CHRIST EN
CHINE
LA VIE ET LE MESSAGE
d'ANDRÉ GIH DE CHANGHAÏ
PREMIÈRE PARTIE
CHAPITRE V
SA PROMESSE EST VRAIE
« Crois au Seigneur
Jésus-Christ et tu seras sauvé, toi
et ta maison. » Telle est la promesse du
Seigneur pour le salut de toute la famille. Quand
il a sauvé Noé, Il a sauvé
tous les siens avec lui. Quand la ville de
Sodome a été condamnée
à une totale subversion, Il en a fait sortir
Lot avec ses filles. Nous pouvons trouver bien des
cas semblables dans toute la Bible. Quand Dieu veut
atteindre une âme au sein d'une famille
païenne, Sa méthode est parfaite. Il se
sert ensuite de cette âme pour Se faire
connaître par sa vie et par son
témoignage, à tous ceux de sa propre
maison. Dieu soit béni ! Ses promesses
sont immuables et Il demeure fidèle. Non pas
à cause de nous, indignes que nous sommes,
mais à cause de Son grand amour, Il est
fidèle et Il ne peut se renier
Lui-même.
Après ma conversion, les
premières conquêtes furent mes soeurs
qui ne tardèrent pas à Lui ouvrir
leur coeur. J'avais amené la cadette
à l'École de la Mission où
elle rencontra son Sauveur, tandis que
l'aînée, elle aussi, vint à
Christ et se mit à étudier la Bible
à la maison, bien souvent jusque tard dans
la nuit, tant cette Parole divine était
précieuse à son coeur. Enfin,
à notre grande joie à tous, ce fut
notre chère maman qui, en réponse
à nos prières, accepta le Seigneur
Jésus comme son Sauveur.
Il ne restait plus que ma vieille
grand'mère à sauver. Nous l'avons
engagée vivement à mettre sa
confiance dans le Seigneur Jésus, mais elle
le refusa. C'est si difficile pour les Chinois
d'âge mûr de renier toutes les
superstitions qui ont influencé tout le
cours de leur vie ! Ils croient que les
âmes dans l'Au-delà ont besoin des
choses de cette terre et leur offrent en sacrifice
de l'argent, des chevaux, des coffrets, etc., le
tout en papier qu'on fait brûler à
leur intention. Le jour anniversaire de leur mort,
on fait venir les prêtres bouddhistes pour
faire des incantations et des
cérémonies ayant pour but de les
délivrer des tortures de l'enfer, et bien
d'autres rites de ce genre. Aussi les vieillards
ont-ils une certaine appréhension à
l'idée d'abandonner ces pratiques pour la
religion chrétienne qui ne tient aucun
compte des morts et ne fait rien pour le salut de
leur âme. Quelle garantie une telle religion
lui apporterait-elle une fois qu'elle aurait
quitté ce monde ? C'est pourquoi ma
pauvre grand'mère résistait avec
opiniâtreté à toutes nos
supplications, donnant pour excuse :
« Je suis trop vieille maintenant, c'est
bon pour les jeunes de changer sa foi, moi je ne
peux pas ! »
Lors d'une de nos tournées dans
le sud de la Chine, le Seigneur a bien voulu
bénir richement Sa Parole, de sorte que plus
de mille personnes s'approchèrent de
l'estrade pour se donner à Lui, implorant
Son pardon et recevant Sa grâce
toute-puissante. Dès que l'assurance du
salut leur était accordée, leur
visage s'illuminait d'une joie céleste
tandis qu'ils rendaient leur témoignage
devant tous à la louange et à la
gloire de Dieu.
Je me souviens qu'en quittant une
certaine ville pour nous rendre à la ville
voisine, dix jeunes filles nouvellement converties
voulurent nous y accompagner, ne craignant pas de
marcher une vingtaine de kilomètres pour
satisfaire leur soif intense de la Parole de Dieu.
Il pleuvait à torrents et la route
était glissante, mais peu importe, elles
allaient de l'avant joyeusement, marchant pieds
nus, tout en chantant les petits choeurs que nous
venions de leur apprendre à la
dernière réunion. L'une d'elles fit
un faux pas et tomba de tout son long dans la boue,
mais elle se releva bien vite, en disant
« Dieu soit béni ! je ne me
suis pas fait mal », et se remit à
chanter de plus belle. Cet incident me fit une
profonde impression, et je pensai alors à ma
chère grand'mère. Le Seigneur se
servait de moi pour sauver bien des
pécheurs, et pourquoi pas elle ? Je me
mis à crier à Dieu, le coeur
étreint par un réel fardeau de
prière pour cette précieuse
âme, allant jusqu'à l'agonie. Les
larmes coulant de mes yeux, je continuai à
prier ainsi tout le long du chemin, jusqu'à
ce que Dieu me rappela Sa précieuse
promesse : « Crois au Seigneur
Jésus-Christ et tu seras sauvé, toi
et ta maison. » Et dans cette assurance
je trouvai la consolation.
En rentrant de cette tournée je
me rendis dans ma famille et trouvai ma pauvre
grand'mère dans le même état,
toujours aussi fermée et le coeur endurci.
Mes prières avaient-elles donc
été vaines ? Dieu ne
répondrait-Il pas enfin en m'accordant la
joie de la voir sauvée, selon Sa
promesse ?
Peu de temps après, nous devions
repartir pour le nord de la Chine. Nous y
étions à peine depuis un mois
lorsqu'un télégramme de Maman
m'apprit que Grand'mère était bien
malade et qu'il me fallait revenir sans tarder. Ce
fut pour moi un terrible choc.
« Grand'mère n'est pas encore
sauvée, me dis-je, et qu'en sera-t-il de son
âme si elle meurt avant mon
retour ? » J'étais dans une
grande angoisse et criai à Dieu tout le long
du voyage, le suppliant de donner une
évidence de sa conversion si vraiment
l'heure du départ avait sonné pour
elle. À mon arrivée, j'étais
anxieux de savoir où elle en était,
mais à mon grand soulagement, on me dit
qu'elle allait un peu mieux. Je la trouvai assise
sur son lit.
À ma grande stupéfaction,
elle me dit tout tranquillement :
« Tu sais, j'ai cru en
Jésus-Christ. »
J'avais de la peine à croire
à une si grande joie. Comment avait-elle pu
recevoir enfin ce Sauveur qu'elle avait si
longtemps rejeté ? À ma
question, elle me répondit pour expliquer
son changement d'attitude :
« Depuis que j'ai
été malade, immobilisée sur ce
lit pendant de longs jours, n'ayant rien à
faire qu'à réfléchir, j'ai
beaucoup pensé, et j'ai compris que la seule
chose à faire pour moi, c'était de
devenir chrétienne. »
Après avoir pris cette position
de foi toute nouvelle pour elle, grâces
à Dieu, elle demeura très ferme dans
ses convictions. Elle dut faire face à la
persécution. Même ses propres filles,
mes tantes encore incrédules, vinrent la
voir et se moquèrent d'elle. « Tu
es si vieille, c'est absolument fou de ta part
d'abandonner ainsi toutes tes espérances
pour la vie à venir. Après ta mort,
qui brûlera des vêtements pour
toi ? Qui invitera les prêtres
bouddhistes à faire un service pour la
rémission de tes péchés ?
Tu n'auras plus ni sacrifices ni rien et tout ce
que tu as préparé toi-même pour
ta vie à venir sera perdu. » Mais,
Dieu soit béni, Grand'mère a tenu
ferme. Elle put écouter sans sourciller tout
ce flot d'arguments, ayant mis sa confiance dans le
Seigneur Jésus, prête à tout
abandonner pour Celui qui l'avait rachetée
à un si grand prix.
Comme elle semblait aller mieux, je
décidai de retourner à mon travail,
sachant que mes collaborateurs m'attendaient et
ayant l'assurance que le Seigneur me voulait
là-bas pour Son service.
Six semaines plus tard, rappelé
encore par un autre télégramme,
j'arrivai trop tard cette fois. Ma chère
Mémé s'était endormie dans le
Seigneur ! Elle avait désiré
revoir son petit-fils, le premier chrétien
qu'elle eut jamais connu, mais le Seigneur en a
décidé autrement, et Il l'a prise
avec Lui dans la Patrie céleste où
bientôt, à Son retour en Gloire, nous
nous retrouverons tous, non plus dans nos corps
d'infirmité, mais dans la splendeur d'un
corps glorifié rendu semblable au Sien.
Oh ! quelle merveilleuse espérance est
la nôtre ! Nous savons qu'Il vient
bientôt et que nous Le verrons face à
face et qu'en LUI nous reverrons aussi tous les
bien-aimés qui nous ont devancés.
Avant son départ, ma grand'mère a eu
comme une vision qui l'a transportée. Elle
raconta qu'elle voyait quatre jeunes gens qui
arrivaient et pria ma mère de
préparer des lits pour les loger. Quand
Maman lui demanda ce qu'ils venaient faire ici,
elle lui répondit :
« Oh ! ils vont m'emmener demain
matin à Béthel pour étudier la
Bible ! » Elle qui était
illettrée et n'avait jamais
rêvé de prendre un livre en main,
c'était bien étrange qu'elle
eût à cette heure suprême une
pareille idée ! Mais
« Béthel » signifie la
« Maison de Dieu », c'est la
Porte du Ciel (comme dit Jacob après son
rêve). Et en effet, elle devait dès le
lendemain en franchir le seuil lumineux et se
trouver dans la Demeure du Très-Haut pour
l'éternité. Oui, Dieu est
fidèle et Sa promesse est sûre, nous
en avons vu l'accomplissement.
CHAPITRE VI
DIEU ENVOIE LE RÉVEIL
Le Seigneur Jésus est venu pour
nous apporter la Vie, et la vie avec abondance.
Après ma consécration ; Il me
fit croître en grâce et en
connaissance, étant toujours de plus en plus
affamé de Sa Sainte Parole. Bien souvent je
m'attardais à lire un livre après
l'autre, découvrant alors une
vérité nouvelle ici ou là, ce
qui me donnait une immense joie.
Peu de temps après, un serviteur
de Dieu, Seth Rees, vint à Changhaï
avec sa famille pour tenir des réunions de
réveil, dont la première eut lieu
dans la plus grande église méthodiste
de la ville. Il y eut une foule nombreuse. Il
prêcha sur Actes 1. 8 : « Mais
vous recevrez de la puissance, le Saint-Esprit
venant sur vous. » (Version
Pau-Vevey.)
Je sentais vivement ce besoin de
puissance dans le service. Oui certes, le Seigneur
m'avait déjà donné des
âmes comme salaire. Mon service n'avait pas
été stérile, mais oh !
combien j'avais encore besoin de Lui, de Sa
plénitude, de Sa vie en abondance le Quand
l'appel retentit pour les âmes
assoiffées de cette puissance, je
m'approchai de l'estrade avec d'autres pour prier.
Et Il m'a rencontré, béni soit Son
Nom ! Je Lui ai tout simplement ouvert mon
coeur au large pour permettre au Saint-Esprit
d'inonder mon être tout entier jusque dans
les recoins les plus intimes de mon âme.
Alors le sentiment ineffable de Sa précieuse
présence me fut donné comme tout
à nouveau ; oui, mon Seigneur
était venu à moi en réponse
à la prière
Je n'ai eu ni transports
extraordinaires, ni visions extatiques, ni n'ai
parlé en langues à cette occasion.
Mais j'ai eu la tranquille assurance que
désormais ma vie tout entière Lui
était livrée, esprit, âme et
corps, sans réserve aucune.
Bien que les réunions dans cette
église aient dû être
interrompues, certains pasteurs y ayant mis des
objections, je ne puis que bénir Dieu pour
cette unique et inoubliable soirée qui
devait porter son fruit pour tout le reste de ma
carrière. J'avais trouvé une nouvelle
joie, une nouvelle certitude de Sa présence,
une source de puissance débordante.
J'étais encore jeune à
cette époque et très limité
dans ma connaissance des Écritures, et je ne
m'attendais pas à devoir tenir de grandes
réunions. Mon seul désir était
d'apprendre à prêcher
l'Évangile car la passion des âmes me
consumait toujours plus. Quand je pouvais
accompagner un pasteur dans sa tournée, je
ne manquais pas de le faire, ne serait-ce que pour
porter sa valise et l'aider au cours de son voyage,
afin de l'écouter prêcher et
d'apprendre moi-même à cette
école.
Mais je découvris bientôt,
au cours de ces tournées, que « ce
n'est ni par force, ni par, puissance, mais PAR MON
ESPRIT, dit l'Éternel". Dès notre
arrivée à destination, les gens nous
entourèrent avec joie, et voyant que nous
étions deux, ils exigèrent que nous
parlions tous les deux et inscrivirent mon nom au
programme. Ce fut un choc pour moi, le jeune
étudiant qui ne se croyait pas du tout
capable de prêcher à un si grand
auditoire, Mais comme ils insistèrent, je
suppliai le Seigneur de m'aider à annoncer
Sa Parole.
Béni soit Dieu, ce ne fut ni par
force ni par puissance, mais bien par Son Esprit,
et je vis des conversions à chacune de mes
réunions, alors que la prédication du
pasteur parut rester sans effet. À l'une des
réunions, une profonde conviction de
péché s'empara de l'auditoire
tellement que l'un après l'autre se leva
pour confesser ses fautes et demander les
prières des frères. La
bénédiction du Seigneur était
là, bien des âmes furent
sauvées, à la très grande joie
du cher président dont le coeur
débordait de reconnaissance. À la fin
du service, il s'approcha et me dit :
« Ce fut une réunion bénie.
Maintenant voulez-vous prononcer la
bénédiction ? » Je
savais que je n'étais pas un pasteur
attitré et n'avais donc pas le droit de
faire cela, mais je terminai par la prière
en demandant à Dieu de continuer à
déverser Sa bénédiction sur
Son peuple.
Telle fut ma première
expérience dans une tournée
d'évangélisation. C'est ainsi que
j'appris à me confier entièrement
dans le Saint-Esprit. J'étais encore bien
inexpérimenté, et quand un appel nous
parvint, demandant trois pasteurs pour la ville de
Canton, j'espérais qu'on nous donnerait un
prédicateur plus capable pour conduire la
tournée. Mais aucun d'eux n'étant
disponible, ce furent les trois novices qui
partirent ensemble pour cette grande cité.
Dans cette église nous avons vu vraiment la
puissance du Saint-Esprit à l'oeuvre. Nous
ne pouvons prêcher qu'un évangile tout
simple, dans le langage courant à la
portée de tous, mais la puissance de
l'Esprit vint alors sur nous.
Malgré la difficulté de la
diversité des dialectes, le message devant
être interprété dans la langue
courante de cette province, l'attention fut
très soutenue. Quand je parlai de la
nécessité pour les croyants de se
charger de leur croix pour suivre le
Crucifié, le Saint-Esprit fut répandu
sur tout l'auditoire et, l'un après l'autre,
ils se mirent à pleurer. Ils avaient
reçu par l'Esprit la vision de la Croix du
Seigneur Jésus.
Bientôt la congrégation
tout entière était en larmes, y
compris mon interprète, incapable de dire un
mot de plus. Je cessai donc de prêcher et le
service se changea en une immense réunion de
prières. Tous tombèrent à
genoux, courbés sous une puissante
conviction de péché, pleurant et
criant à Dieu pour le pardon, pour la
purification par le précieux Sang de
Jésus, puis pour le don du Saint-Esprit qui
devait transformer leur vie.
C'est le Saint-Esprit qui seul peut
convaincre un homme et l'amener à restituer
ce qu'il doit. Le missionnaire nous raconta ensuite
qu'il avait été occupé tous
les jours suivants à recevoir les gens qui
venaient confesser leurs infractions et lui
demander pardon de leurs infidélités.
Même sa fillette adoptive, âgée
de quatre ans, fut atteinte par cette conviction de
péché. Quand tout le monde fut sorti,
elle vint à lui, les yeux pleins de
larmes : « Oh ! Papa,
pardonne-moi ! - Qu'est-ce qu'il y a, ma
chérie ? - Tu m'avais défendu de
prendre, des noisettes sur la table et j'en ai pris
quand tu étais parti. Je ne pensais pas que
c'était mal, mais le Saint-Esprit me l'a dit
et je suis si triste, Papa, oh !
pardonne-moi ! » L'ayant prise dans
ses bras, le fidèle berger l'assura de son
plein pardon, puis lui fit comprendre la valeur du
Sang de Jésus qui nous purifie de tout
péché. Et l'enfant s'en alla en
sautant de joie, dans l'assurance bénie de
la réconciliation. C'est ainsi que le
Saint-Esprit parlait à ce peuple, jeunes et
vieux, savants et ignorants, les classes sociales
les plus diverses étant atteintes sans
distinction au cours des réunions.
LE RÉVEIL A SIENYOU
Voici ce qu'écrit W.-B. Cole au sujet du
réveil dans l'une de nos nombreuses
campagnes
d'évangélisation :
« CHÈRE MISS
HUGHES,
« Je sais que vous avez
déjà été
informée par nos frères de la
merveilleuse bénédiction que Dieu
s'est plu à déverser sur notre oeuvre
ici. À Sienyou nous avions le dessein de
former un Institut pour nos
prédicateurs.
« Dès la
première réunion ; l'Esprit de
Dieu a été présent parmi nous.
M. Tchoung a fait chanter les gens, et les visages
souriants exprimaient la joie qui remplissait les
coeurs. Le frère Gih est certainement un
homme dont Dieu se sert puissamment. Il
présente le message d'une façon
tellement vivante et effective ; on sent que
cela pénètre les coeurs. Miss Tchoung
aussi est une précieuse messagère du
Seigneur. Elle a donné pour les
prédicateurs le plus émouvant appel
qu'on ait jamais entendu, plaidant avec eux de tout
son coeur, son visage inondé de larmes en
parlant.
« Le troisième jour,
dans une grande réunion pour les femmes -
elles étaient environ deux ou trois cents -
le Saint-Esprit se manifesta avec puissance par la
prédication du frère Gih. Beaucoup de
ces femmes étaient en larmes, confessant
avec des sanglots dans la voix la longue liste de
leurs péchés. La réunion
commencée à deux heures se prolongea
jusqu'à cinq heures passées. Bien des
âmes firent l'expérience bénie
du salut par grâce. Les étudiantes de
l'École des Filles allèrent trouver
Miss Tchoung. L'une d'entre elles se sentait
particulièrement malheureuse à la
suite d'une querelle avec sa compagne de classe.
Sur le conseil de sa directrice, elle se hâta
d'aller la trouver pour lui demander pardon. Ce fut
alors toute une série de confessions et de
larmes de la part du groupe entier, dont plusieurs
s'étaient rendues coupables de tromperies
envers leurs professeurs. Elles allèrent
donc les trouver pour mettre tout en règle,
et la réunion se termina avec des chants de
joie, la joie de coeurs en paix avec Dieu. Ainsi
l'école tout entière fut comme
balayée à fond par le souffle
puissant de l'Esprit, laissant maîtresses et
élèves le coeur purifié de
tous ses interdits.
« C'est dommage que le temps
ait été si limité, car nous
commencions tout juste à atteindre les
hommes de l'assemblée. Quand ils sont partis
pour Hinghoua, on les a accompagnés en
foule, ce fut une manifestation grandiose. Puis
nous sommes revenus à travers le centre de
la ville, marquant le pas en chantant les choeurs
de Béthel et en criant
« Alléluia ! » Cela
ne devait pas bien plaire au diable, car il a
cherché à nous attirer des ennuis au
prochain tournant du chemin. Mais chaque nouvelle
attaque n'a servi qu'à retomber sur sa
tête, à sa propre confusion.
« Comme nous bénissons
notre Dieu pour cette immense
bénédiction ! Nous avons vu Sa
main à l'oeuvre, dirigeant toutes choses le
long du chemin. Nous savions que notre Père
nous préparait pour recevoir de grandes
grâces, mais nous n'aurions pas osé
attendre une telle manifestation de Sa puissance,
comme des fleuves d'eau vive se déversant
sur nous tous. Maintenant nous Lui demandons que le
réveil se poursuive jusqu'à ce que
tous les moindres recoins de Son oeuvre ici en
soient atteints.
« Nous sentons qu'un lien
nouveau s'est créé entre Sienyon et
Béthel, le lien de coeurs unis en Lui. Nous
ne pouvons trouver les paroles pour vous exprimer
notre reconnaissance, mais nos prières vous
sont acquises et je sais que vous aussi vous priez
pour nous. Nous avons réalisé quelle
vague puissante de prière a suivi nos
frères de Béthel depuis leur
départ de Changhaï pour cette mission
dans le Sud.
« Un grand coup a
été porté en faveur de la foi
dans l'autorité de notre vieille Bible. En
cela j'ai eu lieu de me réjouir. L'un de nos
ouvriers en vue me fit observer combien cet
Institut pastoral différait de la plupart
rencontrés jusqu'ici où le
mélange entre Modernisme et Orthodoxie ne
pouvait donner aucun résultat permanent. Ici
tous sont sur le terrain solide de la Parole de
Dieu et Dieu a pu honorer Sa parole. Ce fut pour ma
chère compagne et moi une confirmation de la
position prise depuis que nous sommes ici comme Ses
témoins. Aussi vous pouvez vous imaginer si
nous sommes heureux ! L'accent donné
sur le Retour prochain du Seigneur Jésus
nous a aussi bien encouragés. Oui,
chère Miss Hughes, vos hommes sont bien
comme ces bons vieux Méthodistes du temps de
John Wesley, de ceux qui croient encore à la
conversion et à la sanctification.
« Nous avons maintenant un bon
nombre de jeunes gens, et des plus
âgés aussi, qui ont fait une
expérience positive avec le Seigneur. Ils
sont enflammés de zèle pour Christ,
ils sont sanctifiés et croient de tout leur
coeur au Livre divin. Comme le Seigneur est bon
d'avoir ainsi répondu à nos
prières.
« Bien à vous à
Son service.
« W. B. COLE. »
Tout un groupe de ces chers jeunes du district
de Mr. Cole ont pris sur eux de se rendre à
Béthel, à leurs propres frais (et le
voyage de Sienyou à Shanghaï est
certainement plus long que de Lille à
Marseille !).
Ce fut pour nous une inspiration. Nous
les avons accompagnés à leur retour
au son des cantiques, et le mois suivant voici la
lettre que nous écrivait encore Mr.
Cole :
« CHÈRE Miss
HUGHES,
« Vous pouvez, si vous le
jugez bon, utiliser cette lettre en écrivant
à vos amis au sujet de l'oeuvre. J'aurais
aimé vous répondre plus tôt,
mais nous avons été tellement
occupés par les
« après » de la
bénédiction que nous n'avions plus
guère de loisir pour écrire.
« L'oeuvre se poursuit
merveilleusement bien. Nous avons un groupe
important de jeunes qui se sont offerts pour le
service du Seigneur dans
l'évangélisation. Je crois qu'il y en
avait quatorze qui ont assisté à
votre convention cet été.
« Après la
clôture de l'école, notre Dr Soung est
parti avec une bande de jeunes convertis pour une
tournée de deux semaines à la
Péninsule de Binghaï. Ils ont eu un
succès remarquable et bien des âmes
ont été sauvées. En cours de
route, ils ont composé plusieurs chants de
réveil qu'ils ont adaptés à
des mélodies chinoises.
« Il y a eu depuis lors
plusieurs autres tournées également
bénies, dans la joie du Seigneur.
« Nous sentons cependant que
ces jeunes ont besoin d'une préparation plus
profonde au ministère. C'est pourquoi,
réunissant tous ceux qui ne pouvaient se
rendre à Changhaï, nous avons eu avec
eux une retraite d'une semaine sur notre montagne
de Hinghoua. Nous étions entre cinquante et
soixante. Ce fut une semaine inoubliable. Je ne
pouvais que bénir le Seigneur sans cesse en
posant mes regards sur tous ces visages de jeunes
gens ayant consacré leur vie entière
à Son service. Notre Dr Soung est le
« leader » de la jeunesse. Il a
une grande puissance et une entière
consécration. Ses progrès spirituels
depuis son contact avec le Groupe de Béthel
nous jouissent beaucoup. Nous croyons que le
réveil n'a fait que commencer.
« Sincèrement à
vous en Lui.
« W.B. Cole »
DIEU VISITE ENCORE SIENYOU !
« Sienyou, Fou-Kien
(Chine), le 1er août 1932.
CHÈRE AMIE,
« Vous vous souviendrez sans
doute que dans ma lettre de mai dernier je vous
disais : « Nous attendons des
réunions de réveil pour un avenir
très proche. » Et maintenant il
nous reste à louer le Seigneur pour
l'accomplissement de la promesse, infiniment au
delà de tout ce que nous osions demander ou
penser.
« Les instruments du Seigneur
furent les quatre membres du « Groupe
Évangéliste de
Béthel » qui nous ont
visités en juin. Ils arrivèrent de
Fou-Tchéou par un orage épouvantable
qui rendait la route presque impraticable,
voyageant tantôt en chaise Sedan,
tantôt en pousse-pousse. Ils atteignirent
enfin Hinghoua au bout de deux journées
d'averses, leurs valises et leurs manteaux couverts
de boue, mouillés jusqu'aux os, mais le
visage rayonnant de la joie d'En Haut. Ils nous
disent que ces pluies torrentielles avaient
été pour eux comme le signe
précurseur des ondées de
bénédiction spirituelle que Dieu
voulait déverser sur ces réunions.
Nous avions affaire avec des hommes de Dieu sur qui
les circonstances les plus déprimantes ne
pouvaient avoir aucune prise.
« La première
réunion eut lieu dans la cité de
Hinghoua. Quelques semaines auparavant, nous avions
été tentés de renoncer
à cette offensive tant les conducteurs de
l'endroit montraient peu d'enthousiasme à ce
sujet. Mais le fardeau qui pesait sur nos coeurs ne
devenait que plus lourd à cette idée,
de sorte que nous sommes allés de l'avant
avec confiance, sachant que le Seigneur voulait
faire descendre Sa riche bénédiction
aussi sur cette grande cité. Presque tous
les prédicateurs du district étaient
présents, sans compter bien des
délégués des églises de
la campagne environnante. Il y avait aussi les
étudiants des écoles de la Mission et
les personnages officiels de la ville.
Bientôt les craintes des pasteurs furent
dissipées en ce qui concerne
l'intérêt suscité par de telles
réunions. Les gens arrivèrent en
foule, sous une averse épouvantable, les
jeunes filles de l'École Supérieure
sortant tout juste de leur dernier examen pour se
précipiter à la réunion ;
bref, l'intérêt fut bientôt
à son paroxysme d'intensité.
« Ce fut une bien grande
victoire, presque impossible à
décrire. Le Surintendant du District et le
Pasteur mirent fin à leur inimitié en
confessant publiquement leur péché,
et en se donnant la main, des membres de la
faculté de théologie
confessèrent leurs torts mutuels et
l'harmonie entre eux fut bientôt
rétablie. Les étudiants, saisis par
une profonde conviction de péché,
purent rendre témoignage à la
Nouvelle Naissance et la purification de leur
coeur. Des jeunes filles de l'École
Supérieure restèrent pendant des
heures agenouillées près de l'estrade
jusqu'à ce que les vieilles querelles aient
été réglées, les
péchés confessés, et la joie
du pardon rendue évidente par le
témoignage des lèvres et l'expression
lumineuse de leur visage.
« Le réveil a atteint
aussi l'École Supérieure de Guthrie.
Des garçons ayant été un
problème pour leurs maîtres
l'année passée se sont convertis. Le
Directeur lui-même a pu rendre le
témoignage d'une foi renouvelée
après une longue période
d'incrédulité, quasi
d'athéisme, datant de ses années
d'études aux États-Unis. Bien des
ouvriers de Dieu confessèrent leur
négligence dans le domaine de
l'évangélisation et s'en
retournèrent à leurs fonctions, avec
le voeu d'annoncer désormais avec une
nouvelle énergie cette Bonne Nouvelle du
Salut par grâce. Deux semaines après
la clôture des réunions, on pouvait
voir tout un groupe de nouveaux convertis
déjà organisés en pionniers de
l'Évangile, se rendant dans les
églises de la campagne environnante pour y
apporter leur témoignage au parfait salut en
Christ. Un centre de prière et
d'étude biblique s'était formé
aussi spontanément, se réunissant
chaque Matin de six à sept heures, et les
membres, au nombre de trente tout d'abord,
montèrent bien vite jusqu'à
soixante.
« La seconde réunion
eut lieu dans la ville de Sienyou. Trois de nos
frères de Béthel sont à la
fois prédicateurs, chanteurs, musiciens, et
l'un d'eux, Pierre Chang, vient d'un riche foyer
méthodiste de Hong-kong. C'est un musicien
de talent, ayant abandonné tout ce que l'art
et l'opulence pouvaient lui procurer ici-bas, pour
suivre la petite troupe de Béthel dans ses
pérégrinations, « afin
d'apprendre, dit-il, comment servir mon
Seigneur ». Inutile de dire combien ces
jeunes, à peine sortis des bancs de
l'école, font impression parmi notre
jeunesse chinoise. Ils savent présenter par
leurs chants le message vivant de
l'évangile. Ainsi des vérités
fondamentales sont imprimées d'une
façon indélébile dans l'esprit
et la mémoire de ces jeunes. André
Gih qui a été parmi nous
déjà trois fois, prêche le
même évangile que Wesley et les
anciens méthodistes d'autrefois, et nous
avons pu réaliser encore maintenant que ces
vérités divines n'ont pas perdu leur
efficacité. Un écrivain
célèbre, initié à la
mentalité chinoise, écrivait
dernièrement : « Les Chinois
sont un peuple inaccessible à la conscience
du péché. » Mais quand ce
messager de Dieu rempli du Saint Esprit se mit
à leur parler (comme l'Apôtre Paul
à Félix) « de la justice,
de la tempérance et du jugement à
venir », hommes et femmes furent
frappés d'épouvante et
littéralement baignèrent de leurs
larmes l'autel du Seigneur en confessant leurs
péchés, pour trouver ensuite la
parfaite joie du salut.
« Au bout de huit jours de
rencontres bénies, l'Esprit de Dieu a
tellement balayé à fond tout
l'auditoire qu'il a été amené
à une parfaite unité de pensée
et de but. Je me souviendrai toute ma vie de cette
immense vague de prière s'élevant
simultanément de ces centaines de coeurs
pour monter ensemble vers le Trône de Dieu.
Ce n'était pas la confusion des langues,
mais l'impression d'une harmonie parfaite, comme un
flot puissant de supplications se déversant
par un même Esprit dans le coeur même
de Dieu. Puis ce fut une scène inoubliable
de consécration où tout fut mis sur
l'autel tandis que les mains se levaient pour
recevoir le Seigneur Jésus comme Seigneur de
toute la vie. Quelle joie ce fut pour nous
d'entendre ces témoignages de plusieurs de
nos jeunes évangélistes ! Ils
ont été amenés à
comprendre que la Nouvelle Naissance doit se
produire avant qu'on puisse parler
d'éducation chrétienne et de
progrès dans la foi. « Le Sang n'a
pas perdu Sa puissance », fut l'un de nos
choeurs de prédilection au cours de ces
réunions et plus d'un peut témoigner
de la réalité de ce glorieux
Évangile de notre Rédemption
éternelle. « Toujours bien
à vous à Son Service.
« W. B. COLE. »
La campagne suivante pour André Gih et
ses compagnons fut dans l'intérieur du pays.
Le long voyage à travers les montagnes, par
chaise à porteurs et à pieds se
déroula une fois de plus sous des pluies
torrentielles. Parfois les chaises devaient
être remorquées à travers des
torrents impétueux tandis que voyageurs et
porteurs pataugeaient ensemble de leur
mieux.
La conférence eut lieu dans la
plus grande église méthodiste de la
ville, pouvant contenir environ trois mille
personnes, autrefois l'église du père
du Dr Soung. En racontant l'histoire de cette
tournée, Gih s'exprima ainsi
« Miss Hughes, nous avons
appris une meilleure méthode de travail
cette année - nous laissons tout simplement
le Saint-Esprit conduire les choses comme Il
l'entend, et c'est Lui qui fait l'oeuvre tout
entière, Lui seul. »
Le réveil a commencé
tandis que Gih s'adressait aux prédicateurs.
Aucun effort ne fut fait pour « produire
le réveil ». Aucun appel n'a
été adressé, mais l'Esprit a
agi puissamment par le message donné. Comme
précédemment, le besoin de confesser
le péché fut le premier indice de
l'oeuvre divine commencée dans le coeur des
auditeurs. Parmi les écoliers,
garçons et filles ont été
poussés à faire des restitutions,
à confesser des torts à leurs
professeurs dont ceux-ci n'avaient jamais rien su.
Puis ce fut dans l'École Biblique qu'une
conviction de péché
générale s'empara de la famille
entière des étudiants. C'était
Philippe Li qui prêchait alors. Il avait eu
un grand fardeau de prière pour ce peuple et
on l'invita à prendre le service à la
Chapelle. Il avait pris son trombone pour en jouer,
mais ne put s'en servir. Prenant l'exemple de Saul
qui persécutait l'église tout en
pensant servir Dieu, il l'appliqua aux
étudiants chinois des écoles
supérieures, ennemis de l'Évangile
comme il l'avait été lui-même,
dit-il, bien que fils de pasteur. Ce message
pénétra profondément dans les
coeurs et quand Philippe demanda qui voulait
confesser ce même péché et s'en
repentir, plus de 90 % des étudiants
levèrent la main ! L'aumônier de
l'école lui-même se leva et fit la
confession suivante :
« Moi, votre conducteur
spirituel, je n'ai fait que l'oeuvre d'un
mercenaire, recevant chaque mois mon salaire. Je ne
vous ai pas enseigné la vraie religion et
j'ai critiqué ces hommes de Béthel.
Je viens leur demander pardon devant tous (et en
disant cela, il alla tendre la main à
Philippe) et je vous demande pardon aussi à
vous, mes chers
étudiants. »
Puis ce fut le tour du directeur chinois
du collège :
« J'ai été
élevé en Amérique, dit-il, et
c'est là que j'ai attrapé le germe
nocif du modernisme. Je me suis opposé
à la visite des frères de
Béthel dans cette ville. Je les trouvais
trop émotifs, mais hier soir leur message
m'est allé tout droit au coeur et j'ai
été convaincu de mon
péché. Je me suis dit :
voilà des années que j'enseigne la
religion à ces jeunes gens, et maintenant
ces prédicateurs de Béthel, des
jeunes comme eux, viennent leur prêcher et
tous se convertissent. C'est donc moi qui ai tort.
L'enseignement et l'éducation que je vous ai
donnés ont été une faillite et
n'ont pu vous influencer. Je le reconnais
humblement et je vous demande de prier pour
moi. »
En disant ces mots, lui aussi se tourna
vers Philippe et lui tendit la main. Ensuite ce fut
une missionnaire qui confessa l'opposition qu'elle
avait ressentie à l'idée de cette
tournée des frères de Béthel.
Elle se réjouissait maintenant de voir la
puissance de Dieu opérer ainsi parmi eux et
elle vient tendre la main à notre
frère.
Je me souviens qu'un jour une amie de ma
femme est venue nous voir et nous entretenir de son
oeuvre. Elle n'était pas satisfaite et se
plaignait de bien des choses qui n'allaient pas
à son gré. « Eh bien,
prions ensemble », répondis-je
simplement. Elle se mit à rire. Nous nous
sommes mis à genoux néanmoins, tandis
qu'elle continuait toujours à ricaner sous
cape. Mais dès que j'ai commencé
à invoquer le Seigneur, tandis que les
larmes coulaient de mes yeux, son coeur fut
touché et elle eut conscience de la
sainteté de cette heure dans la
présence de Dieu. Elle confessa ensuite
d'elle-même son péché,
implorant le pardon du Seigneur et rentra chez
elle, une nouvelle créature,
régénérée par le don du
Saint-Esprit. Sa vie fut transformée
dès ce jour-là et elle connut la
plénitude de l'Esprit dans son
ministère. Bien souvent nous avons eu
ensemble des moments bénis dans la communion
du Seigneur. Nous avons décidé que
pas un jour ne devrait se passer sans qu'une
âme au moins n'ait été
attirée à Christ par notre
témoignage personnel. Et chaque soir notre
petit groupe de prière se réunissait
pour se communiquer les expériences de la
journée. La passion des âmes nous
tenait si fort au coeur que nous étions
prêts à nous poster au coin de toutes
les rues pour y annoncer l'Évangile. Nous
étions bafoués, insultés,
parfois même roués de coups, mais rien
ne pouvait éteindre notre joie dans le
Seigneur. Béni soit Dieu pour la
plénitude de bénédiction de
l'Évangile de Christ !
CHAPITRE VII
MON MARIAGE
Bien que ma ville natale ne fût
éloignée de Changhaï que de cinq
kilomètres à peine, l'Évangile
n'y avait encore jamais été
annoncé et je fus le tout premier
chrétien de l'endroit, ma famille la
première famille au service du Seigneur. De
même, mon mariage fut le premier mariage
chrétien célébré en ce
lieu.
Selon l'antique coutume chinoise, la
mariée doit être vêtue de rouge,
mais une Chinoise convertie à Christ
s'habille de blanc. Comme pour les Chinois le
vêtement blanc est celui du deuil, cela fit
sensation de voir une nouvelle mariée ainsi
revêtue. Après la
cérémonie officielle, ce sont les
festins de famille réunissant les nombreux
amis qui viennent présenter aux nouveaux
époux leurs voeux et leurs hommages.
Ils ont aussi une coutume qui consiste
à enfermer les conjoints dans la chambre
nuptiale dont les amis gardent la porte, leur
adressant de l'autre côté de la
cloison des quolibets et des questions plaisantes.
Quand on voulut procéder de la sorte avec ma
chère compagne et moi, le meneur de la bande
nous proposa d'un ton badin de leur chanter
« un cantique
évangélique ».
« Fort bien, répondis-je, nous
vous chanterons volontiers des cantiques, mais cela
est bien trop sacré pour se passer dans
l'atmosphère de la plaisanterie. Si vous
voulez des cantiques, il faut vous engager à
écouter aussi toute la suite de la
réunion. » Ils y consentirent, et
nous nous sommes mis à chanter et à
prêcher la Parole, l'appuyant de notre propre
témoignage, ce qui produisit une profonde
impression sur tous nos hôtes. Après
cela ils ne demandèrent plus rien et
quittèrent la chambre l'un après
l'autre dans le plus grand silence. Et les nouveaux
mariés tombèrent à genoux pour
supplier Dieu d'arroser la semence précieuse
répandue dans les coeurs.
Nous avions fait le projet de consacrer
notre « lune de miel », non pas
à un voyage d'agrément pour notre
plaisir égoïste, mais à un cours
biblique au profit de tous les amis
présents. Deux jours après, le gai
compagnon qui menait la noce fut trouvé
à genoux sur le sol couvert de boue.
Oh ! quand une âme est réduite au
désespoir sous la conviction de
péché, elle ne
réfléchit pas si elle se trouve sur
un beau tapis ou sur la terre nue. Il s'agit d'une
transaction immédiate avec le Seigneur.
Ainsi ce jeune homme était là
prosterné, pleurant et criant à Dieu
pour obtenir miséricorde. Il fut
sauvé le jour même et il est
maintenant un évangéliste ardent
comme le feu, gagnant des âmes par
centaines.
« Un Témoignage de la
Grâce » est le sujet de l'histoire
suivante, écrite par Miss Hughes, dans leur
feuille Rethel Heart Throbs
(littéralement : Les Battements du
Coeur de Béthel) :
« Un réveil béni
vient d'éclater à Lunghoua, un
faubourg de Changhaï où nous avons une
salle d'Évangélisation. Lunghoua est
la ville natale d'André Gih. Il est venu
à Béthel autrefois comme simple
étudiant, ayant fait le voeu solennel de ne
jamais devenir chrétien. Après son
mariage célébré dans la
chapelle de Béthel, Gih et sa compagne sont
retournés à Lunghoua, au foyer
maternel où un festin familial leur fut
offert. Des amis et parents de près et de
loin s'étaient rassemblés en cette
joyeuse journée, entre autres un certain Mr
Shih, fils d'un citoyen hautement respecté.
Ce fut par le témoignage d'André Gih
à son mariage que Mr Shih entendit pour la
première fois le message de
l'Évangile. Il venait d'un milieu des plus
conservateurs. Son père était un
homme despote et violent qu'on avait
surnommé « le loup »
à cause de sa violence. Il exigeait en tout
temps, qu'il eut tort ou raison, une
obéissance sans réplique.
« Après sa conversion
à Christ, le jeune Shih, maintenant
né de nouveau, trouva la vie au foyer
paternel très difficile. Avant d'être
venu au Sauveur, il avait injustement accusé
sa femme d'infidélité et lui avait
retiré sa confiance, mais maintenant toutes
choses étaient faites nouvelles dans sa
vie.
« Un jour il rêva que
Christ se présentait à lui et lui
demandait : « Est-ce que tu m'aimes
vraiment et Si oui, voici la croix que tu auras
à porter désormais. » Et il
comprit qu'il s'agissait de la persécution
à venir. Le 8 février, il y eut une
grande cérémonie chez eux pour
l'adoration des ancêtres et son vieux
père lui demanda de se joindre à ce
rite familial. « Ou tu adoreras avec
nous, ou bien tu mourras ! Et si ce n'est pas
toi qui meurs, c'est moi qui mourrai ».
Bien entendu, le jeune Shih refusa de céder.
Le vieux père eut le coeur brisé de
ce que son fils put ainsi mépriser la
mémoire de ses ancêtres. Il
menaça de le frapper. La famille le
déclara solennellement un fils indigne de
porter son nom. Il se sauva de la maison et se
cacha dans la forêt. À minuit, son
frère le trouva là, à genoux
dans la prière et le supplia de rentrer. Le
père lui dit simplement :
« Je veux bien te pardonner encore
aujourd'hui ; mais demain nous renouvellerons
la cérémonie et tu seras le premier
à présenter l'encens. Je vais
préparer un cercueil au cas où tu
refuserais de m'obéir !
« Ses amis le
supplièrent de renier Christ, mais il leur
rendit son témoignage avec d'autant plus
d'ardeur : « J'aime mon père,
mais Christ a tant fait pour moi ! Je l'aime
Lui par-dessus tout et dois Lui obéir le
premier. » En réponse à la
prière, on n'osa pas le battre encore ce
jour-là, mais le, père le garda sous
clef.
« Il lisait sa Bible la nuit
en secret, à la lueur d'une chandelle. Son
père le découvrit et brûla son
précieux Livre. Un dimanche, il se rendit
à la salle de Béthel, mais son
père alla l'y chercher et le traîna
dehors. Ce jour-là il le frappa sur tout le
corps avec un gros gourdin. Dans sa souffrance
intense, il cria à Dieu dans une agonie de
prière pour son malheureux père comme
pour lui-même. II ne pouvait plus bouger tant
ses membres lui faisaient mal. Sa femme
était alors très malade, et cette
même semaine leur petit enfant leur fut
repris. Les évangélistes de
Béthel vinrent le voir et prier pour sa
femme. Elle s'était moquée de lui au
début, mais à présent elle
avait été gagnée et avait pris
position pour Christ avec son mari, sur quoi le
terrible père lui fit aussi sentir ses
coups.
« Un jour un de ses amis lui
dit confidentiellement : « Il te
faut partir de la maison, ton père à
l'intention de te tuer. » Mais il
répondit : « Non, je ne
partirai pas avant que Dieu Lui-même ouvre la
porte. » Déjà ses amis
avaient annoncé d'un ton moqueur :
« Bien sûr qu'il va partir d'ici et
se faire nourrir par ses chers
missionnaires ! » C'est pourquoi il
était bien décidé à
attendre que Dieu lui montre clairement son
chemin.
« Enfin le Seigneur lui envoya
Ses serviteurs de Béthel et, selon ses
propres termes, « ils
délièrent l'ânon dont
Jésus voulait se servir » et
l'emmenèrent avec eux. Quand il arriva
à Béthel, Miss Hughes s'informa avec
bienveillance de sa santé, lui proposant un
séjour à l'hôpital de la
Mission pour guérir de ses blessures en
disant : « Vous savez, quand un
membre souffre, dans le Corps de Christ tous les
membres souffrent. »
Ces paroles d'encouragement et de
sympathie lui réchauffèrent le coeur.
Avec des larmes de joie il rendit son
témoignage au Tabernacle. Il est maintenant
à l'École biblique où il se
prépare pour le
ministère. »
La suite de notre « lune de
miel » fut une excursion dans la province
voisine, non pas en touristes certes, mais pour y
annoncer l'Évangile. Arrivant dans
l'église du lieu qui était fort
spacieuse, nous n'y trouvâmes qu'un
très petit auditoire, à peine une
vingtaine. Nous n'étions pas satisfaits
à si bon marché, et voyant que
personne d'autre n'entrait dans l'édifice,
nous avons parcouru les rues de la ville en
chantant des cantiques. Quand les gens
s'arrêtaient pour nous écouter, nous
leur avons expliqué que la nouvelle
mariée - bien que ce ne soit guère la
coutume en Chine - était venue à eux
pour leur dire quelque chose d'important par le
chant de ces cantiques. Ainsi nous avons tout
abandonné pour l'amour de l'Évangile,
nous souciant fort peu d'être
méprisés ou admirés des
hommes. Nous ne cherchions aucune autre faveur que
celle de notre Dieu. Ainsi la foule fut
bientôt conquise et après leur avoir
adressé quelques paroles
préliminaires, nous avons pu les persuader
d'entrer dans le temple qui fut bientôt
rempli du haut en bas. La puissance du Seigneur
était là et des âmes se
convertirent soir après soir. Pas une
réunion ne se passa sans que vingt ou trente
personnes ne s'approchèrent de Dieu en
recherchant Son pardon. Ainsi
l'intérêt alla en grandissant au cours
de toute cette série de réunions et
notre joie fut à son comble dans cette
nouvelle manifestation du merveilleux amour de
notre Dieu et de Sa faveur sur notre union en
Lui.
Voici encore un extrait de la Feuille de
Béthel:
« Avec l'interruption
forcée du travail médical, il n'y en
a eu aucune dans l'enthousiasme et la
consécration totale de nos fidèles
pionniers. Pendant tout le temps de notre
épreuve, ils ont senti la
nécessité de poursuivre le combat
plus ardemment que jamais. Gih et sa compagne ont
répondu à un appel pour
l'évangélisation dans cette province.
Il s'y trouve une école laïque dans
laquelle on sent un esprit particulièrement
hostile au christianisme. Notre frère
raconte, l'histoire dans la lettre qui suit.
C'était leur première tournée
missionnaire ensemble depuis leur mariage. Gih et
sa femme sont tous deux des élèves de
l'École biblique de Béthel.
« Dieu soit béni pour
Sa présence avec nous encore
aujourd'hui ! Tse Ying (Mme Gih) a
parlé ce matin et moi j'ai pris la
réunion de l'après-midi. Il y avait
environ une centaine de personnes ce matin. Tse
Ying a été très courageuse en
délivrant son message et une dizaine
d'âmes se sont tournées vers le
Seigneur. L'après-midi, c'était
seulement pour les étudiants, trois cents
environ. Il y avait un bon esprit à la
réunion. Je leur ai parlé de la
Repentance, et à la fin du service trente
jeunes gens ont demandé le pardon de Dieu.
Mais ce n'est là qu'un petit commencement,
il nous faut encore un brisement
général des coeurs et c'est ce que
nous attendons du Seigneur.
« Ici toutes les écoles
sont du gouvernement. Elles célèbrent
toutes le culte du Soleil. On n'a le droit d'y
prêcher Christ que trois fois par semaine
pendant un quart d'heure seulement et cela non pas
à l'école entière mais
uniquement aux deux ou trois chrétiens qui
s'y trouvent. Dans une telle école on peut
prêcher le Soleil à l'école
entière mais non pas Christ. Quelle
pitié ! Et pourtant les instituteurs
chinois semblent satisfaits d'un tel état de
choses. « Et qu'en est-il des
non-chrétiens ? demandai-je à
celui qui m'informait du règlement, car la
foi vient de ce qu'on entend, dit la Parole de
Dieu. » Il me répondit qu'on ne
faisait rien pour eux. Oh ! que Dieu veuille
susciter parmi ce peuple des centaines de
témoins qui parcourront la Chine
entière et proclameront
« Jésus seul » afin de
secouer hors de leur sommeil tous ces soi-disant
« chrétiens ». Priez
pour nous afin que le Seigneur glorifie Son Nom en
ce lieu.
« André
Gih. »
Voici bien des années que nous avons
été à Son service. Parfois
nous allons au travail ensemble, parfois nous
sommes séparés. Au début de
notre mariage, ma femme a dû faire un
séjour à l'École biblique pour
sa préparation au ministère, tandis
que je partais de mon côté pour une
tournée avec de biens maigres ressources. De
part et d'autre nous avons connu la souffrance,
mais c'était de tout notre coeur que nous
avions accepté de souffrir pour Lui. Le
premier été j'étais en
tournée dans le Sud de la Chine tandis
qu'elle était restée à
Changhaï. Nous étions tourmentés
par une véritable invasion de moustiques
toutes les nuits et elle n'avait pas les moyens de
s'acheter une moustiquaire, de sorte qu'elle
passait de longues heures d'insomnie à
exécuter ces ennemis innombrables. Soucieux
de son épreuve, j'en faisais un ardent sujet
de prière lorsqu'un ami, apprenant mon
mariage récent, me fit un don de cinq
dollars pour ma compagne. Avec une profonde
reconnaissance j'acceptai de la main de mon Dieu ce
don qui me permit d'acheter sans tarder le tulle
nécessaire que j'envoyai à
Changhaï. Mais elle avait déjà
passé bien des semaines de souffrance. Nous
avons connu la pauvreté, mais jamais le
murmure. Si elle avait exposé ses besoins
à ses amis, elle aurait été
bien vite délivrée, mais elle avait
pour principe de n'en parler qu'à son
Seigneur, de sorte que moi-même, son mari, je
les ignorais bien souvent. Mais notre Père
céleste sait que nous avons besoin de ces
choses et c'est Lui qui a pourvu une fois de plus
par le moyen de cet ami.
FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE
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