Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.

PAYS ROMAND.

Pays romand
Nouvelles de Genève
Revue du passé: La réforme tente de pénétrer à Lausanne
 
FEUILLETON DU CHRONIQUEUR.
Promenade à Nyon et au champs de batailles de Gingins (Second article)

Noms propres de cette page

Nouvelles de Genève.

Conseil des Deux-Cents, du mardi 2 novembre.
(Extrait du Registre des Conseils.)

Sont présens en Conseil MM. Louis de Diesbach et Nicolas Augsbourger, accompagnés de noble Antony Bischoff, ambassadeur de Berne. Ils exposent que retournant à Berne, comme ils étaient à Morat, ont reçu des lettres de leurs supérieurs, leur enjoignant de revenir vers nous, pour nous en faire savoir le contenu.

MM. de Berne n'eussent pas cru possible que notre Conseil général leur donnât une réponse ennemie de la paix comme celle qu'ils en ont reçue. Cependant que Genève se conduisait ainsi, le Duc envoyait à Berne ses ambassadeurs et annonçait aux seigneurs de la république qu'à leur considération, il voulait observer le dernier arrêt qu'ils lui avaient envoyé ; qu'il allait donc relâcher les vivres, tenir les Genevois en sécurité dans ses pays, faire retirer ses gens de guerre et mettre à Peney un gentil-homme qui veillât à la sûreté des chemins. « Avisez donc, ainsi poursuivent les députés de Berne, et veillez à ne rien innover, à renvoyer vos gens de guerre et à ne faire aucune fâcherie aux Savoyards.

En allant acheter et vendre par les pays de Savoie, soumettez-vous à ne point prêcher l'Évangile. Cependant nos seigneurs espèrent faire une bonne paix, et pour ce sujet, ils ont choisi le lieu d'Aoste, où ils traiteront avec le Duc en personne et non plus avec ses envoyés. Vivez donc en paix, n'offensez personne et attendez tranquillement l'issue de cette journée, assignée au 21 novembre. Que si vous agissiez autrement, Messeigneurs vous remettraient votre bourgeoisie, ennuyés qu'ils sont de vos affaires. »

À ce discours les Deux-Cents ont répondu : « Nous avons toujours voulu nous conformer à la volonté de nos très honorés seigneurs et combourgeois de Berne, et encore à présent nous le voulons, et souhaitons une bonne et durable paix, suivant l'arrêt de St-Julien et la sentence de Payerne. Toutefois nous croyons que leurs Excellences doivent prendre garde qu'aucun gentil-homme ne soit mis par l'illustrissime seigneur de Savoie au château de Peney, qui est de nos terres et nous appartient ; mais plutôt qu'il y soit mis un commis de leurs Excellences, qui le garde en neutralité. Et qu'il leur plaise aussi qu'il y ait un de nos gens, de notre art, en la journée d'Aoste, pour mieux les raviser de nos droits, libertés et franchises. »

On a le soir même écrit à Berne en ce sens, comme aussi à CI. Savoie notre ambassadeur, afin qu'il appuie ce que nous écrivons. Sur ce MM. les députés de Berne se sont tournés vers le maréchal de Savoie, M. le comte de Challand.

Propositions des députés à M. le maréchal de Savoie.
Conformément à la convention faite entre MM. de Berne et les sires d'Estavayer, Paul Vagnon et secrétaire Fontanel, les ambassadeurs adressent les demandes suivantes à M. le Maréchal de Savoie.

« 1° De faire vider et enarmer le château de Pency.
2° De donner ordre pour que ceux de Genève puissent aller, venir, séjourner et trafiquer sur les pays sans qu'il soit innové en leurs biens ou en leurs personnes.
3° De donner congé aux gens de guerre. »

Sur quoi il leur a été répondu par M. le Maréchal ce qui suit :

« Et d'abord pour le premier, qu'il enverra un gentil-homme faire vider Peney, du mieux que se pourra besogner.

Quant au second, que le Maréchal fera crier les lettres de Monseigneur sur ce qu'il ne soit rien innové, pourvu que ceux de Genève ne fassent point de pratiques par le pays, tant contre la foi que contre l'autorité du prince ; auquel cas ils seront punis selon l'exigence du cas, comme le seraient les sujets du Duc.

Quant au troisième article et à congédier les gens de guerre, M. le Maréchal dit n'avoir point de charge et ne pouvoir rien faire sans commandement. Aussi ne le peut-il faire, attendu le peu de fiance qu'il a en ceux de Genève, qui promettent et ne tiennent rien. Au reste il avertira en toute diligence son seigneur, pour en avoir réponse, qu'il adressera incontinent aux seigneurs de Berne. »

Qu'en sera-t-il de Genève ?

Le samedi 6 la nouvelle parvient dans Genève que les Savoyards ne veulent point faire retirer les gens de guerre, mais toujours camper contre nous.

Qu'ont su faire alors Messieurs que de se tourner de nouveau vers les seigneurs de Berne. « Vous le voyez, leur ont-ils dit, vous le voyez maintenant ce que l'on prétend contre nous. Les Savoyards n'ont fait pis que depuis qu'on traite de la paix. Ils nous avaient pris le vin et le blé ; ils nous prennent aujourd'hui la fuste et la fermente ; ils ne laissent venir à nous, bois, chair, beurre ni fromage. Il ne sort pas un pauvre garçon, ni la plus pauvre chambrière, qu'ils ne soient aussitôt pris et traînés par les prisons. C'est la plus grosse pitié qui fut oncques. De grâce, quel recours nous reste-t-il qu'en vos Excellences de Berne, que nous avons toujours tenus pour nos bons pères. »

Tout en tenant ce langage, MM. ont été d'avis de retenir les gens de guerre de Berne et de Morat, que nous avons, de ne faire aucune sortie pour quelque cause que ce soit, et d'ordonner que, sous peine du gibet chacun, au son du tocsin, se trouve en armes au lieu qui lui est ordonné.

Le dimanche, 7 dernier, les députés bernois sont retournés chez eux. En chemin faisant, ils n'ont pas été peu surpris de voir tout à l'entour de Genève les Savoyards ravager les maisons, et des troupes échelonnées à Versoix, à Coppet et à Nyon. Aussi s'en sont-ils allés bien indignés de la perfidie de nos ennemis.

La cause des pauvres devant le peuple de Genève.
Une ville chrétienne n'oublie pas les pauvres ; aussi l'un des premiers soins de Genève convertie à l'Évangile a-t-il été d'aller au-devant de ses indigens, vieillards, malades ou orphelins. Au milieu de beaucoup d'autres soins, de grands périls et de grandes nécessités, Messieurs ont trouvé le loisir de s'occuper de cet objet. Ils s'en sont même occupés avant toutes choses. Comme nous l'avons dit, ils ont formé le dessein de faire un grand hôpital du couvent de Sainte-Claire et d'appliquer ce qui reste des biens des paroisses à l'entretien des indigens. Ces biens, voués par la piété, appartenaient à un pieux ouvrage, et en les consacrant aux pauvres, Genève les donnera à Jésus-Christ, Christo in pauperibus (*).

Cependant des difficultés se sont présentées dans l'exécution. Les procureurs des paroisses se refusent de consigner au procureur de l'hôpital les titres et les biens des églises. Les prêtres les encouragent dans leur désobéissance. On en voit toujours aller et venir dans la ville, séduisant les citoyens, chantant la messe, baptisant les enfans dans les maisons et semant des discours propres à entretenir la discorde parmi les bourgeois. Pour rompre leur opposition, Messieurs viennent de prendre le parti de convoquer les Deux-Cents. Et les Deux-Cents qu'ont-ils ordonné ?

« D'abord et avant tout, que pour nourrir la concorde et obtenir la paix de Dieu, il fallait premièrement prendre soin des pauvres et leur consacrer les biens des paroisses, églises, chapelles, monastères, couvens et confréries.

« En second lieu, pour que cette maudite discorde ne puisse croître parmi les citoyens, MM. les syndics appelleront les prêtres et leur demanderont une seconde fois s'ils veulent vivre selon la Parole de Dieu. Que s'ils veulent soutenir toujours que les sermons de nos prédicateurs sont injustes, ils aient à se pourvoir de doctes personnages qui le prouvent et nous les écouterons. Et s'ils se refusent à soutenir leurs factions en disputant par la Sainte-Écriture, qu'ils sortent de la ville, ou du moins qu'ils quittent leurs cérémonies, subornations et séductions. »

On parle en troisième lieu d'élire un hôpitalier, et Claude Salomon, dit Pasta, se présente pour faire ce service. Il offre encore d'y employer tous ses biens, et même il a dessein de les léguer à l'hospice érigé à Ste-Claire. CI. Pasta, nos lecteurs s'en souviennent, est un de ces hommes qui les premiers ont reçu avidement la parole prêchée dans Genève.
Chacun s'est mis à dire son zèle envers les pauvres, et que même il a déjà commencé de les servir. Et d'une commune voix on a résolu qu'il serait accepté comme hôpitalier avec sa femme et qu'on le proposerait en Conseil général.

Le lendemain (c'est ce dimanche 14) le peuple assemblé, après avoir fait la prière dominicale, a décidé unanimement que l'hôpital avait été saintement érigé, que les biens appliqués par nos prédécesseurs à des usages pieux devaient être appliqués à l'usage très pieux des pauvres, que deux commissaires seraient élus pour rechercher de ces biens, et que Cl. Salomon et sa femme gouverneraient les pauvres du grand hôpital.

Messieurs feront faire des cries pour que personne n'ait à mendier, et que tous les pauvres se retirent à Ste-Claire. Un homme chargé de les y contraindre recevra 50 sous de gage par an.
On a commencé hier déjà à vendre la dépouille du couvent de Palais, que tous larrons s'accordaient à venir piller. On l'a vendue au plus offrant, à l'extinction de la chandelle. La dépouille entière, à savoir les tuiles, le fer, le bois, les briques, les porteaux, les fenêtres, les virets et les degrés ont procuré 250 écus d'or.

Ce que nous écrit M. Froment au sujet du grand Hôpital.

« C'est chose remarquable en ces commencemens de l'Évangile que la manière dont un chacun fidèle se conduit honnêtement et fort chrétiennement dans Genève. La charité de Dieu est grande, je dis telle que nul fidèle n'est indigent ni laissé en son besoin. Chacun donne selon sa dévotion, les uns argents, les autres accoutremens, d'autres un lieu en leur maison et le nécessaire. Il y a comme des diacres, hommes et femmes, pour s'enquérir et distribuer où il faut, et aussi pour subvenir aux nécessités de ceux qui annoncent la Parole. Car pour ceux-ci, il n'y a eu jusques ici nulles prébendes, sinon les bénéfices et censes quotidiennes des apôtres, c'est à savoir injures, coups et privations. Desquelles censés fort peu en veulent être receveurs. Outre cela quand aucun dans Genève fait chose non décente à l'Évangile, on va en sa maison familièrement et on l'admoneste comme frère, en douceur, un chacun se parforçant de le gagner, et ainsi l'Évangile va son chemin. Et tous ne sont pas de ceux qui pensent avoir assez fait, quand ils ont débaqué contre le pape, mis bas les prêtres, rompu le nez aux idoles et pris avec cela quelque apparence de justice par dehors. « Certes, nous disent avec raison les prêcheurs, ce n'est pas avoir satisfait à Dieu. »

Bien autrement comprend le service du chrétien ce Salomon Pasta, l'un des premiers dans Genève qui ait tout laissé pour l'Évangile, lequel incontinent que les dames de Ste-Claire ont été sorties de leur couvent, n'a cessé après le Conseil que cette maison n'ait été convertie en hôpital. Et au lieu de ces dames y sont mis à force pauvres. Et pour commencer cette oeuvre, le pieux Salomon y a mis tout son bien, à savoir son or, son argent, ses meubles et lui-même avec sa femme, qui y sont à servir les pauvres, se donnant à eux journellement. À leur imitation, plusieurs autres gens de bien et fidèles donnent aussi beaucoup. Et la seigneurie a appliqué à cette maison les biens d'Eglise et les bans des offenses faites contre la réformation. Ainsi se fait comme je le disais, qu'au milieu de la disette à laquelle Genève est en proie, il ne s'y trouve pas d'indigens, ni de gens qui soient abandonnés dans le besoin. »

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REVUE DU PASSÉ
LA RÉFORME TENTE DE PÉNÉTRER À LAUSANNE.
« Du sommeil de la liberté
Les rêves sont lourds et pénibles ;
Pour ne mourir à la gaîté
Faudrait devenir insensibles. »
 
« Mieux vaut avoir en Dieu fiance
Qu'en l'homme, qui moins est que rien
Mieux vaut avoir en Dieu fiance
Qu'aux princes et grands terriens. »

Les débats entre l'Évêque et les Lausannois n'avaient pas de trêve. D'une part l'Évêque, jeune, altier, irascible, ne se mettait pas en peine de savoir jusqu'où s'étendaient les privilèges de la ville ; les citoyens, de leur côté, allaient à la conquête de droits toujours nouveaux. La police de la ville appartenait au Conseil durant le jour ; il s'arrogea celle de la nuit. Il ne voulait plus permettre la falsification des monnaies. Il mettait de jour en jour des limites plus étroites à la jurisdiction des officiers du prince. Je dirai pas tous les sujets sur lesquels ils étaient en différend. Témoins de cette lutte prolongée, les villes libres filles de l'évêché interposèrent leur médiation ; Berne, Soleure et Fribourg se réunirent pour offrir aux deux partis une journée d'accommodement. Elle eut lieu à Fribourg, le 8 novembre de l'année 1525. Les députés s'assirent ; l'Évêque en personne était présent, accompagné de son vicaire et de nombreux seigneurs ; le Gouverneur Étienne Grand et les banderets Jean Boverat, Jean de Leyra et Claude Fontanne représentaient la ville de Lausanne ; plusieurs autres nobles conseillers et bourgeois et quantité de gens, comme il en est toujours à Lausanne qui se trouvent du loisir, étaient aussi accourus en cette grande occasion.

Les députés des villes prirent la parole : « Nous sommes ici. dirent-ils, pour entendre et ordonner des choses survenues entre révérend père en Dieu, Monseigneur de Lausanne et les citoyens du dit Lausanne, ses sujets, désirant pacifier les parties. » La cause fut plaidée, puis les députés prononcèrent. Ils déclarèrent :

« 1° Qu'au révérend seigneur Évêque il appartenait de détenir et faire prendre par ses officiers les personnes suspectes de crime, sans contradiction des nobles et des bourgeois de Lausanne. que toutefois les accusés ne seraient interrogés, mis à la torture et jugés qu'en présence de quatre délégués de MM. du Conseil de Lausanne, réunis, aux commis du révérend seigneur.

2° Que les dites personnes suspectes et défiancées ne se devaient prendre dans les maisons des Lausannois, n'entendant cependant pas les meurtriers de bois, détrousseurs de chemin, sorciers (**), fausseurs de lettres et larrons publics, auxquels asile ne pourrait être donné dans les susdites maisons.

3° Le droit de battre monnaie fut reconnu à l'Évêque, mais à la condition que quand il en voudrait frapper de nouvelle, il consulterait les états de Lausanne et par leur conseil ferait monnaie à lui honorable et profitable pour le commun. - Quant à tout le reste, les parties étaient laissées à la teneur des titres et des documens. - Celle qui contreviendrait était condamnée à payer 500 écus sol, savoir, 50 à l'église de Notre-Dame de Lausanne 50 à la fabrique de St-Nicolas de Fribourg et les 200 restant aux arbitres, soit à l'ordonnance des magnifiques seigneurs des trois villes. » - Suivent l'acceptation et ratification des parties et la signature du secrétaire A. Krumenstoll, de Fribourg.

Cette sentence remplissait le but de la conférence, mais elle était loin de satisfaire aux voeux des Lausannois. Ils souhaitaient de parvenir à la liberté des villes suisses ; une alliance avec ces villes leur paraissait le moyen le plus sûr d'y arriver ; ils sollicitèrent donc auprès des trois cités la conclusion d'un traité d'amitié, d'alliance et de combourgeoisie. Soleure était éloignée ; peut-être était-elle des filles de l'évêché la plus craintive d'offenser son conducteur spirituel ; elle n'accéda pas à la demande des Lausannois ; mais Berne et Fribourg répondirent selon leur voeu. On n'eut aucun égard à l'opposition de l'Évêque. Le traité fut conclu à Berne le 27 décembre 1523. Les trois villes se promirent amitié et mutuel secours ; elles s'allièrent pour 25 ans, et convinrent que de cinq en cinq ans la combourgeoisie serait renouvelée. En cas de différend, Payerne était choisie, comme lien de marche et de conférence. On réservait les droits du St-Empire, ceux du Duc et ceux de l'Évêque. Une condition était imposée à la ville de Lausanne. Il était bruit qu'à cause de ses privilèges, un grand nombre de malfaiteurs et de scélérats s'y rendaient comme en un lieu d'asile ; or les nouveaux alliés la voulant franche de ce reproche, posaient que de leur propre autorité, les Lausannois saisiraient les malfaiteurs, les remettraient au baillif du seigneur Évêque et pourvoiraient à ce que la ville fût blanchie en sa réputation. Lausanne demandait à ses nouveaux amis d'intercéder pour que ses soldats pussent entrer aux services étrangers aux mêmes conditions que les leurs. Tel était le premier acte par lequel Lausanne s'unissait aux Confédérés.

Ce traité ne fut pas plutôt conclu que le coeur des Lausannois s'enfla et s'ouvrît à de nouvelles espérances. Le Conseil se compose de 24 membres, dont trois sont élus par ceux de Bourg dans la bannière de la Cité, huit par ceux de la Cité dans la bannière de la Palud, trois par ceux de la Palud dans la bannière de St-Laurent, cinq par ceux de St-Laurent dans la bannière du Pont, et cinq par ceux du Pont dans la bannière de Bourg. Les conseillers élus jurent le dimanche après St-François, d'être bons et fidèles à la commune, de tenir secret ce qui aura été délibéré et de comparaître aussi souvent qu'ils seront appelés par les gouverneurs.

Les présidens du Conseil étaient deux syndics ; ils furent à cette époque remplacés par un bourgmaître (***). Discret Étienne Du Flon (De Fluvio) fut élu bourgmaître le premier et le fut pour le terme de trois ans. Le Conseil avait jusques ici été convoqué par des cries ; on voulut qu'à l'avenir il le fût par 24 coups de cloches de la cathédrale (****). Le langage des bourgeois envers l'Évêque s'éloigna de plus en plus de celui du respect et de la soumission. Les sujets de débats n'avaient pas tardé à renaître et à se multiplier. On en était à ces termes quand la Réforme se montra et fit sa première entrée dans la ville chef-lieu de l'évêché.

Suivons l'ordre des faits. En 1328 Berne se réforme. La même année elle a à combattre les Oberlandais révoltés et Lausanne catholique lui envoie en secours 66 couleuvriniers. Les Bernois sont victorieux et ne songent plus qu'à faire triompher avec eux la réformation. Le changement du langage qu'ils tiennent à l'Évêque est remarquable (*1) : ils signaient naguère : « Les plus soumis de vos fils ; » ils accusent aujourd'hui leur pasteur de n'avoir su que tondre ses brebis et de ne leur avoir pas donné la pâture. Ils lui font voir que le pape diffère autant de l'apôtre Pierre qu'un moucheron ressemble peu à un éléphant, et ils le somment de justifier ses droits et ceux de Rome, sinon plus d'appel à son siège. Les couleuvriniers auxiliaires rentrent dans Lausanne. Les Bernois ont été surpris de leur bonne mine et de leur air martial. Ils leur ont fait le meilleur accueil. Tout autre est celui que l'Évêque leur fait à leur retour. Il veut les punir d'être partis malgré sa défense et donne l'ordre de les jeter en prison.

Mais ils se réunissent, se promettent une mutuelle assistance et jurent qu'ils se soutiendront les uns les autres jusqu'à la mort. L'Évêque se voit contraint de les laisser en repos. Cependant il fait assembler la bourgeoisie. Lui-même ne parait point. Il craindrait de compromettre sa grandeur en se montrant à un peuple dont il sait l'inimitié. Les officiers exhortent les citoyens à persévérer dans l'ancienne religion et à rejeter l'hérésie de Luther. - « Nous sommes tous bons chrétiens, répondent sèchement les bourgeois ; que si quelqu'un tombe en faute, il soit puni par voie de droit. » Leur haine envers le prélat dictait aux Lausannois la brièveté de cette réponse ; à vrai dire ils étaient loin d'être portés vers la réformation. Ils étaient catholiques de coeur, d'habitude et d'intérêt. Ils mettaient pour la plupart différence entre l'homme altier qui occupait le siégé épiscopal et la dignité de la charge qu'ils entouraient d'un vieux respect. Ils calculaient ce que la réforme ôterait à Lausanne en gloire et en revenus. Le concours des peuples cesserait ; plus de pèlerins, plus de plaideurs serrés autour des tribunaux de l'Eglise. Et comment se représenter Lausanne sans l'Évêque, sans sa cour, sans le cortège de dignitaires et d'employés qui se pressent sur les pas du prince d'Empire et du prélat régnant sur un diocèse étendu ? Aussi quand les soldats revenus de Berne voulurent faire au nom des seigneurs de cette ville, quelque ouverture sur la religion, furent-ils écoutés plus défavorablement encore que l'Évêque ne l'avait été. « Nous voulons, leur répondit-on, vivre bien et honnêtement comme nos prédécesseurs, en bons chrétiens et selon Dieu. » -
On s'abstint pourtant de formuler cette réponse et de la rédiger en statut. Quelques conseillers se rendirent auprès des chanoines pour prier ces bons ecclésiastiques de chasser de leurs maisons les femmes de mauvaise vie et de se conduire honnêtement selon Dieu. Ce fut tout ce que les Lausannois voulurent entendre sous le nom de réformation.

Cependant on ne tarda pas à apprendre à Berne et à Fribourg ce qui se passait à Lausanne. À Fribourg on en fut instruit par les chanoines, qui accusèrent les citoyens, sous prétexte de réformer les moeurs du clergé de méditer le changement de la religion. Ou prit la chose fort à coeur, et Fribourg écrivit à ses combourgeois, les pressant de demeurer attachés à la sainte foi. Les Bernois considérèrent les choses sous un autre aspect. Un pauvre moine dont le crime était d'avoir assisté à la dispute de Berne et de n'en avoir pas mal dit, ayant été arrêté à Fribourg et mené garrotté à l'Évêque, Berne menaça de représailles s'il n'était relâché. Elle écrivit encore pour faire élargir Farel, qui avait été fait prisonnier et était détenu à Chillon. « Appelleriez-vous malfaiteur, disait-elle, ceux qui sont bons et vrais chrétiens selon la Parole de Dieu ? et si Farel était un malfaiteur l'eussions-nous reçu pour coadjuteur en la prédication de Christ ? »

Bientôt il arriva à Lausanne une nouvelle lettre de Berne adressée à ses combourgeois : « On dit chez vous que les Allemands seuls ont pris part à notre dispute et que seuls ils ont pu s'y faire entendre librement ; Farel qui y était ira vous en instruire et vous dira la vérité. » - Farel entra dans Lausanne accompagné d'un Bernois ; c'était, je crois, le chancelier Cyro. Je ne sais s'il entreprit de prêcher publiquement ; mais comme il parlait à tout venant de religion, il ne tarda pas à être maltraité par le clergé et par l'Évêque. Berne s'adressa à l'Évêque : « Nous ne pouvons témoigner assez notre surprise et notre douleur de ce que nous venons d'apprendre. C'est donc ainsi que dans une ville libre, telle que Lausanne, votre Paternité et sa sainte cohorte se conduisent envers des hommes sans crime et qui s'offraient à se justifier. Nous voulons parler de Farel, notre sujet et serviteur, et d'Étienne, son hôte et notre bourgeois. Nous vous exhortons à permettre qu'on prêche la Parole de Dieu, à recevoir honorablement ceux qui la prêchent, et particulièrement Farel, que nous vous renvoyons pour défendre sa cause et la nôtre des calomnies par lesquelles on nous noircit. Que s'il recevait le moindre mauvais traitement ou la moindre injure, nous le ressentirions comme fait à nos personnes et à nos corps. Rom. XII, 19. Prenez donc garde qu'il ne soit touché à un cheveu de leurs têtes et souvenez-vous que nous ne vous avons point fermé l'accès à notre dispute de religion. La grâce de Dieu soit avec vous tous, qui aboyez à nos talons (oblatrantibus). Marc VI, 11. Ainsi soit-il. »

Farel rentra à Lausanne, conformément au vouloir des seigneurs de Berne. Il se présenta en Conseil le 31 octobre (1529), et déposa une lettre qui priait les Lausannois de l'admettre à prêcher. Berne dans cette lettre se montrait offensée d'une conduite qui touchait à son honneur ; elle voulait que les bonnes gens pussent avoir leur liberté et que leurs combourgeois ne fussent plus traités avec tyrannie. L'affaire parut fort grave aux Vingt-Quatre ; ils convoquèrent les Soixante. Les Soixante s'excusèrent, disant que ce n'était point à eux à admettre un prédicateur dans les chaires de la ville, mais au chapitre et à l'Évêque. Farel insista, pour que la proposition de Berne fût portée devant les Deux-Cents, et il l'obtint. Le dimanche 14 novembre les Deux-Cents furent assemblés « pour délibérer sur le prédicateur luthérien ; » mais ils se bornèrent à donner au Petit Conseil plein pouvoir dans cette affaire, et à admettre qu'aucun prédicateur ne serait reçu à prêcher que par la permission du Conseil.

Vainement Berne demanda de nouveau « audience pour la Parole du Seigneur. » Elle se plaignit vainement d'une résolution dictée par la tyrannie de quelques-uns, qui ne voulaient, disait-elle, que péculer et détruire. Ses efforts pour encourager ses combourgeois à laisser, malgré l'Évêque et le clergé, « aller l'affaire de Celui qui est plus fort qu'eux tous » n'ébranlèrent point les Lausannois. Ils demeurèrent à la décision qu'ils avaient prise.

À l'année suivante (1530) , je ne rencontre que ce fait. Des gentils-hommes du Pays-de-Vaud se trouvant à Lausanne avec le comte de Gruyère, se promirent de saisir tout ce qu'ils pourraient de Luthériens, de leur donner trois fois l'estrapade, et s'ils persévéraient dans l'hérésie de les faire périr par le feu. - « Et nous, leur écrivirent MM. de Berne, que ferez-vous de nous ? Donnerez-vous aussi l'estrapade à nos sujets s'ils voyagent sur vos terres et s'ils y parlent religion ; seront-ils aussi jetés au feu ? Nous vous prions d'y penser sérieusement. » -

En 1551 éclata la guerre de Cappel. Les Confédérés coururent aux armes, protestans contre catholiques et Berne, selon son droit, demanda le secours des Lausannois. Leur contingent alla cette fois encore grossir les rangs des réformés.
Alors un prêtre monta en chaire : « Puissent, dit-il, ces soldats destinés à soutenir la cause de l'hérésie rencontrer tous la mort dans ses rangs ! Puisse-t-il n'en revenir pas un s'asseoir à nos foyers ! Que la verge soit sur leur dos... la verge, oui, elle les frappera, car le temps approche, je le sais, j'en ai la certitude, je l'ai lu dans la prophétie de Ste-Brigite. »

Ces paroles, on le croira, irritèrent plus d'un auditeur. Le Conseil fit appeler le prêtre pour rendre raison de son discours. Il s'humilia, reconnut sa faute, se soumit à la peine qu'on voudrait lui imposer ; mais les chanoines, qui virent dans son humiliation la leur, s'opposèrent à la soumission qu'il avait faite, et lui reprochèrent amèrement son peu de courage. Ils irritèrent par leur conduite la bourgeoisie, qui continua long-temps à s'occuper de cette affaire, et les soldats auxiliaires qui, comme nous le verrons, gardèrent plusieurs années sur le coeur l'injure qu'ils avaient reçue.

Cependant le contingent revint de Cappel. Zwingli avait été tué. Les réformés avaient eu le dessous. L'Évêque crut le moment venu de travailler à affermir la religion catholique et d'imposer à la bourgeoisie un nouveau serment contre la réformation. Tout prince et souverain qu'il est, il ne peut porter aucune loi sans la participation des trois états de la ville et des terres de l'évêché. Il fit donc assembler son peuple dans l'église de Notre-Dame, selon la teneur du plaid, et il proposa d'ordonner qu'il fut défendu de parler de Dieu et de l'Évangile en bien ni en mal, sous peine de l'estrapade. Mais le peuple ne voulut point accepter ce règlement. - « Que ne songez-vous plutôt, répondirent les Lausannois à l'Évêque, à faire battre une monnaie qui ne soit plus d'un titre et d'un poids trop bas, et ne nous expose plus à des pertes toujours nouvelles ! Que n'établissez-vous votre tribunal de justice sur un meilleur pied, en y établissant douze jurés au lieu des deux ou trois assesseurs qui le composent ! »

Nous aurions pour long-temps à dire, SI nous voulions entrer dans l'énumération de tous leurs sujets de plainte.
Berne, cette même année, demanda encore à Lausanne de joindre son contingent aux troupes qu'elle envoyait sur les bords du lac de Come, combattre le tyran de Musso. Les citoyens se cotisèrent pour avancer les frais de l'expédition ; mais trouvant raisonnable que les ecclésiastiques contribuassent aussi bien qu'eux, ils demandèrent 500 écus au chapitre et 200 au reste du clergé. Le clergé séculier se prêta de bon coeur à ce qu'on demandait de lui ; mais les chanoines s'y refusèrent ; le Conseil dut leur retenir les châteaux de St-Pré, de Dommartin et d'Essertines, qui leur appartenaient et il ne les leur rendit qu'après qu'ils se furent engagés à livrer 950 écus d'or.

Dans l'année 1532, le duc Charles de Savoie visita son Pays-de-Vaud. Le 5 juin, il coucha à Chillon, où il n'avait jamais été encore. À Vevey il fut reçu par 450 soldats et jeunes gens tous habillés de blanc, et criant : « Vive Savoie. » De Vevey, il alla avec une grande noblesse tenir les états à Morges. Il y fut parlé de réparer les places fortes du pays. Les députés s'y plaignirent beaucoup de l'Évêque et des chanoines, qui refusaient de comparaître devant les tribunaux séculiers pour les affaires civiles. L'Évêque qui était présent défendit le privilège du clergé Le Duc remit l'affaire à un autre temps et partit. Il s'avança jusqu'à Cudrefin. À son retour, il vint à Lausanne, où les Soixante avaient arrêté de ne lui faire aucune réception ; mais à la sollicitation de l'Évêque 200 arquebusiers allèrent à sa rencontre, et à son départ plus de 9000 hommes, tant de Lausanne que de La Vaux l'accompagnèrent jusqu'à Vidy. On ne doutait pas que le prince n'eut fait ce voyage avec quelque dessein important, et l'attente de ce qu'il en adviendrait maintint durant les mois qui suivirent le calme dans la cité.

Mais vers la fin de l'année l'agitation reparut. Il est à Lausanne, l'avenir le montrera, des âmes altérées d'une vraie paix. Il s'y trouve aussi, comme ailleurs des hommes plus ardens à déployer leur haine contre les prêtres que leur amour pour l'Évangile de Jésus-Christ. Un jour, ce fut celui du mardi-gras, quelques-uns de ces derniers se rassemblèrent, le visage masqué, Il vous souvient de ce prédicateur qui, lors de là guerre de Cappel, avait prophétisé la mort des auxiliaires que Lausanne y avait envoyés ; eh bien, nos jeunes hommes vont le saisir ; Ils le mettent sur un traîneau, le promènent en le fouettant publiquement, et après avoir donné ce spectacle à toute la ville, ils laissent le traîneau. et le prêtre devant la maison du bourreau. Le même jour deux antiques images se trouvèrent détachées de l'église de St-Laurent et jetées à la fontaine. On commençait à refuser de payer les dîmes aux prêtres. La nuit, on rompait les portes de leurs maisons. Ce n'est pas tout ; arrive à Lausanne maître Michel, le prédicant d'Ormont-dessus ; avait-il été appelé ? venait-il de son propre mouvement ? MM. de Berne lui avaient-ils écrit ? nous l'ignorons ; il vient ; mais à peine est-il arrivé que le zèle du clergé s'effraie à la vue d'un ministre de l'Évangile. Les chanoines remuent vigoureusement, et ils le contraignent à se retirer. Ils ne lui avaient pas même laissé le temps d'ouvrir la bouche.

Un mois plus tard, maître Michel fit encore une tentative par l'ordre des seigneurs de Berne ; mais MM. de Lausanne l'éconduisirent doucement et firent savoir à Berne leur résolution de ne point l'écouter.

Ces événemens portés à Fribourg, y firent une forte sensation. Des seigneurs de cette ville en grand nombre, membres du petit et du grand Conseil, se rendirent à Lausanne, et ils haranguèrent fortement les Deux-Cents pour les détourner de la réformation. Ils les menacèrent, s'ils l'embrassaient, de renoncer à leur alliance. Jean de Saint-Cierge avait succédé à Étienne Du Flon dans la charge de bourgmaître ; il répondit civilement à leurs remontrances et protesta contre leurs menaces. Après l'avoir entendu, les Fribourgeois assignèrent Lausanne à une journée de marche, qui se tiendrait à Payerne, le dimanche 20 d'avril. Lausanne invita Berne à y envoyer des députés.

L'usage dans les journées de marche est de prendre pour juge des différens qui s'élèvent entre les villes alliées, des conseillers de ces villes mêmes, qu'on délie momentanément du serment qu'ils ont prêté à leur bourgeoisie, pour qu'ils puissent prononcer avec toute liberté. Suivant cet usage, deux députés de Fribourg et deux de Lausanne furent établis juges en cette occasion, et les députés des deux villes plaidèrent leur cause devant eux. L'animosité était grande ; les plaintes parurent graves de part et d'autre (*2) ; les juges renvoyèrent leur décision à une seconde journée, qui s'ouvrit à Payerne le 18 mai ; mais le jour où cette nouvelle conférence commençait, il arriva à Lausanne une sédition qui l'empêcha de pouvoir porter aucun fruit.

Ce dimanche 18 mai (1533) ; plusieurs personnes jouaient à la paume, et comme on fit un coup qui fut disputé, on demanda sur ce coup l'avis des assistans.
Un des banderets, qui se trouvait présent, dit sa pensée, laquelle ne plut pas au sire De Pré, seigneur de Corsier sur Lutry et chanoine de la cathédrale. Le chanoine, brutal et emporté qu'il est et plus prompt à manier les armes que le bréviaire, donna un démenti au banderet et le couvrit de paroles injurieuses. L'offensé se plaignit en Conseil et conta ce qui avait eu lieu au capitaine de la société de la jeunesse, c'était, je crois Fernand de Loys. Bientôt on entendit sonner le tocsin. Le chanoine, averti d'un complot, mit garnison dans sa demeure et prépara une vigoureuse résistance; prêtres et laïques s'y défendirent avec lui, mais enfin il leur fallut céder au nombre, et la maison fut prise et emportée. Quelques personnes furent blessées dans le conflit. Cette affaire rendit vaine la journée de Payerne et donna matière à de nouveaux griefs.
Des députés de Berne et de Soleure se hâtèrent d'accourir (*3). Ils trouvèrent les esprits aigris au dernier point. Tout ce qu'ils tentèrent pour les rapprocher fut inutile ; Ils ne purent que régler un accommodement entre l'Évêque et la ville, dans lequel ils décidèrent entr'autres :

1° Que les Lausannois conserveraient leur bourgmaître.

2° Qu'ils demeureraient les maîtres de leurs portes et de leurs murailles.

3° Que pour donner à l'Évêque quelque satisfaction, le bourgmaître irait le prier de leur pardonner ce qu'ils avaient pu faire contre son autorité. Enfin, que la société de la jeunesse serait cassée pour les désordres qu'elle avait commis. » Nous eussions désiré trouver dans notre feuilleton la place de donner à nos lecteurs cette prononciation tout entière. Elle leur eût fait connaître dans le détail la position des partis et ce que Lausanne à cette heure se trouve avoir acquis de libertés. Peut-être trouvera-t-elle sa place ailleurs.

Cependant les Lausannois ne se trouvèrent réconciliés ni avec Fribourg, ni avec l'Évêque. Fribourg les avait blessés, comme elle venait, à peu près dans le même temps, d'éloigner d'elle les coeurs des Genevois. Pour l'Évêque, il ne songeait plus qu'à se rendre maître de la ville de vive force. Le sieur de Boëge, son neveu, assembla du monde en Savoie et dans la Gruyère pour la surprendre. Le Conseil en fut averti et donna des ordres nécessaires pour la défense des murailles et pour se garder de surprise (juillet 1534). Berne promit bon secours à ses combourgeois.

Tel était l'état des choses et des esprits quand l'année 1535 a commencé. Tout ennemie qu'est Lausanne de son clergé, elle s'est montrée jusqu'ici moins amie encore de la réformation de l'Eglise. Si elle y a songé, ç'a été pour inviter les chanoines a une vie moins scandaleuse, pour défendre de manger de la viande, du fromage et du beurre en carême et pour faire baiser la terre au malheureux surpris à blasphémer. Du reste elle s'oppose de tous ses efforts et avec tout le Pays-de-Vaud à l'établissement de la religion réformée. Nous l'avons vue cette année sacrifier à son éloignement pour l'Évangile l'amitié qu'elle portait à Genève. La crainte qu'elle a des doctrines nouvelles l'a réconciliée avec Fribourg. Elle s'est même dans ces derniers temps quelque peu rapprochée de l'Évêque. Les jeunes hommes qui avaient commencé à faire paraître leur zèle en renversant des images sont aujourd'hui rentrés dans le silence. Et les hommes droits, et les esprits éclairés, et les âmes sincères, pieuses et altérées d'une vraie consolation, sont réduits à prier en secret. Ils soupirent dans l'attente. Ils se demandent si le Seigneur Dieu ne se montrera point, s'il ne lèvera point le bras et si l'heure n'est peut-être pas venue où il le déploiera pour la délivrance de son peuple.

 

SOURCES.
Ruchat. - Leu. - Levade, dictionnaire du canton de Vaud. Le Conservateur suisse. Pièces servant à l'histoire de la ville impériale de Lausanne. - Manuscrit de Ruchat appartenant à la bibliothèque de M. le doyen Bridel. - Un volume, intitulé Documens sur Lausanne, appartenant à la bibliothèque de M. le colonel Monod. - Anciens dessins de la ville de Lausanne. - Archives de Berne. - Miscellanea Helvetica et Bernensia, à la bibliothèque de la ville de Berne. - Sinner's Bern. Regiments und Regionen-Buch, ibidem. - Gruner's Collectanea, ibidem. - Herman, antiquités du Pays-de-Vaud, ibid. - Archives de Lausanne. - Archives de la Cathédrale. - Privilèges du Pays-de-Vaud, Tome II, volume de la bibliothèque de M. Gottfried de Mulinen.
 
Pour une étude plus approfondie du sujet sont à consulter encore: - Acta Conciliorum. - La légende des Saints. - Duchesne Scriptor. Franc. - Mémoires de Loys de Bochat. - Posographia virorum illustrium Pantaleonis. - Stumpf. - Guilliman. - Goldast. - Chronica Raurac. Wurstisii. - Bacelini topo-chrono-stemmotegraphica Germaniae - Philiberti Angonis arbor gentilitia principum Sabaudiae. - Paradin. - Champier. - Guichenon. - Dunod. - Chiffelii Vesontio. - Stettler, le grand manuscrit, duquel la chronique imprimée est l'extrait. - Les Actes des visites diocésaines. J'ai vu et parcouru celles des années 1413, 1416. - Chronique de Vaud. - Le Cartulaire.

Table des matières

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* Il y avait à cette époque à Genève sept hôpitaux.

Le premier, nommé le Grand Hôpital, jouit d'environ 2000 écus de rente ; il a été fondé pour les malades, qu'on renvoie dès qu'ils sont guéris et qu'on les a habillés, à la réserve des invalides qu'on y garde. Il y a un directeur, un chapelain, un médecin, un chirurgien, un apothicaire et quelques autres officiers ; un syndic y préside et en a la principale direction.

Le second hôpital a retirer les pauvres orphelins ; et ils y étaient instruits et élevés à quelque métier ; il a été fondé par le pape Martin V, au moyen d'aumônes ramassées pendant son séjour à Genève.

Le troisième sert à loger et entretenir les pauvres de la ville que la vieillesse met hors d'état de gagner leur vie ; il a été fondé par la duchesse Yolande de Savoie.

Le quatrième recevait les pèlerins, à qui l'on donnait trois repas ; il a été fondé par Anne de Chypre, duchesse de Savoie.

Le cinquième est l'hôpital des pestiférés.

Le sixième, fondé par Amédée IX, est destiné pour les insensés.

Le septième, fondé par l'évêque Jean-Louis de Savoie, reçoit les enfans trouvés.
(Fragmens sur Genève, pag. 216.)
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** Heriges. Hérégie, hérésie signifie souvent sorcellerie.
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*** Burgoz-maître, maître bourgeois.
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**** Le Conseil s'assemble les mardis et jeudis. Les honoraires du bourgmaître sont de 28 livres ; ceux du boursier de 100 florins, ceux des gouverneurs de 28 livres. Les conseillers reçoivent 6 deniers par séance ; s'ils font défaut ils paient 3 sous d'amende à la première fois, 6 sous à la seconde, à la troisième ils sont exclus du Conseil. Le bourgmaître a pour assistans le Maisonneur, le Boursier, les Gouverneurs. Les banderets ont entrée en Conseil, mais sans voix délibérative.
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*1 Voyez quelques traits de la correspondance de Berne avec l'Évêque, dans Ruchat, Hist. de la Réformation, T. I. page 605 de l'édition nouvelle, 1835.
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*2 L'énumération de ces griefs se lit dans Ruchat à la page 54 de la nouvelle édition de 1835, et en abrégé à la page 54 du Chroniqueur.
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*3 Certaines copies portent Fribourg au lieu de Soleure. Nous suivons la version qui nous parait la plus probable et qui s'appuie sur le titre déposé aux archives de Lausanne.


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- Allemands - Amédée - Angonis - Anne - Antony - Aoste - Augsbourger -

Bacelini - Bern - Berne - Bernensia - Bochat - Boëge - Bourg - Boverat - Brigite - Buch - Burgoz -

Cappel - Challand - Champier - Charles - Chiffelii - Chillon - Christ - Christo - Chronica - Chypre - Claire - Claude - Collectanea - Come - Conciliorum - Coppet - Corsier - Cudrefin - Cyro -

Diesbach - Dieu - Dommartin - Duchesne - Dunod -

Empire - Essertines - Estavayer - Étienne - Évangile -

Farel - Flon - Fluvio - Fontanel - Fontanne - Fribourg - Fribourgeois - Froment -

Genève - Genevois - Germaniae - Gingins - Goldast - Gottfried - Gruner - Gruyère - Guichenon - Guilliman -

Helvetica - Hérégie - Heriges - Herman -

Jean - Jésus -

Krumenstoll -

Laurent - Lausanne - Lausannois - Leu - Leyra - Louis - Loys - Luther - Luthériens - Lutry -

Maisonneur - Marc - Martin - Mémoires - Michel - Miscellanea - Monod - Morat - Morges - Mulinen -

Nicolas - Nyon -

Oberlandais - Ormont -

Palud - Pantaleonis - Payerne - Peney - Philiberti - Posographia -

Raurac - Rome - Ruchat -

Sabaudiae - Salomon - Savoie - Savoyards - Soleure - Stettler - Stumpf -

Vagnon - Vaud - Versoix - Vesontio - Vevey -

Wurstisii -

Yolande -

Zwingli -

 

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