Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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DOROTHÉE TRUDEL

 QUATRIÈME PARTIE



Les méthodes de quelques guérisseurs par la foi

Depuis Mütterli, de nombreux guérisseurs par la foi ont attiré l'attention des chrétiens et même celle des incrédules. Citons, en France M. Vignes, en Allemagne le pasteur Jean-Christophe Blumhardt de Boll et M. O. Stockmayer de Hauptweil. Mais c'est particulièrement en Angleterre et en Amérique que le mouvement a pris une extension extraordinaire. On pourrait dresser une longue liste de ces guérisseurs de toutes dénominations et de toutes sectes. Nous nous contenterons de relever les noms du rév. W. E. Boardman, du Dr Ch. Cullis de Boston, du rév. Dr A.-B. Simpson, de New-York, de M. George-O. Barnes, de M. J.-M. Wood d'Australie, de Mme Baxter et de miss Gordon.

Or, dans chaque pays, chaque guérisseur emploie des méthodes différentes. Aussi avons-nous pensé qu'il serait intéressant d'ajouter à l'étude que nous venons de faire, un rapide aperçu de ces diverses méthodes préconisées en France, en Allemagne et en pays de langue anglaise. Cela nous fournira l'occasion d'apprécier encore une fois, de ce point de vue, l'oeuvre et la vie de Dorothée Trudel, en même temps que le chemin parcouru depuis elle par quelques guérisseurs contemporains.

I

Monsieur Vignes

C'est une véritable poésie qui se dégage du tableau simple et primitif de ce paysan qui s'arrête au milieu de son travail champêtre, pour s'occuper de quelques malades venus de loin afin d'être guéris par lui ; et, entourant cette scène, en lui prêtant un cadre de toute beauté, nos belles et pittoresques Cévennes...

Mais il ne rentre nullement dans notre sujet de faire une biographie de M. Vignes, à combien plus forte raison de décrire ses occupations, sa maison ou le beau pays qu'il habite. Nous désirons seulement donner une idée de la méthode avec laquelle il traite les malades qui l'approchent.

Toutefois, disons d'abord que Mütterli et M. Vignes ont un point commun qui fait toute leur force et leur donne toute leur autorité : c'est la confiance pleine et entière qu'ils possèdent en leur Sauveur. Il est intéressant et instructif, après avoir vu comment, chez Dorothée Trudel, naquit cette confiance, d'en suivre le même développement chez M. Vignes, de Vialas.

Il avait douze ans, lorsque sa mère qui était veuve et avec laquelle il vivait seul, tomba gravement malade. Les médecins se déclarèrent impuissants. Alors le jeune garçon se rappela qu'il est écrit dans la Bible : « Quelqu'un parmi vous souffre-t-il ? Qu'il prie (Jacques V, v. 13.). » Le passage de l'Évangile de Jean ch. XIV, v. 12 à 14 lui revint aussi à la mémoire. Il s'agenouilla près du lit de sa mère et pria de tout son coeur pour sa guérison. Aussitôt un mieux se fit sentir et bientôt la malade fut complètement guérie.

À partir de ce moment, où l'Écriture lui était apparue sous un jour tout nouveau et lui avait donné une puissance qu'il avait ignorée jusque-là, le jeune Vignes eut une pleine confiance en Dieu qui exauce les prières. Il veilla à ce que cette bénédiction ne lui fût pas enlevée ; il pria pour les domestiques de sa mère, pour les malades de son village ; puis, sa réputation grandissant, des étrangers firent le voyage de Vialas, et, pendant un temps, ce petit coin des Cévennes eut un grand nombre de visiteurs qui s'en retournèrent bénissant et louant Dieu pour tout ce qu'ils avaient vu, comme les bergers qui avaient trouvé l'enfant Jésus à Bethléhem.

Si madame Trudel fut la cause indirecte de cette confiance inébranlable que nous avons tous admirée chez Mütterli, pour M. Vignes sa mère en fut la cause directe. Pour Dorothée, ce fut l'exemple qui finit par triompher des résistances (1; pour le paysan des Cévennes, l'expérience brisa du premier coup les doutes et les hésitations. Quoi qu'il en soit, que la lutte ait été longue ou brève, qu'elle se soit terminée par une crise ou sans crise, le même but était atteint, le même sommet était gravi : Dorothée Trudel et M. Vignes possédaient pleinement cette confiance, qui est l'un des éléments principaux, sinon l'élément principal de la foi.
Pour conduire les âmes à la foi, Dorothée Trudel et M. Vignes se servirent de chemins bien différents.

En premier lieu, M. Vignes ne voulut jamais s'établir, comme Mütterli finit par s'y décider (2). Jamais il ne quitta son travail, des champs, son labourage, sa charrue et ses sabots. Toute la journée occupé à ses affaires, il ne met encore à part, pour recevoir les malades qui se pressent tous les jours à sa porte, qu'une heure après le déjeuner de midi. Ne lui demandez pas d'installer à Vialas une sorte d'établissement ou d'oeuvre pour les malades - vous seriez éconduit de la bonne manière.

D'ailleurs, M. Vignes reçoit ses visiteurs avec rudesse et sévérité. C'est un autre Jean-Baptiste qui ne craint pas de faire entendre un reproche, un avertissement salutaire, un appel décisif à la conscience et à la volonté.

Nous avons trouvé dans une petite brochure allemande (3) les détails suivants qui donneront une idée de la façon avec laquelle M. Vignes reçoit, les malades, souvent fatigués par un long voyage. Il les réunit dans une simple chambre de paysan, et leur parle à peu près en ces termes :

« Mes amis, vous venez ici pour chercher quelque chose que je ne puis pas vous donner. Vous êtes du monde, vous vivez pour le monde ; si vous étiez de Dieu, vous ne seriez pas ici ! Vous courez après la créature, au lieu de vous confier à Dieu qui vous a créés ! Quand un enfant souffre, il ne va pas vers des étrangers, mais vers son père et sa mère, et Dieu nous est en Jésus-Christ plus que père et mère. C'est à nous qu'il adresse la promesse : « Demandez et vous recevrez ! » Dieu ne ment pas et ne trompe jamais. Dieu se tient à sa parole et fait ce qu'il promet. Je ne suis rien, je ne sais rien, Je ne puis rien. C'est Dieu qui fait tout. Il est avec vous aussi bien qu'avec moi. Confiez-vous en lui sans faiblesse et sans réserve et vous serez guéris. »

Il dira aussi : « Mes amis, il n'y a qu'un seul vrai docteur, c'est Dieu par notre Sauveur Jésus, le bien-aimé de Dieu ! Il n'a besoin ni de médecins, ni d'autres moyens ; car il les a tous créés et nous devons choisir entre Lui et ces choses. Confiez-vous en Lui sans aucun doute, et vous serez guéris. Dieu ne veut pas qu'on souffre, il est le meilleur des pères. Il nous envoie des maladies pour notre éducation spirituelle, afin que nous allions à Lui, et alors il nous guérit. »

À quelqu'un qui s'étonnait des guérisons qui s'opéraient à Vialas, M. Vignes dit :
« Quant à vous, vous priez et vous n'obtenez aucune victoire parce que vous priez mal ; vous êtes encore du monde, vous vivez encore pour le monde, vous avez encore vos intérêts dans le monde, vous travaillez pour le monde ! Le monde n'a aucun prix ! Si vous viviez seulement pour le monde, cela serait mieux, vous ne seriez jamais né ! Vivez donc pour Dieu, soumettez-Lui non seulement vos croyances, mais aussi votre amour, votre coeur et votre être tout entier ! »

Se tournant vers un autre, il s'écria :
« Certainement vous êtes venu ici pour éprouver qu'il y un Dieu vivant. N'avez-vous donc aucun Dieu à Berne ? Soumettez-vous à Lui, restez en Lui, confiez-vous en Lui et rentrez maintenant chez vous. »

À un pasteur, il dit :
« Vous prêchez, mais vous ne croyez pas ; il faut pratiquer l'Évangile ! Guérissez les malades vous-même ! »

M. Vignes ne conserve d'ailleurs avec aucun malade une correspondance qui serait propre à augmenter son influence et pourrait amener des résultats bénis. Les quelques lettres qu'on a de lui rappellent exactement la brièveté de ses allocutions. On en pourra juger par la suivante :

Vialas, le 13 Septembre 1895.

MADAME

Je ne tiens aucune correspondance, il m'est impossible ; vous m'obligez. Je viens vous dire qu'il n'y a qu'un seul vrai Docteur, Dieu par notre Sauveur Jésus ; veuillez le connaître tel qu'il doit l'être sans faiblesse. ni réserve, donnez-vous à Lui avec foi et amour ; le Seigneur accomplira ses divines promesses sur vous et vos malades. Vous aurez bien lieu de remercier votre bon Père céleste, par votre Bienfaiteur. C'est le souhait de mon coeur, pour vous et pour moi aussi, que je désire de tout coeur que sa sainte volonté s'accomplisse sur tous. Amen.
Dans cette agréable attente, que Dieu, par notre Seigneur, soit et demeure avec vous tous.

VIGNES.

Nous sommes, par ces quelques faits, assez loin de la délicatesse, de l'affection, de l'amour avec lesquels Mütterli accueillait ceux qui venaient à elle, pour trouver dans les méthodes employées à Maennedorf et à Vialas une différence assez sensible (4).

Il va sans dire que lorsqu'on se trouve en présence du rude paysan de soixante-quinze ans qu'est M. Vignes, on accepte mieux, on ne tient point pour étrange ce langage sévère et froid. Et puis, il y a dans cette manière de parler aux âmes un avantage : les illusions s'évanouissent, les consciences se réveillent, on ne peut que s'humilier et reconnaître le bien fondé des reproches. Nous avons aussi remarqué déjà que Dorothée Trudel savait flageller la piété alanguie et rester sévère pour ceux qui refusaient de se convertir (5).

Mais où sont, chez M. Vignes, les mots affectueux de Mütterli ? où trouverez-vous une attention délicate, un rien qui réconforte ? Ses visiteurs vous diront-ils, après l'avoir vu : c'est un homme affectueux, doux, aimable ? - Non ; chez lui, l'amour ne revêt aucune forme extérieure. Le fond du coeur est bon, mais il ne le montre pas. C'est un homme de Dieu dans le vieux sens biblique du mot. Je dirai plus : c'est un prophète. Nous vénérons sa méthode, mais nous préférons celle de Mütterli : l'amour a toujours gagné plus d'âmes que la sévérité.

Le peu de temps qu'il consacre à ses malades force M. Vignes à être très bref dans ses entretiens particuliers. Il n'est pas même dit qu'il fasse de prière avec ceux qui attendent de lui leur guérison. Il n'acquiert, au près d'eux une autorité, une influence que parce que sa conversation se réduit à un ordre, une affirmation ou une promesse. C'est d'ailleurs, après les petites allocutions de l'arrivée, tout ce que l'on peut ordinairement tirer de lui.

La méthode qu'employait Mütterli est absolument différente de celle-là. Il est vrai qu'elle avait tout le temps d'agir sur les âmes et sur les corps ; son établissement ouvrait largement ses portes et l'on pouvait y demeurer longtemps. Mais toute l'influence qu'elle exerçait sur les âmes venait de ses quatre cultes par jour où l'on méditait la Parole de Dieu, où l'on priait (6). Elle priait aussi en particulier avec ses malades. Son action sur les âmes et sur les corps était lente, indirecte, mais profonde et sûre.
Il faut cependant reconnaître tout le bien que M. Vignes a fait à certaines âmes et les succès étonnants qu'a obtenus sa méthode brusque et directe.

Dans la petite brochure allemande citée plus haut nous lisons :
« M. Vignes se tournant vers Mme B. lui dit : Qu'avez-vous ? - Ah ! J'ai de terribles douleurs ! répondit-elle. - Remuez-vous, reprit M. Vignes. B. remue ses doigts l'un après l'autre. - Mais..., mais..., s'écrie-t-elle, que signifie cela ? Celui-ci ne me fait plus mal, celui-là non plus. Je ne sens plus aucune douleur ! Mais, monsieur, cela durera-t-il ?
M. Vignes, sans répondre, se tourne vers un enfant infirme du bras : Étends ta main ! L'enfant obéit. - Mets-la sur ta tête ! L'enfant exécute ce mouvement. Les parents ne peuvent en croire leurs yeux ; l'enfant est guéri.

« Un autre visiteur était si malade, qu'il ne pouvait descendre de voiture. M. Vignes s'approche et lui dit : - Descendez ! - Cela m'est impossible, répond le malade. - Au nom de Dieu, descendez ! - Le malade alors descend ; il était guéri. »

Dorothée Trudel n'a jamais hasardé une parole aussi directe, un ordre aussi formel. Elle se bornait dans ses prières à demander avec insistance mais aussi avec soumission la guérison pour ses malades. Elle ne voulait pas s'exposer à un échec, car, pour elle, toute guérison était subordonnée à la volonté de Dieu (7).

Certes M. Vignes ne prétend pas connaître la volonté de Dieu ; il n'a jamais affirmé qu'il pouvait guérir tout le monde. Et quelqu'un étant un jour venu se plaindre à lui de ce qu'il n'avait pas guéri sa femme, il lui répondit : « Que voulez-vous ? si c'est la volonté de Dieu que votre femme reste souffrante, je n'y peux rien (8! » - Et pourtant il ordonne, il semble qu'à sa voix la maladie devrait céder ! N'y a-t-il pas là une légère contradiction, peut-être même un danger ?

Il n'est guère impossible, en effet, que tous les malades n'obéissent pas à la voix de M. Vignes. Un jour, il ordonne à un malade souffrant de la jambe de marcher. Mais le malade n'ose pas. Et M. Vignes de lui dire : « Vous n'entendez pas ma voix. Vous êtes du monde ; vous avez des yeux et vous ne voyez pas, des oreilles et vous n'entendez pas. Confiez-vous à Dieu sans réserve, sans douter ; alors vous serez guéri ! »

Plutôt que de mettre sur le compte du doute, l'échec de son commandement, ou de laisser croire au malade qu'il n'a pas eu assez de foi, nous aurions mieux aimé voir M. Vignes suivre la méthode prudente et réservée de Mütterli. Peut-être aurait-il fait encore plus de bien et acquis sur les âmes une influence beaucoup plus grande.

Mais, encore une fois, nous ne voudrions pas être injuste vis-à-vis de M. Vignes. Pour l'apprécier justement, il aurait fallu le voir, l'approcher, le regarder agir, l'entendre parler, et c'est ce qui nous a manqué. Nous le regrettons très vivement.


Table des matières

Page suivante:


(1) Voir : pages 30-32.

(2) Voir : pages 62-64.

(3) F. Schlachter. Das alte Evangelium Nr 2 : Vignes in Vialas.

(4) Voir : pages 93-96.

(5) Voir : pages 81-82 et 87-88.

(6) Voir : pages 78-90.

(7) Voir pages 107 et 108.

(8) Luigi, les Guérisons de Vialas (Église libre du 17 avril 1896), page 124.

 

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