Jésus est spirituellement, pour les chrétiens, ce que fut pour les Israélites le rocher d'où l'eau jaillit. Beaucoup furent pourtant infidèles; que les Corinthiens craignent de l'être comme eux.
317. Verset
15. Je
vous parle comme à des personnes
intelligentes; jugez vous-mêmes de ce que je
dis.
Quand saint Paul
n'aurait
pas écrit ces paroles, la réflexion
qu'elles suggèrent ressort assez de la
nature et du ton de ses épîtres.
Où l'avez-vous vu ne pas parler « comme
à des personnes intelligentes,» ne pas
inviter à raisonner, ne pas en fournir les
moyens? Où l'avez-vous vu, tout apôtre
qu'il est imposer la foi? Il l'impose, sans doute,
en ce sens qu'il se déclare inspiré
de Dieu ; mais c'est cela même qui rend plus
remarquable encore ce perpétuel respect pour
l'intelligence des fidèles, ce
perpétuel soin de leur exposer ses raisons.
Impossible, avec lui, de croire sans avoir
réfléchi, sans être allé
aussi avant que la raison humaine peut aller. Non
seulement il ne demande pas une foi aveugle, mais
il ne la veut pas. Il sait bien qu'on peut abuser
du raisonnement, de l'examen ; il condamne l'abus,
mais il n'en conclut rien contre le droit, et
l'exercice de ce droit lui paraît
indispensable, au contraire , pour que la foi soi(
réellement la foi. L'homme ne croit
réellement que ce qu'il s'est
approprié par l'intelligence et par le
coeur.
318. Verset
16. La
coupe de bénédiction, que nous
bénissons, n'est-elle pas la communion au
sang de Christ? Le pain que nous rompons n'est-il
pas la communion au corps de
christ?
Quoique
l'Eucharistie ne
soit considérée, en cet endroit, que
comme un symbole de l'union des chrétiens,
ce verset a son importance dans la question de
l'Eucharistie elle-même.
L'apôtre en fait un
symbole d'union ; il entend donc,
évidemment, que tous aient part aux deux
éléments qu'il indique, au vin comme
au pain. Remarquez même qu'il met le vin le
premier; autre détail inexplicable si les
gens auxquels il écrit n'eussent pas
été habitués à
communier sous les deux espèces.
Remarquez aussi le
retour
de cette expression rompre le pain, si
éloignée (voir
206)
de supposer rien de semblable à la
transsubstantiation et à la
messe.
Versets 48
et suiv. -
S'abstenir des viandes sacrifiées aux
idoles, mais non dans la pensée que ces
viandes soient souillées, car les idoles ne
sont rien.
Conseils divers sur les assemblées chrétienne. Saint Paul a appris, dit-il, que celles des Corinthiens ne sont pas toujours assez fraternelles.
319.
Versets 18 et 19.
Et je le crois en partie, car il faut qu'il y ait,
parmi vous, même des hérésies,
afin que ceux qui sont dignes d'approbation soient
manifestés parmi vous.
Saint Paul veut dire
qu'il y aura inévitablement , dans
l'Église, des divisions plus graves encore,
lesquelles fourniront aux vrais fidèles
l'occasion de manifester leur foi, leur
piété, leur charité. il
accepte donc les divisions comme un fait,
fâcheux sans doute, mais naturel,
inévitable; fait, d'ailleurs, qui se lie aux
desseins de Dieu, dit-il, car il concourt à
la manifestation de l'Évangile en soumettant
à une utile épreuve le coeur et
l'esprit des vrais chrétiens. L'unité
n'est souvent que le sommeil et la mort. Une
Église sans orages risque toujours beaucoup
de n'être qu'une eau dormante, où vont
se développer à l'aise tous les
éléments de corruption.
Versets 20
et suiv.-
Abus dans la célébration de la
Cène. Le repas qui l'accompagne n'est ni
assez fraternel ni assez grave.
320. Verset
20. Lors
donc que vous vous assemblez ainsi, ce n'est pas
manger la Cène du Seigneur.
Voilà où en
était, après quelques années
d'existence, une Église fondée par
saint Paul. Quel argument contre la tradition !
Quelle preuve, de la nécessité d'une
autorité écrite, immuable, que chaque
Église et chaque fidèle puisse
consulter en chaque occasion ! Tout ce que saint
Paul enseigne aux Corinthiens dans ce chapitre , il
affirme le leur avoir enseigné , et,
sûrement, il y était revenu bien des
fois. Qu'en avaient-ils fait? Qu'en avaient fait
les chefs de leur Église? À quoi
eût servi de le leur répéter de
bouche? Ils l'auraient oublié, comme la
première fois, et saint Paul n'eût
plus été là pour le redire;
les abus, les altérations auraient poursuivi
leur chemin. Hélas ! les altérations
n'ont que trop marché, malgré ce
chapitre; mais nous avons au moins , ce chapitre en
main, de quoi les combattre, sûrs que nous
sommes d'avoir là, intacte, la pensée
de saint Paul.
321.
Versets 25-29.
J'ai appris du Seigneur ce que je vous ai
enseigné c'est que le Seigneur Jésus,
la nuit qu'il fut livré, prit du pain, et,
ayant rendu grâces, le rompit, et dit:
Prenez., mangez, ceci est mon corps qui est rompu
pour vous ; faites ceci en mémoire de moi.
De même aussi, après avoir
soupé, il prit la coupe, et dit: Cette coupe
est la nouvelle alliance en mon sang; faites ceci
en mémoire de moi, toutes les fois que vous
en boirez. Car toutes les fois que vous mangerez de
ce pain et que vous boirez de cette coupe, vous
annoncerez la mort du Seigneur, jusqu'à ce
qu'il vienne. C'est pourquoi quiconque mangera de
ce pain ou boira de la coupe du Seigneur
indignement, sera coupable du corps et du sang du
Seigneur. Que chacun donc s'éprouve
soi-même, et qu'ainsi il mange de ce pain et
boive de cette coupe, car celui qui en mange et en
boit indignement mange et boit sa condamnation, ne
discernant point le corps du
Seigneur.
Tout ce morceau est
de la
plus grande importance. Vous n'avez, dans les
Évangiles, que le récit de
l'institution de la Cène ; le voici avec les
mêmes détails , mais arrangé en
vue de la pratique, tableau vivant de la
Cène vingt ou vingt-cinq ans après la
mort de Jésus-Christ.
Vous remarquerez,
d'abord, la forme que l'auteur attribue ou
plutôt conserve à la Cène :
elle se célébrait dans un repas.
Blâme-t-il cet usage? Nullement; il ne se
plaint que des abus qui s'y sont introduits, abus
qui firent plus tard abandonner l'usage même,
peu praticable dans une Église nombreuse.
Reste donc toujours ce grand fait que la
Cène avait lieu dans un repas, et que la
chose, en soi, paraît à saint Paul
toute naturelle. Essayez , comme nous l'avons
déjà dit , de retrouver là la
Messe; essayez de comprendre comment l'idée
de la. présence réelle,
matérielle, s'accommoderait de la
Cène ainsi donnée.
Mais poursuivons.
Que
veut, dans tout ce morceau, saint Paul? Augmenter
le respect des Corinthiens pour la Cène. Que
dirait, dans ce cas un catholique,
théologien ou non ?
Une seule chose :
«Ce que vous mangez, ce que vous buvez, c'est
le corps et le sang de Jésus-Christ, son
vrai corps, son vrai sang. » Saint Paul dit-il
cela ? Non.
Les mots « ne
discernant point le corps dit Seigneur » se
lient à ce qu'il a dit du manque de respect
et de préparation ; il défend donc de
participer à la Cène comme à
un repas ordinaire, sans discerner ce qu'elle est,
ce qu'elle rappelle. Et en effet, au moment
même où il insiste sur le respect dont
elle doit être entourée, il ne dit
encore, à deux reprises, que: « Ce
pain, cette coupe. » En y prenant part,
dit-il, nous annonçons (nous rappelons) la
mort du Seigneur a jusqu'à ce qu'il vienne.
.» Est-ce là ce qu'il dirait s'il
croyait pouvoir dire que le Seigneur est
présent? Parlerait-il de la venue future
quand il pourrait parler d'une venue actuelle?
Encore une fois, faites l'expérience.
Interrogez un croyant catholique, théologien
ou non ; demandez-lui ce qu'il dirait à des
gens communiant sans respect, et voyez si
l'argument de la présence réelle ne
serait pas le premier dans son esprit , le premier
dans sa bouche; voyez s'il croirait raisonner juste
en allant chercher l'idée d'une
présence future du Sauveur.
Notons, enfin, les
paroles mêmes que saint Paul met dans la
bouche de Jésus-Christ. « Ceci est mon
corps, qui est rompu pour vous. » Son corps,
en ce moment, était-il rompu?
Non ; la crucifixion
n'eut lieu que le lendemain, Donc , dans cette
partie partie de la phrase, il y a figure;
Jésus appelle rompu ce qui ne l'est pas.
Mais, s'il y a figure dans une moitié de la
phrase, peut-il ne pas y avoir figure dans l'autre
moitié ?
Le mot corps peut-il
être au figuré relativement aux
derniers mots, et garder, avec les premiers, son
sens propre?
On a si bien senti
la
portée de ce contraste , que , dans la
Vulgate , on l'a ôté. Au lieu de
« Ceci est mon corps, qui est rompu pour vous,
» on a mis « Ceci est mon corps, qui sera
livré pour vous » Alors, plus de figure
dans la fin de la phrase, et on peut se remettre
à soutenir que le commencement n'est pas
figuré non plus. - Et voilà de quels
subterfuges on est obligé d'étayer la
transsubstantiation !
322. Aucune
trace donc, dans ce morceau,
de la présence réelle; aucune non
plus, ajouterons-nous, de la Cène
envisagée comme un renouvellement quotidien
du sacrifice de Jésus-Christ. Non seulement
saint Paul rapporte, comme saint Luc, les mots:
« Faites ceci en mémoire de moi, »
mots qui excluent l'idée d'un renouvellement
de l'acte même, - mais l'ensemble du
récit, comme des conseils qui suivent, ne
laisse aucune place à la doctrine du
renouvellement. C'était pourtant,
après la présence réelle, le
plus fort argument à présenter aux
Corinthiens pour leur rendre la Cène
vénérable. Pourquoi saint Luc n'en
use-t-il pas ?- Mais nous reviendrons
là-dessus dans l'Épître aux
Hébreux. Ajoutons seulement qu'il n'y a non
plus aucune trace, dans l'antiquité
chrétienne, de communions sans communiants,
ce qui est devenu, avec la Messe, le cas le plus
ordinaire ; autre preuve, par conséquent,
que la Cène n'était pas ce que fut
plus tard la Messe, acte sacerdotal, sacrifice
à renouveler sans cesse, en l'absence comme
en la présence des fidèles.
323. Les
versets 27, 28 et 29, confirment
ce que nous avons dit (notes
81
et 318)
de la
communion sous les deux espèces.
L'apôtre y parle de pain et de coupe, de
manger et de boire. Impossible de dire ici, comme
on l'a essayé à l'occasion du
récit des Évangélistes, que
Jésus ait eu l'intention de ne donner qu'aux
prêtres l'ordre de manger et de boire. Ainsi,
au temps de saint Paul, tous recevaient le vin
comme le pain; tous donc, aujourd'hui, devraient
recevoir le vin comme le pain. On va chercher, dans
l'histoire des premiers siècles, un tout
petit nombre de cas où , par
impossibilité ou pour quelque autre cause
accidentelle, la communion eut lieu sous une
espèce; mais il n'en est pas moins
incontestable que la règle universelle,
aussi bien que l'usage universel, était de
participer aux deux. Ne croyez pas à ce
qu'on vous dira des désordres
qu'entraînerait la communion par le pain et
le vin ; les pays protestants vous montreront des
communions de trois mille personnes , et vous n'y
verrez nulle trace de ces prétendus
désordres dont on veut vous faire peur. Le
seul motif réel du retranchement de la
coupe, c'est qu'on a voulu relever le prêtre
en le séparant de la foule. Voilà
pourquoi on a érigé en
privilège ce qui avait été
primitivement le droit de tous.
324. Le
verset 28, enfin, confirme ce que
nous avons dit ailleurs contre la confession
sacramentelle. Avant de communier, vous dit saint
Paul, que chacun s'éprouve
soi-même.
Si la confession avait été en usage, ou que saint Paul eût songé à l'établir, croyez-vous qu'il n'en aurait pas parlé ici? Dans l'Église romaine, c'est précisément avant de communier que la confession est réputée indispensable ; saint Paul parle de la communion, de la nécessité de s'y préparer dignement, et c'est alors qu'il dit : « Que chacun s'éprouve soi-même.» Il pourra être bon , sans doute , dans certains cas , de s'éprouver soi-même avec l'aide de son pasteur; mais ce verset n'en montre pas moins que la confession sacramentelle était inconnue aux Corinthiens, inconnue à saint Paul.
Diversité des dons et des ministères dans l'Église. Tout, cependant, procède du même Esprit, et concourt à une même unité spirituelle (note 277). Que chacun donc exerce le don qu'il a reçu, car tout chrétien est ouvrier avec Dieu.
325. Verset
28. Ainsi,
Dieu a établi dans l'Église
premièrement des apôtres, secondement
des, prophètes, troisièmement des
docteurs, ensuite... etc.
A.
De
tous les passages à citer contre la
papauté, voici peut-être le plus
frappant, car c'est celui où il serait le
plus invraisemblable, le plus absurde, que saint
Paul ne dit rien d'un chef suprême.
Remarquez, en effet, que ce chapitre est tout
entier sur l'unité, tout entier de conseils
et de considérations sur l'unité. Et
c'est là que saint Paul aurait omis de
parler du centre! C'est là qu'après
avoir onze fois pris et repris l'image
première, celle d'un corps, il omettrait de
mentionner la tête! On est tenté de se
demander à quoi bon discuter encore avec des
gens qui ne se rendraient pas à une pareille
évidence. Pensez-y, catholiques! Il est un
degré de persistance où les yeux
fermés sont coupables , où l'erreur
devient un péché. Demandez-vous ici,
sérieusement et devant Dieu, si ce n'est pas
là que vous en êtes quand vous
persistez à croire au pape.
B.
Croire au pape ! Sait-on bien, au moins, quand on y
croit, ce qu'on croit? - Nous avons vu que
non.
Les catholiques
s'accorderont bien, en gros, à l'appeler
chef de l'Église et vicaire de
Jésus-Christ; mais, quant à la nature
et à l'étendue de ses droits, autant
de docteurs, autant d'avis. L'ultramontain fait de
lui la source unique de tout pouvoir spirituel et
de toute vérité le gallican ne voit
en lui que le chef hiérarchique de
l'Église, chargé de la gouverner
selon des lois faites par elle. Entre ces deux
extrêmes , mille degrés , mille
nuances, les papes eux-mêmes,- tous
ultramontains, ne l'ont pas été tous,
à beaucoup près, au même
degré, quoique l'étant toujours assez
pour que la majorité des catholiques
fût, sur ce point, en désaccord avec
eux, souvent en guerre ouverte.
Ainsi , dans une
Église qui se prétend investie du
droit et des moyens de déterminer tout ce
qu'il faut croire, voilà les fidèles
condamnés à ne rien savoir de
précis sur l'autorité de leur chef ,
pas plus , comme nous l'avons déjà vu
, que sur l'autorité en
général, son principe, son
siège, etc. Le concile de Trente essaya de
mettre un terme à cette anomalie; on
délibéra longuement , mais on vit
qu'on ne s'entendrait jamais, et qu'on ne faisait,
d'ailleurs, que soulever des flots d'incertitudes.
Si personne n'alla jusqu'à reconnaître
ouvertement que la papauté n'est pas dans
l'Écriture, il se fit d'étranges
aveux sur l'impossibilité de
déterminer, par l'Écriture, ce
qu'elle est, ce qu'elle doit être; les moins
ultramontains s'effrayaient de ne lui trouver,
dès qu'on allait au fond, que des bases si
vagues, si peu capables de porter un tel
édifice. On finit par n'en pas dire un seul
mot, l'acceptant comme un fait, mais
renonçant à en exposer la
théorie. Ce que le concile de Trente n'a pas
fait, on ne le fera jamais trop de dissentiments,
trop d'incertitudes s'y opposent.
C.
Même silence , dans les décrets du
concile de Trente , sur tout ce qui tient aux
cardinaux; même embarras quand on avait
essayé d'en parler. Tout le monde savait
leur origine ; la jalousie des évêques
ne se faisait pas faute de rappeler le temps
où cardinal était au-dessous
d'évêque, où ce titre
était celui des curés de quelques
paroisses de Rome. Impossible donc , même
à leurs amis, de leur trouver une place
régulière dans la hiérarchie
catholique , qui ne peut laisser faire aucune
brèche à ses prétentions
d'antiquité , d'apostolicité ; le
cardinalat n'a eu d'autre origine et n'a d'autre
légitimité que le bon plaisir des
papes.
D.
De
là, dans la question de la papauté
elle-même , des conséquences que le
concile de Trente se garda bien de tirer, mais qui
n'en subsistent pas moins.
Les cardinaux
élisent le pape, mais seulement depuis un
décret de Nicolas III, en 1059. Nous
demanderons donc, d'abord, si la papauté
pouvait légitimement transférer
à un corps nouveau le droit de la
perpétuer. Un pouvoir ne peut pas changer
les conditions de sa propre existence ; la
papauté le pouvait moins que tout autre,
puisque, plus que tout autre, elle était
réputée d'institution divine. Ainsi,
soit au point de vue hiérarchique, soit au
point de vue mystique, il n'est pas facile de
comprendre comment la transmission par un canal
tout nouveau a pu ne pas altérer la
transmission.
On nous répond que
l'innovation de Nicolas III a amené plus de
régularité dans l'élection des
papes, longtemps livrée aux caprices du
peuple de Rome , aux violences des seigneurs , etc.
Oui ; mais donner cette raison , c'est nous
rappeler ces désordres qui ont duré
des siècles, et notre objection ne fait que
changer de terrain. Comment comprendre une
légitimité se perpétuant
intacte à travers ces caprices , ces
violences , ces crimes, qui en devenaient les
arbitres? Laissons, si vous voulez, les violences
et les crimes; l'objection reparaît encore.
Depuis que le pape est élu par les cardinaux
, cardinal lui-même, créé
cardinal par un pape, on peut au moins apercevoir
une filiation mystique entre les papes.
Jadis, rien de
semblable.
On choisissait un évêque quelconque,
un prêtre quelconque, parfois même,
cela s'est vu, un laïque, qu'il fallait faire
prêtre avant de le sacrer pape. Comment et
par qui s'opérait, dans tous ces cas, la
transmission des pouvoirs de saint Pierre ? Quelle
filiation aperçoit-on entre des papes ainsi
élus? Une chaîne ainsi composée
était-elle, spirituellement, une
chaîne? Peut-elle avoir servi de canal entre
saint Pierre et les papes modernes?
Ainsi , même en
dehors de nos objections quant au fond , même
sur le terrain de l'idée romaine et de la
forme romaine, - obscurités,
difficultés de tout genre.
La charité. Sans elle, tout est sans valeur devant Dieu.
326. Verset
2. Et
quand j'aurais le don de prophétie, et que
je connaîtrais tous les mystères et
toute la science , et que j'aurais toute la foi,
jusqu'à transporter des montagnes, si je
n'ai pas la charité, je ne suis
rien.
Ainsi, quand une
Église posséderait réellement
cette science et cette infaillibilité que
l'Église romaine s'attribue , cette
Église pourrait encore,
chrétiennement, n'être rien: il
suffirait que la charité lui manquât.
En vain compterait-elle, parmi ses chefs, des
hommes profondément croyants; en vain leur
foi irait-elle, selon l'énergique figure de
l'apôtre, jusqu'à transporter des
montagnes : si cette vigueur de foi se tourne en
intolérance , en violence , ces hommes ,
comme leur Église, ne sont rien,
chrétiennement rien, car il leur manque ce
qui fait surtout le chrétien, la
charité.
Oublier
momentanément la charité, c'est
déjà grave ; mais ce qui est grave
surtout, c'est quand les principes mêmes
d'une Église consacrent cet oubli, de telle
sorte qu'elle ne puisse pas ne pas user
d'intolérance partout où elle en aura
les moyens. Voilà, en réalité
tomme en système, ce qui a lieu dans
l'Église romaine. Partout où elle a
pu persécuter, elle l'a fait, elle le fait.
Un catholique n'est tolérant que par
inconséquence ; des lois formelles , des
traditions constantes , l'esprit de ces traditions
et de ces lois, tout, enfin, lui interdirait de
l'être. Rome n'a pas la charité ; Rome
posséderait tous les dons qu'elle
s'attribue, que, par cela seul, devant Dieu, ils
seraient nuls.
327. Verset
3. Et
quand je distribuerais tous mes biens pour la
nourriture des pauvres, et quand je livrerais mon
corps pour être brûlé, si je
n'ai pas la charité, cela ne me sert de
rien.
Quand je
distribuerais
tous mes biens. - Ainsi, soit en recommandant, soit
en pratiquant l'aumône, gardez-vous de la
considérer comme ayant un mérite en
soi; elle ne vaut, devant Dieu, que par le coeur,
et elle deviendrait facilement, dans notre esprit,
une monnaie à payer le ciel. Ce calcul,
l'Église, romaine y a grandement
poussé, soit par les promesses magnifiques
dont elle accompagne toujours ses exhortations
à l'aumône, soit par l'éclat
qu'elle donne aux oeuvres qui s'y rapportent, soit
par la divinisation de l'aumône
elle-même dans la personne de beaucoup de
saints. Il est bien difficile, après cela,
que le fidèle ne confonde pas, plus ou
moins, aumône et sainteté,
aumône et saint, - erreur positivement
contraire à ce qu'enseigne ici saint
Paul.
328. Quand
je livrerais mon corps pour
être brûlé, dit-il encore. -
Voilà qui atteint d'autres saints, ceux qui
ont dû au titre seul de martyrs l'honneur
d'être mis sur les autels. Or, il y en a une
foule; le nombre s'en accroît même tous
les jours, car tous les jours on expédie de
Rome quelque squelette de martyr, retrouvé
dans les catacombes. Ce martyr, comme nous l'avons
déjà dit (note
247),
on ignore souvent jusqu'à son nom, et le
pape lui en donne un au hasard; souvent aussi il
n'est pas du tout prouvé que ce martyr en
soit un. Mais, n'y eût-il aucun doute sur le
fait même du martyre, ce fait, selon saint
Paul, ne suffirait point à prouver la
sainteté. L'histoire est d'accord avec saint
Paul. S'il y a eu, dans les premiers temps de
l'Église, des martyrs dont la mort
n'était que le couronnement d'une vie toute
sainte, il y en eut aussi dont l'orgueil provoqua
souvent les justes reproches des Pères.
Souvent l'Église eut à se plaindre
d'hommes qui avaient affronté la mort, et
qui, ne l'ayant pas affrontée dans un esprit
suffisamment chrétien , ne trouvaient dans
le souvenir de leur courage, dans les éloges
qui leur étaient donnés, qu'un motif
pour mépriser leurs frères et se
mettre au-dessus de toute loi. Il y a donc dans la
divinisation du martyr en lui-même, pour
lui-même, quelque chose de charnel et de
grossièrement humain ; la sainte guerre de
la foi se trouve assimilée à nos
guerres ordinaires, où on fait un
héros de quiconque s'est bien battu, quelle
qu'ait été d'ailleurs sa vie. Une
Église chrétienne doit
apprécier autrement les héros du
christianisme.
Directions relatives à l'usage de certains dons, soit miraculeux, soit ordinaires.
329.
Versets 6, 9 et
19. Ainsi, mes Frères, si je venais parmi
vous parlant en langues (inconnues), en quoi vous
serais-je utile?.. Vous, de même, si vous ne
parlez pas une langue qui soit comprise, comment
saura-t-on ce que vous dites? J'aimerais mieux ne
prononcer dans l'Église que cinq paroles
selon mon intelligence, afin d'instruire aussi les
autres, que dix mille dans une langue
inconnue.
Quoique nous
manquions de
quelques-unes des données historiques qui
seraient nécessaires pour bien comprendre ce
chapitre, la leçon qui en sort est assez
claire: Paul veut que ce qui se dira dans les
assemblées chrétiennes puisse
être compris de tous. - C'est donc au
mépris de cet ordre que l'Église
romaine a adopté, dans son culte, une langue
morte, laquelle est nécessairement, soit
pour tous les assistants, soit pour presque tous,
une langue inconnue. Ajoutez que ceux mêmes
qui savent le latin comprennent souvent tout aussi
peu que ceux qui ne le savent pas. L'emploi d'une
langue non comprise a amené l'habitude de
parler bas, vite, confusément; ce n'est
qu'en suivant dans un livre les paroles du
prêtre, ou la traduction de ces paroles,
qu'on peut, et souvent ce n'est pas sans peine,
s'associer à ce qu'il dit.
Le latin n'a
été primitivement la langue de
l'Église que parce qu'il était la
langue de tout le monde; ne dites même pas
qu'il était la langue de l'Église,
mais de l'Église d'Occident, de
l'Église latine. Eut-on l'idée,
alors, de l'imposer aux peuples qui ne le parlaient
pas? Les Orientaux, de leur côté,
songèrent-ils à imposer le grec? Ils
auraient eu, pourtant, de bonnes raisons à
donner. Les apôtres avaient
prêché, avaient écrit en grec;
c'est en grec que le Nouveau Testament était
arrivé dans l'Occident. Si le christianisme
doit avoir une langue sainte, cette langue est le
grec, non le latin.
Mais que parlez-vous
de
langue sainte? L'universalité même de
christianisme n'est-elle pas un argument contre
l'unité de langage dont Rome a voulu le
doter? Ce n'est que dans les pays à castes,
chez les anciens Égyptiens, chez les
Hindous, que nous trouvons une langue
spéciale pour le culte et les prêtres.
Quand une religion s'annonce comme devant
appartenir à tous les peuples, et, dans
chaque peuple, à tout homme qui voudra se
l'approprier , - il est contradictoire à son
essence de la faire parler, où que ce soit,
dans une langue que tous n'entendent
pas.
Au reste, ce n'est
pas
par hasard que Rome se trouve ici en rapport avec
l'Égypte et l'Inde. Le latin dans le culte ,
c'est une barrière de plus entre le
clergé et le peuple , un
élément de plus dans la notion
sacerdotale substituée à celle du
ministère évangélique. Puis ,
en beaucoup de choses, le fond s'est
incorporé à la forme ; l'abandon du
latin compromettrait d'importantes portions de
l'édifice. Voyez la Messe. En
français, en anglais, en allemand ,
serait-ce encore la Messe? Garderait-elle son
prestige?
Ce qui opère la
transsubstantiation, ce sont les mots : Hoc est
corpus meum. Leur puissance magique ne passerait
pas facilement, aux yeux de la foule, dans les
quatre mots correspondants d'une langue moderne.
Voyez encore la Confession. Ce qui absout, c'est:
Ego te absolvo. Essayez de dire: «Je
t'absous,» et beaucoup de gens croiront moins
à votre pouvoir d'absoudre. Singulier
christianisme que celui qui tient, en tant de
choses, à quoi? A la langue en laquelle on
le fera s'exprimer!
Preuves de la résurrection de Jésus-Christ. Jésus ressuscité s'est montré d'abord à Pierre (note 99), puis à tous les apôtres, etc. Tous meurent en Adam ; tous revivront en Jésus-Christ. Enfin, Jésus remettra « le royaume » à Dieu son père, après avoir détruit « tout empire, toute domination et toute puissance... »
330. Verset
25. Car il
faut qu'il règne jusqu'à ce qu'il ait
mis tous ses ennemis sous ses
pieds.
Sous quelque forme
que
nous soit présenté, dans
l'Écriture, le règne de
Jésus-Christ, aucun détail, aucun mot
ne nous autorise à supposer que ce
règne ne doive pas être le sien,
strictement le sien, sans amoindrissement et sans
partage. L'idée de la royauté de sa
mère n'est pas seulement omise, introuvable
; il est encore impossible de trouver, dans
l'Écriture, une place où on puisse
introduire cette idée, un terrain, tant
borné soit-il, où on puisse
élever le prétendu trône de
Marie.
Versets 29
et suiv.
Sans la doctrine de la résurrection, plus
d'espérance, plus de courage. Explications
sur ce mystère. La mort vaincue.
331. Verset
57.
Grâces soient rendues à Dieu, qui nous
a donné la victoire par Jésus-Christ
notre Seigneur!
Encore une parole
peu
d'accord avec ce qui s'enseigne et se pratique dans
l'Église romaine, où la victoire sur
la mort, la grâce de bien mourir, est si
généralement demandée, non
à Jésus-Christ, mais aux saints et
surtout à la Vierge.
Toutes les grâces
spéciales que certaines congrégations
offrent à leurs affiliés mourants,
c'est Marie qui est supposée les leur
procurer ; toutes les morts pieuses, c'est à
elle qu'on en rend grâces. Marie attend, au
delà du tombeau, quiconque aura
espéré en elle, quiconque,
après n'importe quelle vie, se sera
tourné un moment vers elle.
C'est à elle qu'on
recommande tous ceux que leur état expose
à mourir sans préparation, les
soldats, les marins. Un peu de foi en Marie, ou,
moins encore, une médaille au cou avec
l'image de Marie , et, à quelque heure ou
sous quelque forme que la mort les surprenne, le
ciel s'ouvrira devant eux.
Autant de gens , par
conséquent, qui ne se joignent pas à
l'exclamation de l'apôtre, et qui, n'ayant
rien demandé à Jésus-Christ,
ne lui rendent grâces de rien ; autant de
gens à qui on enseigne à mourir sans
passer par la seule voie de salut que saint Paul
ait connue et que Dieu nous ait
révélée.
Collecte à
faire
pour les chrétiens de Jérusalem.
L'apôtre se propose d'aller voir ceux de
Corinthe. Exhortations; salutations.
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