Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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L'ÉGLISE DE L'UNITÉ DES FRÈRES


CHAPITRE VI

« L'EGLISE DES PELERINS »

 

Lorsque Zinzendorf, en 1736, reçut le premier décret royal qui le bannissait du territoire de Saxe, il dit: « je ne pourrais déjà, sans cela, pendant les dix ans qui vont suivre, m'établir en permanence à Herrnhut. C'est l'heure d'organiser l'Eglise des pèlerins et d'annoncer le Sauveur au monde entier. Le lieu où il y aura l'oeuvre la plus réelle à accomplir pour Lui, voilà dorénavant notre patrie. »

Accepter résolument l'exil et se consacrer, avec ce que la colonie morave possédait de plus vaillant et de plus distingué, aux affaires de Dieu dans le monde, pour Zinzendorf c'était sacrifier la place centrale que Herrnhut avait occupée jusqu'alors. Avec le comte et son entourage, la doctrine, les principes d'organisation et de vie de l'Eglise naissante, allaient se trouver transportés tantôt ici, tantôt là. C'était faire naître de nouveaux foyers moraves et réduire Herrnhut au rôle d'un premier entre ses égaux. On comprend à quel point ce fait compromettait l'existence de la plante encore si jeune que Dieu avait fait croître sur le versant du Hutberg. Mais sa main demeurait étendue sur le village auquel il avait ravi l'homme qui en avait été la providence terrestre. « Pas un clou n'y a été ôté de sa place par l'ennemi », disent les annales. « Herrnhut, en l'absence du comte, demeura debout comme une habitation de Dieu au milieu des hommes ». Les adversaires, en cela, essuyèrent une défaite.

Ils ne réussirent pas non plus quant à leur désir - partagé d'ailleurs, on va le voir, par Zinzendorf lui-même - d'empêcher la naissance d'une nouvelle Eglise et de retenir les Frères dans le giron de l'Eglise luthérienne. On avait pu envisager Herrnhut comme faisant partie de la paroisse luthérienne de Berthelsdorf, mais il était impossible d'appliquer la même manière de voir à tous ces centres moraves qui ne tardèrent pas à se produire dans les pays les plus divers et dans les conditions ecclésiastiques les plus variées. Le vin nouveau, comprimé pendant un temps dans la vieille outre, finit par déborder et par réclamer un vase à lui. De toutes façons, l'opposition contre Zinzendorf et les Moraves arriva donc à des fins contraires à celles qu'elle avait rêvées.

Sous le coup de son bannissement, Zinzendorf se rendit d'abord dans l'ouest de l'Allemagne où il se proposait de travailler parmi les piétistes réformés. Il ne pouvait être question, même ici, de propagande en faveur d'une Eglise nouvelle. Celle-ci, pour le comte moins encore que pour n'importe lequel de ses contemporains, n'existait pas. Tout ce que Zinzendorf ambitionnait, c'était de proclamer toute la plénitude de la grâce divine en Jésus-Christ, le Sauveur du monde, et de grouper les âmes autour de cet Evangile-là.

Au mois de juin 1736, il trouva le champ d'activité qu'il cherchait, dans la Wetterau, contrée située entre le Taunus et le Vogelsberg. C'est là qu'il réussit à louer, au milieu de cinquante-six familles pauvres et délaissées, la Ronneburg, vieux château à moitié en ruines, appartenant au comte Isenburg-Wächtersbach. Il s'y installa avec sa famille non seulement, mais aussi avec un cercle de frères et de soeurs dont le nombre variait et qui, à part un noyau assez fixe, ne se composait pas toujours des mêmes personnes.

C'est à ces compagnons d'exil et d'oeuvre qu'il donna le nom d'Eglise des pèlerins. Cette Eglise, soeur cadette de celle de Herrnhut, mais ambulante, appelée à séjourner tantôt dans un lieu, tantôt dans un autre, devait, selon la pensée du comte, propager d'une manière toute particulière les trésors de connaissance et de grâce que Dieu avait confiés aux Frères. Elle devint aussi, avec le temps et pour quelques années, l'organe directeur de toute l'activité morave, telle que, manquant encore de la base d'une constitution ecclésiastique nettement formulée, elle se poursuivait dans le monde chrétien et parmi les païens.

Après six semaines de travail, Zinzendorf, laissant l'Eglise des pèlerins dans la Ronneburg, partit pour les provinces baltiques, où Herrnhut, depuis la visite de Christian David, en 1729, comptait de nombreux amis parmi la noblesse, le clergé et le peuple. En se rendant dans ce milieu, le comte cédait à de pressantes sollicitations. Aussi l'y reçut-on à bras ouverts et son séjour, quoique bien court, - un mois - laissa-t-il des traces profondes. Il en résulta non seulement une traduction de la Bible en esthonien, l'ouverture d'une école normale chrétienne à Wolmarshof, et une profonde impression produite sur un grand nombre de coeurs, mais aussi une oeuvre que Dieu a donné à l'Eglise des Frères de continuer, à travers un siècle et demi, et jusqu'à nos jours.

En l'absence du comte, l'Eglise des pèlerins traversa de nombreuses contrariétés et fut obligée de quitter la Ronneburg pour se réfugier à Francfort-sur-le-Main. C'est là que la rejoignit son chef, revenant de la Russie par Berlin, ou avait eu lieu l'entrevue, mentionnée plus haut, avec Frédéric-Guillaume 1er. Les lettres de recommandation du roi firent merveille. Elles ouvrirent, devant Zinzendorf et les siens, un nouveau refuge dans le château de Marienborn, mémorable par ce fait que l'Eglise des pèlerins, numériquement augmentée pour l'occasion, y tint, du 6 au 8 décembre 1736, une suite de séances auxquelles on donna le nom de premier

« Synode de l'Eglise. » « Nous n'oublierons pas ces trois jours heureux », disait plus tard le comte; « c'est là qu'ont été jetés les fondements de toute l'oeuvre que nous faisons pour le salut de plusieurs milliers d'âmes. »

La décision la plus importante du « Synode » fut celle de créer, dans la Wetterau, sous la forme d'une colonie semblable à Herrnhut, un nouveau lieu de refuge pour les Moraves, s'attendant à devoir quitter le territoire de Saxe. On obtint, de la part du comte de Büdingen, les garanties les plus complètes, on acheta un terrain au prix de 8000 thalers, et on se mit à construire, à une lieue et demie de Marienborn, le village du Herrnhaag, non sans un certain luxe qui avait nécessairement fait défaut à Herrnhut et que facilitaient quelques riches protecteurs des Frères en Hollande et ailleurs. A peu près en même temps, deux autres colonies, devant servir au même but que le Herrnhaag, prirent naissance, l'une dans le Holstein - Pilgerruh - l'autre en Hollande - Heerendyk. A d'autres endroits encore, on retrouvait l'influence caractéristique des Frères dans la naissance de nouveaux groupes plus ou moins organisés. De ce nombre furent Francfort, Berlin, où Zinzendorf, en 1738, prononça une suite de discours fort remarqués, Iéna, où étudiait le fils du comte, Christian René, Amsterdam, Bâle (1739). Au delà de la Manche, le ministère de Pierre Böhler, de Iéna, décida, en 1738, la création d'une branche anglaise de l'Eglise des Frères. Plus loin encore, en Pensylvanie, l'activité de Spangenberg (depuis 1736) prépara la future branche américaine.

L'Eglise des pèlerins, nous l'avons dit, occupait alors une place centrale au milieu de ces formations nombreuses et variées. Tout en ayant son pied à terre dans le château de Marienborn, elle voyageait beaucoup, réalisant par là le nom qui lui avait été donné. Fractionnée ou dans son ensemble, se composant tantôt de Zinzendorf et de quelques hommes et femmes d'élite seulement, tantôt d'un grand nombre de personnes, elle paraissait dans les lieux les plus divers. Nous la trouvons, entre autres, en 174 11 à Genève où, représentée par cinquante personnes groupées autour du comte et de la comtesse de Zinzendorf, elle résida quelque temps à Plainpalais. A son retour, elle s'arrêta à Montmirail, que le comte, à cette occasion, destina à être un lieu de rendez-vous pour les Frères de la Suisse allemande et romande. Plus tard, une société de quarante frères et soeurs fit un séjour dans deux vastes maisons de Heerendyk. Delà Zinzendorf, avec une suite moins nombreuse, se rendit à Londres où, avant son départ pour l'Amérique, devait se tenir, au mois de septembre 1741, une réunion d'adieux à laquelle nous aurons à revenir plus tard.

Vers la fin de 1740 et dans le courant de l'année 1741, l'Eglise des pèlerins, au milieu de laquelle était revenu, pour quelque temps, l'excellent Spangenberg, conçut de nouveaux plans pour l'avenir. Une grande porte semblait ouverte dans les Etats-Unis de l'Amérique du Nord, le pays de la liberté religieuse. Spangenberg insistait. Zinzendorf, quelque peu fatigué des difficultés que la patrie ne cessait de semer sur sa route, approuvait hautement une extension de l'oeuvre au delà de l'océan. Il n'en fallait pas davantage pour qu'une colonne de frères et de soeurs, - parmi lesquels Anna Nitschmann - s'ébranlât, en 1740. Le comte se proposait de la suivre.

On décida de faire un pas en avant, en Angleterre aussi. Le méthodisme de Wesley et de Whitefield avait commencé à s'y heurter contre la doctrine de la grâce et du péché telle que la prêchaient les Frères. Peu nombreux, loin d'être définitivement organisés, ces derniers, qu'on commençait à appeler Moravians, avaient besoin d'un nouvel appui, et l'Eglise des pèlerins résolut de le leur envoyer dans la personne de Spangenberg.

Mais une autre question encore, d'une nature plus grave, demandait une solution. Agitée, dans les cercles de Herrnhut depuis plus de dix ans déjà, reprise sous la pression qu'exerçaient les circonstances dans l'Eglise des pèlerins, elle s'imposait de plus en plus à tous les esprits. Nous voulons parler de la question d'Eglise. Les Frères, tels que la main de Dieu les avait groupés, dont les rangs s'étaient considérablement augmentés, auxquels avaient été confiées tant de missions au près et au loin et qui avaient leur doctrine et, dans bien des endroits, une organisation ecclésiastique franchement caractérisée, ces Frères formaient-ils ou non, une nouvelle Eglise à côté des Eglises existantes ? Etaient-ils le renouvellement de l'ancienne Eglise de l'Unité? - Au sein de l'Eglise des pèlerins même, on n'était pas d'accord à ce sujet. Nous allons le voir, en nous tournant à notre tour vers cet important détail.



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