Les sacrificateurs tiennent conseil contre Jésus. Judas forme le projet de le livrer. Il ordonne de préparer le repas de la Pâque. Il se met à table avec ses disciples.
80. Verset
26. Or,
pendant qu'ils mangeaient, Jésus prit du
pain, et, ayant rendu grâces
(01),
le
rompit et dit:
Prenez, mangez; ceci est mon corps.
Comme nous aurons à
revenir plusieurs fois sur la question que ces
derniers mots soulèvent, nous ne placerons
ici que quelques observations.
La
transsubstantiation,
nous dit-on, est un miracle. Qu'importe, dès
lors, que nous ne la comprenions pas? Tout est
possible à Dieu.
Oui; mais Dieu ne
fait
pas tout ce qui lui serait possible. La
possibilité d'une chose ne prouve rien ; il
faut toujours prouver encore que celui qui peut la
faire veut la faire, et qu'elle a réellement
lieu.
Allons plus loin. La
possibilité, dans le présent cas,
existe-t-elle ? Est-il vrai que tout soit possible
à Dieu?
Non. Il y a des
choses
que Dieu ne pourrait vouloir sans cesser
d'être raisonnable et sage , sans cesser
d'être Dieu.
Peut-il vouloir,
peut-il
faire qu'une chose soit et ne soit pas ? Qu'un
événement passé soit encore
à venir ? Peut-il créer un
carré qui soit rond, un cercle qui ne soit
pas rond?
Or, entre ces
impossibilités-là et celles qui
abondent dans la doctrine de la
transsubstantiation, nous défions qu'on
établisse une différence
réelle. Votre raison ne s'accommode pas
mieux d'un corps présent en deux endroits
que d'un carré qui ne serait pas
carré, d'un cercle qui ne serait pas rond,
d'un événement passé qui
serait encore à venir.
L'invraisemblance
n'eût jamais été plus
énorme qu'au moment même de
l'institution de la Cène; c'est
Jésus, en chair et en os, Jésus,
assis au milieu de ses apôtres, qui
tiendrait, qui romprait, sous leurs yeux, son
propre corps. Eux , cependant, toujours si lents
à croire, si prompts à
s'étonner, comment se fait-il, ici, qu'ils
n'aient pas l'air d'avoir rien vu ni rien entendu
qui les surprenne? Une seule explication est
possible : c'est qu'ils ont compris
figurément, spirituellement.
Celui qui vient de
leur
dire: « Ceci est mon corps, » c'est celui
qu'ils ont entendu cent fois, mille fois, parler en
figures; c'est celui qui leur a dit un jour :
«Je suis le chemin ;» un autre jour :
« Je suis le cep ; » un autre jour,
parlant de sa mort et de sa résurrection:
«Détruisez ce temple, et je le
rebâtirai en trois jours.»
Quand Jésus ne les
aurait pas habitués à l'entendre
parler figurément, ils n'auraient encore
aucune peine a apercevoir là une figure.
Hébreux et Grecs n'employaient-ils pas
constamment être dans le sens de
représenter (02)?
Jésus
ne
dira-t-il pas, l'instant d'après : «
Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang
(03)?»
Voilà
pourquoi leur raison ne s'offense
point de lui entendre dire qu'un morceau de pain
est son corps ; voilà où la
vôtre doit chercher l'explication de ces
mots.
La raison n'a rien
à faire ici, dira-t-on.
Entendons-nous. Ce
qui
lui est seulement supérieur , il petit
arriver, en effet, qu'elle n'ait rien à y
voir ; ce qui lui est contraire, jamais vous ne lui
ôterez le droit de le rejeter, car c'est un
droit qu'elle garde forcément et qu'elle
exerce malgré elle, comme l'oeil celui de
voir et l'oreille celui d'entendre, aussi
longtemps, du moins, que l'organe n'est pas
détruit. La transsubstantiation n'est-elle
que supérieure à la raison? Non. Que
ceux qui y croient se demandent de quelle
manière ils y croient, et ils verront que ce
n'est pas d'une simple croyance, comme, par
exemple, aux miracles racontés dans les
Évangiles, mais en refoulant leur raison, en
s'exaltant ou en s'étourdissant. Il y aura
éternellement contradiction dans
l'idée d'un corps toujours le même, et
présent, tout entier, dans plusieurs
endroits à la fois.
Aussi le
catholicisme
moderne cherche-t-il souvent à voiler,
à spiritualiser cette doctrine. Quand donc
nous aurons à la combattre,
commençons toujours par la ramener à
ses véritables termes , à ceux du
concile de Trente.
Le décret (session
XIII) porte : «Anathème à qui
niera que le corps et le sang de
Jésus-Christ, avec son âme et sa
divinité, soit contenu véritablement,
réellement et substantiellement dans
l'Eucharistie. Anathème à qui niera
le changement de toute la substance du pain au
corps de Jésus-Christ, et de toute la
substance du vin au sang de Jésus-Christ.
»
Et le concile, dans
les
considérants, ajoute que « C'est un
attentat intolérable » d'introduire sur
ce point « des explications
métaphoriques, » et de ne pas enseigner
la présence de Jésus-Christ dans la
Cène comme réelle, corporelle,
matérielle.
Voilà ce que
l'Église romaine a tiré des mots :
« Ceci est mon corps;» voilà ce
que tout catholique, sous peine d'anathème,
est tenu de croire. Aussi en est-il un grand nombre
dont la foi en ce dogme ne subsiste que grâce
aux ménagements avec lesquels on le leur a
prêché, ou aux adoucissements qu'ils y
ont introduits eux-mêmes afin de pouvoir y
croire. Ceux-là, il suffira de leur bien
montrer ce que c'est, ce qu'ils ont à
croire, et certainement ils ne croiront
plus.
Ceux qui
persisteraient
malgré l'exposé de la doctrine,
montrez-leur où elle mène ;
montrez-leur ce qu'ils s'engagent à croire,
une fois le principe admis.
Ils s'engagent à
croire que le corps de Jésus-Christ est tout
entier dans chaque fragment d'hostie, tellement que
si, par mégarde, on casse l'hostie en la
recevant, on a Jésus-Christ dans la bouche
autant de fois qu'il y a de morceaux.
Ils s'engagent à
croire que le corps de Jésus-Christ est tout
entier dans chaque goutte du vin contenu dans le
calice, tellement que , si une goutte tombe, c'est
Jésus-Christ qui est là, sur la nappe
ou sur le sol.
Ils s'engagent à
croire que, une fois l'hostie consacrée, le
miraculeux pouvoir du prêtre appartient au
premier venu , vu que le premier venu peut, en
coupant l'hostie, reproduire autant de Jésus
qu'il lui plaira.
Ils s'engagent à
croire qu'un animal qui mangera l'hostie, mangera
le corps de Jésus-Christ.
Ils s'engagent à
croire que le corps de Jésus-Christ,
«avec son âme et sa divinité,
» comme dit le concile de Trente, subsiste
dans une hostie desséchée, moisie,
corrompue.
Ils s'engagent à
croire qu'un prêtre peut changer en corps et
sang de Jésus-Christ, non seulement une
hostie ou mille hosties, non seulement le vin d'un
petit ou d'un grand calice, mais tout le pain qui
sera chez un boulanger, tout un tonneau de vin,
tout le vin qui sera dans une cave. Et en effet, si
le pouvoir existe, où est la limite à
ce pouvoir?
Ces cas, et beaucoup
d'autres que nous pourrions énumérer,
qu'on ne se figure pas que nous les inventons. Ce
sont les théologiens romains qui les ont
indiqués comme autant de conséquences
de la transsubstantiation ; vous les trouverez dans
tous leurs livres , d'Innocent III à
Bellarmin , et de Bellarmin aux modernes. Ainsi,
quiconque ne croira pas à ce que nous venons
de dire, à tout ce que nous venons de dire,
ne croit pas réellement à ce
dogme.
Avant de le
soutenir,
qu'on se demande bien si on aura le courage de le
soutenir jusque-là ; si on ne le soutient
pas jusque-là, autant vaut, dès
l'abord , ne le pas soutenir du tout.
Mais nous aurons à
reprendre tous ces points.
81. Verset
27. De
même, ayant pris la coupe et rendu
grâces, il la leur donna , en disant:
Buvez-en tous.
Tous. Ce mot ne
semble-t-il
pas avoir été ajouté par
Jésus-Christ pour ôter d'avance toute
excuse à l'usage romain de refuser le vin
aux communiants? Au verset précédent,
parlant du pain, il ne dit que :
«Mangez.» Ici, parlant du vin
«Buvez-en tous. »
On a répondu que
les apôtres n'étaient pas des
communiants ordinaires.
Qu'on s'arrange
alors
avec saint Paul, qui parle à tous (1 Cor.
XI) du vin comme du pain.
Qu'on s'arrange avec
l'histoire, qui nous montre les deux espèces
reçues par tous durant des siècles,
puis, longtemps encore, par quiconque les
demandait, et ne cessant définitivement de
l'être qu'en 1120.
Qu'on s'arrange avec
le
concile de Constance, qui (Session XIII) avoue
positivement le fait;
Qu'on s'arrange avec
le
concile de Trente, moins franc, et reconnaissant
pourtant (Session XXI) que cette forme de communion
« n'était pas rare » aux premiers
siècles.
Les Églises qui
l'emploient n'ont donc fait que la renouveler, et
c'est se jouer de l'histoire , comme de
l'Écriture, que de les accuser d'avoir
innové sur ce point.
On cherche des
raisons
d'ordre, de décence. Qu'adviendrait-il,
dit-on, si le vin était offert à la
foule ?- La foule ferait ce qu'elle fait dans les
Églises où il lui est offert , et
où il est sans exemple qu'un communiant
fasse plus que de tremper ses lèvres dans la
coupe commune.- Voir note 323.
82. Verset
29. Or je
vous dis que désormais je ne boirai plus de
ce fruit de la vigne, jusqu'à ce jour auquel
je le boirai nouveau, avec vous, dans le royaume de
mon Père.
Si le vin a été
changé en sang, pourquoi ces mots :
«Fruit de la vigne?» Au moment même
où Jésus viendrait d'enseigner que ce
vin n'est plus du vin, voilà le vin qui
revient avec une mention précise de
l'origine et de la nature du liquide; Jésus
n'indique plus que du vin, rigoureusement du vin.
Avouez que vous trouveriez bien étrange
qu'un prêtre appelât le vin «
fruit de la vigne » au moment même
où il va le boire en qualité de sang
de Jésus-Christ.
Remarquez encore ces
mots: « Jusqu'à ce jour auquel je le
boirai nouveau, » car c'est là ce que
dit le texte grec, et non pas « où je
le boirai de nouveau, » comme on a souvent
traduit. Dans le royaume de son père , il le
boira nouveau, dit-il, nouveau dans le sens
où tout doit l'être alors,
c'est-à-dire changé,
spiritualisé, divinisé l'union entre
lui et ses apôtres, l'union encore
grossière de la Cène terrestre, se
changera en une union intime, divine.
Mais si le vin
renferme
déjà, avec le sang de
Jésus-Christ, son âme et sa
divinité, comme dit le concile de Trente,
qu'est-ce qu'il pourrait renfermer de plus dans le
ciel? En quel sens serait-il question de le boire
alors nouveau?
Tout donc nous
ramène au sens naturel. Le vin que
Jésus offre aux apôtres, c'est du vin.
Emblème de l'union parmi les hommes , la
coupe devient, entre ses mains et dans la
perspective de son sacrifice adorable,
l'emblème de leur union avec lui ,
imparfaite d'abord sur cette terre , et parfaite
ensuite dans le ciel.
Versets 30
et suiv. -
Jésus prédit le reniement de saint
Pierre. Il se rend en Gethsémané. Ses
angoisses. Judas arrive avec ceux qui doivent le
saisir. Pierre veut résister. Jésus
le lui défend.
83. Verset
54. Comment
donc s'accompliraient les Écritures, qui
disent qu'il faut que cela arrive ainsi?
Jésus n'avait pas
besoin des prophéties pour savoir les
desseins de Dieu ; il n'avait pas besoin non plus
d'être lié par elles pour accomplir la
volonté de son Père. Si donc il se
représente toujours comme obéissant
aux Écritures, comme lié par leurs
déclarations, c'est uniquement en vue des
hommes , et pour les leur rendre plus
sacrées. La Bible s'étant
complétée de livres
spécialement chrétiens,
placés, dès lors, sur le même
pied que les autres, nous avons le droit d'exiger
de tout docteur, de toute Église, que, selon
l'exemple donné, par Jésus-Christ,
l'accomplissement des Écritures soit leur
but, leur règle, leur tout. Personne
au-dessus ; personne en dehors.
Versets 51
et suiv.-
Jésus chez Caïphe. Reniement de saint
Pierre.
Jésus est conduit à Pilate. Désespoir et mort de Judas.
84 . Verset
Et s'en
étant allé, il se pendit.
Ce Judas qui trahit soit
Maître, qui couronne son crime par un autre
crime, le suicide, ce Judas, enfin , dont le nom
même est devenu une injure, il avait eu part,
comme apôtre, à toutes les promesses
de Jésus ; il avait été, comme
ses collègues, en pleine possession des
droits d'apôtre.
Rien de plus
concluant,
par conséquent, contre la prétention
d'attribuer à certaines paroles du Sauveur
un effet infaillible, indélébile,
indépendant des temps et des
personnes.
Si les promesses
faites
aux apôtres n'ont pas empêché un
apôtre de devenir ce qu'est devenu Judas, les
promesses faites à l'Église ne
peuvent pas empêcher une Église de
dégénérer, d'errer, de tomber.
« Ne vous ai-je pas choisis tous les douze ?
Et cependant l'un de vous est un démon.
» Voilà ce qu'avait dit un jour
Jésus (Jean VI, 70).
Si un des apôtres ,
choisi par le Sauveur lui-même, a perdu
cependant les droits et la qualité
d'apôtre , il est inadmissible qu'un de leurs
successeurs, choisi par des hommes faillibles, soit
nécessairement en possession de ces droits;
il est inadmissible que des promesses qui ne se
réalisèrent pas en Judas, un des
apôtres, doivent nécessairement se
réaliser en d'autres hommes, leurs
successeurs.
Versets Il
et suiv.-
Jésus devant Pilate. La crucifixion.
Plusieurs femmes y assistent de loin.
85. Verset
56. Entre
autres... Marie, mère de Jacques et de
Joses.
Voici le seul passage
sur
lequel on ait pu essayer d'établir que les
frères de Jésus n'étaient que
ses cousins. Cette même Marie étant
désignée ailleurs comme la soeur de
la mère de Jésus, et ces deux
mêmes noms, Jacques et Joses, se trouvant
parmi les quatre indiqués (Matth. XIII)
comme ceux des frères de Jésus, on a
cru pouvoir conclure qu'il s'agissait des deux
mêmes personnages, et que les quatre noms,
par conséquent, étaient ceux de
cousins de Jésus-Christ.
L'identité des
noms prouve-t-elle ici celle des personnes ? Deux
frères de Jésus, deux sur quatre,
n'ont-ils pas pu s'appeler comme deux de ses
cousins? Remarquez que ce fait, très
possible et très ordinaire chez nous,
l'était plus encore chez les Juifs, vu le
très petit nombre de noms en usage chez
eux.
Vous avez, ici
même, deux soeurs s'appelant Marie. Vous
avez, parmi les apôtres, deux Simon, deux
Jacques, deux Judas, car Jude et Judas sont le
même mot en hébreu. Vous avez, sans
sortir de l'histoire de Jésus-Christ et des
apôtres, d'autres Marie encore, d'autres
Simon, d'autres Judas. De grands travaux ont
été faits sur l'histoire des Jacques,
et les savants catholiques ne sont pas mieux
arrivés que d'autres à
l'éclaircir définitivement, ni
même à se mettre d'accord.
Une seule chose est
claire, et nous l'avons déjà dite,
cette chose: c'est que les
Évangélistes n'ont pas en la
pensée qu'on dût un jour
s'inquiéter de ces détails.
Considérez, d'un côté,
l'importance qu'on donne à la question, et,
de l'autre, la nécessité où
l'on est de se prendre à un fragment de
verset, à un petit incident de récit,
à deux noms, enfin, qui ne prouvent rien,
puisqu'ils peuvent tout aussi bien avoir
été portés par quatre
personnes que par deux. Voilà à quel
imperceptible fil on est obligé de rattacher
un dogme qu'on dit si grave, et ce fil même,
vous le voyez, ne tient pas.
La résurrection. Jésus apparaît aux saintes femmes, puis aux onze apôtres. Il les charge traiter instruire et baptiser toutes les nations.
86. Verset
20. -... et
voici, je suis tous les jours avec vous,
jusqu'à la consommation des
siècles.
Ce passage, dont on a
tiré tant de choses, ne dit
réellement rien de plus que ceux dont nous
avons pris note pour nous en servir
maintenant.
S'il ne peut pas
être vrai à la lettre (note
17)
que quiconque demande reçoit : S'il ne peut
pas être vrai à la lettre
(note
53)
que, si deux personnes s'unissent pour demander une
chose, elle leur sera accordée,
S'il ne peut pas
être vrai à la lettre (note
54)
que, dès que deux ou trois personnes seront
assemblées en son nom, Jésus sera au
milieu d'elles pour les préserver de tout
mal, de toute erreur ;
Si un apôtre,
choisi par Jésus lui-même ,
héritier comme les onze autres de tout ce
qui leur était promis, a pu (note
84) n'en rien
garder,
tomber au-dessous de rien ;
S'il y a, en un mot
,
dans l'Évangile, des promesses qui n'ont
évidemment pas été faites
comme devant s'accomplir nécessairement ,
infailliblement, rien ne prouve que cette nouvelle
promesse ait été d'une autre nature,
et qu'elle ait dû infailliblement
s'accomplir.
Remarquez même que
les termes en sont notablement plus vagues; c'est
de conséquence en conséquence qu'on
arrive à ce que l'Église romaine veut
y voir. «Les apôtres, nous dit-on, ne
devaient pas vivre jusqu'à la consommation
des siècles, donc Jésus, par ces
mots, désigne leurs successeurs. Les
apôtres étaient en possession de la
vérité ; donc, si Jésus est
avec eux, ce qui veut dire avec leurs successeurs,
c'est pour que la vérité ne
s'altère jamais entre leurs mains,- et
voilà l'Église infaillible.
»
Avec ces
procédés-là, on va loin. Il
est vrai qu'il faudrait prouver encore que cette
Église est l'Église romaine ; mais,
sur ce point, Rome n'a pas même l'air de
penser qu'il faille prouver. L'Église, c'est
elle, et tout est dit.
Que dirons-nous
donc,
nous , de cette promesse ?
Ce que nous avons
dit de
toutes les promesses analogues. Prenez-la dans son
esprit, et voilà un magnifique encouragement
aux apôtres, à tous ceux qui
travailleront avec eux ou après eux,
à tous les fidèles, enfin -
Jésus avec eux dans leurs travaux, dans
leurs épreuves, toujours,
partout.
Mais si vous voulez
préciser, si vous voulez dire exactement ce
que Jésus a promis, si vous voulez mettre un
système là où il n'a mis que
son amour,- alors, plus de limite aux
prétentions que vous baserez
là-dessus, mais, aussi, plus de fondement
raisonnable à votre confiance en la
promesse. Vous en changez la nature; vous lui
faites dire ce que n'a dit aucune des promesses
analogues , ce que les faits n'ont montré en
aucune d'elles.
Encore une remarque,
déjà faite (note
45) ,
et non moins frappante ici.
Si «Je suis avec
vous » implique cette assistance
régulière, miraculeuse, dont
l'Église romaine se dit favorisée,-
cette assistance se bornera-t-elle au dogme? Non.
Jésus avec nous suppose la vertu aussi bien
que la vérité si je dis à un
homme: « Jésus soit avec toi,» il
est clair que je lui souhaite d'être bon tout
autant que d'avoir une foi exacte et
pure.
Dans l'Église
romaine, l'histoire vous condamne à
séparer ces deux choses; il faut que
«Je suis avec vous » se soit accompli,
quant au dogme, dans des temps où il ne
s'accomplissait évidemment plus en tout le
reste : il faut que Jésus ait
été avec Alexandre VI, pape, quand ce
même Alexandre VI, homme, était un
scélérat. Encore une fois, sur quoi
basez-vous cette distinction ? Quelle trace, quel
germe en montrerez-vous dans la promesse? Où
a-t-on vu que «Je suis avec vous»
implique assistance en fait de dogmes quand il n'y
aura plus assistance en autres choses?
Si la promesse, par
la
perversité des hommes, est restée
souvent, en grande moitié, sans
accomplissement, comment prouver que l'autre
moitié a dû s'accomplir
toujours?
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