HISTOIRE DE
LA TERRE
LA RÉVÉLATION ET LA
GÉOLOGIE.
CHAPITRE PREMIER.
Histoire de la Terre d'après la Bible.
Chercher dans la Bible l'histoire de la terre
est aux yeux de plusieurs une fâcheuse
imprudence. Nos Livres saints,
répète-t-on, ont pour but unique la
gloire de Dieu et le salut de l'homme ; ils ne
contiennent aucun enseignement formel sur le monde
physique, et l'on ne fait que les compromettre en
leur demandant ce qu'ils ne peuvent pas donner.
Mais un tel langage est en contradiction directe
avec l'esprit et la lettre des Saintes
Écritures. Elles renferment en effet des
révélations toutes spéciales
sur les origines de la terre et des cieux, sur leur
transformation finale, sur les grandes crises qu'a
subies notre globe pendant le développement
de l'humanité, et au point de vue des
écrivains inspirés, la nature et le
monde moral, étant l'oeuvre d'un même
Dieu et les deux parties d'un même tout, se
tiennent par des liens si intimes qu'on ne peut
faire l'histoire de l'un sans indiquer en
même temps celle de l'autre. La Bible ne
serait pas le livre de la
vérité si tout en nous conservant le
souvenir de la chute et du salut de l'homme, elle
ne nous avait point dit les effets que ce salut et
cette chute ont produits sur le monde physique, si
le récit apocalyptique qu'elle nous fait de
la création d'Adam et d'Eve n'avait pas
été précédé de
la page qui raconte la création de la terre,
et si les prophéties relatives aux
destinées futures de l'humanité
n'avaient jeté aucune lumière sur
celles de sa patrie. Il en est de la terre et de
l'homme comme du corps et de l'âme.
Le corps est l'oeuvre de Dieu tout aussi bien que
l'âme, et si dans la Bible l'Esprit-Saint le
flagelle sans pitié, s'il ordonne qu'on le
tienne en servitude et qu'on le dompte par le
jeûne, ce n'est point qu'il veuille
l'anéantir, c'est bien au contraire qu'il
l'aime et qu'il entend le ressusciter.
Le péché a fixé sa demeure
dans notre chair, il faut l'en expulser par de
violents moyens, mais une fois que l'esclave
rebelle aura été
détrôné par la volonté
de l'âme sanctifiée, et purifié
par la mort dans le creuset du sépulcre, il
rentrera dans les faveurs de Dieu qui même le
rendra spirituel, brillant et glorieux.
La Bible, sans jamais élever le corps au
niveau de l'âme, le perd aussi peu de vue que
la terre ; la Genèse nous met sous les
yeux la création du corps d'Adam comme elle
fait celle de notre globe, et le dogme de la
résurrection de la chair est, de même
que celui de la transformation future du monde, une
partie intégrante et nécessaire de la
doctrine chrétienne. Cette doctrine forme un
ensemble organique dont on ne saurait supprimer une
partie sans altérer complètement
l'harmonie de l'ensemble.
Les liens qui unissent la terre et l'homme sont
nombreux et divers. Nous tenons à la nature
par notre corps, qui nous met dans l'absolue
dépendance des éléments et des
substances qui nous font vivre. Nous tenons
à la nature par notre âme, qui
resterait plongée dans les
ténèbres de l'instinct où elle
passe les premiers temps de son existence, si les
choses visibles ne développaient ses
facultés endormies.
Le monde moral se relie au monde physique par des
analogies si nombreuses que, pour exprimer nos
idées abstraites, nous ne faisons que donner
un sens nouveau aux mots qui désignent des
objets sensibles. Le Sauveur savait même de
son divin regard lire dans les
phénomènes de la nature tous ceux du
règne de la grâce. Il y a enfin entre
la terre et l'homme, une sorte d'harmonie
préétablie qui les fait marcher
toujours du même pas.
La terre s'était mise la première en
route ; dans les six journées
cosmogoniques de son développement, elle
allait en quelque manière à la
recherche, à la rencontre de l'homme, et
Dieu le lui donna quand il la vit arrivée
à un degré de très grande
bonté.
Mais bientôt l'homme pèche, elle
est maudite à cause de lui et se couvre de
ronces et d'épines
(Gen. I, 31 ;
III, 18).
Elle maudit à son tour Caïn
qui lui a fait boire le sang de son
frère
(Gen. IV, 11.).
Dieu l'a détruite
(Gen. VI, 13.) par le
déluge pour ensevelir sous ses ruines une
race coupable.
Dans le cours de l'histoire, quand le riche opprime
et dépouille les pauvres, elle crie
contre lui
(Job XXXI, 38-40).
Quand les forfaits d'un peuple
s'appesantissent sur elle, elle tremble,
elle chancelle, elle tombe pour ne
plus se relever
(Esaïe XXIV. Comp.
Proverbes XXX, 21-23.).
Quand ils l'ont entièrement
souillée, elle vomit au loin
ses habitants ou les consume
(Lévitique XVIII, 27-30).
Sont-ils au contraire justes et pieux, elle obtient
sans peine des cieux la pluie, la
rosée, la chaleur, et elle répond
avec joie aux demandes que lui
font le froment, la vigne et l'olivier
(Osée II, 21-23.). Elle
obéit d'ailleurs, comme un docile serviteur,
à la voix puissante d'un Moïse et d'un
Josué, d'un Samuel, d'un Élie, d'un
Esaïe.
Lors de la venue du Fils de Dieu, elle voit
apparaître au ciel une étoile
nouvelle ; elle frémit et s'entr'ouvre
à sa mort au milieu de mystérieuses
ténèbres. De nos jours la terre ne
semble plus nous témoigner sa redoutable
sympathie que par les cruels fléaux dont
elle châtie notre profonde corruption. Mais
un temps viendra où elle se relèvera
avec l'homme de leur commune chute et de leur
misère commune ; elle franchira
même avec lui le seuil de
l'éternité et participera à sa
gloire future.
Tant est intime, d'après la Bible, l'union
de la nature et de l'humanité ! Cette
union est la clef de tous les enseignements des
Livres Saints sur le monde physique, et c'est en
ayant toujours présent à l'esprit ce
grand fait que nous allons tenter de reconstruire
l'histoire de la terre.
Si nous remontons, la Bible à la main, le
cours des temps, nous apercevons, à une
distance incommensurable, au delà même
du chaos, une terre et des cieux qui sortent des
mains de Dieu, brillants de la lumière la
plus pure
(Genèse I, 1). Ce monde est,
d'après la poétique expression du
livre de Job
(XXXVIII, 7), celui de l'aurore
ou du commencement, et cette aurore des
siècles est le temps où l'univers,
exempt encore de tout péché,
jouissait d'une félicité semblable
à celle d'Adam et d'Eve dans leur
paradis.
Nous tournons nos regards vers le côté
opposé ; et dans l'avenir s'offre,
assez près de nous, un monde éternel
où la terre occupe la place
d'honneur, et qui resplendit du plus vif et doux
éclat. Toutefois, dans un coin de cet
univers est un étang de feu et de soufre
où des anges et des hommes ont
été précipités ensemble
(Apocal. XX, 10 ;
XIX, 20 ;
XXI, 8 ;
XXII, 15.) ; c'est la fosse
commune où le vainqueur, après une
sanglante bataille, jette tous les cadavres de
l'ennemi.
Mais ces morts vivent dans leur mort, subissant la
peine de leur crime ; car ils se sont
révoltés contre Dieu, et ils ont,
dans leur obstination insensée,
rejeté sans se lasser le pardon que leur
offrait leur Seigneur.
Ainsi donc, le paradis de l'éternité
est séparé de celui de l'aurore par
un temps où quelque grande révolte et
une longue guerre ont troublé l'univers.
Nous ne savons ce qui s'est passé dans le
monde des étoiles, dont la paix semble
n'avoir point été interrompue par le
péché. Tout indique au contraire que
le grand théâtre de la lutte des
créatures rebelles et de Dieu a
été la terre, dont le
développement, violemment suspendu, ne s'est
fait que par chutes et par relèvements.
La terre de l'aurore, qui était probablement
la demeure de Lucifer et de ses légions, a
été entièrement
détruite à la suite de leur
révolte, et ses ruines ont formé ce
chaos ténébreux et fluide
(Genèse I, 2.) qui a
été le berceau de la terre actuelle
et des autres astres que comprend le système
solaire.
En six jours le Créateur a tiré de
cette masse désordonnée un monde
nouveau, et la terre était très
bonne
(Genèse I, 31.) quand le
péché, s'y introduisant par une
séduction, y sema avec la mort toute
espèce de maux. Sous ses coups destructeurs,
la nature s'affaissa et se détériora
pendant plus de deux mille ans. Puis le mal a
semblé rester stationnaire,
ou du moins ses progrès depuis Abraham et
Moïse sont peu apparents. Mais le Dieu qui a
sauvé l'homme, n'a point oublié la
terre : elle se relèvera de son
état actuel de corruption pour entrer,
purifiée par le feu
(2 Pierre III, 10-13), dans
l'éternité.
La terre primitive ou de l'aurore que Dieu avait
créée pure et que le mal moral a
transformée en un chaos, nous est inconnue,
et nous ne pouvons songer à en faire
l'histoire. Il ne saurait être ici question
que de notre terre, que le Créateur a
restaurée, que le péché a
défigurée et que le Sauveur
élèvera à son degré
définitif de splendeur et de
beauté.
Jetons un rapide coup d'oeil sur le point
d'où notre terre est partie, sur la route
qu'elle suit et sur le but où elle tend.
À son origine notre terre était
désordre, solitude,
ténèbres et mer. Au terme
de son développement, après avoir
été transformée par le feu,
elle aura une lumière propre, des
eaux douces sans aucune mer, des formes
symétriques, une population d'hommes aux
corps aériens, et des substances
étranges qui réuniront la
transparence du cristal à la
densité et à l'éclat de l'or
(Apoc. XXI et XXII.).
Ces deux points extrêmes nous indiquent assez
quels changements la terre a subis
déjà et doit subir encore tant dans
ses relations avec le soleil qui l'illumine
aujourd'hui, que dans sa nature interne. Ainsi,
pendant le chaos les ténèbres
régnaient sans partage ; mais
bientôt a paru la lumière et s'est
levé le premier matin
cosmogonique.
La troisième période de la
création a vu le temps se partager entre la
nuit et le jour, et si les soirs, sinistres retours
du chaos, se sont prolongés jusqu'à
la formation de l'homme, au moins n'ont-ils pas
séparé le sixième jour du
septième qui fut tout
matin, toute lumière
(Genèse I, 31 ;
II, 1-3.).
Aujourd'hui le temps se divise encore pour nous en
heures diurnes et en heures nocturnes ; mais
la terre de l'éternité ne
connaîtra plus ni la nuit ni les
ténèbres.
Ainsi encore, la terre n'était primitivement
qu'un globe d'eaux ou d'éléments
fluides ; au troisième jour c'est du
sein d'une mer immense qu'ont surgi les continents,
et aujourd'hui même ils n'occupent avec les
îles qu'un tiers de notre globe. Mais le feu,
qui est né dans son sein on ne sait quand,
qui a probablement soulevé les montagnes
dès les temps de la création, et qui
apparaît pour la première fois
(1) dans
l'histoire lors de la ruine de Sodome, consumera la
terre à la fin des temps actuels, et quand
elle revêtira sa dernière forme, les
océans avec leurs eaux salées
disparaîtront entièrement.
Ainsi, enfin, pendant le chaos et jusque dans la
première moitié du troisième
jour, la terre était vide,
déserte ; elle ne produisit d'abord que
des plantes ; puis ses mers et son
atmosphère se peuplèrent
d'animaux ; les continents reçurent
ensuite leurs habitants ; l'homme paraît
enfin. Cependant le genre humain a commencé
par un couple unique dont la
postérité ne s'est répandue
que lentement sur les divers continents. Elle
s'était déjà multipliée
au loin quand le déluge l'obligea à
recommencer son oeuvre par le premier bout. Cette
oeuvre fut de plus en plus entravée par la
mort, qui depuis le grand cataclysme avait
réduit la vie humaine à quatre-vingts
ans ; de nos jours encore, que de
régions fertiles attendent les nations qui
auraient dû les cultiver depuis
longtemps ! Mais lors de la grande
conflagration la terre et la mer
rendront leurs morts, les corps ressusciteront
transfigurés, et toutes les
générations qui se seront
succédé sur notre globe depuis Adam
et Noé, habiteront en même temps leur
vieille patrie renouvelée.
Cette longue histoire de la terre, qui commence
avec le chaos et qui se prolonge à perte de
vue dans l'avenir, se divise en trois grandes
périodes : celle de création,
où Dieu restaure le monde
détruit ; celle de repos, que l'homme
trouble par sa chute, et celle de
l'éternité, où le bien et la
vie triomphent du mal et de la mort.
1° LES SIX JOURS DE LA
CRÉATION.
Cette période comprend six jours ou
époques. Ils ont probablement, chacun, la
même durée, et une durée fort
longue, mais la Genèse ne l'évalue
point en années terrestres et nous ne
saurions suppléer à son silence.
L'oeuvre des six jours ne concerne pas la terre
seule. La terre informe et vide ou le chaos
est le berceau de tous les astres du système
solaire. Ils se forment ensemble dans les eaux
communes ou dans la nébuleuse pendant le
premier jour.
Au deuxième les eaux se séparent,
la nébuleuse se dissipe, d'un astre
à l'autre l'espace devient libre, et ces
corps célestes prennent chacun leur figure
propre.
Le troisième jour voit la terre soulever
au-dessus de la mer ses premiers continents
et les couvrir de végétaux,
tandis que les autres planètes, les
satellites et le soleil traversent une phase
analogue.
Ce n'est qu'au quatrième jour que le
système solaire reçoit sa forme
définitive : alors chacun de ses astres
se place à sa distance actuelle avec son
double mouvement de révolution
et de rotation.
Les deux derniers jours ne concernent que la
terre ; mais les écrivains
sacrés ne perdent jamais de vue les intimes
relations de notre patrie avec les cieux que nous
nommerons solaires pour les distinguer de ceux des
étoiles fixes ou de l'aurore.
C'est du système solaire que doivent
s'entendre, à notre avis, les divers
passages qui parlent d'un commun
ébranlement, d'une destruction,
d'une transformation commune de la terre
et des cieux. Notre planète ne peut, en
effet, entrer seule dans
l'éternité ; son sort est
indissolublement lié à celui de ses
nombreuses soeurs et de leur père, le
soleil.
Aussi saint Pierre nous représente-t-il la
conflagration finale commençant ses ravages
par les cieux, et la terre
consumée par un feu qui n'a point
été allumé uniquement pour
elle. Sortis du même berceau, tous ces astres
périront ensemble et seront ensemble
renouvelés
(2 Pierre III, 10-13 ;
Apoc. XX, 11 ;
XXI, 1 ;
Esaïe LXV, 17 ;
LXVI, 22 ;
Matth. XXIV, 35 ;
V, 18 ;
Psaume CII, 26, 27 et
Esaïe LI, 6.).
L'oeuvre de la création de la terre est
celle d'un Dieu tout puissant et tout sage qui
exécute les décrets éternels
de sa souveraine sagesse. Il révèle
sa volonté par sa Parole : il
dit, et la chose est. Il agit
immédiatement sur les matériaux de la
terre par son Esprit qui plane sur le
chaos, le réchauffe, le féconde.
C'est cette action qui produit la lumière au
premier jour ; c'est elle encore qui donne
à la terre la puissance de pousser ses
végétaux et de concourir à la
création des animaux. Car l'Esprit de Dieu
ne s'est point retiré de la terre à
mesure que l'oeuvre restauratrice s'accomplissait.
Nous savons bien au contraire que dans
l'économie actuelle de la nature tout ne
subsiste que parce que cet Esprit
pénètre, soutient, vivifie tout
(Psaume CIV,
27-30.).
Dieu, son Verbe et son Esprit, tels sont les agents
invisibles et spirituels de la création. Les
agents matériels ou visibles sont, nous
venons de le dire, la lumière
là-haut, la terre ici-bas.
La lumière, pendant les trois premiers
jours, est diffuse, pâle, faible : elle
ne fait que concourir à la séparation
des eaux inférieures et supérieures
et à la production des
végétaux.
Mais, au quatrième jour, elle se concentre
dans le soleil et acquiert un degré tout
nouveau d'éclat, de chaleur et de puissance,
tel que le réclamait l'apparition
subséquente des animaux.
La force productrice de la terre est à son
comble au troisième jour où les
continents se couvrent de
végétaux ; au cinquième
Dieu crée les animaux, que
produisent les eaux ; au sixième
la terre n'est pour rien dans la formation de
l'homme. Nous verrons plus tard la terre refuser
sa force à Caïn, la retirer
à elle et se rendre stérile.
L'oeuvre des six jours commence par le
désordre et les ténèbres, et
finit par un état de très grande
bonté, qu'il ne faut pas confondre avec
celui de l'éternelle perfection. Le
progrès consiste dans la lente diminution du
mal, et dans le lent accroissement du bien. Le mal
semble complet au point de départ, et il est
nul au terme de la période de
création ; le bien au contraire est nul
à l'origine, complet à la fin.
Ce qui constitue le mal physique, ce sont :
les ténèbres, qui, dans le
langage figuré de la Bible, sont le symbole
du péché ; les soirs, qui
sont des temps de désordre et comme des
invasions du chaos, et les eaux primitives,
que représentent les stériles
océans.
Le bien, c'est la lumière, qui
enlève dès le premier jour aux
ténèbres la moitié de leur
empire, et qui s'épanche au quatrième
dans le grand vase du soleil.
Ce sont ensuite les matins ou les temps de
création, d'ordre, de progrès
manifestes et de paix.
C'est enfin l'apparition de la
terre, corps formé des substances
informes du chaos ; celle des continents,
qui font progressivement sur l'océan
primordial la conquête d'un tiers de la
surface terrestre, et celle enfin des plantes,
des animaux et de l'homme.
Les animaux qui se nourrissent d'autres animaux
vivants sont une énigme dont la Bible ne
nous donne pas le dernier mot. Elle nous dit
seulement que sur la terre très bonne du
sixième jour les quadrupèdes et les
oiseaux se nourrissaient de plantes, nous donnant
à entendre par là que les habitants
des eaux comptaient une multitude de
carnivores.
Le progrès du bien et la décroissance
du mal s'opèrent en six jours, dont trois
antésolaires et trois postsolaires, qui
correspondent exactement les uns aux autres.
Le chaos.
1° Le jour de la
lumière.
2° Celui des eaux inférieures et des
eaux supérieures.
3° Celui des continents et des plantes.
4° Le jour des luminaires.
5° Celui des animaux des mers et des animaux
de l'air.
6° Celui des animaux terrestres et de
l'homme.
7° La terre très bonne et le jour du
repos.
Dans la première série la terre
est isolée ; dans la seconde elle est
unie au soleil et aux autres astres du
système. Là elle se développe
sous l'action de la lumière primitive ;
ici, sous celle des rayons ardents du soleil. La
première moitié de sa vie n'aboutit
qu'à la plante, la seconde aboutit à
l'homme.
Cette exacte correspondance des trois derniers
jours avec les trois premiers, ne pouvant
être accidentelle, prouve
que la sagesse divine a suivi dans la
création de la terre un certain plan, qu'il
s'agit de retrouver.
Mais qui oserait se vanter d'avoir saisi la
pensée de l'Éternel et de pouvoir
l'exprimer sous sa forme la plus simple ?
C'est à peine s'il est donné à
l'homme d'entrevoir confusément les bords
des décrets éternels.
Il nous paraît que la terre se forme
au premier jour par la réunion en un
même corps de ses substances
élémentaires qui sont opaques, et par
sa séparation d'avec l'embryon lumineux du
soleil.
Le second jour voit la terre se constituer
en se séparant des autres
planètes avec lesquelles elle était
plongée dans une même
nébulosité ; le noyau solide se
recouvre d'une mer uniforme, et l'air enveloppe la
mer de toute part.
Au troisième jour, la configuration de notre
globe se termine par l'émersion des
continents. Mais le trait distinctif de cette
période, c'est l'apparition des
végétaux ; elle manifeste les
vertus cachées de la terre, qui
s'épanouit ainsi et qui arrive au temps de
sa fleur. Ici finit la première
moitié de son histoire cosmogonique.
Elle subit ensuite un très grand
changement : elle entre en relation intime
avec les autres astres de son système ;
elle fait alliance, elle se marie
avec eux ; ils agissent sur elle et elle
réagit sur eux à son tour, et ses
forces s'accroissent au point qu'elle peut produire
ou porter des êtres de beaucoup
supérieurs à la plante. L'oeuvre du
quatrième jour est en quelque manière
une nouvelle naissance dont le principal agent est
la puissante lumière du soleil.
Le cinquième jour est marqué par
l'apparition des animaux de l'eau et de l'air,
âmes vivantes que nous pouvons
considérer, au point de vue humain, comme le
fruit du mariage de la terre avec le soleil.
L'oeuvre du sixième jour, comme celle du
troisième, se divise en
deux parties, dont la première est la simple
continuation de celle de la période qui
précède immédiatement :
les animaux de la terre ferme viennent s'ajouter
à ceux de la mer et de l'eau. Après
eux parait enfin l'homme, qui trouve la
terre très bonne, et par qui commence un
monde nouveau, celui de la liberté.
Pendant le septième jour, Dieu se repose,
l'homme agit, et la terre assiste avec
sympathie aux destinées de
l'humanité.
Les sept périodes de la terre, telles que
nous les concevons, se résumeraient donc
dans ces sept mots : formation,
constitution et fleur ; alliance,
oeuvres vivantes, perfection et repos.
2° LE JOUR DU REPOS.
La terre venait à peine d'entrer dans son
sabbat que son repos fut troublé par la
chute de l'homme, et du pied de l'arbre fatal de la
connaissance du bien et du mal jaillit une source
de souffrances, de fléaux et de mort, dont
les eaux, de plus en plus abondantes et
formidables, ont étendu leurs ravages sur la
terre entière et à travers tous les
siècles. Toutefois, taudis que la
rébellion de l'archange avait fait de la
terre de l'aurore une masse, confuse, la faute
d'Adam a causé dans le monde physique de
simples perturbations, et non point une ruine
totale.
Mais ces perturbations sont immenses. Par l'oeuvre
des six jours Dieu a bien refoulé et
dompté les puissances
ténébreuses du chaos, leur force a
été brisée ; mais elles
n'ont point été anéanties, et
les voilà qui font irruption par la porte
que leur a ouverte Adam. Les soirs cosmogoniques
avec leurs bouleversements et leurs
cataclysmes s'apprêtent
à détruire une dernière
fois la surface terrestre par le déluge
(2) et la mer,
qui franchira bientôt les bornes que Dieu lui
a tracées, va replonger, semble-t-il, la
nature dans l'état où elle se
trouvait au commencement du troisième jour.
En outre, les déserts avec leurs ronces
et leurs épines envahiront une grande
partie de la superficie de notre globe. Les
sécheresses et la famine, les inondations,
les grêles, les ouragans, les tremblements de
terre, les pestes frapperont chaque zone à
son tour.
Enfin, Dieu placera auprès de l'homme
pécheur, pour son châtiment et pour sa
rude éducation, des animaux carnassiers et
des êtres venimeux (plantes, ou serpents et
scorpions), qui mettront constamment sa vie en
danger. C'est ainsi que la race d'Adam qui a
été assujettie par le
péché à la mort, verra se
multiplier les occasions de mort à
l'infini.
Le péché a transformé la
période sabbatique de la terre en un temps
de désordre, d'agitation, de fléaux,
de ruines locales, et même c'est à lui
qu'est due la division de cette période en
deux parties d'inégale longueur, dont l'une
a précédé et l'autre suivi le
déluge.
1° D'après le passage classique de
saint Pierre dans sa seconde épître
(III, 1-13), la terre
antédiluvienne qui avait été
tirée des eaux du chaos, et qui
devait périr par celles du
déluge, subsistait parmi l'eau,
c'est-à-dire était un immense
archipel, et n'offrait point la même
étendue de continents que notre terre
actuelle. Nous savons d'ailleurs par la description
que Moïse fait des fleuves du Paradis, que la
surface de notre globe a subi, depuis les origines
de l'humanité, et sans doute par le
déluge, des changements
très
considérables.
L'atmosphère n'était point non plus
au temps d'Adam ce qu'elle est aujourd'hui :
alors le sol était arrosé par
une vapeur
(Gen. II, 6.) et non par la
pluie ; il n'y avait point d'arc-en-ciel, et
sous Méhujaél une effroyable
sécheresse détruisit en grande
partie la race de Caïn. La vigne manquait au
règne végétal. Les animaux
eux-mêmes vers la fin de cette époque
se corrompirent avec l'homme
(Gen. VI, 12.) ce que nous entendons
de l'entier développement de leurs instincts
féroces, et l'homme soupirait sous le faix
du travail auquel l'avait condamné la
malédiction que l'Éternel
avait prononcée contre la terre
(Gen. V, 29.). Toutefois nous
concluons de la longévité des
Sethites et de la force des Néphilim, que le
péché était bien loin encore
d'avoir réduit la nature humaine à
son degré actuel d'infirmité, et que
par conséquent les conditions physiques
d'existence, l'économie
générale de la nature terrestre
différaient encore peu de ce qu'elles
étaient avant la chute d'Adam.
2° L'histoire de la terre d'à
présent
(2 Pierre III, 7.) se subdivise en
trois époques : l'époque
diluvienne, les temps historiques et le
millénium.
a) Le déluge a été non
point une simple inondation, mais une
destruction de la terre, une crise
tellurique, une immense révolution
géologique, qui a été suivie
pendant plusieurs siècles de bouleversements
partiels, tels que celui de Sodome, et qui a
produit dans l'atmosphère et dans toute la
constitution de notre globe, une altération
si profonde que la vie de l'homme s'est rapidement
abaissée de neuf siècles à
deux cents ans. En même temps
apparaissent l'arc-en-ciel et la
vigne. C'est dans cette même époque
que s'est opérée la formation des
races et des nations : fait immense et
mystérieux qui imprime son caractère
à cette époque qu'on pourrait
désigner par le nom
d'éthnogonique.
Elle se prolonge, si nous ne faisons erreur,
jusqu'au temps de Moïse et de Josué,
où la longévité humaine est
descendue à son terme final de soixante-dix
ou quatre-vingts ans
(Psaume de Moïse XC, 10.). Ce
temps est d'ailleurs signalé en
Égypte, dans l'Arabie déserte et en
Palestine, par des révolutions locales, qui
s'opèrent sans doute à l'ordre du
législateur hébreu et de son
successeur, mais qui n'ont pas le caractère
de ces miracles par lesquels les lois mêmes
de la nature sont suspendues.
Les dix plaies de l'Égypte, le passage de la
mer Rouge, les flammes du Sinaï, le sol
s'ouvrant sous Coré, les eaux du Jourdain
refluant au loin en amont de Jéricho, la
rotation de la terre un moment interrompue lors de
la chute d'un immense aérolithe, tous ces
faits peuvent être le simple résultat
d'une harmonie préétablie entre la
nature et l'humanité, tandis qu'on ne
saurait expliquer ainsi les miracles des
siècles subséquents, tels que la
multiplication des pains, la transformation de
l'eau en vin, les guérisons
instantanées des maladies les plus graves et
les plus invétérées, la
résurrection d'un mort.
b) L'époque présente, qui
s'étend du temps de Moïse au
règne de mille ans, est un temps de repos
relatif où la terre jouit d'une certaine
paix parce qu'elle est enfin arrivée au bas
du précipice où l'avaient
jetée le péché de l'homme et
la malédiction de Dieu.
« Le soleil, de son lever
à son coucher ; les eaux des
mers, des nuées, des sources et des
fleuves ; les vents du nord
et ceux du sud
accomplissent leurs révolutions avec une
fatigante monotonie. Toutes choses travaillent
plus que l'homme ne saurait dire, et cet
immense travail ne semble rien produire :
rien de nouveau sous le soleil ; nul
progrès
(Ecclésiaste I,
5-10.). » Aussi les moqueurs
des derniers jours disent-ils que
toutes choses demeurent dans le même
état où elles étaient au
commencement du monde, qu'il n'y a point eu de
déluge qui ait détruit une
première terre, et que la terre d'à
présent sera tout aussi peu détruite
par le feu
(2 Pierre III, 3-7).
Ce langage, que l'apôtre entendait dix-huit
siècles à l'avance, est celui de
notre génération tout entière.
On oublie ou l'on nie le péché et ses
suites. Sans le péché la terre aurait
passé de son état de très
grande bonté à son état
d'éternelle perfection par une
transformation insensible, qui n'aurait connu ni
cataclysme ni conflagration, de même que la
mort aurait été pour l'homme pur ce
qu'elle a été exceptionnellement pour
Hénoc et pour Élie, une glorieuse et
réjouissante métamorphose.
Mais la malédiction qui pèse sur la
terre, l'a vouée à la destruction, et
son repos actuel est celui du corps humain qui,
dans son âge mûr, ne croît plus
et ne décroît pas encore, et qui sera
au bout de peu d'années la proie du
sépulcre.
La fin du monde par le feu qui, d'après
Josèphe (3),
aurait été
déjà révélée
à Adam, et dont parlent toutes les religions
anciennes, était sans doute bien connue des
filles de Lot qui ont cru que la terre
entière avait été
dépeuplée par l'incendie qui venait
de consumer les villes de la Plaine. Cette
conflagration toute locale est un type de l'immense
et finale combustion qui dévorera la terre
et ses cieux. Elle ouvre en quelque sorte une
ère nouvelle : à l'âge de
l'eau succède celui du feu, de cet
élément qui se cache partout, dans la
pierre, dans le bois, dans le sol, dans
l'atmosphère, qui éclate de toute
part à l'improviste, et qui est à la
fois tellement répandu et si avide que
c'est, d'après Pline, le plus grand des
miracles qu'un seul jour se passe sans que tout
s'embrase (4).
Cependant la Bible ne nous signale
pas d'autres contrées qui aient
été brûlées que Sodome.
Mais les prophètes, depuis Moïse,
annoncent les uns après les autres, en
termes plus ou moins couverts, que c'est par le
feu, par le feu et le soufre, que Dieu, qui est
un feu consumant, fera périr les
méchants et consumera leur patrie
(5).
Le sort de la patrie des méchants sera celui
de la terre entière ; car toute la
terre a été souillée par le
mal.
Elle l'est dans ses déserts sablonneux et
arides, qui remplissent d'un invincible effroi
l'âme du voyageur, et pour lesquels les
esprits des ténèbres éprouvent
un secret attrait
(Matth. XII, 43-45. Comp.
Lévit. XVI).
Elle l'est plus encore dans les animaux venimeux,
les serpents, les scorpions, que
Jésus-Christ range parmi les forces du
grand Ennemi de la race humaine
(Luc X, 19.).
Elle l'est à un moindre degré dans
les animaux que la loi mosaïque
déclarait immondes, et qui devaient rappeler
constamment à Israël la présence
du mal moral et l'obligation de s'en garder
(Lév. XI.).
Elle l'est par la plus hideuse et la plus ancienne
des maladies, la lèpre, qui les
résume toutes en quelque sorte, et qui est
la plus fidèle image du
péché ; elle l'est même
par ces plaies qui rongent et les vêtements
et les murailles, et qui sont les analogues de
la lèpre dans les choses
inorganiques
(Lév. XIII et
XIV.).
Elle l'est tout spécialement enfin par la
mort ; non pas par celle des animaux qui ont
été créés pour
périr, mais par celle de l'homme, dont Dieu
avait lié l'âme au corps par des
noeuds si étroits que le péché
seul pouvait les briser. Il faut lire dans les
Nombres les cérémonies par lesquelles
doit se purifier celui qui a touché un
cadavre humain, tandis que le contact du cadavre
d'un animal immonde ne souillait que jusqu'au soir
et n'exigeait aucune purification
(6).
L'Évangile n'a point anéanti la mort
avec la hideuse décomposition du cadavre, ni
la lèpre et les autres maladies, ni les
animaux immondes ou venimeux, ni les
déserts ; mais il avait donné
aux premiers chrétiens, qui devaient fonder
l'Église dans un monde rebelle, la puissance
miraculeuse de ressusciter les morts, de
guérir les maladies, d'être
inaccessibles à l'action du poison et de
marcher sur les serpents et les scorpions
(Luc X, 19 ;
Marc XVI, 17. 18 ;
Actes III, 1-11 ;
IX, 32-42 ;
XXVIII, 1-6, etc.).
La distinction des animaux mondes et immondes a
été aussi abolie pour les
chrétiens de tous les temps. Le Christ,
à qui la nature appartient aussi bien que
les êtres intelligents, l'a livrée
tout entière au libre usage de ses
disciples, et il les a rendus par leur foi
vainqueurs en espérance de la mort et des
autres maux physiques, en attendant qu'il ait
détruit toutes les oeuvres du diable, et
rendu au monde la pureté pour laquelle il
avait été formé.
Cette victoire finale du Christ est l'objet de
l'ardente espérance de toutes les
créatures qui ensemble soupirent
jusqu'à maintenant et sont comme en travail
pour enfanter leur
délivrance
(Rom. VIII, 18-24.). Les
chrétiens, qui pourtant ont reçu
les prémices de l'Esprit-Saint, mais
qui ne sont sauvés encore qu'en
espérance, soupirent après le
temps où leurs corps seront
rachetés des mains de la mort.
Les nations païennes soupirent après
la glorieuse manifestation des enfants de Dieu,
sous le lourd et rude manteau
dont le péché les a recouvertes,
et qui comprime tous leurs mouvements, arrête
leur essor, les courbe vers la terre, les
étouffe, les écrase
(Esaïe XXV, 7.).
Les créatures dénuées de
raison elles-mêmes soupirent après
la liberté que doit leur rendre
l'Église au temps de sa gloire et de sa
résurrection ; car elles ont
été assujetties à la
vanité, à la corruption,
malgré elles et par la faute de leur
propre roi qui, au lieu de les porter avec
affection à travers les siècles
jusque dans l'éternité, les a
exposées par sa chute aux foudres du Dieu
trois fois Saint.
Les animaux domestiques soupirent sous le fouet de
maîtres sans pitié ; nos
récoltes et nos vergers, ainsi que les
arbres des forêts, soupirent sous les coups
de la grêle ou de la tempête ; la
montagne soupire quand l'avalanche déchire
ses flancs ; l'air est plein de soupirs sous
toutes les zones, de plaintes lugubres vers les
pôles, de cris sinistres dans les nuits des
tropiques ; la nature entière soupire
quand les grands fléaux de Dieu
ébranlent ou parcourent la surface
terrestre, et les astres même qui sont sortis
du même chaos que notre planète,
sympathisent aux souffrances de leur soeur.
c) Ce temps d'affranchissement, que les
créatures appellent avec tant d'angoisse et
d'impatience, c'est le règne du Christ
pendant le septième et dernier
millénaire de l'histoire de
l'humanité. Alors toutes choses seront
rétablies
(Matth. XVII, 11 ;
Actes III, 21.) dans leur
état normal, d'où le
péché les a
déplacées ;
elles seront restaurées,
rafraîchies
(Actes III, 19.) ; ce
sera une vraie palingénésie,
et quand le Fils de l'homme se sera assis sur
son trône glorieux, les douze apôtres,
ressuscités, siégeront aussi
sur douze trônes, exerçant le
jugement et régnant avec tous leurs
frères
(Matth. XIX, 28 ;
Apoc. XX, 4.).
L'établissement du règne du Christ se
lie si intimement aux dernières
destinées de l'Église actuelle et de
nos puissances antichrétiennes tant
politiques qu'ecclésiastiques, que nous
devons revenir quelque peu sur nos pas pour
exposer, d'après la prophétie,
comment finira l'âge présent, et les
révolutions physiques qui auront lieu alors,
tiennent de trop près aux commotions
sociales pour que nous puissions ne faire ici que
l'histoire de la terre
(7)
.
L'empire turc n'existe plus : le fleuve de
l'Euphrate est desséché. La
Judée sans maître voit accourir vers
elle de tous les pays où ils avaient
été dispersés, ses enfants,
qui sont les Rois de l'Orient
(Apoc. XVI, 12 ; comp.
Esaïe XLIV, 27 ;
Jérém L, 38 ;
LI, 32,36.).
Cette émigration en masse a
excité la colère de tous les rois
de la terre, que séduisent de
concert les inspirations des esprits invisibles de
l'enfer, les conseils des hommes d'État, et
ceux des prêtres du faux christianisme ;
la guerre se prépare entre les
puissances du monde et le Dieu d'Israël
(Apoc. XVI, 13, 14.) et les
armées européennes viennent
assiéger Jérusalem, qui est
à peine affermie, et qui semble
abandonnée de Dieu. Mais tous leurs efforts
sont inutiles ; l'Éternel frappe
ses ennemis de folie.
Jérusalem est délivrée, et
bientôt elle siège de nouveau
en reine sur son trône ; car
Juda a dévoré toutes les
nations voisines et s'est élevé
à un degré extraordinaire de
puissance
(8).
Cependant en Occident, la Babylone mystique, la
ville aux sept collines, qui s'est enivrée
du sang de tous les martyrs, a vu les dix
royaumes qui s'étaient formés des
débris de l'empire romain, et qui l'avaient
longtemps portée complaisamment sur
leur dos, se tourner contre elle
après leur grande défaite
en Judée, la rendre
désolée et nue, manger ses chairs et
la brûler dans le feu.
La destruction de cette cité par la main
des hommes se complétera, semble-t-il, par
quelque catastrophe physique : Babylone
sera réduite en un désert en un
instant ; elle sera précipitée
avec violence, telle qu'une meule qu'on jetterait
dans la mer, et sa fumée montera aux
siècles des siècles comme celle
d'un volcan à demi éteint qui s'est
affaissé sur lui-même
(Apoc. XVI, 17-21 ;
XVII, 1-3.
Comp. Esaïe XXXIV, 10.).
Bientôt après, Israël, au milieu
de ses prospérités croissantes,
reconnaîtra avec une indicible douleur, que
Celui qu'il avait en Golgotha
percé sur sa croix, est
Jéhova lui-même, et se convertira
tout entier à l'Évangile. Le Christ,
qui dans les cieux est toujours le fils de David,
peut maintenant redescendre sur la terre vers les
siens
(Zach. de XII, 10 à XIII,
6.).
Ils l'attendent dans de mortelles angoisses ;
car les dix rois, depuis qu'ils avaient
commencé à haïr Babylone
la prostituée, s'étaient
donné un autre maître en la personne
de l'Homme de péché, de
l'Antichrist, de la Bête, qui
réunissait ainsi pour un peu de temps sous
un seul sceptre tous les pays de l'ancien empire
romain, et en qui se
résumait tout ce que le
péché a de séduction,
de puissance et
d'impiété
(Apoc. XVII, 12. 13.
16. 17.
Jean 1re épître II,
18.).
Cet Antichrist, qui s'était
trouvé engagé dans une grande guerre
avec un roi puissant du Midi ou de
l'Égypte, avait, à
l'ouïe d'étranges nouvelles,
tourné subitement ses armes contre
Jérusalem, et dressé ses tentes
royales, dans une grande fureur, entre la mer Morte
et la Méditerranée, sur la sainte
montagne (des Oliviers ?)
(Daniel II, 38-45.).
Jérusalem est donc
assiégée par ce roi, qui a
amené contre elle toutes les nations.
Déjà même elle est
prise, elle est pillée, elle est
emmenée en captivité ; et
pourtant elle est repentante et
fidèle ; mais le sang du Fils de Dieu
teint encore le rocher de Golgotha, et
l'épée vengeresse de
l'Éternel s'est réveillée
pour frapper le troupeau
même de Dieu et, pour ainsi dire, son
proche parent
(Zach. XIII, 7-9 ;
XIV, 1.2.).
Tout à coup le soleil s'obscurcit, la
lune ne luit plus, des signes se montrent dans
les étoiles et les puissances des
cieux sont ébranlées ; la mer et
les flots bruissent avec violence ; les
nations rendent l'âme de terreur.
Bientôt, tel qu'un éclair
qui part de l'orient et atteint en un
clin d'oeil l'occident, apparaît le
signe du Fils de l'homme, et les hommes
voient le Verbe de Dieu, le Roi des rois et le
Seigneur des seigneurs descendre du ciel sur
une nue avec une grande puissance et une grande
gloire, entouré de tous ses saints
anges
(Zach. XIV, 3. 6 ;
Matth. XXIV, 27-30 ;
Luc XXI, 23 -27 ;
Apoc. XIX, 11-16.).
Il pose ses pieds sur la montagne des Oliviers,
qui se fend par le milieu d'orient en
occident, et dont une moitié
s'affaisse vers le nord et l'autre vers le midi.
Les fidèles de Jérusalem, dans
l'épouvante générale,
s'enfuient par cette nouvelle
vallée qui s'étend jusque
au lieu nommé la Fin des
douleurs. Journée
unique qui n'est ni nuit ni jour,
mais qui n'aura pas de soir et se transformera
en une pure et permanente lumière.
Cependant, des sources nouvelles qui ont
jailli à Jérusalem, donnent naissance
à deux fleuves, dont l'un descend
vers la mer Morte, dont les eaux
deviendront, en partie du moins, salubres,
et l'autre, vers la grande mer
Occidentale ; et tout le haut
plateau de Juda, depuis les
frontières d'Éphraïm à
celles de l'Idumée, se transforme en une
plaine basse et unie semblable à
celle du Jourdain, tandis que
Jérusalem est élevée
au-dessus de son altitude actuelle et domine de
très haut toute la contrée voisine
(Zach. XIV, 3-14 ;
Ezéch. XLVII ;
Joël III, 18.).
Au milieu de ces révolutions de la nature,
les nations qui venaient de prendre
Jérusalem, sont frappées d'une
affreuse maladie, qui fait pourrir les corps
avant la mort, et dans le trouble que
l'Éternel leur met au coeur elles
tournent leurs armes les unes contre les
autres.
Ce champ de bataille est le tombeau de
l'Antichrist et du Faux Prophète,
ou de l'État romanique et d'une
soi-disant Église chrétienne, qui
faisaient la guerre à Jésus-Christ et
aux siens. Nulle puissance religieuse ni civile ne
s'opposera plus désormais au règne de
la vérité : Satan est
lié pour mille ans
(Zach. XIV, 12. 13 ;
Apoc. XIX, 13-20. Comp.
2 Thessal. II, 8.) « Le
Seigneur détruira le méchant par
l'éclat de son
avènement. »
Ce que nous appelons l'histoire moderne
aboutira donc à une révolte ouverte
des peuples de l'ancien empire romain contre
Jésus-Christ, et à la ruine totale de
la société actuelle, sur les
débris de laquelle s'élèvera
le trône du Messie.
Satan une fois lié, l'Église
éprouve une complète transformation.
Non seulement les soi-disant nations
chrétiennes sont retranchées à
cause de leur infidélité,
et Israël, enté sur
son ancien tronc ; mais la foi s'allie
à la vue, la possession à
l'espérance, la joie à
l'abnégation ; en même temps
l'Église, d'invisible qu'elle était,
devient visible, d'obscure glorieuse, d'esclave
reine. Elle déploie à tous les yeux
ses trésors cachés, sa beauté
intérieure. Elle passe du domaine de
l'esprit dans celui de la nature.
De même que le péché spirituel
d'Adam n'avait manifesté tous ses effets
matériels dans le corps de l'homme et dans
la terre que deux mille ans après la chute,
ainsi le Sauveur répand pendant deux mille
ans sa vie dans les âmes avant de renouveler
les corps et le monde physique.
Et d'abord, à l'instant de son
avènement, il a envoyé ses anges
avec un grand son de trompette pour rassembler ses
élus d'un bout des deux à l'autre
(Matth. XXIV, 31.).
Par une première et partielle
résurrection il a rappelé
à l'existence terrestre tous ceux qui
étaient morts en lui, tant ceux qui
avaient péri sous la hache des
persécuteurs que ceux qui avaient
simplement refusé leur culte
à ses ennemis
(Apoc. XX, 4 6, et
1 Thessal. IV, 16. Comp.
Daniel XII, 2).
Ceux de ses serviteurs qui vivront lors de sa
descente du ciel seront
métamorphosés en un clin d'oeil au
son de la dernière trompette et
enlevés avec les ressuscités dans les
airs à sa rencontre pour ne plus le
quitter.
Réunis tous ensemble dans une portion de
la Judée qui est comme le Lieu
Très-Saint de la terre
(9), ils sont
les sacrificateurs de Dieu et du Christ,
intercédant sans cesse pour le reste des
hommes
(1 Thessal. IV, 14-17 ;
1 Corinth. XV, 51, 52.)
Dans les limites, très agrandies, de la
Judée que nous comparerons au Lieu Saint,
les fidèles verront leurs jours
égaler la durée des arbres, elles
ouvrages de leurs mains
vieillir devant eux.
Exempts de toute maladie
(Esaïe XXXV, 5. 6.), il n'y aura
plus parmi eux d'enfant qui ne vive que peu de
jours, de vieillard qui n'accomplisse sa
carrière ; celui qui mourra centenaire
sera jeune, et sa mort prématurée
sera le châtiment de ses
péchés.
Le temps des Sethites, par lequel s'ouvre
l'histoire de l'homme, reparaît donc à
la fin de son développement, et, pendant le
millénium, le Christ fait remonter à
l'humanité, qu'il veut introduire dans les
cieux, autant de degrés que le
péché lui en avait fait descendre
d'Adam à Abraham et à Moïse.
Hors de la Judée, dans le Parvis, vivent les
nations qui toutes reconnaissent la
souveraineté de Jésus-Christ et de
son Église, mais qui diffèrent peu,
semble-t-il, de ce qu'elles sont aujourd'hui.
À la longévité extraordinaire
des fidèles de la Judée correspond
nécessairement une nature renouvelée
à l'instar de l'homme. Ce pays est devenu un
Éden, un jardin de l'Éternel
(Esaïe LI, 3 ;
Ezéch. XXXVI, 35.). Les
torrents ne tarissent plus pendant les ardeurs de
l'été, toutes les vallées
ont leurs sources, et des fleuves
descendent des lieux élevés
(Zach. XIV, 8 ;
Joël III, 18.).
Comme les vraies limites de la Terre-Sainte
s'étendent au loin dans les déserts
vers l'Euphrate et le Nil, ces vastes plaines,
aujourd'hui stériles et solitaires, seront
arrosées par des rivières qui
les convertiront en étangs, où
l'on verra (par un étrange contraste avec le
temps actuel) la verdure des roseaux et des
joncs ; des sources y jailliront en grand
nombre, et le désert fleurira et sera
dans l'allégresse. Il poussera des cris de
joie, car il aura reçu la gloire du
Liban et la magnificence du Carmel : il se
couvrira tout à la fois de cèdres,
de sapins, d'ormes, de buis, de myrtes et
d'oliviers
(Esaïe XXXV ;
XLI, 18. 19 ;
XLIII, 19.
20).
Pour opérer de tels changements dans
l'aspect de l'Asie occidentale, il suffirait
peut-être que les nuées qui errent
comme à l'aventure sur la face de la terre,
fussent dirigées en rangs serrés vers
la Judée ; car, dans les pays chauds,
la fertilité dépend de l'abondance
des eaux. C'est de la régularité des
pluies qu'il faut entendre ce passage
prophétique d'Osée : Alors,
dit l'Éternel, je répondrai
aux cieux, et les cieux répondront à
la terre, et la terre répondra au froment,
à la vigne et à l'olivier, qui
répondront au (peuple de la belle et
fertile plaine de) Jizréel
(Osée II, 21. 22. Comp.
Ezéch. XXXIV, 26,
27.).
Si la terre et l'homme éprouvent à
l'entrée du millénium des changements
aussi considérables que ceux que nous venons
de signaler, il ne se peut faire que le
règne animal, dans la Judée au moins,
n'ait aussi sa part dans cette restauration
générale. « Dans ce
temps-là, dit Osée au même
endroit, l'Éternel traitera pour son
peuple une alliance avec les bêtes des
champs, avec les oiseaux des cieux et avec les
reptiles de la terre ; et il brisera l'arc et
l'épée, il ôtera du pays la
guerre, et il fera dominer en sûreté
ses serviteurs. »
En vertu de cette alliance, les animaux
nuisibles seront exterminés du pays
afin que les brebis de l'Éternel
puissent dormir en assurance au milieu des
forêts, et il ne pourra point y arriver
de bêtes féroces des
contrées voisines parce que le chemin
qui conduit à la Terre-Sainte se
nomme le chemin de la sainteté
(Ezéch. XXXIV, 25. 28 ;
Esaïe XXXV, 8. 9).
Ou plutôt les animaux carnivores
perdront, par quelque étrange
transformation, leurs moeurs sanguinaires ;
le loup habitera avec l'agneau, la jeune vache
paîtra avec l'ourse, et leurs petits
gîteront ensemble ; le lion mangera du
fourrage comme le boeuf. Mais le serpent, en
mémoire de la chute, conservera sa vieille
nature : il rampera toujours dans la
poudre ; toutefois il
ne fera point de mal dans
toute la sainte montagne, et l'enfant qu'on
allaite s'ébattra impunément sur
le trou de l'aspic
(Esaïe XI, 6-9 ;
LXV, 25.).
C'est ainsi qu'en Judée, sous le
règne du Messie, l'homme ne périra
plus par les bêtes venimeuses ou
féroces, et que l'animal domestique
lui-même vivra paisiblement auprès
d'elles. La nature terrestre revient donc à
cet état de très grande
bonté où les quadrupèdes
ni les oiseaux ne comptaient point d'espèces
carnassières.
Cette correspondance de l'état originaire
avec l'état final est trop manifeste pour
qu'il soit possible de ne donner aux
prophéties d'Esaïe qu'un sens
allégorique. Nous savons d'ailleurs par
plusieurs prédictions accomplies que le sens
figuré n'exclut nullement le sens
littéral, et nous devons donc admettre qu'en
même temps que le fidèle reprendra sa
quasi-immortalité des siècles
primitifs, le règne animal subira, dans
certaines espèces et dans une certaine
contrée, des modifications que nous ne
pouvons faire concorder avec les lois
physiologiques, mais dont aussi nous ne connaissons
point encore la vraie nature.
Cependant la malédiction dont le sol de
l'Église est affranchi au millénium
continue à peser sur le reste de la
terre : ainsi les nations qui se refuseront
à adorer le vrai Dieu, seront
châtiées par la sécheresse,
la pluie ne viendra point sur elles
(Zach. XIV, 17-19.).
Après les mille ans, Satan est
délié ; Gog et Magog, ou les
nations des extrémités de la terre,
qui avaient subi sans se convertir le joug du
Christ, tentent un dernier effort contre
l'Église. Dieu les détruit par le feu
du ciel
(Apoc. XX, 7-9).
Ce feu, c'est une grande crise atmosphérique
qui prélude à la conflagration qui va
dévorer tout le système
solaire.
Satan est précipité dans
l'étang ardent de feu et de soufre,
où ont été jetés
déjà l'Antichrist et le Faux
Prophète ; le jugement dernier
commence ; l'incendie éclate, la terre
et le ciel sont comme anéantis ; tous
les morts comparaissent devant le tribunal du
Christ, et chacun est jugé selon ses oeuvres
(Apoc. XX, 10-15).
La grande période de ce septième jour
cosmogonique qui aurait dû être pour la
nature un sabbat, est terminée. La terre
très bonne, après avoir
été bouleversée par l'eau du
déluge, est consumée par le feu.
3e PÉRIODE DE
L'ÉTERNITÉ.
Le monde qu'a détruit le feu,
renaît de ses cendres. Mais c'est un ciel
nouveau, c'est une terre nouvelle
(Apoc. XXI, 1).
Le système solaire n'existe plus. La lune
n'est plus le satellite de la terre, et la terre
n'est plus la planète du soleil; elle n'a
plus de nuit, et la lumière qui
l'éclairé, c'est la gloire même
de Dieu
(Apoc. XXI, 11-25 ;
XXII, 5.
Ps. LXXII, 5. 7).
Plus de ténèbres et plus de
mer ! Ainsi disparaît toute trace du
chaos désordonné qui a
été le berceau de la terre
(Apoc. XXI, 1).
L'apôtre Jean, par qui seul nous connaissons
la terre éternelle, ne nous parle avec
quelque peu de détails que de la
Jérusalem céleste, astre cubique
qu'il vit descendre d'auprès de Dieu sur la
surface de la terre nouvelle.
Le cube est le symbole de l'inébranlable
durée.
Chacune des faces de la Jérusalem
céleste mesure douze mille
stades, soit environ quatre cent quatre-vingt-cinq
lieues. Son étendue est donc de plus de deux
cent trente-cinq mille lieues carrées
(10)
Le sol de la grande place et la ville même
sont non de calcaire ou de grès, ni de
granit ou de porphyre, mais d'une substance
étrangère à notre terre
actuelle, qui réunit, par une
étonnante combinaison, des
propriétés en apparence
contradictoires. C'est un or pur qui a la
transparence du cristal le plus clair. Les murs
sont de pierres précieuses, et chacune des
douze portes est d'une seule perle
(Apoc. XXI, 18-21).
Enfin un fleuve, qui sort du trône de Dieu et
de l'Agneau, traverse la grande place où
s'élève l'arbre de vie
(Apoc. XXII, I. 2).
D'ailleurs la distinction de peuple élu et
de nations subsiste encore, et les feuilles de
l'arbre de vie
(Apoc. XXII, I. 2) sont pour la
guérison des gentils
(Apoc. XXI, 24-27 ;
XXII, 2).
Mais le trait distinctif de la Jérusalem
céleste, c'est que la gloire de Dieu
l'éclaire, que Dieu et l'Agneau y ont
leur trône, que c'est là que
Dieu a dressé son tabernacle
pour l'éternité
(Apoc. XXI, 3. 11.
22-24 ;
XXII, 1. 3. 5).
La terre, qui à son origine était la
patrie du premier des archanges, devient ainsi, au
terme de son développement, le séjour
de l'Homme-Dieu et le Lieu Très-Saint de
l'univers où l'Éternel fait habiter
sa gloire resplendissante.
L'histoire de la terre d'après la Bible
forme un en semble complet et
harmonique dont la fin répond au
commencement, et dont les parties
intermédiaires s'enchaînent solidement
les unes aux autres. Il serait même fort
aisé de représenter toute cette
histoire par une ligne qui descendrait de la
hauteur du monde de l'aurore jusque dans les
profondeurs du chaos ; de là elle se
relèverait, en six degrés et
malgré six faibles rechutes, jusqu'au niveau
de la terre très bonne ; puis elle
s'abaisserait de nouveau après la faute
d'Adam, par une pente peu rapide du paradis au
déluge, d'une manière abrupte du
déluge à Abraham, assez lentement
d'Abraham à Moïse, presque
insensiblement de Moïse à
l'Antichrist ; et, enfin, elle remonterait
pendant le millénium au niveau de la
période antédiluvienne, pour
s'élever subitement, après la
conflagration finale, à une hauteur de
beaucoup supérieure à celle de son
point de départ.
Cette histoire si bien liée se trouve
éparse dans tous les livres de la Bible.
Pour la reconstruire nous avons dû faire
entrer dans le même tableau une cosmogonie
plus ancienne que la dispersion des peuples, les
révélations de saint Pierre et de
saint Jean, des passages de Moïse, de David,
de Salomon, d'Esaïe, de Daniel,
d'Ezéchiel, de Zacharie, et des paroles de
Jésus-Christ.
D'où vient, à trois et quatre mille
ans de distance, une telle unité de vues sur
un sujet aussi étranger en apparence
à la morale et à la foi, aussi
spécial, aussi positif, aussi
difficile ? N'est-on pas comme forcé de
reconnaître que tous ces prophètes qui
se succédaient à de longs intervalles
dans la suite des âges puisaient leurs
pensées, leurs révélations
à une source unique, immuable,
éternelle et divine ?
Cependant l'unité de vues peut provenir
aussi d'une intuition antique et erronée que
la tradition conserve de génération
en génération, et qui va se
développant et se
complétant avec les siècles. C'est
ainsi que le brahmanisme a son histoire du monde,
qui, pour être complète et fort bien
liée, n'en est pas moins absurde ;
aussi de nos jours bat-on en brèche avec les
sciences naturelles ce système hindou dont
les dogmes religieux, les lois morales, les
institutions sociales sont indissolublement
liés à une cosmogonie imaginaire.
Ce que les chrétiens d'Europe font à
Calcutta contre l'idolâtrie, les
incrédules le font en Europe contre la
révélation chrétienne :
ils tentent de démontrer que cette histoire
de la terre, qui fait partie intégrante de
notre foi, est en contradiction avec la
géologie ou l'astronomie.
Mais s'ils ne prouvent pas leur thèse, il
est évident que les écrivains
hébreux, vivant à une époque
où les sciences naturelles n'existaient
point encore, n'ont pu connaître les
résultats auxquels elles sont tout
récemment parvenues, que par une voie
surnaturelle qu'on nomme l'inspiration.
Ajoutons que si les récits de la Bible
relatifs au passé sont reconnus pour vrais
par ces sciences, ce serait manquer à
l'équité et à la logique que
de ne pas accepter aussi pour vraies les
prophéties de cette même Bible sur
l'avenir de notre planète.
Nous allons donc, après plusieurs autres,
tenter la comparaison de la Bible avec les sciences
physiques, et tout spécialement avec la
géologie. Cette comparaison portera sur la
période de création et sur
l'époque diluvienne, que la Genèse
décrit avec un soin tout particulier. Notre
premier devoir est de justifier et de
compléter l'interprétation que nous
en avons donnée dans les pages qui
précèdent, et pour cela nous
soumettrons à une analyse scrupuleuse chaque
ligne du texte sacré.
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