Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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HISTOIRE DE LA TERRE





SEPTIÈME JOUR.

Et s'achèvent les cieux et la terre et toute leur armée. Et Dieu achève au septième jour ses oeuvres qu'il a faites ; et il se repose au septième jour de toutes ses oeuvres qu'il a faites.
Et Dieu bénit le septième jour, et il le sanctifie, parce que en ce jour il s'est reposé de toutes ses oeuvres que Dieu a créées les faisant (ou pour les faire).
Telles sont les origines des cieux et de la terre quand ils furent créés.

Le septième jour n'a ni soir ni matin. Et aussi ne pouvait-il ressembler à cet égard aux précédents ; car la terre venait d'être déclarée très bonne ; elle ne devait donc plus être bouleversée par une nouvelle invasion des forces désordonnées du chaos. Et le sixième jour a fait place au suivant sans qu'aucune crise violente, aucun fait physique ait marqué la fin de l'un et le commencement de l'autre.

Les six premiers jours étant de longues périodes, le septième doit pareillement embrasser plusieurs siècles. Il date du Paradis, il dure encore, il ne cessera qu'avec l'humanité et la terre. C'est le temps du repos du Dieu créateur, du simple développement des êtres physiques et du travail de l'homme.
Cependant le repos de Dieu n'est pas de l'oisiveté : il achève ses oeuvres pendant toute la durée du septième jour. Paroles d'une grande portée, qui nous autorisent à admettre que l'action créatrice de Dieu n'a pas complètement cessé depuis l'apparition de l'homme (1), et qu'elle pourrait d'un instant à l'autre se déployer de nouveau, si elle y était appelée par quelque circonstance particulière, telle que les ravages qu'a produits le péché sur la terre.

En effet, le péché d'Adam, dont la vision cosmogonique fait complètement abstraction, a jeté une grande perturbation dans le repos divin du septième jour. Non seulement l'Éternel, pour punir le mal et le réprimer, a lâché de nouveau la bride aux puissances dévastatrices de l'antique abîme, et livré la nature à vingt fléaux différents. Mais il a modifié son oeuvre des six jours : il a changé la forme du serpent, qui, avant d'avoir séduit Ève, ne rampait pas encore dans la poussière ; il a créé après la chute les ronces et les chardons.
Cette création, que motive le péché, s'est-elle bornée à ces plantes-là ? Nous serait-il peut-être permis de l'étendre à ces végétaux, à ces animaux qui distillent un poison mortel, à toutes les bêtes féroces de la terre ferme ? Ou comment expliquer l'apparition, après le Déluge, de certaines flores et faunes particulières, sans avoir recours à l'hypothèse d'une action créatrice de Dieu qui se prolongerait fort avant dans le septième jour ?

Au moins est-il certain que sans le péché il n'y aurait point eu de Déluge, que ce cataclysme a été, comme nous le démontrerons plus loin, non point une simple inondation, mais une destruction et une transformation de la terre entière, et qu'il a été suivi pendant plusieurs siècles de nombreuses révolutions locales. Saint Pierre va jusqu'à déclarer qu'il faut être un moqueur aveuglé par ses propres convoitises, pour prétendre que toutes choses sont demeurées dans le même état depuis la création, et qu'il y a péché volontaire à ignorer que la terre première a péri dans les eaux du déluge.

Poursuivons donc jusqu'à sa destruction au sein des flots l'histoire de cette terre que nous avons vue sortir des eaux du chaos.
Adam et Ève quittent leur jardin à regret. Dieu, les en fait sortir ; ils tardent, et il les en chasse, sans doute en faisant trembler le sol sous leurs pieds (2) ; et l'apparition des Chérubins avec leur épée de feu a probablement été accompagnée de quelque révolution physique, qui aura bouleversé la contrée du Paradis, et dont la géologie retrouvera un jour la trace en étudiant la vallée de l'Araxe supérieur.

Caïn est meurtrier. La terre le maudit en lui retirant sa force (Gen. IV, 12) et ses fruits. Cette force est celle qu'elle a reçue lors du chaos, quand elle a été vivifiée par l'Esprit de Dieu, celle qui lui a fait pousser son jet au troisième jour, celle qui circule à sa surface et y maintient la fécondité. Quand cette force abandonne le sol que l'homme cultive, et qu'elle se replie dans les entrailles de la terre, de vastes contrées deviennent stériles, ou du moins les récoltes manquent, la famine éclate, les peuples périssent. La menace faite à Caïn par la terre s'est accomplie sous son arrière-petit-fils Méhujaël, dont le nom signifie détruit de Dieu. Sa génération a été en majeure partie enlevée par une effroyable sécheresse, que nous avons vue jouer un des premiers rôles dans toutes les mythologies païennes (3). Elle a duré, d'après les traditions lydiennes, au moins dix-huit ans, quarante d'après les Védas. C'est ce fléau du feu mentionné dans Sanchoniathon, chanté par Nonnus, personnifié en Chine par Tchi-Yéou, en Égypte par Typhon, fils du Soleil, en Grèce par Phaëthon, chez les Arcadiens par Cérès Furie, chez les Éoliens par de jeunes filles éprises de Neptune.
C'est chez les Perses le combat de Taschter et d'Epéoscho ; chez les Hindous, celui d'Indra et des Asouras ; chez les Phéniciens, celui du Ciel et de Saturne ; chez les Grecs, celui de Jupiter et des Titans.
Ce sont les nuées dérobées par Vritra ou par Mercure. C'est la faim insatiable de Lityersès ou d'Erysichton.

La Genèse, qui nous fait connaître la cause morale du fléau, nous en donne aussi l'explication physique : la vapeur qui seule arrosait la terre lors de la création d'Adam, aura diminué de plus en plus depuis la chute sans être immédiatement remplacée par la pluie, et la transition de l'état primitif de l'atmosphère à l'état subséquent aura été marquée par un temps d'une aridité inouïe et d'indicibles angoisses.
Les mythes païens s'accordent d'ailleurs à célébrer la pluie unique qui a mis fin au fléau, et qui était une vraie crise de la nature terrestre : c'est le sang du Ciel qui tombe sur la terre, c'est celui de Méduse qui produit Pégase (le symbole des sources) ; c'est Jupiter tombant en pluie dans la prison de Danaë ; c'est la pluie extraordinaire qui termine le combat des Asouras et celui d'Epéoscho ; c'est la naissance d'Agdestis, d'Erichtonius, d'Orion.

Cette première pluie a ouvert une nouvelle ère de fécondité. Sous les fils de Lémec, les Caïnites ont eu un temps de grande prospérité et de gloire. On dirait cependant, à entendre les plaintes du père de Noé, que la malédiction que l'Éternel avait prononcée contre la terre rendait très pénible le travail du laboureur (Gen. V, 29)

Cette malédiction devait se manifester spécialement par l'apparition des ronces et des chardons, qui représentent la flore des terres stériles ou des déserts. Les déserts, les steppes, ne peuvent avoir pour habitants que des nomades, et comme le monde antédiluvien a eu ses nomades, qui avaient pour père Jabal (Gen. IV, 20), nous devons en conclure que du vivant de ce fils de Lémec existaient déjà des steppes. Peut-être s'étaient-ils formés pendant le fléau du feu.
De la chute au Déluge, le règne animal, d'après la Genèse, s'est modifié, s'est altéré comme le règne végétal, comme l'atmosphère et comme la contrée du Paradis.

Le serpent qui a séduit Ève avait, au dire des mahométans, une tout autre forme que celle qu'il a maintenant, et une beauté extraordinaire ; c'était probablement quelque reptile à quatre pieds, quelque saurien d'une espèce inconnue. On a voulu faire de lui un serpent ailé ; mais le texte le range parmi les bêtes des champs et non parmi les habitants de l'air. Il a été condamné à manger, lécher la poussière : expression figurée qui indique simplement le dernier degré de l'humiliation, comme le prouvent les passages suivants : Psaumes LXXII, 9 et CII, 10 ; Esaïe XLIX, 23 (4). Nous avons vu que le serpent conservera au millénium sa forme maudite (5).
Avant le Déluge toute chair avait corrompu sa voie sur la terre (Gen. VI, 12). Par le terme de toute chair le texte sacré entend, dans le récit du Déluge, les hommes et les animaux (Gen. VI, 13, 17, 19 ; VII, 15, 16, 21 ; VIII, 17 ; IX, 11, 13, 16, 17.).

Les animaux eux-mêmes participaient donc à la corruption qui avait envahi l'humanité entière. Mais des êtres dépourvus de raison ne peuvent pécher à la façon de l'homme. On ne peut pas même dire que les instincts sanguinaires des carnassiers étaient alors parvenus à leur dernier degré de développement ; car l'instinct est toujours le même. Nous devons donc entendre, ce nous semble, ce passage, d'une excessive prépondérance que les bêtes féroces auraient acquise sur les animaux herbivores.

L'histoire physique de l'homme pendant la période antédiluvienne nous offre trois énigmes à résoudre : sa nourriture, sa longévité et sa taille.
Avant la chute, nous l'avons dit, l'homme ne se nourrissait que de fruits. Pécheur, il dut labourer la terre, et les céréales devinrent son principal aliment, auquel s'ajouta bientôt, sans aucun doute, le lait des troupeaux. Ce n'est que depuis le Déluge que l'homme a reçu la permission de se nourrir de la chair des animaux (Gen. II, 16 ; III, 19 ; IX, 3).
Mais les Caïnites avaient-ils attendu cette permission pour le faire ? La grande sécheresse de Méhujaël ne les avait-elle pas contraints à recourir à tous les genres possibles de subsistance ?
Les traditions païennes ne laissent aucun doute sur ce point : ainsi Sanchoniathon fait les pêcheurs et les chasseurs plus anciens que le Déluge. Il paraît même qu'alors on mangeait parfois de la viande crue et qu'il y avait des anthropophages (6).
Créé à l'image de Dieu, Adam ne devait pas mourir, mais être simplement transformé. Il pèche : le salaire du péché c'est la mort ; et désormais tout homme mourra. La loi nouvelle de la mort est l'abolition d'une loi primitive de la vie, qui est la loi fondamentale et véritable. C'est en vertu de cette loi qu'ont eu lieu l'ascension d'Hénoc et celle d'Élie : ce qui nous semble un miracle inadmissible, une monstrueuse exception, est donc, au contraire, la règle, et le vrai miracle, l'exception réellement monstrueuse, c'est la mort (7). Aussi voyons-nous l'ordre de choses primitif reparaître à la fin des temps, et à la seconde venue de Christ, tous les vrais fidèles échapper à la mort par une transformation instantanée (1 Thessal. IV, 14-17). C'est ainsi que tout s'enchaîne dans l'intuition biblique.

Mais poursuivons. L'homme créé pour l'immortalité pèche et doit mourir. Le péché qui produit la mort lutte contre une nature pleine de sève et de vie, et n'achève son oeuvre de destruction qu'après huit et neuf siècles. De là l'extraordinaire longévité des Antédiluviens, des Caïnites, aussi bien que des Sethites. Mais une vie si longue donne au péché une trop grande puissance : Dieu décrète de réduire les jours de l'homme à cent vingt ans (Gen. VI, 3) et, en effet, cette réduction s'opère après le Déluge, du temps des fils de Noé à celui d'Abraham et de Moïse. Lors du rétablissement de toutes choses, l'homme vivra de nouveau plusieurs siècles, et après la résurrection il entrera dans cette vie éternelle en vue de laquelle il avait été fait au commencement. On peut rejeter la Bible entière, mais ce qu'on ne doit pas se permettre, c'est de tronquer sa doctrine de la vie et de la mort, en niant, par exemple, la longévité des patriarches Sethites, qui est la conséquence nécessaire de prémisses sur lesquelles repose toute l'économie du salut.
On a prétendu que les années du monde primitif étaient d'un mois. À ce taux-là, le déluge a eu lieu cent trente-huit ans après la création, Keinan a été père avant six ans, et les trois fils de Noé étaient âgés de huit ans et quelques mois quand ils entrèrent dans l'arche avec leurs femmes ! Au reste le récit du Déluge ne laisse aucun doute sur la vraie durée de l'année de la primitive humanité.

Les traditions des païens confirment d'ailleurs la longévité des Antédiluviens. L'historien Josèphe s'appuie sur les témoignages de plusieurs écrivains, dont un seul, Hésiode, s'est conservé jusqu'à nous. Or, ce poète grec parle d'un temps où l'homme, à cent ans, était à peine sorti de l'enfance (8).
Une croissance de plus d'un siècle suppose une taille plus haute que la nôtre. La preuve biblique de ce fait se trouve dans le mot hébreu RÉPHAÏM, qui signifie à la fois ombres et géants, parce que les premières ombres qui aient peuplé le Schéol, ont été les Antédiluviens à la taille gigantesque. Au milieu de cette race colossale se distinguaient les Néphilim, dont la stature dépassait encore la mesure moyenne. Toutefois nous ne devons pas prendre à la lettre les paroles des espions hébreux, qui, pour épouvanter le peuple au désert, comparent les Hanakins d'Hébron à des Néphilim auprès desquels ils ne paraissaient que comme des sauterelles (Nombres XIII, 32, 33).
D'ailleurs Baruc rappelle l'existence des géants antédiluviens, et les dix rois chaldéens, qui sont les patriarches sethites, passaient pareillement pour des géants (9). Les traditions des païens concordent en plein avec celles des Hébreux sur la haute taille de la primitive humanité (10). Si les païens ont attribué à leurs géants une stature démesurée, c'est qu'ils prenaient pour des ossements humains les débris fossiles des animaux monstrueux qui ont vécu avant l'homme.
Tels sont les détails que la Genèse nous donne sur l'histoire de l'homme physique et de la terre avant le Déluge. Nous ferons de ce cataclysme le sujet d'une étude spéciale. Il nous suffit ici de savoir qu'il a détruit la terre primitive et que la terre actuelle est sortie de ses eaux.

En géologie, la dernière révolution universelle est le diluvium, qui clôt la période des terrains tertiaires et ouvre celle des terrains quaternaires et des temps historiques.
Le diluvium doit donc nécessairement être identique avec le déluge biblique. Il ne peut exister sur ce point de doute qu'autant qu'on fait du déluge de Noé une simple inondation, ce qui équivaut à en nier la réalité, car il n'est le Déluge qu'à la condition d'être une crise de la nature entière et la plus grande de toutes celles qu'a subies notre globe. La terre, depuis sa création au premier jour, jusqu'à sa conflagration future, n'a été et ne sera détruite qu'une seule fois, au temps de Noé (11)
.
Cependant nous avons vu que les premiers animaux sont, d'après la Genèse comme d'après la géologie, les habitants de la mer, et que le cinquième jour paraissait correspondre aux terrains de transition.
II résulte de là que les trois périodes géologiques des terrains de transition, secondaires et tertiaires, sont comprises dans le cinquième jour, le sixième et la partie du septième qui se termine par le Déluge.
Or, nous avons cru retrouver les animaux marins, les amphibies et les oiseaux de la grauwacke et de la houille, des roches triasiques, de l'oolithe et de la craie, dans les êtres créés au cinquième jour. Il ne nous reste donc pour le sixième jour et la période antédiluvienne que les terrains tertiaires avec leurs trois époques éocène, miocène, pliocène.

II y a sans doute une disproportion choquante dans ce partage, qui donne à un seul jour génésiaque cinq immenses époques géologiques, et trois époques fort courtes seulement à un jour et demi. Mais dans l'état actuel de nos connaissances nous ne saurions faire mieux.

Le sixième jour commence par la création des animaux terrestres, c'est-à-dire des quadrupèdes, avec une partie des reptiles.
Les premiers quadrupèdes que connaît la géologie (si l'on néglige l'animal équivoque de Stonefield) apparaissent dans les plus anciens terrains tertiaires : l'époque éocène est celle des grands pachydermes herbivores dont les espèces sont aujourd'hui éteintes, pateothères, anoplothères, lophiodons, etc. Ajoutons que les phénomènes plutoniques ont été très fréquents dans ce temps-là. L'époque éocène sera donc la première partie du sixième jour.

Les espèces de mammifères créés alors ont subsisté jusqu'au diluvium, dont le terrain renferme de leurs ossements. M. Buckland, partant de l'idée erronée que Noé avait recueilli dans l'arche tous les quadrupèdes qui existaient de son temps, et ne retrouvant pas de palaeothères et de lophiodons dans les terrains quaternaires et sur la terre actuelle, avait conclu de la présence de ces animaux dans le terrain diluvien à la non identité du diluvium avec le déluge biblique. Mais ce fait s'explique à notre point de vue de la manière la plus simple, et on ne l'aurait pas constaté par l'observation directe, que nous aurions pu le deviner. Car le sixième jour n'est séparé du septième par aucun soir cosmogonique, par aucune catastrophe générale, et les espèces créées au commencement du sixième jour devaient donc subsister encore au temps du Déluge, à moins toutefois qu'elles n'habitassent une région peu étendue et qu'une révolution locale ne les eût détruites.

L'époque miocène diffère peu de la précédente. Les pachydermes y prédominent encore. Les mammifères qui lui appartiennent en propre sont les plus anciennes formes de nos genres actuels, mastodontes, rhinocéros, tapirs, etc., avec quelques ruminants, et avec le premier singe, qui annonce la prochaine venue de l'homme. Nous pensons que les deux époques éocène et miocène correspondent à la partie du sixième jour qui a précédé l'apparition d'Adam.

Adam aurait donc été créé à l'entrée de l'époque pliocène que clôt le Déluge. Les arbres du paradis que Dieu avait fait pousser des terres au moment de former l'homme, et le blé qui apparaît dans le récit à propos de la chute, appartiendraient à la flore pliocène, qui se distingue entre autres par les premières céréales et qui ne possède pas de vigne.
La faune de cette époque, qui se compose des mêmes genres que la nôtre, et d'espèces qui ne diffèrent de nos espèces que par de plus grandes dimensions, comprendrait entre autres ces quadrupèdes et ces oiseaux qui ont été créés quand Adam habitait déjà le Paradis ; ce sont eux qui lui ont donné ses animaux domestiques, qui ont peuplé les contrées de la zone tempérée où sa postérité s'est répandue, et qui, après avoir traversé dans l'arche le Déluge, ont été les souches de notre faune historique. La haute taille des animaux pliocènes est en harmonie avec celle des Antédiluviens leurs contemporains, et la stature des uns aura diminué comme celle des autres pendant l'époque diluvienne ou quaternaire. Ajoutons que l'on ne connaît pas de serpents antérieurs au diluvium, et nous avons vu que le serpent du Paradis n'était point l'animal qui porte aujourd'hui ce nom et qui rampe sur le ventre. Enfin, la terre antédiluvienne subsistait au milieu de l'eau, et à l'époque pliocène nos continents n'avaient point encore leurs limites actuelles, de vastes régions étant recouvertes par les mers.

Mais si la corrélation que nous établissons entre l'époque pliocène et la terre antédiluvienne, est bien fondée, il faut que nous retrouvions dans la série des terrains tertiaires la distinction entre le sixième jour qui fait partie des temps de création, et le septième qui est un temps de repos.
Or cette distinction, les géologues eux-mêmes l'ont faite à leur insu quand ils ont divisé les terrains tertiaires en terrains inférieurs formés par voie chimique, qui offrent dans certaines localités des couches de trente pieds d'épaisseur, toutes composées d'un nombre infini de céphalopodes microscopiques, qui donnent une idée vraiment saisissante de la puissance de la vie tellurique aux temps de création ; et en terrains supérieurs formés par voie mécanique, et qui ne sont que des amas non cimentés de débris d'autres roches préexistantes.
Reste la grave et difficile question des quadrupèdes et oiseaux carnivores, et de la terre très bonne de la fin du sixième jour.

Cette très grande bonté de la terre, nous croyons avant tout la retrouver dans le temps de calme qui s'est écoulé entre l'époque éocène, pendant laquelle ont eu lieu de fréquentes injections de roches plutoniques, et l'époque pliocène, dont la fin surtout a été signalée par de violentes éruptions volcaniques. Les premiers de ces phénomènes appartiendraient au sixième soir cosmogonique, les seconds seraient une des conséquences de la malédiction dont la terre a été frappée après la chute d'Adam.

Mais ce qui constituerait surtout la très grande bonté de la terre, ce serait la prépondérance des mammifères herbivores pendant les deux époques éocène et miocène. Cette prépondérance est d'autant plus extraordinaire qu'elle est précédée du règne des sanguinaires sauriens de la période oolithique, qui sont les monstres du cinquième jour, et suivie de la domination tout aussi cruelle des grands chats et des hyènes de l'époque pliocène, de cette époque où, d'après la Genèse, toute chair avait corrompu sa voie sur la terre.
C'est ainsi que, des deux parts, l'esprit infernal de carnage triomphe d'abord dans les mers, où de nos jours encore il est très puissant, est ensuite entièrement vaincu sur la terre ferme à l'apparition des premiers quadrupèdes, et reprend de nouveau le dessus ayant le Déluge avec un redoublement de violence et de férocité.
Sa première victoire se rattache aux soirs cosmogoniques et aux ténèbres du chaos ; sa défaite, qui aurait dû être sa totale destruction, marque le temps où la terre s'apprêtait à son état de relative perfection et où l'homme a été créé ; sa seconde victoire ne peut être qu'une conséquence de la chute.

Lors donc que Dieu donnait aux bêtes de la terre et aux oiseaux des cieux pour nourriture des végétaux, et qu'il les faisait tous venir devant Adam, il n'y avait encore parmi eux aucune espèce Carnivore. Les grands carnassiers qui caractérisent l'époque pliocène, auront été créés immédiatement après la chute, et peut-être à une grande distance du pays d'Eden.

Cette supposition concilierait certainement la Révélation et la géologie. Toutefois, et nous sommes les premiers à le déclarer, ce ne sont là que les préliminaires de la paix définitive.
D'un côté, en effet, la Genèse fait comparaître devant Adam tous les quadrupèdes, et ne contient aucune allusion à une création de bêtes féroces postérieure à la chute.
De l'autre, l'époque miocène compte déjà quelques grands chats, et l'époque éocène, des ours et des chiens. Il faut donc laisser à la géologie le temps de résoudre elle-même par de nouvelles découvertes ces difficultés, qui ne portent au reste que sur des détails, et qui ne peuvent détruire les grandes harmonies que nous avons signalées.

Avant de poursuivre notre marche et d'étudier le Déluge universel et sa longue époque de révolutions locales, arrêtons-nous quelques instants pour jeter un regard sur le champ que nous venons de parcourir.

Moïse avait transcrit en tête de son livre le récit inspiré de la Vision des sept jours. C'était un tableau général de la création du monde, mais un tableau divin, et l'homme s'obstina de siècle en siècle à l'interpréter comme il fait ses propres ouvrages. Dieu nous y parlait, nous le savions, et pourtant nous expliquions son langage par le nôtre. Nous le rabaissions de toutes nos forces à notre niveau, ne nous souvenant pas que la simplicité de Dieu est la sublimité de l'homme, et que pour la comprendre il faut recourir à une sainte audace et se livrer à une divine folie. Car les pensées de l'Éternel ne sont pas nos pensées ; nous ne pouvons les deviner à l'avance, et quand elles nous sont connues, c'est tout ce que nous pouvons faire que d'en entrevoir confusément le sens. D'ordinaire elles nous font peur par leur hardiesse, et nous croyons leur rendre service en les rendant quelque peu triviales. C'est ainsi que l'on voulait que les jours de Dieu dans la Vision fussent, comme les nôtres, de vingt-quatre heures.

Les Pères de l'Église eux-mêmes, les théologiens des derniers siècles, persévérèrent la plupart dans cette grave erreur, jusqu'à ces derniers temps, où les savants qui voulaient, les uns attaquer la Genèse, les autres la justifier (12), se mirent à interroger la terre elle-même sur son histoire.
Sa première réponse fut de leur étaler les myriades d'ossements et de débris organiques que recèle sa surface : « L'humanité, leur dit-elle, vit sur un cimetière. » Ils crurent d'abord que c'était celui du déluge de Noé, mais en le voyant s'étendre par couches superposées jusqu'à d'immenses profondeurs, ils comprirent que ces étages de morts étaient les feuillets où était écrite l'histoire de la vie de la terre, et ils se mirent à les déchiffrer.
Par une erreur opposée à la première, ils prétendent maintenant que la page du déluge de Noé leur manque et n'existe pas ; mais ils se raviseront certainement bientôt.

Les découvertes qu'ils firent étaient de continuels sujets d'admiration. C'étaient des couches pétries d'ossements, des roches de trente pieds de hauteur et d'une étendue indéterminée, formées de squelettes d'infusoires dont quarante millions seraient contenus dans un pouce cube. C'étaient des plantes inconnues, des animaux marins de figures étranges, des sauriens d'une taille gigantesque, des mammifères dont plusieurs, au contraire, semblaient tout pareils aux nôtres. C'était, au milieu de bien des faits contradictoires, un certain progrès des animaux les plus imparfaits à l'homme. C'était une longue succession de cataclysmes et de temps de repos, d'époques de mort et d'époques de vie. C'était toute une vaste épopée qui embrassait des myriades d'années, et dont les héros étaient des dynasties de vertébrés, les uns sanguinaires, les autres doux et pacifiques, qui montaient les uns après les autres sur le trône où l'homme devait enfin s'asseoir.
Tout cela était si bizarre, si grandiose, si mystérieux, que la terre reprit un peu de son ancien crédit, dont l'avait dépouillée l'astronomie. Cette science traitait alors avec un souverain mépris ce corpuscule planétaire qui avait la prétention d'avoir été visité par le Fils de Dieu ; et elle le balayait dans la poussière des mondes.
La géologie est venue le venger de ces outrages. Elle lui a fait des destinées telles qu'il en devient à nos yeux un monde extraordinaire, et l'histoire de sa formation s'est trouvée si étrange, que les annales de l'humanité, qui font suite à celles de la terre, doivent avoir, elles aussi, leurs mystères. Un temple ne peut être plus petit et plus humble que le portique qui en décore l'entrée.

La géologie est ainsi devenue l'introduction obligée à l'histoire de l'homme. Elle jette en même temps de vives lumières sur les plus hautes questions de la philosophie.

À la vue de ces lacunes qui s'offrent à vous quand vous réduisez en un ordre systématique les espèces d'animaux actuellement vivantes, et que viennent peu à peu combler tous ces genres, tous ces ordres éteints qui ont disparu de la terre depuis des milliers d'années, comment ne pas reconnaître l'existence d'une Intelligence éternelle qui avait conçu tout le plan du règne animal avant même d'en avoir commencé l'exécution, et qui le réalisait par fragments d'une période à l'autre ?
Mais si le géologue triomphe aisément du matérialiste, peut-il lui-même rester simple déiste en présence de tant de cataclysmes, de ruines et de cadavres, de tant d'animaux carnivores, qui lui rappellent sans cesse l'insondable question du mal physique ? La religion naturelle, qui n'a pour résoudre ces énigmes que le mot sans vertu d'imperfection de la créature, n'est-elle pas forcée dans ses derniers retranchements ? Et ces vieilles roches qui résonnent sous le marteau du géologue, ne lui parlent-elles pas du Dieu de la Bible et de sa lutte incessante contre le péché ?

La géologie, en effet, a, comme toute autre science, une intime affinité avec la Bible. Elles s'attirent l'une l'autre, comme le fer et l'aimant, elles se complètent, et en dépit de leurs passagères bouderies, elles s'aiment sincèrement.
Qu'est-ce que la géologie fait d'autre que d'écrire à son insu un commentaire de la Genèse, bien plus littéral et bien autrement original que tous ceux que les docteurs de l'Église avaient composés dans leurs cabinets d'étude ? Comme elle explique bien par ses périodes et par ses cataclysmes les jours et les soirs de la Vision ! Comme elle dessine bien les figures secondaires et les mille détails des deux derniers jours ! Quelle ampleur elle donne à cette oeuvre des six jours, que Moïse avait écrite tout entière sur une seule page ! Bien plus, elle croit ne reconstruire que l'histoire de la terre, et il se trouve que son époque pliocène est celle des Sethites et des Caïnites ! Elle nous donnera dans peu de temps la carte de leur patrie ; et déjà nous devons associer dans notre esprit ces Antédiluviens qui vivaient près de mille ans, les Néphilim, les géants, avec ces pachydermes et ces carnassiers de haute taille dont les ossements se retrouvent dans les dépôts diluviens.

La Genèse, de son côté ; révèle aux géologues le Dieu vivant, dont ils reconnaissent l'existence, entrevoient les perfections et ignorent les décrets. Elle leur enseigne les premières origines de la terre, où leurs recherches ne peuvent atteindre. Elle leur propose des périodes autres que les leurs ; elle éveille leur attention par les questions qu'elle leur adresse ; elle les avertit de leurs erreurs quand ils se trouvent en contradiction avec ses enseignements, et ce n'est que d'elle qu'ils peuvent attendre quelque lumière sur la grande énigme du mal physique.

Enfin, si nous comparions l'histoire de la terre à celle de l'humanité, les plus frappantes analogies ne tarderont pas à frapper nos regards. La terre, à son origine, est informe, vide, ténébreuse, désordonnée : l'humanité à son berceau se plonge volontairement dans les sombres abîmes du péché.
D'une part, trois jours d'une lumière pâle et diffusa, avant la formation du soleil ; d'autre part, quarante siècles sur lesquels le Verbe, invisible dans les cieux, répand une douce clarté, jusqu'au moment où il se révèle dans tout son éclat au monde sous le nom de Soleil de justice. Là, la race privilégiée des poissons, puis celle des sauriens, et enfin celle des mammifères, marchent à la tête des autres animaux ; ici le sceptre de l'empire, le flambeau de la civilisation, passe d'un peuple à l'autre depuis les rives de l'Euphrate à celles de l'Atlantique.

La terre tend à l'homme, l'homme tend au règne du Christ qui est le vrai homme, et à l'organisation des nations ; des deux parts il y a progrès, et le progrès parcourt, dans le monde de la nature et dans celui de la liberté, les mêmes phases de formation, de constitution, de production, de perfection relative, de repos, de renouvellement et de perfection finale. Mais des deux parts aussi, il est interrompu par quelques grandes et universelles catastrophes qui détruisent tout un monde, et entre deux de ces temps de ruine, par une multitude de petits cataclysmes ou de révolutions locales. Surtout le progrès est d'une excessive lenteur et ne conduit au but que par de grands détours : la terre, pendant six immenses périodes, a soupiré après son roi, qui n'est venu qu'après les plantes, qu'après le soleil, qu'après les animaux marins et les oiseaux, qu'après les quadrupèdes ; l'homme pareillement a attendu quatre mille ans le Messie, et il attend depuis bientôt deux autres mille ans l'avènement de son règne de gloire.
De telles harmonies entre l'histoire de la nature et celle de l'humanité, n'éveillent-elles pas dans nos coeurs la conviction que le Dieu de la Révélation est aussi celui de la géologie ?


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(1) De là ces insectes qui ne peuvent vivre que sur des produits de l'industrie humaine, comme les mites qui rongent les draps de laine.

(2) Genèse III, 23 et 24. Nos traducteurs français ont ajouté un Ainsi qui dénature le sens.


(3) Voyez Peuple primitif, t. II, p. 133, 39.
Nous lisons dans le Catholique d'Eckstein, t. XVI, p. 420 : « Dans les croyances anciennes, les terres avaient été fertilisées par la rosée avant que de l'être par la pluie. Une atmosphère d'une égalité parfaite avait environné le globe, qui nageait en quelque sorte dans un éther délicieux. Les orages ne s'étaient formés, les torrents de pluie n'étaient tombés que lorsque Dieu voulut punir la désobéissance des hommes. »

(4) Gen. III, 1. 14. - Nous disons ainsi : mordre la poussière, pour périr sur le champ de bataille.

(5) Voyez plus haut page 27.

(6) Voyez Peuple primitif, t. II, p. 170. 228.

(7) Ce paradoxe ne peut se démontrer par la science. Toutefois nous appellerons l'attention de nos lecteurs sur deux faits :
1° Fort souvent l'esprit n'est jamais plus lucide, le cours entier de la vie plus présent à la mémoire, la conscience morale plus délicate, le jugement plus impartial, que dans les heures ou les instants qui précèdent la mort. L'âme qui se sent pleine de vie s'étonne de mourir, et nul n'a su ni ne saura jamais pourquoi il meurt, si ce n'est celui qui sait que la mort est un châtiment.
2° Ozanam dit : « Les effluves dégagés d'un corps sain vivant ou nouvellement privé de la vie par le fer tranchant, tel que le boeuf à la boucherie, s'introduisant dans d'autres corps vivants, y produisent une nouvelle énergie vitale
(comme le prouve l'heureuse constitution des bouchers)..... Mais le cadavre humain possède une propriété délétère inexplicable. Une blessure, même légère, que se fait un anatomiste en disséquant, prend aussitôt un caractère inflammatoire, et une gangrène mortelle ne tarde pas à se manifester, si l'on n'a pas eu soin de cautériser sur le champ et profondément la plaie. » (Histoire des maladies épidémiques, Sec. éd. t.1, p. 61.)

(8) Voyez Peuple primitif, t. II, p. 161 et surtout 381

(9) Baruc III, 26. (C'est là que furent engendrés les fameux géants, ceux du commencement, de haute stature et versés dans l'art de la guerre)

(10) Voyez Peuple Primitif, t. Il, p. 163 sq.

(11) Voyez Peuple Primitif, t. II, p. 175 sq. : Le Déluge un chaos.

(12) De Luc a dit : « C'est la Révélation (cosmogonique).... qui est la vraie cause des progrès que les hommes ont faits dans l'étude de la nature, et le seul guide qui les y ait dirigés ; car si l'on suit avec soin l'histoire de la géologie, on verra que toutes les recherches des savants on. eu en vue la Genèse, soit pour l'attaquer, soit pour la défendre. » Pages 188, 189.

 

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