Jésus défend d'étaler ses bonnes oeuvres; que la main gauche ignore ce que fait la droite.
12. Verset
5. De
même, quand vous priez, ne faites pas comme
les hypocrites, qui aiment à prier debout
dans les synagogues et au coin des rues, pour
être vus des hommes.
Une Église a donc tort quand elle multiplie ces manifestations extérieures qui peuvent toujours devenir hypocrisie ou formalisme. Ainsi, dans la piété individuelle, point de formes apparentes : « Entrez dans votre cabinet, dit Jésus au verset suivant, et fermez-en la porte.» Dans la piété publique, point d'autres formes que ce qui sera nécessaire pour constituer un culte en commun. C'est ce qui eut lieu dans la primitive Église.
13. Verset
7. Quand
vous priez, n'usez pas de redites, comme font les
païens, qui s'imaginent que c'est par la
multitude des paroles qu'ils seront
exaucés.
Que penserez-vous,
après cela, de ceux qui
répètent dix fois, vingt fois, cent
fois la même prière? Que penserez-vous
du chapelet, héritage de ces païens
auxquels Jésus nous défend ici de
ressembler ?
Quand nous ne
lirions pas
cette défense, le bon sens dirait encore
assez que ces prières
répétées deviennent
nécessairement machinales, et ne peuvent
plus, par conséquent, ni plaire à
Dieu, ni opérer en nous une sanctification
réelle.
Les versions
catholiques
adoucissent ce passage, condamnation trop claire
des redites romaines.La
Vulgate met : «Gardez-vous, en
priant, de parler beaucoup.»
(Orantes, nolite multum loqui.)
- Falsification incontestable, car le mot grec n'a
jamais eu d'autre sens que répéter,
redire, et se prend toujours en mauvaise
part.
14. Versets
9 et suiv,
Vous donc, priez ainsi: Notre Père qui est
aux cieux... etc.
A. L'Oraison
Dominicale doit être
considérée plutôt comme un
modèle de prière que comme une
formule; Jésus, après ce qui
précède, ne peut pas avoir voulu dire
qu'il fallait s'en tenir à réciter
ces quelques mots, ni, surtout, qu'il fallait les
réciter plusieurs fois de suite.
N'est-il pas
singulier
qu'une prière dont on a tant abusé,
dans l'Église romaine, en
répétitions machinales, soit
précisément celle que Jésus
nous indique au moment où il vient de
condamner ces
répétitions?
Le chrétien doit
tendre à pouvoir prier sans formules ; il
peut s'en aider quelquefois, mais pour arriver
à s'en passer. Qu'il redise tous les jours
l'Oraison Dominicale, mais pour en prendre l'esprit
, et pour la développer , dans son coeur,
selon ses besoins du moment.
B. Quant
aux redites imposées,
dans la confession , comme pénitences, elles
ne sont pas condamnables seulement comme redites ,
mais comme faussant la notion même de la
prière chrétienne.
Partout, en effet, dans l'Écriture, la prière nous est représentée comme un privilège et un bonheur; si elle devient une pénitence, elle n'est plus ni l'un ni l'autre. Ajoutez que, dans ce cas, le fidèle est encore plus inévitablement conduit à attribuer aux redites une valeur, une vertu. Chaque Pater, chaque Ave est comme une pièce de monnaie concourant à former la somme requise pour racheter telle ou telle faute ; chaque ligne, chaque mot a sa valeur, dont Dieu tient compte, et on se croira consciencieux si on ajoute un ou deux Pater sur le tout pour être sûr que la somme y est bien.
15. Verset
16. Et
quand vous jeûnez, ne prenez pas un air
triste, comme font les hypocrites, qui affectent de
se montrer avec un visage abattu, afin qu'on voie
qu'ils jeûnent.
Mêmes remarques que sur
la prière (note
12). Tout ce qui
n'est pas culte public doit rester entre l'homme et
Dieu. Les formes extérieures de la
contrition du coeur ne sont pas toujours de
l'hypocrisie, sans doute, mais risquent toujours de
l'être ; elles risquent toujours aussi de
tromper ceux qui en usent.
Parce qu'on a les
formes,
on croit avoir le fond , et on ne songe plus
à se demander si on l'a.
Jésus ne condamne
pas le jeûne en soi ; mais il y a loin de
là au système romain des abstinences,
sur lequel nous aurons à revenir.
16. Versets
19, 21 et
55. Ne vous amassez pas des trésors sur la
terre... car où est votre trésor,
là aussi sera votre coeur... Cherchez avant
tout le royaume de Dieu et sa justice...
L'histoire ne nous
fournirait
que trop de quoi tourner tout cela contre
l'Église romaine.
Elle a acquis,
partout
où elle l'a pu, des richesses immenses; elle
a souvent cherché bien moins « le
royaume de Dieu et sa justice» que le maintien
et l'accroissement sans fin de ses
privilèges terrestres ; elle a dormi, durant
plus (le mille ans, dans toutes les corruptions de
l'opulence, et, telle elle était au
seizième siècle, telle elle est
encore, ou à peu près , dans les pays
où son opulence a
subsisté.
Quant au rôle de
l'argent dans l'Église romaine , comme prix
des indulgences, des messes, des dispensés ,
etc. , nous en parlerons ailleurs.
Fin du discours sur la montagne. - La paille et la poutre. La prière. Demandez et vous recevrez.
17. Verset
8. Car
quiconque demande, reçoit...
A.
Jésus semble promettre que
toute prière sera exaucée, et il est
évident que ce n'est pas là ce qu'il
veut dire.
Notez donc ceci
comme
exemple de promesses que le bon sens et
l'expérience ne permettent pas de prendre
à la lettre. Cette observation nous sera
utile plus tard (note
86).
B.
Au milieu de tous ces conseils sur
la prière, remarquez bien qu'il n'est rien
dit de l'invocation des saints , et vous allez voir
que Jésus-Christ n'en parle pas plus
ailleurs qu'ici.
Jamais il ne vous
parlera
que d'invoquer Dieu , Dieu seul ; il vous indiquera
un seul intercesseur, un seul avocat auprès
de Dieu , et, cet avocat, ce sera lui-même.
Les apôtres, dans leurs épîtres,
ne vous diront rien d'autre ni rien de plus.
18. Verset
13. Entrez
par la porte étroite...
Est-ce une porte
étroite que celle qu'on ouvre aux
fidèles, dans l'Église romaine, avec
ces mille moyens d'arriver au ciel a bon
marché?
Les indulgences sont
de
plus en plus prodiguées; on peut en faire,
presque pour rien, des provisions énormes.
L'absolution se donne à qui la veut, et
aussi souvent qu'on veut.
Beaucoup de
congrégations sont des espèces de
sociétés d'assurance, qui, pour une
prime modique, vous garantissent contre les chances
de damnation.
L'Église romaine
sait faire, au nom du ciel, de terribles menaces ;
mais elle ne les fait que pour qu'on recoure
à elle, et, du moment que vous vous mettez
entre ses mains, toute
sévérité s'évanouit :
la porte est ouverte à deux battants.
19. Versets
22 et 25.
Plusieurs me diront, en ce jour-là :
Seigneur, Seigneur, n'avons nous pas
prophétisé en ton nom? N'avons-nous
pas chassé les démons en ton nom, et
n'avons-nous pas fait plusieurs miracles en ton
nom? Alors je leur dirai ouvertement: Je ne vous ai
jamais connus. Retirez-vous dé moi, vous qui
faites des oeuvres d'iniquité.
Que sera-ce donc si, au
nombre de ces «oeuvres d'iniquité,
» se trouvent de faux miracles,
fabriqués pour tromper les
peuples?
Même de vrais
miracles, vous dit Jésus, ne prouveraient
pas nécessairement la sainteté de
ceux qui auraient reçu le don d'en faire.
Mais l'Église romaine l'a-t-elle
reçu, ce don? Qui est-ce qui croit, parmi
ses chefs, à ces grossiers mensonges de
Rimini et de la Sallette?
Et cependant ils
font
tout pour qu'on y croie ; et le pape laisse faire,
prêt à en décréter
l'authenticité un jour (01),
comme il a
décrété, lui ou ses
prédécesseurs, celle de tant d'autres
légendes. Reconnaissez l'arbre à ses
fruits.. Une Église qui aurait ses racines
dans le vrai aurait horreur de semblables
moyens.
Versets 24
et suiv. -
Écouter Jésus-Christ, mettre ses
paroles en pratique, c'est bâtir sur le
roc.
20. Verset
26. Mais
quiconque entend mes paroles, et ne les met pas en
pratique, est semblable à un homme
insensé qui a bâti sa maison sur le
sable.
Bâtissez donc votre
christianisme sur les paroles de
Jésus-Christ, seul rocher ; tout le reste
est sable. Les traditions qui ne se justifient pas
par l'Écriture, c'est du sable;
l'autorité d'une Église qui se croit
quelque chose indépendamment de
l'Écriture, c'est du sable.
Lire les
Évangiles, c'est revivre dix-huit
siècles en arrière; c'est entendre,
comme les hommes d'alors, la voix de
Jésus-Christ. Mais, comme alors, chaque
parole entendue crée pour nous un devoir,
celui de la « mettre en pratique. » Quand
donc une de ces paroles vous amène à
reconnaître la fausseté de quelque
enseignement dont on vous avait nourri, - le seul
moyen de la « mettre en pratique». et de
ne pas imiter cet « insensé » dont
parlait Jésus-Christ, c'est de rejeter
franchement l'idée fausse, d'embrasser
franchement la vraie , de quitter courageusement le
sable pour le rocher.
Guérison d'un lépreux et du serviteur d'un centenier.
21. Verset
14.
Jésus entra ensuite dans la maison de
Pierre, dont la belle-mère était au
lit, et avait la fièvre.
La belle-mère de
Pierre. Pierre était donc
marié.
L'Église romaine a
fait des saints et des saintes de tous les
personnages du Nouveau Testament, y compris le
père et la mère de Marie , dont les
Évangélistes ne disent pas un mot ;
mais, la femme de saint Pierre, on se garde bien
d'en parler.
Saint Paul nous la
montre
pourtant (I Cor. IX, 5) accompagnant Pierre dans
ses voyages; ce seul fait, en tout autre cas,
aurait suffi pour qu'on lui donnât la
première place parmi les femmes de
l'âge apostolique. Mais le fait, comme la
personne, a été laissé dans
l'ombre,- et l'Église romaine
anathématise ceux qui , en abolissant le
célibat ecclésiastique , n'ont fait
que rétablir ce qui fut permis aux
apôtres, ce que les apôtres permirent
aux pasteurs de la primitive Église, ce qui
ne fut interdit que bien longtemps
après.
Versets 46
et suiv. -
Guérisons diverses. Jésus marchant
sur les eaux. Guérison de deux
possédés.
On apporte un paralytique à Jésus. Jésus lui dit : « Tes péchés te sont pardonnés. à Ces paroles scandalisent les Juifs. « Lequel est le plus aisé, répond Jésus, ou de dire à cet homme : Tes péchés te sont pardonnés, ou de lui dire : Lève-toi, et marche ?
22. Verset
6. Or, afin
que vous sachiez que le Fils de l'homme a, sur la
terre, le pouvoir de remettre les
péchés : Lève-toi, dit-il
alors au paralytique, emporte ton lit, et va-t-en
dans ta maison.
Les Juifs, croyant
Jésus un simple homme et l'entendant
remettre les péchés, l'accusent de
blasphémer; le droit de pardonner les
péchés n'appartient qu'à Dieu,
pensent-ils, et ils ont raison.
Comment Jésus leur
prouve-t-il que ce droit est entre ses mains? Par
la guérison du paralytique. Forcés de
croire an miracle visible , ils pourront croire ,
alors , au miracle intérieur.- Quand votre
confesseur vous offrira des preuves de ce genre,
alors vous pourrez croire aux absolutions qu'il
prononce.
Versets 9
et suiv. -
Vocation de Matthieu. Les pharisiens se
scandalisent de voir Jésus avec des
publicains. Instruction donnée aux disciples
de Jean-Baptiste. Guérison d'une femme.
Résurrection de la fille de Jaïrus.
Autres guérisons.
23. Verset
56. Et
voyant tout ce peuple, il fut ému de
compassion envers eux, de ce qu'ils étaient
misérables et errants comme des brebis qui
n'ont point de berger.
L'organisation visible
de
l'Église juive était cependant encore
intacte; l'autorité hiérarchique de
ses chefs et de ses docteurs était
incontestable, incontestée. Une
Église peut donc avoir tout cela , et
n'être plus, devant Dieu, ni vivante, ni
sainte.
Ainsi, quand la
hiérarchie romaine pourrait, comme la
hiérarchie juive, se dire établie de
Dieu, et quand la succession apostolique
résiderait incontestablement chez elle, elle
pourrait encore n'avoir que la forme sans le fond,
ne posséder que l'autorité
légale et nullement la
vérité.
24. Verset
2. Voici
les noms des douze apôtres. Le premier,
Simon, qui est appelé Pierre...
Le premier. Le grec met
Premier, sans article ; c'est donc moins un titre
donné qu'un mot ouvrant simplement la liste,
et synonyme de Premièrement. Marc (III, 16)
et Lue (VI, 14) donnent la liste et omettent ce
mot. Jean ne la donne pas.
Reste donc pourtant
que
Matthieu, Marc et Luc, donnant la liste des
apôtres , mettent saint Pierre en tête.
Quelle est la portée de ce fait?
Nous aurons souvent
à revenir sur tout ce qui tient à
saint Pierre. Contentons-nous, ici, d'une
observation générale.
La primauté de
rôle et la primauté d'autorité
, d'autorité légale et officielle,
peuvent être et sont en effet souvent deux
choses très différentes.
La première
n'implique point nécessairement la seconde,
pas plus que la seconde ne produit
nécessairement la première. Vous
pouvez, avec une grande autorité officielle,
ne jouer qu'un petit rôle; vous pouvez jouer
un grand rôle, et n'être,
officiellement, rien de plus que ceux qui vous
entourent.
Pierre a-t-il eu la
primauté de rôle? - Sur ce point
déjà, nous le verrons, il y aurait
bien des distinctions à faire. Si cette
primauté est, dans certains cas,
incontestable, elle s'efface dans beaucoup
d'autres; si elle est plus saillante pendant la vie
de Jésus-Christ et immédiatement
après, elle disparaît ensuite,
c'est-à-dire au moment où les
progrès du christianisme et la
multiplication des Églises auraient
dû, au contraire , la mettre plus en vue.
Saint Pierre s'efface devant saint Paul, non pas
à demi, mais totalement.
Mais restons, si on
veut,
dans la période où saint Pierre a la
primauté de rôle. Cette
primauté, telle qu'il l'exerce,
suppose-t-elle la primauté de rang?- Toute
la question est là. Si nous montrons qu'il
n'a rien fait ni rien dit qui ne rentre dans la
primauté de rôle, qui ne s'explique
par son zèle, par son caractère
ardent, par le relief que lui donnèrent
certaines circonstances, par sa chute
éclatante, par le besoin de la
réparer, par l'ascendant que cette chute
même, une fois réparée, donnait
à sa prédication, si, dis-je, nous
montrons cela, la primauté d'autorité
n'est déjà plus qu'une supposition
que rien ne nécessite.
Alors, s'il se
trouve des
cas où cette primauté devrait
apparaître clairement, et cependant
n'apparaît point; si saint Pierre,
après avoir été le premier
dans certains cas où il n'y avait pas lieu
à exercer une autorité officielle, se
trouve ne plus l'être dans des cas où
le chef de l'Église l'aurait
été naturellement,
nécessairement, alors, dis-je, la
supposition ci-dessus n'est pas seulement inutile,
mais sans fondement, mais fausse.
Voilà notre route
tracée, et les faits viendront s'y placer
d'eux-mêmes.
Versets 5
et suiv.
instructions diverses données aux
apôtres. Qu'ils prêchent,
guérissent, etc.
25. Verset
8. Vous
avez reçu gratuitement donnez
gratuitement.
L'Église romaine
a-t-elle obéi à ce précepte?
Il est vrai que Jésus, au verset 10, ajoute
que «l'ouvrier mérite sa nourriture;
» mais il y a loin de là à ces
tarifs où toutes les choses saintes sont
cotées, et l'Église romaine a
été blâmée, sur ce
point, par beaucoup de ses meilleurs amis.
Versets 11
et suiv.-
Quand les apôtres entreront dans une maison,
qu'ils disent: La paix soit sur cette maison.
»
26. Verset
15. si
cette maison en est digne, que votre paix vienne
sur elle ; mais si elle n'en est pas digne, que
votre paix retourne à vous.
Il est donc
nécessaire, pour recevoir une grâce,
d'en être digne, autant, du moins, que
l'homme peut l'être, c'est-à-dire par
de saints désirs, par des efforts pour la
recevoir dans un coeur pur.
Que penserez-vous ,
en
conséquence , de la valeur qu'on attribue,
dans l'Église romaine, aux
bénédictions
cérémonielles?
Que penserez-vous de
ces
objets auxquels on attache l'idée de
bénédiction , médailles,
chapelets bénits , Agnus-Dei , etc.
?
Ne sont-ce pas
autant
d'encouragements à ne pas s'inquiéter
de ce qu'on est, de ce qu'on vaut, et à s'en
remettre aux vertus magiques d'un objet qu'on aura
dans sa poche ou à son cou?
Jésus vous
enseigne, au contraire , que la
bénédiction d'un apôtre
même, en personne, ne donne rien à qui
n'en est pas digne.
Versets 16
et suiv. -
Les apôtres seront persécutés.
On les traînera devant les magistrats et
devant les rois.
27. Versets
19 et 20.
Mais quand on vous livrera entre leurs mains, ne
soyez point en peine de ce que vous direz, ni
comment vous parlerez, car ce que vous aurez
à dire vous sera donné à
l'heure même, ce n'est pas vous qui parlerez,
mais c'est l'Esprit de votre Père qui
parlera en vous.
Donné à l'heure
même. Voilà l'inspiration;
voilà l'infaillibilité.
Pour que les papes
et les
conciles pussent se dire infaillibles, il faudrait,
au moins, qu'on ne vît pas les longs
tâtonnements dont leurs décisions sont
précédées. Le concile de
Trente, sur certaines questions, a
délibéré des mois entiers.
S'il a fallu des mois pour se mettre d'accord sur
un décret, qui vous garantira qu'une
délibération plus longue encore
n'eût pas amené un décret plus
ou moins différent ?
L'histoire nous dit,
d'ailleurs, à quoi s'employaient ces longs
mois, et de quelles intrigues sortaient ces
décisions qu'on a imposées à
l'Église comme émanant du
Saint-Esprit (02).
28. Verset
28. Ne
craignez point ceux qui tuent le corps, et ne
peuvent tuer l'âme.
C'est ce qu'on a pu dire
également à tous ceux qui montaient
sur les échafauds et les bûchers de
l'Église romaine. Une religion qui
persécute ne s'écarte pas seulement
de l'esprit du christianisme ; le simple bon sens
dit assez qu'il y a folie à vouloir
régner sur les âmes autrement que par
la persuasion.
N'objectez pas que
d'autres Églises ont persécuté
aussi. De qui avaient-elles appris, ces
Églises, à persécuter? Qui
avait établi, comme un principe
incontestable, qu'on peut, qu'on doit appeler la
force au secours de ce qu'on regarde comme la
vérité ?
Rome avait fait,
durant
mille ans, l'éducation du monde ; une
éducation de mille ans ne s'oublie pas en un
jour. Si des protestants ont
persécuté, cela ne prouve qu'une
chose: c'est qu'ils étaient encore, sur ce
point, catholiques.
29. Versets
54, 55 et
57. Ne pensez pas que je sois venu apporter la paix
sur la terre; je ne suis pas venu apporter la paix,
mais l'épée. Car je suis venu mettre
la division entre le fils et le père, entre
la fille et la mère... Celui qui aime son
père ou sa mère plus que moi, n'est
pas digne de moi.
Quelle est la paix que
Jésus-Christ déclare n'être pas
venu apporter?
Ce ne peut être
qu'une paix fausse et coupable, celle qui nuirait
à l'avancement de son règne, celle
que nous achèterions en dissimulant nos
convictions, en pratiquant un culte que notre coeur
condamnerait, en restant membres d'une
Église qui ne nous paraîtrait plus
l'organe de la vérité.
Jésus-Christ ne
dit pas, comme l'Église romaine, qu'on doit
rester dans la religion de ses pères, car
ç'eût été dire aux Juifs
de rester Juifs, aux païens de rester
païens; il dit que nous devons l'aimer, lui,
plus que notre père, plus que notre
mère, et qu'est-ce que lui, sinon la
vérité?
Ainsi,là où
nous voyons la vérité, nous devons y
aller; là où nous voyons l'erreur,
nous ne devons pas y rester. Le chrétien
n'oubliera jamais ce qu'on doit à un
père, à une mère; il aura pour
eux et pour leurs idées tout le respect
compatible avec les droits souverains de
l'Évangile ; mais , quand il lui faudra
définitivement choisir entre
l'Évangile et eux, il n'hésitera
pas.
N'est-ce pas ce que
l'Église romaine loue elle-même chez
un grand nombre de convertis et de martyrs des
premiers siècles? Ce courage qu'ils ont eu
de se séparer de leur famille et de leurs
concitoyens, n'y voit-elle pas une preuve de leur
foi, de leur sainteté? Rien donc dans une
semblable démarche, quand la conscience
l'ordonne, qui ne soit bon et honorable devant Dieu
et devant les hommes. Si elle vous est
pénible, douloureuse, raison de plus pour
croire que Dieu vous y appelle, car c'est le propre
du chrétien d'avoir une croix à
porter. Voyez au verset 38. « Celui qui ne
prend pas sa croix et ne me suit pas, n'est pas
digne de moi. »
Jean-Baptiste envoie ses disciples vers Jésus. Jésus rend témoignage de lui. Folie de ceux qui n'écoutent ni Jean ni le Christ.
30. Verset
25. Alors
Jésus dit : Je te bénis, ô
Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce
que tu as caché ces choses aux sages et aux
savants, et les as révélées
aux enfants.
L'Évangile est donc
abordable aux simples, aux ignorants, aux petits ;
le fût-il moins, ce ne serait pas une raison
pour qu'une Église eût le droit de
leur en défendre l'étude, et de leur
imposer ce qu'ils devront croire. Or, ce n'est pas
aux ignorants seulement, mais à tous, que
l'Église romaine défend de puiser
eux-mêmes aux sources de la foi ; tous, selon
elle, doivent recevoir leur foi d'elle
seule.
Quand donc elle
cherchera
à vous effrayer sur votre impuissance,
rassurez-vous par ces paroles du Maître, et,
qui que vous soyez , abordez avec confiance
l'étude de ces vérités saintes
que Jésus remerciait Dieu d'avoir «
révélées aux enfants »
L'Église romaine ne craint point que vous ne
les compreniez pas ; elle craint seulement que vous
ne vous aperceviez des changements qu'elles ont
subis chez elle.
31. Verset
28. Venez
à moi., vous tous qui êtes
travaillés et chargés, et je vous
soulagerai.
Venez à moi. C'est
à lui, à lui seul qu'il appelle ceux
qui souffrent; c'est à lui, à lui
seul, que tout le Nouveau Testament nous dit
d'aller, si nous voulons être
soulagés, soit du poids de nos afflictions
terrestres , soit du poids de nos
péchés.
Vous ne trouverez
pas un
seul passage où il soit fait mention de qui
que ce soit d'autre à invoquer dans nos
détresses ; pas un seul passage, en
particulier, où ce rôle divin qu'il
s'attribue soit attribué à sa
mère.
Quand il vous dit :
« Venez à moi et je vous soulagerai,
» que vous faut-il de plus ? Si un roi vous
disait cela, auriez-vous l'idée, ensuite, de
ne pas aller droit à lui, de le faire prier
par d'autres, par ses ministres, par sa
mère? Ne sentiriez-vous pas que vous allez
avoir l'air de douter de sa promesse ? Ne
craindriez-vous pas que sa première parole,
quand vous paraîtrez devant lui, ne fut pour
vous demander si vous en avez douté? Quand
ce roi vous aurait offert sa protection froidement,
sèchement, on comprendrait que vous eussiez
quelque embarras à la réclamer
ensuite ; mais ici, est-ce le cas?
Les offres que
l'Église romaine suppose faites par la
Vierge pourraient-elles être plus tendres,
plus pressantes, que celles que vous avez
là, comme dans cent autres passages,
écrites, certaines , positivement sorties de
la bouche de Jésus-Christ? Encore une fois,
qu'avez-vous besoin d'autre chose ou de quelqu'un
d'autre?
Épis cueillis et homme guéri un jour de sabbat. Instructions à cette occasion. Guérison d'un démoniaque aveugle et muet. Jésus , accusé de ne faire des miracles que par la puissance de Satan , montre que c'est là un blasphème contre le Saint-Esprit, blasphème qui constitue le plus irrémissible des péchés.
32. Verset
52. Si
quelqu'un a parlé contre le fils de l'homme,
il pourra lui être pardonné mais celui
qui aura parlé contre le Saint-Esprit, il ne
lui sera pardonné ni dans ce siècle,
ni dans le siècle à venir.
En quoi les pharisiens,
que
Jésus a ici en vue, ont-ils commis ce
péché?
En refusant de
reconnaître l'action du Saint-Esprit en
dehors de leurs idées et de leur
autorité. Ainsi pèche, par
conséquent, toute Église qui se dit
seule en possession de la grâce, seule en
droit de la communiquer; ainsi pèche
l'Église romaine quand elle prétend
que, hors de son sein , il n'y a point de salut,
comme si le salut n'était pas l'oeuvre de
Dieu, et comme si l'oeuvre de Dieu ne pouvait pas
s'opérer en toute âme
d'homme.
Ce principe une fois
posé, l'Église romaine est
obligée ou de nier tout le bien qui se
trouve en dehors d'elle, ou de le dénigrer
comme ne venant que d'impures sources; la
bonté des fruits pourrait faire croire
à la bonté de l'arbre, et le seul
arbre qui soit bon, selon elle, c'est
elle-même. De là tant d'accusations,
tant d'attaques contre les autres Églises ;
de là tant d'efforts pour prouver qu'il n'y
a, en dehors du catholicisme, ni foi, ni
piété, ni charité, ni bonnes
oeuvres.
Le
croyez-vous?
Si vous le croyez,
ouvrez
les yeux, et vous serez vite détrompé
; si vous ne le croyez pas , reniez donc le
principe intolérant qui vous condamnerait
à être injuste et de mauvaise foi
envers tout ce qui n'est pas de l'Église
romaine.
33. Verset
32.-... ni
dans le siècle à
venir.
Il y a donc des
péchés, ont dit les controversistes
romains, qui ne sont pas comme celui-là, et
qui pourront être pardonnés dans
l'autre vie. Voilà le Purgatoire, ont-ils
conclu.
Ce que nous pouvons
conclure, nous, d'un raisonnement semblable, c'est
qu'on doit n'avoir pas trouvé un seul
passage où le Purgatoire parut
véritablement enseigné, car il est
clair que, si on en avait trouvé un seul ,
on n'irait pas chercher une si légère
ombre de preuve.
L'ombre même n'y
est pas , car Jésus ne dit point que ce
péché ne sera pas expié, mais
qu'il ne sera pas remis. Ajoutez que saint Marc,
dans le passage parallèle, ne dit pas «
ni dans le siècle à venir, »
mais simplement «jamais; » saint Luc,
plus simplement encore, dit que ce
péché « ne sera pas remis.
»
Cette déclaration
ne peut donc signifier qu'une chose: que le
péché contre le Saint-Esprit est le
plus grave de tous; qu'il ne sera pardonné
ni dans cette vie, ni au jour du jugement. Lisez
quatre versets de plus, et vous verrez que c'est en
effet à l'idée du jugement qu'aboutit
le discours de Jésus-Christ.
Les pharisiens ont
blasphémé contre le Saint-Esprit; les
pharisiens seront infailliblement condamnés.
Rien d'autre à tirer de ce passage.
34. Verset
46. Comme
Jésus parlait encore à la foule,
voici, sa mère et ses frères
étaient dehors, voulant lui
parler.
Ainsi, ou Marie avait eu
d'autres enfants que Jésus-Christ, ou
l'Évangéliste, du moins, n'a rien
fait pour nous empêcher de le croire, et n'a
mis, comme nous l'avons déjà dit
(note
1),
aucune importance à cette
question.
Ces frères, nous
dit-on , ce n'étaient que des cousins de
Jésus, des neveux de Marie.
Que des cousins
pussent
être appelés familièrement et
par amitié des frères, c'est
très croyable ; mais que ce nom ait pu leur
être donné, constamment donné,
dans des récits purement historiques,
calmes, raisonnés, détaillés,
c'est inadmissible. Nous pourrons, à chaque
fois, le montrer.
Ce mot, d'ailleurs ,
vous
le verrez toujours à côté d'un
autre, celui de mère, lequel est
incontestablement dans son sens propre.
Où trouver, et
dans les auteurs sacrés, et dans n'importe
quel livre, une semblable association de deux mots,
l'un , toujours pris dans son sens propre et
direct, l'autre, toujours dans un sens
détourné?
A la constante
association des deux mots, joignez celle des
personnes. Qu'est-ce que cette femme toujours et
partout accompagnée de... neveux? Quand le
mot neveux y serait, on s'étonnerait encore
qu'un fait aussi étrange ne fût pas
expliqué en quelque endroit ; ce mot n'y
étant pas, à qui viendrait, dans
quelque autre histoire que ce fût,
l'idée qu'il ne s'agisse pas de fils, mais
de neveux?
Enfin, redisons-le
encore, quand l'Église romaine arriverait
à découvrir une preuve du contraire ,
un fait subsistera toujours : c'est que
l'idée de la virginité
perpétuelle de Marie, qui occupe tant de
place dans l'enseignement catholique, n'en prend
aucune, absolument aucune, dans le Nouveau
Testament.
35. Versets
48-50.
Mais il répondit à celui qui lui
avait dit cela: Qui est ma mère, et qui sont
mes frères? Et étendant sa main vers
ses disciples, il dit. Voici ma mère et mes
frères, car quiconque fait la volonté
de mon Père qui est aux cieux,
celui-là est mon frère, et ma soeur,
et ma mère.
Est-ce ainsi que Jésus
aurait parlé de sa mère , s'il avait
voulu que l'Église lui rendit plus tard un
culte?
Impossible, au
contraire,
de nous dire plus nettement que, comme fils de
Dieu, comme chef suprême de l'Église,
il n'a plus ni frères, ni mère; que
les seuls liens qui existent entre lui et qui que
ce soit, ce sont les liens nouveaux et tout
spirituels que la foi aura formés. Rien donc
de plus opposé que ces paroles à la
doctrine romaine d'une union mystique entre le
Sauveur et sa mère.
Le Sauveur, en tant
que
Sauveur, ne connaît plus Marie. Comme Fils de
Dieu, il n'a point de mère ; tout ce qu'il a
fait ou fera en cette qualité, sa
mère selon la chair ne peut y avoir aucune
part. Voilà ce qui ressort de tout ce que
les Évangélistes nous racontent de
ses rapports avec sa mère. Dans les
Épîtres, elle n'est pas même
nommée, et ce complet silence prouve assez
que l'Église primitive n'a pas entendu la
chose autrement que nous.
Chapitre précédent | Table des matières | Chapitre suivant |
Mots clés: A à C / D à F / H à L / M à O / P à R / S à V |