Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
REGARD
Bibliothèque chrétienne online
EXAMINEZ toutes choses... RETENEZ CE QUI EST BON
- 1Thess. 5: 21 -
(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



Nous les jeunes

V.
LA SANTÉ

« IL S'ÉLÈVE UN CRI VERS LA SANTÉ, À TRAVERS CE MONDE CONTAMINÉ ! »

LHOTZKY.

 Une fois de plus, il faut que nous venions en aide à notre volonté. L'esprit est prompt, mais la chair est faible ; il ne faut pas que cette faiblesse dégénère en une maladie héréditaire, se perpétuant et se transmettant d'une génération à l'autre. Comme l'esprit, la volonté a besoin d'éducation, pour pouvoir exercer une maîtrise incontestée sur le corps, et pareillement, le corps doit être dans l'état voulu, pour obéir à l'esprit. Le meilleur cavalier ne saura que faire d'un cheval sauvage.

Il y a eu des gens, et il en existe encore aujourd'hui, qui considèrent le corps comme une chose vile et souillée. C'est pourquoi ils le mortifient par l'ascétisme. Mais ils ont fait l'expérience que le corps, ainsi maltraité, n'obéit pas mieux à l'esprit. Les plus grands « Saints » ont eu à endurer les plus fortes tentations sexuelles. L'ascétisme, comme principe, pèche contre la nature qui se venge.

Actuellement, le danger me paraît être tout autre. On fait beaucoup trop attention au corps. On le nourrit avec ce qu'il y a de meilleur, on le protège contre toutes les influences de l'air vif on le soumet au médecin, on lui fait subir des cures pour des maux très légers, on essaye, aujourd'hui ce remède, demain celui-là ; on consulte des docteurs les uns après les autres. En vérité, il y a des hommes dont toute l'occupation et la maladie ne consistent que dans le souci qu'ils prennent de leur corps. On pourrait leur donner ce conseil : Ne vous inquiétez plus de votre corps ! mais ils ne le suivraient pas, car il est trop simple. Ce bien précieux de la santé, que l'on conserverait si facilement par des moyens naturels, est sacrifié, combien souvent ! à l'idole Mammon. Que d'hommes meurent, non de leur maladie, mais de leurs cures !

Nous devons adopter, à l'égard de notre corps, une attitude simple et naturelle. Il est aussi nécessaire à notre existence que notre esprit. Nous ne pouvons pas vivre sur cette terre sans posséder un corps ; c'est pourquoi, tout comme chacun de ses membres, il a une valeur qui lui est propre.

Nous n'allons pas essayer de faire, ici, une analyse scientifique par laquelle nous fixerions les limites des domaines respectifs du corps et de l'esprit ; nous nous efforcerons plutôt de définir ce que doit être le corps au point de vue « moral ». Le développement de la personnalité humaine, qui nous est apparu comme l'idéal suprême auquel nous devons tendre, ne nous permet pas d'admettre que le corps ne soit pas sous la domination de l'esprit. Ils auront beau se pénétrer et s'influencer mutuellement, c'est l'esprit qui doit être le maître !

Mais le corps ne remplirait pas complètement la fonction qui lui a été attribuée par la nature, s'il n'était que l'organe soumis de l'esprit ; il est plus que cela, il est l'expression, la manifestation de l'esprit. Il caractérise l'esprit qu'il sert par sa tenue, par la forme qu'il prend, par chacun de ses mouvements, par l'expression des yeux. Il rend tangible la vie personnelle invisible ; il est la façade de la demeure de notre être ; il est encore plus que cela, il prend part à nos actions les plus intimes ; il peut être un lourd fardeau pour les ailes de notre esprit, ou au contraire, il peut fortifier ces ailes et faciliter leur vol. Nous ne mépriserons et ne négligerons pas ce compagnon indispensable de notre vie personnelle. Nous lui donnerons ce qui lui appartient, ni plus ni moins. Nous lui apprendrons qu'il doit nous servir, et quand il essayera d'outrepasser ses droits, nous le remettrons à sa place.

Une âme saine doit régner dans un corps sain.

La synthèse de toutes les forces corporelles est la force sexuelle. Son droit à l'existence, sa noblesse, son importance n'ont plus besoin d'être justifiés ; nous dirons seulement qu'il est naturel que cette force se manifeste chez l'homme fait. Le mariage lui fournit l'occasion de s'exercer d'une manière conforme au but qui lui a été assigné. Quelque fondées que puissent être les critiques que l'on fait sur le mariage et la façon dont il se conclut actuellement, il n'en demeure pas moins sûr et certain qu'il n'est pas une institution arbitrairement établie par la volonté humaine, que l'on pourrait arbitrairement modifier ou supprimer. Considéré au point de vue de l'évolution naturelle, le mariage nous apparaît comme un héritage que nous posséderions en commun avec les animaux supérieurs, lorsqu'ils vivent en liberté.

Chez ces derniers également, l'union des deux sexes n'a pas comme but unique la procréation, mais aussi les soins à donner à la progéniture, jusqu'à son complet développement. Celui, donc, qui parle de la liberté sans entraves de l'instinct sexuel comme d'un droit naturel n'est plus sur le terrain scientifique. « Le commerce sexuel, en dehors du mariage, n'est pas du tout prévu dans la nature, il n'est qu'une malheureuse aberration de la civilisation, une erreur. Plus l'instinct sexuel sera intensif, plus bienfaisante sera sa satisfaction ; plus ses limites seront précises et étroites, plus la relation sexuelle sera sainte et élevée, car elle conduit à l'amour, au mariage. Chez l'homme, l'amour seul, l'amour réciproque, et non l'instinct sexuel, donne le droit à la jouissance sexuelle. L'instinct monogame est donné par la nature ; si l'humanité l'abandonne, et continue à l'abandonner, elle ira à sa perdition. » (Professeur Heim.)

Sans doute, une activité normale de l'instinct sexuel dans le mariage, est saine et profitable. Mais je présume que beaucoup d'entre nous, jeunes hommes, se font une idée très fausse de ce qui concerne les rapports conjugaux. Ils croient peut-être que le mariage donne le droit d'assouvir l'instinct sexuel, sans aucun frein, au gré des caprices ou des besoins du moment. Il n'en est rien, et il est heureux qu'il n'en soit pas ainsi.

Peu de personnes seront, il est vrai, aussi sévères que le comte Tolstoï, qui veut que l'acte sexuel ne soit accompli qu'avec l'intention, parfaitement consciente, de procréer un enfant. Strictement suivi, ce conseil aboutirait au même pédantisme que si nous décidions de ne manger que lorsque nous avons vraiment faim, sans nous laisser jamais tenter par la saveur d'un aliment ou d'une boisson. D'ailleurs, la nature a opposé bien des obstacles à des rapports sexuels déréglés dans le mariage. Le temps de la menstruation, pendant lequel la femme exige des ménagements, les premiers mois de la grossesse qui, surtout avant la première naissance, l'éprouvent beaucoup, les derniers mois de la grossesse, ainsi que bien des semaines après la naissance, sont autant d'époques qui rendent nécessaire, à cause de l'état de la femme, l'interruption des rapports sexuels. Je sais très bien que dans beaucoup de mariages on n'en tient pas compte, mais c'est presque toujours au détriment de la femme. Si l'union sexuelle est la plus forte expression de l'amour entre les époux, un renoncement désintéressé de la part du mari est une preuve d'affection tout aussi forte, lorsque la nature le lui impose comme un devoir. C'est pourquoi, ne nous berçons pas de l'illusion que, le mariage accorde une jouissance sexuelle sans entraves ; nous aurions, tôt ou tard, de grandes déceptions. Plus d'un homme marié est, grâce à l'état physique de sa femme, condamné à une continence prolongée. Je dis « condamné, » car il est dur d'être marié et de ne pouvoir jouir des rapports conjugaux ; cependant, il y a bien des maris qui supportent cette privation sans tromper leur femme. Le mariage, tel qu'il doit être, ne sera jamais, en aucun cas, le champ clos où notre sensualité pourra se donner carrière.

Les rapports sexuels dans le mariage, voilà les seuls qui soient normaux, voulus par la nature ; les statistiques le prouvent en nous donnant, pour les célibataires, des chiffres de mortalité supérieurs à ceux des hommes mariés. Connaissant nos contemporains comme nous les connaissons, nous n'oserons prétendre que cette mortalité est due à la continence gardée par les célibataires. Tout aussi absurde serait-il de conclure de l'âge plus avancé qu'atteignent les hommes mariés que la possibilité d'une satisfaction sexuelle sans entraves les rend plus forts et mieux portants. Toutes les probabilités concordent pour démontrer que les rapports sexuels dans le mariage, bienfaisants pour le corps et pour l'âme, tant qu'ils restent réglés, normaux, naturels et séparés par des intervalles plus ou moins longs, conservent la force de l'homme jusque dans un âge avancé.

Parlons maintenant des conséquences nuisibles pour la santé qu'entraîne le commerce sexuel en dehors du mariage. Nous ne chercherons pas à effrayer par le danger des maladies contagieuses. Celui qui n'aurait pas d'autre raison pour rester pur que la crainte de la syphilis, ne serait qu'un lâche. Nous avons, j'espère, de meilleurs motifs en réserve !

J'ai déjà dit qu'un jeune homme adonné à la prostitution n'est pas probablement, mais sûrement exposé à contracter une maladie vénérienne. Il y a des exceptions ; mais qu'elles soient rares, les jeunes hommes le savent. Cependant, c'est à peine si l'on sait que ces maladies, malgré une prétendue « guérison » obtenue par des traitements pénibles, peuvent encore, après bien des années, détruire le bonheur d'une union, et on peut bien le dire, infecter femme et enfants. Ce qui distingue ces maladies, c'est qu'on est porté à les croire guéries alors qu'elles ne font que sommeiller. Celui qui connaît leur persistance, ne s'étonnera plus de voir tant de femmes en bonne santé, tomber, après leur mariage, dans un état maladif prolongé et constatera la vérité de cette antique parole, que l'iniquité des pères retombe sur leurs enfants.

Je renonce à m'étendre plus longuement sur ce sujet, mais de ce que nous venons de dire, il résulte pour l'homme, avant son mariage, une effrayante responsabilité. De l'empire qu'il aura su exercer sur lui-même pendant une seule heure, dépend - combien souvent ! - le bonheur de toute une vie, que dis-je, d'une famille entière ! En tout cas - il est malheureusement nécessaire de donner ici ce conseil - tout homme contaminé doit aller consulter un médecin consciencieux et suivre très exactement ses prescriptions, car sa santé, sa vie et son bonheur sont en jeu !

Du reste, l'existence des maladies vénériennes, avec leurs terribles conséquences, n'est-elle pas une protestation de la nature contre les rapports sexuels en dehors du mariage ? Elle se défend contre la violence qu'on lui fait, elle combat pour son droit. Et ce droit, n'est-il vraiment pas plus noble de le lui reconnaître spontanément, puisqu'il est indiscutable ? ou préférerons-nous nous laisser vaincre et anéantir par elle, grâce à notre légèreté et à notre mauvais vouloir ?

Il existe, il est vrai, toutes espèces de moyens pour se préserver de la contamination des maladies vénériennes. Je les connais par les livres des savants, qui donnent la méthode d'emploi de chacun d'eux. Je dois dire que j'ai été saisi d'un profond dégoût en lisant la nomenclature de ces pommades, injections, etc. Je me représente un corps d'homme, le mien par exemple, passant par toutes ces manipulations qui doivent être pratiquées avant et après les relations sexuelles, lorsqu'elles ont lieu en dehors du mariage, et j'ai honte que notre corps, aux muscles souples, à la démarche élastique, à la ressemblance divine, puisse être ainsi avili par les essais révoltants de toutes sortes de charlatans qui ne peuvent pas même garantir l'efficacité de leurs remèdes. Car, il n'y a que la réclame qui parle de l'action sûre de ces préservatifs ; la science ne les connaît pas. Elle ne connaît qu'un seul moyen préventif, c'est la continence.

Lorsque j'étais à l'Université, j'assistai, une fois, à une réunion d'étudiants dans laquelle on vint à parler des maladies vénériennes ; il fut dit que ces maladies étaient déshonorantes. Alors, un vieil étudiant se leva, et, d'un ton nasillard, son visage jauni exprimant la fatigue, prétendit que c'était conserver l'opinion d'une ancienne école, que de regarder comme déshonorantes les maladies vénériennes. Aussitôt un étudiant à la mine florissante s'avança et dit tranquillement, mais fermement, qu'il insistait sur ce point, que la remarque de l'orateur précédent ne reflétait qu'une opinion personnelle, et qu'il fallait bien se garder de l'attribuer à l'assemblée, chargée en ce moment de représenter l'Université tout entière. « Pour moi, ajouta-t-il, une maladie vénérienne est déshonorante ! » Et en effet, il suffisait de voir ces deux hommes, l'un à côté de l'autre, pour se rendre compte que tous deux avaient dit la vérité, en ce qui les concernait. Un corps, mille fois traîné dans la fange de la prostitution, se sent à peine déshonoré par une blennorragie ou par la syphilis. Ces maladies ne sont honteuses que pour ceux dont le corps est pur.

Il faut donc absolument éviter tout commerce sexuel en dehors du mariage ! C'est l'idéal qui nous est proposé, un but qui n'a rien d'inaccessible, mais est, au contraire, à la portée de tous.

Que la continence soit préjudiciable à la santé, ce n'est plus qu'une superstition absolument démodée, contredite presque unanimement par la science médicale. Les légers inconvénients corporels qui peuvent résulter de la continence, ne valent pas même la peine d'être nommés en regard des conséquences presque inévitables de la prostitution ! Je cite textuellement quelques-unes des autorités les plus connues, et j'accumule intentionnellement les citations de professeurs et de médecins, afin de prouver qu'unanimement les représentants sérieux de la science contestent tout danger à la continence. Ce ne sont point des moralistes rigides qui parlent ici, mais des hommes riches d'expériences pratiques, et qui font de la santé l'objet principal de leurs préoccupations.

Le Professeur Oesterlen écrit dans son Manuel d'Hygiène : « Pour ceux qui sont enclins à ménager à leur conscience des échappatoires tranquillisantes, l'affirmation suivante aura son importance, à savoir que la chasteté, la domination de l'instinct bestial, n'a encore jamais causé de grands maux ; en tout cas, dix fois moins qu'un commerce sexuel en dehors du mariage, prématuré et désordonné, n'en peut amener, et cela pour autant que cette chasteté provient de la libre volonté, et non pas d'une pression extérieure, d'une discipline forcée, d'ordonnances, etc. Ceci s'applique surtout au jeune homme qui, l'expérience le prouve, succombe beaucoup plus facilement à la tentation que la jeune fille. Comme pour toutes les faiblesses, ce qu'il faut surtout éviter, c'est le premier pas, car il est plus facile de surmonter les premiers désirs que ceux qui naissent lorsqu'on a déjà goûté du fruit défendu. Et l'on y réussit d'autant mieux lorsqu'on réfléchit qu'il y a point de gloire à faire ce que tout animal, tout butor, peut faire au moins aussi bien ; la grandeur de l'homme consiste ici à réfréner ses instincts et à vivre d'après les principes d'une sévère moralité.
Mais si l'on n'a pas su résister à la tentation, qu'on ne désespère pas ; le désespoir est une autre sorte de faiblesse qui envahit justement les meilleures natures. Il faut se rappeler l'exemple de ceux qui sont plus forts que nous sous ce rapport, l'appeler à notre aide, et penser qu'il n'est jamais trop tard pour le retour au bien, pour la guérison, dès qu'on le veut sérieusement, et que là aussi, le premier pas est le plus difficile. Que l'on ait confiance, et cela ira, cela doit aller. »

Dans sa Neuropathia sexualis virorum, le professeur Eulenburg doute que quelqu'un menant une vie raisonnable soit devenu, par la continence, malade de neurasthénie spéciale ou sexuelle. « Je tiens, dit-il, ces affirmations verbeuses et toujours renouvelées, pour des paroles absolument vides de sens, qui ne servent qu'à répéter ce que tout le monde dit, ou pis encore, à augmenter la soumission consciente à cette idole, universellement vénérée, et bien trop aisée à implorer : le préjugé.

Lutter contre ce préjugé est pénible ; ce serait cependant, pour les médecins, une tâche plus digne d'eux, que leur coopération à la réglementation et à la protection de la prostitution par l'État. Les deux choses se tiennent, car le préjugé en faveur dans le public que la continence est nuisible aux jeunes gens, renforcé par l'approbation tacite ou déclarée de certains médecins, encourage la jeunesse masculine à rechercher le commerce sexuel illégitime et la pousse dans les bras de la prostitution. On ne pourra jamais s'opposer trop énergiquement à cet état de choses. - Le fait que chez les jeunes hommes gardant la continence il se produit de soi-disant pollutions physiologiques, à intervalles plus ou moins rapprochés, est à la base de ce préjugé populaire, ou tout au moins lui sert de prétexte. Mais tout médecin sait que ces émissions qui se produisent pendant le sommeil, dans un rêve érotique, ne peuvent, si elles ne dépassent pas certaines limites, être considérées comme une maladie ; elles ne sont notamment pas à comparer avec la spermatorrhée ou d'autres états analogues, car elles n'ont aucune répercussion nuisible sur l'organisme entier. « Au lieu de rendre notre jeunesse masculine attentive aux dangers supposés de la continence, il vaudrait beaucoup mieux lui conseiller une vie hygiénique, l'endurcissement, le travail, l'exercice corporel, la lutte contre les mauvaises habitudes et les penchants nuisibles, avant tout contre l'habitude de fumer et de boire d'une façon exagérée. »

Dans son livre paru récemment et intitulé : La question sexuelle, le professeur Forel, de Zurich, spécialiste bien connu pour les maladies nerveuses, dit : « Dans des conditions normales, et pour un jeune homme normal, de capacités moyennes, qui travaille aussi bien intellectuellement que corporellement, qui se garde de toute excitation artificielle, surtout des narcotiques, tels que l'alcool, paralysant la volonté et la réflexion, il n'est pas impossible de mener une vie continente. Elle sera, dans la règle, facilitée, mais seulement à la maturité complète, souvent après la vingtième année, par des émissions nocturnes accompagnées de rêves correspondants ; la santé n'en souffre pas du tout. Toutefois, cet état ne peut pas être regardé comme un état normal, s'il n'y a aucune espérance de le voir cesser dans un avenir plus ou moins rapproché. » La fin naturelle de cet état n'est pas autre chose que le mariage. Le témoignage d'un homme aussi expérimenté que Forel a du poids, et cela donne à réfléchir lorsqu'il dit :
« Je n'ai jamais rencontré de psychose (maladie mentale) provenant de la chasteté, tandis que j'en ai vu d'innombrables provenant de la syphilis et d'excès de toute nature. Nous devons, en tout cas nous en tenir à ceci, que pour le jeune homme, jusqu'à son mariage, la chasteté n'est pas seulement éthique et esthétique, mais qu'en regard de la prostitution, elle est l'état le plus hygiénique et le plus salutaire. »

Voici ce que dit le professeur Dr Wyss, de Zurich sur les pollutions que beaucoup redoutent, les croyant nuisibles, et cherchent à éviter en se livrant à la prostitution : « En ce qui concerne les pollutions, on entend sous ce nom des émissions de sperme involontaires, se produisant pendant le sommeil ou dans un état de somnolence, et qui réveillent généralement celui qui les éprouve. Ces émissions, communes â presque tous les hommes, n'ont, cela va sans dire, aucune conséquence fâcheuse. Elles sont, en général, accompagnées de sensations désagréables ; si elles se répètent trop souvent, ou si celui qui les éprouve est de tempérament faible ou excitable, elles peuvent être suivies de lassitude, d'abattement, de douleurs dans les reins, de dégoût pour le travail, de lourdeur de tête ; mais tout cela disparaît au bout de quelques heures. Quoique beaucoup de jeunes gens s'en effrayent, on ne peut constater d'autres conséquences fâcheuses. Qu'est-ce qui produit ces émissions ? Une excitation intense qui atteint l'extrémité des nerfs du canal de l'urètre ; cette excitation est produite par des rêves, des excitations locales qui atteignent ce canal, du côté de la vessie ou du côté du rectum ; suivant les circonstances, l'excitation peut aussi provenir de la moelle épinière, mais ce cas est assurément rare.

Il est possible d'éviter les émissions en évitant les rêves lascifs, car on doit se souvenir que les rêves sont toujours une image, souvent très altérée, il est vrai, de ce qui a occupé nos pensées pendant la journée. Il faut donc absolument éviter les conversations obscènes, les chansons grivoises, les lectures excitantes, les pensées sur des sujets inconvenants ou immoraux. L'alcool, une nourriture trop riche en viande prise le soir, le thé fort et le café noir, certaines espèces de fromages comme le fromage vert, une alimentation trop épicée, irritent la membrane du gros intestin et facilitent les pollutions. La position du corps pendant le sommeil a aussi son importance ; le coucher sur le dos augmente les émissions, le coucher sur le côté, les diminue. À la limite d'un état normal, nous trouvons les jeunes gens anémiques, d'une faible constitution, chez lesquels les émissions se produisent fréquemment. Ceux-ci s'en effrayent souvent d'une manière extraordinaire ; l'un croit qu'il en perdra son intelligence, l'autre craint d'y laisser sa vie qui lui est, cependant, si chère. En réalité, nous considérons des émissions fréquentes comme anormales, mais nous n'avons pas une opinion aussi pessimiste de l'avenir du jeune homme. À côté de l'application exacte des mesures préventives déjà mentionnées, nous recommanderons à ces jeunes gens de prendre, à côté de leur activité cérébrale souvent trop exclusive, de meilleurs soins de leurs corps, de leurs muscles et de leurs nerfs. »

Le même médecin écrit ce qui suit, au sujet de la masturbation : « La masturbation ou onanisme, est un mal que l'on considère comme une conséquence nécessaire de l'abstinence sexuelle. Ce vice provenant des anciennes traditions des siècles passés, transmises par les médecins, est souvent considéré comme la cause des pires états : l'abrutissement, la démence, l'ataxie locomotrice progressive, etc. La médecine moderne ne reconnaît plus ces symptômes de maladie comme des conséquences de la masturbation. Quoique l'on soit forcé de reconnaître que la masturbation peut avoir joué un rôle dans l'ataxie locomotrice, ainsi que dans les maladies mentales, nous avons cependant la conviction absolue que l'origine de ces maladies doit se chercher dans le cerveau et la moelle épinière, et que l'excitation des organes sexuels en est une conséquence.
Que le masturbateur se fasse du mal par son abominable habitude, cela ne fait aucun doute ; les pertes fréquentes de sperme affaiblissent son organisme tout entier, et l'excitation nerveuse produit une irritabilité maladive et une excitabilité des nerfs des organes génitaux, ainsi qu'une sensibilité anormale de tout le système nerveux que l'on nomme la nervosité. Il en résulte, pour celui qui est atteint de ce vice, un état désagréable, repoussant même, qui devient d'autant plus intense que le patient est moins énergique et moins maître de lui-même. Plus il combattra, avec la ferme volonté de dominer ses sensations maladives, de les réprimer, de les bannir de ses pensées par le travail corporel, par l'effort (sans dépasser ses forces !) et par la discipline de son esprit, plus sûrement il pourra vaincre ces difficultés et retrouver la santé.

D'après mes expériences, ce mal, lorsqu'il tombe sous l'observation médicale, date déjà de la première enfance ; il fut enseigné au pauvre petit par un « brave ami » qui était plus âgé que lui, et « en savait plus long » ; rarement par un adulte. Il arrive assez fréquemment que tous les élèves d'un institut ont le malheur d'être « dressés » à cette funeste habitude et de ne plus pouvoir s'en passer. Plus tard, à l'âge où ils devraient être des hommes, ils en sont encore à combattre ce mal ou ce vice, - ce peut être l'un et l'autre - et demeurent des garçons faibles, c'est-à-dire qu'ils n'arrivent jamais à remporter la victoire.

Mon opinion est que l'homme ne doit plus tolérer ce vice. Avec toute son énergie et de toutes ses forces, il s'habituera, se forcera à surmonter ce désir maladif. Et si la supposition que c'est une nécessité absolue pour lui de se débarrasser de son sperme l'obsède, c'est son devoir, je pourrais dire c'est le devoir sacré de tout homme, de combattre avec opiniâtreté contre lui-même, contre ses parents, contre sa famille, de ne pas céder, et d'accepter toujours le combat avec une volonté ferme : C'est ainsi qu'il pourra vaincre. Cela est nécessaire, cela est bon, et tout à fait possible. »

Le professeur Gruber, de Munich, écrit, sur le même sujet, ce qui suit : « J'en dirai davantage sur la satisfaction contre-nature de l'instinct sexuel : je veux parler de l'onanisme, car ce mal est répandu d'une façon incroyable, et il règne en général, sur lui, les opinions les plus absurdes qui contribuent encore à aggraver ses funestes effets. Tandis que les uns estiment que l'onanisme est un moyen très convenable de se procurer du soulagement quand le sperme s'est accumulé en trop grande abondance et que les relations conjugales sont impossibles, moyen qu'ils estiment n'être pas plus blâmable que l'usage du mouchoir de poche ou du clysopompe, d'autres voient dans l'onanisme le mal le plus redoutable, dont les conséquences sont des plus nuisibles, pour la santé. Ces deux opinions sont fausses. Dans l'acte conjugal normal, l'éjaculation est amenée par l'action mécanique du vagin sur le membre viril. Nous ne comprenons pas pourquoi cela serait plus nuisible, pourquoi l'ébranlement nerveux serait plus fort lorsque l'action mécanique est autre que dans l'acte conjugal naturel.... Ce n'est pas absolument dans ce qu'a de nuisible l'acte commis par le masturbateur que réside le danger de l'onanisme, c'est, avant tout, dans ce que deux personnes sont nécessaires pour l'acte conjugal, tandis qu'une seule peut pratiquer l'onanisme, de sorte que les occasions de se masturber sont infiniment plus nombreuses que celles d'exercer l'acte sexuel, et que, par conséquent, la tentation à l'incontinence est beaucoup plus grande.

Les maux que les médecins constatent si fréquemment chez les onanistes sont les mêmes que ceux qui proviennent d'excès dans les rapports conjugaux ; mauvaise humeur, insomnie, pression et douleur dans la région des reins, troubles de l'alimentation, affaiblissement de la mémoire et des autres facultés mentales, faiblesse de la volonté, érections incomplètes, éjaculations prématurées, et par conséquent, difficulté d'exercer normalement l'acte sexuel. Si ces troubles se constatent plus fréquemment et d'une façon plus prononcée chez les onanistes que chez ceux qui pratiquent l'acte sexuel, cela provient justement de ce que l'onanisme est pratiqué par des jeunes gens qui n'ont pas encore atteint leur maturité sexuelle, ou qui ne l'ont atteinte qu'à moitié, et pour lesquels toute manifestation de l'instinct sexuel est très malsaine...

Le penchant à l'onanisme disparaît chez l'homme sain dès qu'il apprend à connaître les relations sexuelles normales. C'est pourquoi on donne fréquemment aux jeunes gens qui se masturbent le conseil d'aller chez les prostituées. Je tiens ceci pour une folie condamnable, car - pour ne rien dire de plus - la masturbation est, pour celui qui a atteint sa maturité sexuelle, un mal bien moindre que les maladies vénériennes qu'il pourrait contracter tôt ou tard, mais presque à coup sûr, dans ses rapports avec les prostituées. Encourager celui qui n'est pas encore pubère à pratiquer l'acte sexuel, c'est le corrompre tout à fait. J'ai dû ramener à sa juste importance le caractère nuisible de l'onanisme, parce que la crainte continuelle et le désespoir de l'onaniste augmentent encore considérablement le mal. Mais le jeune homme ne doit pas y trouver une excuse pour combattre moins énergiquement ce penchant, car, c'est justement lorsqu'il a, une fois, succombé à la tentation qu'il lui est presque impossible de garder la mesure. Et si ses testicules trop pleins lui procurent du malaise, qu'il pense que de cette plénitude de ses glandes génitales, dépendent le sentiment de la joie de la vie et de la force de la jeunesse, son courage et son besoin d'activité ; qu'il sache qu'il se dépouille d'une partie de son plus grand bonheur terrestre s'il émousse ses sensations par l'emploi d'un misérable succédané, avant d'avoir, pour la première fois, serré dans ses bras une femme bien-aimée.

« Il ne faut pas croire que le sperme puisse faire du mal en restant dans le corps. La semence n'est pas une matière nuisible provenant des résidus de l'assimilation de la nourriture, comme l'urine et les fèces. On a fait des expériences à ce sujet, en injectant sous la peau du sperme humain, ou l'extrait aqueux de testicules d'animaux. Ces injections agissent favorablement. Il est notamment prouvé qu'elles augmentent l'activité musculaire. On sait que l'exercice corporel augmente la puissance de production de nos muscles. Ceci se produit à un degré plus élevé lorsqu'on a injecté du sperme ; les muscles et les nerfs moteurs se fatiguent alors beaucoup moins et se remettent beaucoup plus vite. Ces expériences concordent avec la notion très ancienne affirmant qu'on ne parvient aux plus grands exploits corporels que par une continence absolue à l'égard de toute espèce de satisfaction de l'instinct sexuel. C'est pourquoi les athlètes grecs et romains s'abstenaient de l'acte sexuel, comme le font actuellement les fervents du sport lorsqu'ils se préparent pour un de leurs championnats. Les savants et les artistes nous apprennent qu'il en est de même pour les travaux intellectuels. Pendant le temps de l'abstinence, le sperme se résorbe et ses éléments se transforment en sang. Il agit donc - comme nous le voyons - non pas d'une manière nuisible mais favorablement. »

Celui qui conseille aux jeunes gens, pour les guérir de l'onanisme, le commerce sexuel illégitime, commet une mauvaise action. Les rapports illégitimes ne guérissent, ni ne préviennent rien.

Celui à qui le témoignage d'une science intègre ne suffit pas, lorsqu'elle affirme que la continence avant le mariage n'étant pas nuisible, est par conséquent praticable, devrait regarder autour de lui, pour voir s'il ne trouverait pas, parmi ses camarades un jeune homme pur, un frère d'armes. Il n'est pas nécessaire que ce soit un « pédant » (Philister) innocent et ennuyeux. J'affirme qu'il y a beaucoup plus de jeunes gens purs qu'on ne le suppose. Ils vivent une vie de héros ; le combat qu'ils soutiennent n'amoindrit pas leurs forces, mais les augmente. Que ces forts nous aident à changer de route ! Mais ne soyons pas craintifs, comme si nous devions languir dans une honnêteté à vues étroites et bornées ! Nous voulons être et rester jeunes, jouir de notre jeunesse, et ne rien laisser de côté de ce qui peut être goûté purement et joyeusement.

Et encore : Que celui qui souffre une fois de tentations sexuelles ne s'imagine pas qu'il a un tempérament particulier. Cela pourrait devenir une excuse trop commode. Des natures comme celles de Néron et d'Auguste, par leur triste célébrité, prouvent d'autant mieux leur rareté.

Si nous prenons notre corps pour compagnon et associé dans le combat en faveur de la pureté, il faut aussi que nous lui donnions sa part d'un traitement qui corresponde aux exigences de ce combat.

Ce traitement ne consistera pas en choses extraordinaires, mais il commencera par quelque chose de très simple et qui le touche de très près, par la nourriture. L'homme est ce qu'est sa nourriture. Cessons donc de considérer le manger surtout au point de vue de la jouissance ; évitons, autant que possible, les aliments lourds qui, à la longue, délabrent l'estomac de telle façon qu'il devient incapable de digérer sans difficulté les aliments plus légers. Le cri : « Retournons à la nature, » doit surtout être lancé dans le domaine de la cuisine. En général, on peut dire ceci : plus la préparation d'un mets est raffinée et compliquée, moins il remplit son but alimentaire, et plus il rend la tâche difficile, non seulement aux organes de la digestion, mais aussi au système nerveux. Il faudra particulièrement éviter les aliments fortement épicés des restaurants, ils excitent les nerfs ; or des nerfs excités n'obéissent pas à la volonté avec l'empressement qu'on doit attendre d'eux. Les repas pris le soir, et même la nuit, dans lesquels l'estomac est rempli jusqu'à satiété, exercent une influence directement nuisible sur la vie sexuelle, excitent l'instinct, et le transforment en un tourment insupportable. Vivre simplement, en commençant par la nourriture, n'est donc pas seulement une exigence sociale, dont l'inobservance amène finalement un état de choses semblable à celui qui existait dans Rome décadente et dans Paris sous la Régence, mais aussi une exigence de l'hygiène. Le corps qui a besoin de raffinements gastronomiques, est toujours l'indice d'un esprit qui ne sait plus goûter une vie simple et conforme aux indications de la nature.

Il n'est pas du tout nécessaire que de la gourmandise nous passions à l'ascétisme. L'ascétisme ne peut pas être le but de notre vie ; il n'a sa raison d'être que lorsqu'il s'agit de mater un corps qui se révolte ; dans ce cas-là seulement, il est recommandable. Mais, en général, une vie naturelle, dans laquelle on prend ses aliments avec plaisir, se tiendra à égale distance d'une existence de bon vivant et de l'ascétisme qui se contente de sauterelles et de miel sauvage.

L'ennemi le plus dangereux pour notre corps et pour notre pureté, c'est l'alcool. Darwin, qu'on ne peut soupçonner de piétisme dit : « Par les longues expériences de mon père et de mon grand-père, qui s'étendent sur une durée de plus de cent années, j'ai acquis la conviction que rien n'a produit autant de souffrances, de maladies et de misères, que l'usage des boissons alcooliques. »

Je ne veux pas me lamenter sur les désastres que l'alcool a produit dans toutes les nations ; je veux seulement faire remarquer que l'homme du peuple dépense, annuellement, dix fois plus d'argent pour l'alcool qu'il n'en dépense pour ses autres besoins. Je mentionnerai, en passant, que l'alcool influe d'une manière désastreuse sur le sang et l'estomac, les nerfs et les muscles, les poumons et le cerveau, bref, sur toutes les fonctions du corps. Des hommes, comme Helmholtz et Johannes Müller, ont expérimenté sur leur propre corps que l'alcool absorbé, même à petites doses, entravait dans leur cerveau la production de ces idées qui ont grandement contribué à enrichir la science. Chacun sait qu'une seule ivresse diminue pour plusieurs jours la capacité de travail, et que chez celui qui absorbe régulièrement une trop grande quantité d'alcool, la santé des reins et du coeur, des artères et des veines, du foie et de la rate, du larynx et des poumons, en un mot, de tous les organes du corps, est gravement compromise. Le système nerveux central et tous les ganglions nerveux doivent à l'alcool une excitation qu'on ne remarque pas tout d'abord, mais qui, finalement, enlève toute maîtrise de soi-même. Dans la statistique des maladies et des morts, l'alcool joue un rôle considérable. Les maisons d'aliénés et les prisons peuvent en témoigner. La vie de famille et le bien-être lui sont sacrifiés, et plus d'un malheureux enfant, qui nous regarde de ses yeux malades et se traîne sur ses membres difformes, nous prouve que son père était un buveur.

Tout cela est connu, mais il faut que cela le soit encore davantage, afin qu'aucun peuple ne puisse plus continuer à faire ce qu'il sait lui être nuisible. Mais nous ne pouvons pas attendre que la connaissance des dangers de l'alcool ait pénétré dans les couches populaires, celles qui lui fournissent le plus de victimes. Nous, les jeunes hommes cultivés, nous avons la tâche de montrer pratiquement la connaissance que nous avons acquise.

Nous qui savons que l'alcool paralyse la volonté, trouble la lucidité de la pensée, corrompt le sens moral ainsi que le goût du beau ; nous qui savons que l'alcool entraîne à sa suite l'impudicité et que plus d'un a perdu d'abord sa sobriété, puis son innocence ; nous qui voyons de quel danger il menace les individus et les peuples, ne prendrons-nous pas la ferme résolution d'arracher au moins nous-mêmes à sa domination ?

Je ne suis pas abstinent, et ne le serai probablement jamais, car je donne raison au vieux proverbe : « Le vin réjouit le coeur de l'homme. » J'ai été étudiant, et je connais quelque peu la poésie d'un verre de vin pris avec des amis. Mon intention n'est pas de nous condamner tous à ne boire que de l'eau de Seltz. Mais je voudrais allumer comme un feu qui se propagerait d'homme à homme, parmi tous nos camarades, leur inspirant la volonté de rester toujours maîtres de l'alcool ! Lorsque la volonté est si faible que toute concession aux boissons alcooliques occasionne une chute, il n'y a point d'autre alternative que l'abstinence totale, qui seule pourra aider et sauver. Ce peut être une gloire pour nos jeunes gars de 16 à 17 ans de chercher à qui boira le plus, mais nous, jeunes hommes d'âge plus mûr, nous voulons, au contraire, mettre notre honneur à conserver notre sobriété, afin que nous puissions, à toute heure, porter la responsabilité de nos paroles et de nos actes, en quoi nous n'estimons pas faire quelque chose d'extraordinaire, mais tout simplement notre devoir.

Lorsque nous usons d'alcool, nous contractons un emprunt, emprunt qu'il faudra rendre avec les intérêts composés. En toute circonstance, l'usage de l'alcool et un emprunt ne sont pas moins condamnables l'un que l'autre. L'activité de notre corps, de notre coeur surtout, de tous nos organes, est augmentée dans une forte proportion par l'absorption de l'alcool. À mon avis, nous devrions être sur un tel pied d'intimité avec notre corps, que nous puissions discerner (non pas seulement à la lourdeur de la tête) jusqu'à quel point nous pouvons lui imposer ce supplément de travail. Comme aucune des dettes que nous contractons envers l'alcool ne nous est remise, il est du devoir de la conservation personnelle de ne pas estimer trop haut la solvabilité de notre corps. La récompense ne peut manquer. Un estomac en bonne santé, qui n'altère pas notre humeur, des nerfs solides, que nous pouvons tenir en bride pour diriger notre corps d'après notre volonté, une tête claire et un coeur fort et joyeux, voilà la récompense d'une jeunesse sobre. Je connais beaucoup de jeunes hommes qui ne se sont pas laissé subjuguer par Bacchus, et par conséquent pas par Vénus non plus ; jamais je n'ai été aussi joyeux qu'à leurs côtés. Jusqu'à ma mort, je les remercierai de m'avoir aidé à conserver force, pureté et jeunesse.

Et ce qu'on peut dire de l'alcool peut être dit mutatis mutandis du tabac ; l'alcool et le tabac vont, du reste, presque toujours de compagnie. Il n'est pas absolument nécessaire d'en arriver à un empoisonnement par la nicotine pour reconnaître le principe délétère du tabac.

Celui des effets de la nicotine qui nous intéresse le plus, c'est qu'elle excite la sensualité. Et sachant cela, car des médecins expérimentés me l'ont assuré, il faudrait que je fusse un insensé pour ne pas profiter de cet avertissement.

Puisque la force sexuelle est le point culminant de toutes les forces corporelles, et qu'elle est répandue dans tous les vaisseaux, nerfs et organes de notre corps, l'introduction de matières étrangères doit influer sur elle, et calmer ou troubler l'instinct sexuel. Tout ce qui est contre nature, ou dépasse la mesure est impur. C'est pourquoi, pour répondre à l'appel : « Retournons à la nature », commençons par le manger et le boire. C'est un fait bien connu qu'en général, les hommes mangent beaucoup trop, et qu'on meurt plus fréquemment pour avoir trop chargé son estomac que pour avoir eu faim.

Une nourriture naturelle procure un bon sommeil, tandis qu'un estomac surchargé le trouble et le chasse. Le repos complet des nerfs, que le sommeil nous assure, est littéralement un bain de Jouvence. L'insomnie est une souffrance et un tourment. Il est honteux et coupable d'abréger volontairement la dose de sommeil nécessaire au corps. Et si nous le faisons pour passer la moitié de la nuit en festins et en beuveries, nous n'avons pas le droit de nous plaindre si, le jour suivant, les tribulations sexuelles deviennent trop fortes pour nous. C'est la vengeance naturelle des nerfs surexcités. Un jeune homme en bonne santé a besoin de sept à huit heures de sommeil. Mais il ne faut pas, non plus, que le sommeil amollisse. Les lits mous et chauds, les édredons lourds et épais entre lesquels on avait coutume de dormir autrefois ont, Dieu merci, passé de mode. Avons-nous besoin de plus de chaleur la nuit que le jour ? La couverture n'a pas d'autre but que de remplacer cette chaleur du corps que nous entretenons pendant la journée par l'exercice et les vêtements. Tout ce qui est de plus, est de trop, met les nerfs dans un état fiévreux, et, comme conséquence, excite d'une façon anormale les organes sexuels. Habituons-nous donc à organiser nos lits simplement, afin qu'ils correspondent aux besoins de notre corps et qu'ils puissent servir à nous procurer un sommeil réparateur. Le major de cavalerie Schill, bien connu depuis les guerres de l'indépendance allemande, raconte que pour dompter son corps, il a souvent dormi sur des planches dures. Que celui qui en a besoin le fasse ! Probatum est !

Une autre condition importante pour avoir un bon sommeil, est d'absorber de l'air pur qui, en quelque sorte, purifie l'intérieur du corps. On ne se figure pas quelles conséquences morales peut entraîner la négligence des soins à donner au corps ; cette question, loin d'être indifférente ou secondaire, est de la dernière importance. Nous devrions nous habituer à dormir la fenêtre ouverte, même en hiver, si possible. Un homme en bonne santé s'accoutume vite au bruit de la rue ; cela ne l'empêche pas de dormir, et il n'a plus alors un réveil pénible et long avant de pouvoir s'arracher à l'odeur repoussante d'une chambre hermétiquement close. Ce que l'eau est pour la peau, le bon air l'est pour les poumons. Tous deux fortifient le corps, les nerfs, et en font des organes dociles à notre volonté.

Il ne faut pas davantage nous amollir par nos vêtements. Qu'y a-t-il de plus lamentable qu'un jeune homme consultant toujours anxieusement le temps pour réfléchir longuement ensuite sur l'habit qu'il doit mettre, les vêtements de dessous qu'il doit choisir, ou examiner s'il ne vaudrait pas mieux qu'il s'enveloppât le cou d'un foulard ? C'est déjà dommage d'employer sa puissance de réflexion à de telles bagatelles ; mais très souvent aussi ce souci nerveux, cette sensibilité à l'égard du bien-être corporel, sont un mauvais signe de la santé morale du jeune homme. La perte de force qu'entraîne une vie déréglée, attaque les nerfs, la peau, les vaisseaux sanguins et rend l'homme sensible à chaque courant d'air, à chaque contagion. Un homme pur peut être simple dans sa manière de se vêtir, et cette simplicité, qui se change en endurcissement, le récompense en protégeant sa pureté.

« Si tu veux posséder un esprit indépendant, rends ton corps indépendant à l'égard des soi-disant besoins de la vie ; si tu désires avoir une âme forte et puissante, rends ton corps fort et puissant. » (Arndt.)

Enfin, il faut ajouter aux soins corporels, les exercices corporels. Pour entretenir et affermir notre pureté, nous ne choisirons pas le sport, si goûté de nos jours ; il a évidemment un bon côté en faisant vivre les hommes à l'air libre, mais lorsqu'il est excessif, il présente l'inconvénient de n'exercer que les forces corporelles. Nous ne choisirons pas non plus l'athlétisme qui change la proportion harmonique de nos formes en un amas de muscles et des montagnes d'os, ni tout ce qui est exagéré, ce qui surpasse nos forces, et qu'on préconise tant de nos jours. Nous laisserons ces exagérations à ceux qui, pour de l'argent, aiment à se donner en spectacle ; il nous suffit que notre corps obéisse à notre volonté.
Nous ne voulons être ni des athlètes, ni des danseurs de corde, mais nous borner à faire de la gymnastique pour que nos membres restent souples, et que l'embonpoint qu'amènent les années, ne nous atteigne pas prématurément. Nous apprendrons à nager pour nous faire un coeur et des poumons résistants. Nous ferons de l'équitation, lorsque nous en aurons l'occasion, pour acquérir du courage physique et nous habituer à une prompte décision ; et nous ferons des excursions pédestres afin d'avoir la joie d'admirer la beauté de la nature et de nous laisser pénétrer de sa grandeur.
Si seulement on n'avait pas abandonné ces courses d'étudiants qu'on connaissait autrefois, qui coûtaient si peu, et laissaient cependant tant de délicieuses impressions ! N'y a-t-il que ce qui coûte beaucoup d'argent qui soit beau ? Et si les conditions dans lesquelles je me trouve ne me permettent rien de tout cela, je puis m'accorder le bien-être du bain à domicile, en épargnant l'argent nécessaire à l'acquisition d'un « tub » (1) en caoutchouc, et ne pas laisser passer un seul jour sans que j'accorde à ma peau les délices d'un bain ou d'un lavage froid.

Une âme forte dans un corps sain ; je ne peux rien nous souhaiter de meilleur sur cette terre ! Je me souviens d'avoir voyagé une fois, sur mer, dans un bateau à voiles. Les vagues frappaient contre le bateau et se précipitaient par dessus bord. Nous étions obligés de nous frayer un chemin, prudemment et calmement, au travers du balancement tumultueux des vagues.

Jamais encore, je n'avais ressenti, d'une façon aussi saisissante, les délices de la force juvénile que lorsque assis, tout mouillé, au gouvernail, j'attendais sous la voile les vagues qu'il fallait surmonter. Plus d'une fois, j'exprimai tout haut ma joie par un cri d'allégresse, et, chose certaine, la joie et la chaleur intérieures que j'éprouvais, me préservèrent du rhume dont les autres souffrirent les jours suivants. Une âme forte dans un corps sain ! Recherchons-la, et expérimentons la parole de Zola : « L'homme pur est le plus fort ».


Table des matières

Page précédente:
Page suivante:


1) TUB. (On prononce Teub.) n. m. Mot emprunté de l'anglais. Bassin, le plus souvent en zinc, dans lequel on fait ses ablutions.

 

- haut de page -