Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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L'ÉGLISE DE L'UNITÉ DES FRÈRES 


CHAPITRE XVI

LA DISPARITION DES DERNIERS REPRÉSENTANTS DE L'EPOQUE DE ZINZENDORF

 

Pendant que l'Eglise de l'Unité accomplissait l'oeuvre de son organisation définitive et qu'elle s'efforçait de faire valoir, dans ses Missions et dans la patrie, l'héritage que lui avait laissé son époque classique, ils s'en allaient, les uns après les autres, ceux qui, contemporains de Zinzendorf, avaient vu de leurs yeux le grand passé. La plupart d'entre eux, après une vie généreusement dépensée au près et au loin, an service de Christ et de leur Eglise, vinrent mourir à Herrnhut et reposer sous les tilleuls du Hutberg. Celui qui termina la longue série de ces hommes et de ces femmes distingués, fut Jérémie Risler, décédé à Herrnhut, en 1810, âgé de quatre-vingt-onze ans.

Parmi cette nuée de témoins recueillis dans les demeures éternelles, nous relèverons les quelques noms suivants:

Le 1er avril de l'année 1766, s'endormit en paix l'évêque Léonard Dober, membre du directoire de l'Eglise, après avoir été, dans le temps, son premier missionnaire et son ancien en chef. On sait le rôle prépondérant que cet homme avait joué jusqu'en 1741. Dépouillé alors des fonctions qui l'avaient élevé au-dessus de tous ses frères, il continua, à servir ceux-ci, avec une grande humilité, dans une série de postes divers durant plus de vingt ans encore. Lui disait-on, vers la fin de sa vie, qu'on ne pouvait se passer de lui, il répondait: «L'Eglise a été déposée sur le coeur de Celui qui la porte ». Les noms de toutes les communautés étaient sur ses lèvres mourantes. Vrai sacrificateur du sanctuaire, il ne cessa d'intercéder pour ses frères que lorsque le Maître l'appela à lui.

Six ans plus tard, David Nitschmann, le tisserand, premier évêque de l'Eglise de l'Unité renouvelée, suivit dans la mort celui avec lequel, un jour, il avait ouvert, à St-Thomas, la campagne missionnaire morave.

Après une vie invariablement simple, austère, entièrement consacrée au service de Christ, il quitta ce monde à Bethléem, en Pennsylvanie, âgé de soixante-seize ans.

L'été de l'année 1777 vit partir Frédéric de Watteville, le plus ancien ami de Zinzendorf. « Personne ne fût jamais « Frère » mieux que lui, » dit Schrautenbach. Homme plein de grâce et de coeur pour tous, et mettant du coeur partout, humble, n'aspirant jamais aux places élevées, d'une rare fidélité, possédant la confiance même de ceux qui se méfiaient de chacun, il était généralement aimé et vénéré par ses frères. Aussi l'Eglise fit-elle mettre cette épitaphe sur sa tombe : Il aida, dès le commencement, à bâtir l'Eglise ; il la vit verdir et fleurir; il s'en réjouit, puis il entra dans son repos avec louange et actions de grâce.

Frédéric de Watteville précéda de six ans son frère aîné, Nicolas, que Dieu reprit à lui à Herrnhut. Le 29 mars de l'année 1781 le vieillard de quatre-vingts ans, encore employé au service des Missions, eut une légère attaque. Souriant, il dit alors à quelques amis qui étaient venus le voir: « Le Sauveur a heurté à ma porte ; il m'appellera bientôt ». Peu de semaines plus tard, le Maître vint, et l'introduisit dans sa gloire.

Encore un an, et l'Eglise perdit, en 1784, à Barby, Abraham de Gersdorf, qui lui avait rendu d'éminents services dans ses négociations politico-religieuses, souvent fort compliquées, en Hollande, à Berlin, à Londres et ailleurs, si bien qu'il avait reçu de Zinzendorf le titre de chancelier de l'Eglise. Quand Spangenberg, voyant approcher la fin de son collègue, lui demanda: « Mon frère, comment vas-tu ? » - « Admirablement », lui répondit le mourant, et il rendit l'esprit.

Séparé de ces grands selon le monde par sa position sociale, autant qu'il leur était étroitement uni par la foi et une fidélité à toute épreuve dans le service de Christ, Georges Schmidt, l'apôtre des Hottentots, termina ses jours, en 1785, à Niesky, où, modèle d'humilité, il avait passé le soir de sa vie comme manoeuvre et fossoyeur. On le trouva mort, à genoux dans sa chambre, entre onze heures et midi. Quittant son petit jardin, il s'était retiré pour accomplir un engagement à la prière qu'il avait pris avec quelques amis. On a supposé, avec raison, que les derniers soupirs de Georges Schmidt ont été pour l'Afrique dont il avait été le premier missionnaire protestant. (1) A peine, en effet, eut-il fermé les yeux, que de nouveaux et grands horizons s'ouvrirent pour la Mission dans le continent noir.

L'année suivante, 1786, après quarante années environ de fidèle activité dans l'Eglise de l'Unité, Jean-Frédéric Köber entra dans la joie de son Seigneur. Homme d'affaires, très perspicace, d'un caractère véhément, il n'était pas moins pour cela humblement dévoué à Christ, sans lequel jamais il n'entreprit rien, et qu'il confessa courageusement devant chacun. De là, la valeur des services immenses qu'il lui fut donné de rendre à l'Eglise, à l'époque de son organisation et an milieu de difficultés extrêmes. Le 7 août au soir, après quatorze semaines de grandes souffrances, se souvenant avec actions de grâce d'un anniversaire important, il se fit lire quelques cantiques d'adoration et de foi. Mais tout à coup, interrompant le lecteur: « Cessez », cria-t-il à haute voix, « je ne supporte pas tant de joie ». - Le lendemain, vers midi, il expira.

Le coup qui frappa l'Eglise le plus sensiblement, fut la mort d'Auguste-Gottlieb Spangenberg, survenue à Berthelsdorf près Herrnhut, le 18 septembre 1792. Depuis le décès de Zinzendorf, les Frères n'avaient pas, fait de perte plus grande.

Malgré son âge avancé (il était né le 14 juillet 1704), Spangenberg, jusqu'au 13 novembre 179 1, jour où pour la dernière fois il parla en public à Herrnhut, n'avait cessé de vaquer à ses fonctions dans le directoire de l'Eglise. On aurait été tenté de dire de lui, comme de Moïse: Sa vue n'était point diminuée et sa vigueur n'était point passée. A partir du printemps 1792 cependant, des accès de suffocation l'obligèrent de passer les nuits assis dans un fauteuil. Il souffrait quelquefois cruellement, mais jamais aucune plainte ne s'échappa de sa bouche. Des amis venaient-ils s'informer de son état, il aimait à répliquer: « je réfléchis à toute la miséricorde dont le Sauveur use envers moi, et je lui rends grâces, aussi, du bien qu'il m'a fait pendant ma maladie ». Il revit soigneusement tous ses papiers, en annula une partie, rangea en liasses et par ordre de matière ce qui pouvait encore servir, et y mit des étiquettes. Ainsi il était prêt à partir au premier signal du Maître. Dans une belle matinée du mois d'août, désireux de revoir la campagne, il fit transporter son fauteuil au milieu d'une troupe de moissonneurs. Tous vinrent entourer le patriarche qui leur parla de son passé et du vif intérêt qu'il avait toujours porté au bonheur des habitants de Berthelsdorf. Montrant ensuite la riche moisson, il entonna un cantique de louange. Puis il fit offrir aux gens un verre de bière et leur donna, en les quittant, sa bénédiction. Adieux touchants, empreints de cette simplicité cordiale et de cette sérénité par laquelle s'était distingué cet homme éminent.

Très fatigué, il rentra dans sa chambre qu'il ne devait plus quitter. Encore quelques semaines de grande faiblesse, et le vénérable évêque, âgé de quatre-vingt-huit ans, s'en alla en paix, après un ministère dans l'Eglise d'à peu près soixante années.

Le jour des funérailles (23 septembre), on donna lecture d'une notice biographique rédigée par le défunt lui-même et destinée à être communiquée à l'Eglise. Elle se terminait par ces mots : « je bénis Dieu de m'avoir permis de servir l'Eglise évangélique des Frères pendant cinquante et quelques années. Quant à raconter ici les voyages et les travaux accomplis par moi pour l'Eglise, cela n'en vaut pas la peine. Ce dont je serais reconnaissant envers le Sauveur et envers mes frères, c'est qu'ils pardonnassent et oubliassent les fautes innombrables qui n'ont pas fait défaut dans ma vie. D'après la grâce que Dieu nous a faite, à vous et à moi, vous auriez pu vous attendre à quelque chose de mieux. Que faire? je dis du fond du coeur: Pardonne, Seigneur, comme nous pardonnons, nous aussi! »

« Me demandez-vous, quelles sont les dispositions de mon coeur à l'heure où j'écris ces choses, je réponds. je ne connais, dans toute l'Eglise de l'Unité, pas de pécheur plus grand que moi-même. C'est ainsi que je parais devant le Scrutateur des coeurs et des reins. Mais ce que je sais aussi, c'est que je suis une brebis du bon Berger qui écoute sa voix, qu'il connaît, Lui, et qui ne périra jamais. Il lui a plu de faire de moi, misérable pécheur, un enfant de Dieu, un temple du Saint-Esprit, un membre de son corps et un héritier de la vie éternelle. Gloire à son plan d'amour, aux siècles des siècles! Amen. »

Telles furent les dernières confessions d'un homme auquel l'Eglise de l'Unité a accordé de tout temps, à côté du comte de Zinzendorf, la seconde place dans les rangs de ses serviteurs les plus distingués.

Sommé, en 1733, par les chefs du piétisme, de quitter Halle ou de renoncer à ses relations avec Zinzendorf, le jeune et savant professeur Spangenberg, tournant le dos à la carrière brillante qui s'ouvrait devant lui, avait choisi l'exil et s'était rendu à Herrnhut. Il y avait trouvé ce qu'il fallait à son âme. « je confesse devant Dieu », disait-il en 1784, « que j'envisage mon union avec les Frères comme le moyen dont Jésus s'est servi pour me garder, jusqu'à ce jour, dans la vérité et dans la droiture. »

Reconnaissant de tout le bien qu'elle lui avait fait, Spangenberg mit à la disposition de l'Eglise toutes les qualités de sa grande et belle nature. Il l'a infatigablement servie, soit à l'étranger, soit dans la patrie. Aux Missions (St-Thomas 1736); dans l'Amérique du Nord, où il fit trois séjours (1735, 1744, 1751-1762) et déploya une activité remarquable dans des circonstances fort difficiles; en Angleterre (1735 et 1740), où il fonda la société pour la propagation de l'Evangile dans le monde païen (1741); en Allemagne (1762,-1792) où, devenu membre du directoire de l'Eglise, il exerça sur celle-ci une influence puissante à l'heure critique de l'avènement des temps nouveaux.

Aussi bien qualifié pour la cure d'âmes que pour des travaux littéraires (vie de Zinzendorf, 1772-1775 ; Idea fidei Fratrum, 1777-1778), esprit organisateur, mais dépourvu de tout ce qui rappelait le monarque, constamment le même et cependant s'accommodant aux circonstances, plein d'énergie et de courage et tout à la fois doux et humble de coeur, toujours prêt au sacrifice sans jamais se prévaloir de cette vertu, prudent comme le serpent et simple comme la colombe, toujours sobre et toujours rempli de feu sacré, Spangenberg, jusqu'à sa blanche vieillesse, a puissamment et sagement édifié l'Eglise de l'Unité.

A l'heure du débordement malsain des années 1745 1750, il tint ferme et ne se laissa pas ébranler.

En face de l'éblouissante richesse du génie et de la pensée de Zinzendorf, il vit clair, abandonnant ce qui était sans valeur et retenant ce qu'il fallait pour l'édification du corps de Christ.

En présence de la grande diversité d'opinions et de vues qui, après la disparition du comte, se fit jour dans le directoire et dans les Eglises, il sut ramener la concorde et la paix, apaisant le tumulte avec autant de fermeté que d'amour.

Au milieu d'une épouvantable tempête qu'il endura sur mer en 1737, Spangenberg s'écria: « Il ne tombe pas un cheveu de ma tête sans la volonté de mon Père; ce qu'il trouve bon pour moi, soit pour ma vie, soit pour ma mort, est bien fait à toujours ». Trois ans plus tard, il ajouta: « je suis parfaitement au clair sur ce fait qu'il n'y a de vrai repos pour le coeur que dans le sacrifice de Christ. Quiconque a compris que ce salut lui appartient, a le droit d'être joyeux et content. »

Le secret de la vie si simple et si grande qui a passé sous nos yeux, se révèle dans ces deux paroles.



Table des matières

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(1) Si l'on excepte Pierre Hegling qui, au XVII ème siècle, avait évangélisé l'Abyssinie.

 

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