se réfugier dans une des six villes. Là, le meurtrier était à l'abri des poursuites du Goël, pourvu cependant qu'il ne sortît pas de la ville, si ce n'est à la mort du souverain sacrificateur. Celle-ci intervenant, le meurtrier rentrait paisiblement au sein de sa famille; nouvelle preuve que le souverain sacrificateur des Juifs était le type de Jésus-Christ, notre Grand Souverain Sacrificateur; car si nous croyons, sa mort nous affranchit entièrement de la peine du péché.

Chap. 36
§ 1000. Les filles de Tselophcad, dont nous avons vu naguère l'histoire (
§ 984), appartenaient à la portion de la tribu de Manassé qui eut pour sa part le territoire à l'est du Jourdain et au nord de la tribu de Gad. D'après l'arrêt qui avait été rendu à leur sujet, elles eurent le terrain qui serait revenu à leur père s'il eût vécu. Mais il s'éleva là-dessus une nouvelle difficulté. Les filles de Tselophcad, en se mariant, porteront-elles à leurs maris leur part aux biens paternels, surtout si elles se marient à des Israélites d'autres tribus? Ou d'une manière plus générale, est-ce que les biens-fonds appartenant à une tribu seront transportés à une autre tribu par les mariages? Cette question fut résolue au moyen d'une loi qui ordonna qu’une fille héritière, c'est-à-dire une fille qui, n'ayant point de frères, devait par cela même conserver le nom de son père (§ 984), ne pourrait épouser qu'un homme de sa propre tribu, et même, à ce qu'il paraît, un homme de sa propre famille dans la tribu. Par suite, les filles de Tselophcad se marièrent à leurs cousins germains. — On pense que ce fut en vertu de cette loi que Marie, la mère de notre Seigneur, épousa Joseph son parent. Cela explique pourquoi Joseph est appelé tout à la fois fils de Jacob (Matth. I, 16) et fils d'Héli (Luc III, 24). Jacob fut son propre père et Héli le père de Marie. Ainsi Joseph était réputé fils d'Héli, comme les maris de Mahla, de Tirtsa, de Hogla, de Milca et de Noha, étaient censés fils de Tselophcad par leur mariage avec leurs cousines. Elles n'avaient point de frères; il paraît que Marie, la mère de Jésus, n'en avait pas non plus. — Or, n'est-ce pas une chose bien digne d'observation, que, même en des faits de cette nature, tout l'Ancien Testament vienne aboutir à Jésus-Christ?


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