Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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Oeuvres posthume de A. Rochat
Ministre du Saint Évangile

LETTRE XLVIII
Janvier 1840.

Dans une église, un pasteur est plus utile qu'un prédicateur - On n'avance en sainteté , qu'a mesure qu'on avance en foi

Permettez, mes frères, que dans la liberté de Christ, je vous soumette deux observations que vous pèserez devant le Seigneur, et qui peut-être feront naître en vous quelques réflexions utiles.

Première observation. Vous appelez des prédicateurs à passer vers vous et à vous aider en prêchant. À cela je ne vois rien que de bien, pourvu que vous éprouviez les esprits, et que vous examiniez toutes choses, en retenant ce qui est bon. Mais, permettez-moi de vous demander si vous cherchez aussi un pasteur ou des pasteurs ? Vous ne pouvez nier que cette charge n'ait été établie par Jésus-Christ Lui-même (Ephés. IV, 11), Vous voyez les apôtres établir des anciens ou pasteurs dans chaque église (Actes XIV, 23). Vous voyez l'apôtre Paul laisser Tite en Crète, pour régler les choses qui restent à régler, c'est-à-dire pour établir des pasteurs dans chaque ville, suivant qu'il le lui a ordonné (Tite I, 5). Vous savez que dans les épîtres à Tite et à Timothée, les qualités que doivent avoir les anciens ou pasteurs sont énumérées avec beaucoup de détails. Vous savez que l'apôtre Pierre leur a tracé avec soin la nature de leur charge et l'esprit dans lequel ils doivent la remplir (1 Pierre V, 1-3) ; et qu'en cela, parfaitement d'accord avec ce que l'Esprit saint dit par la bouche de l'apôtre Paul aux pasteurs de l'église d'Éphèse, il fait consister leur office en deux choses : paître le troupeau de Dieu et veiller sur lui, c'est-à-dire lui distribuer la Parole de vie pour le nourrir, et comme il est dit ailleurs : « Veiller sur les âmes comme devant rendre compte » (Héb. XIII, 17).

Vous savez fort bien qu'un prédicateur, et surtout un prédicateur qui n'est chez vous qu'en passant, ne peut faire que paître le troupeau, mais ne peut pas veiller sur lui. Vous devez comprendre que lorsqu'une fois les âmes ont été amenées à la foi, et qu'elles ont entendu pendant un certain temps la Parole de vie, elles ont plus besoin de pasteurs que de prédicateurs. C'est alors qu'il faut quelqu'un qui applique la Parole à chaque âme en particulier ; qui lui apprenne à vivre en détail de la nourriture qu'on met devant elle dans les prédications ; qui s'attache à détruire les illusions particulières a chacun ; à le fortifier dans les points où il est faible ; à le guider dans les divers sentiers difficiles où il peut passer ; quelqu'un qui soit son confident ; quelqu'un qui le réveille quand il s'endort, qui le console quand il est abattu, qui lui tende la main quand il est tombé, et qui, par son expérience chrétienne, le guide dans les différents sentiers de la vie spirituelle où il pourrait s'égarer, ou du moins se trouver embarrassé.

Il me semble que le prédicateur ne fait pour ainsi dire que préparer les voies au pasteur en mettant les âmes dans un état où elles ont besoin de sa surveillance et de sa direction. Il me semble qu'il y a entre le prédicateur et le pasteur à peu près la différence qu'il y aurait entre deux médecins, dont l'un donnerait, dans un cours, des directions générales pour conserver ou recouvrer la santé, et dont l'autre appliquerait ces directions à chacun dans des consultations particulières, où il s'informerait de la santé et de la constitution de chaque individu.

Quant à moi, il me semble que le second médecin serait beaucoup plus utile que le premier, surtout lorsque celui-ci aurait, par ses leçons générales, réussi à éveiller l'attention de ses auditeurs sur l'état de leur santé, et sur la nécessité d'en prendre soin.

Vous savez que ce qui manque à un grand nombre d'âmes, et peut-être à nous tous, c'est de savoir ou de vouloir appliquer les prédications aux détails de la vie commune.
On admire, ou reçoit des impressions ; mais trop souvent, dans la pratique, on va en sens inverse de ce qu'on avait admiré, et jusqu'à un certain degré senti. Nous avons besoin de quelqu'un qui vienne nous dire : « Tu es cet homme-là, » et qui, dans, le cours de la vie, nous demande quel parti nous tirons des prédications. Il est d'ailleurs de ces choses intimes, particulières à chaque âme, qui tiennent au fond des expériences chrétiennes, et qui ne peuvent guère être dites dans les prédications, ou qui, du moins, ne peuvent l'être de manière à répondre exactement aux besoins de chacun. Il en est de l'âme comme du corps.
Chacun a son tempérament ; personne n'a exactement celui d'un autre ; ensorte que les directions générales ne suffisent entièrement à personne, si ce n'est à ceux qui ne tiennent pas à soigner leur santé en détail, et à qui il suffit, en gros, de n'avoir pas une maladie bien déclarée ; ou peut-être encore à ceux qui ne se soucieraient pas qu'on vît de trop près les côtés faibles de leur constitution, et qui aiment peut-être secrètement leur mal. A ceux-là, sans doute, un prédicateur convient mieux qu'un pasteur, parce que écouter, admirer et recevoir certaines impressions, ne tire pas à conséquence pour la destruction du péché, et coûte beaucoup moins à la chair, que le conseil franc de quelqu'un qui a mis le doigt sur la plaie, qui ordonne un pansement, et qui dit : Je reviendrai voir dans quelques jours si l'on suit le traitement que j'ai prescrit. Telle âme est passionnée de prédications, de discussions, d'approfondissement de certains points de doctrine ; telle âme aime entendre parler des plus grandes hauteurs de la sanctification, qui se soucierait fort peu de soumettre toute sa conduite à une surveillance exacte qui la poussât à marcher journellement et de point en point, dans toutes les ordonnances du Seigneur. Ce que je dis ici, je le dis pour l'avoir vu plus d'une fois, et c'est une chose qui me convainc que, dans une église, un pasteur est plus utile qu'un prédicateur.

Maintenant, mes frères, si ces réflexions sont justes, si elles sont fondées sur l'Écriture et sur l'expérience, je vous demande si les églises du Seigneur n'ont pas tort de ne pas chercher, avant tout, des pasteurs ?
Mais où les prendre, me direz-vous peut-être ?
Il faut demander à Celui qui ne promet jamais en vain ; à Celui qui a le pouvoir de tenir tout ce qu'il promet ; à Celui qui ne veut pas que ses troupeaux soient comme des brebis qui n'ont point de pasteur ; à Celui qui en disant : « Obéissez à vos conducteurs, » s'est engagé indirectement à donner des conducteurs aux troupeaux ; à Celui qui s'y est engagé directement, en établissant, « les uns pour être pasteurs pour l'assemblage des saints, pour l'oeuvre du ministère, pour l'édification du corps de Christ. » Ce grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ, qui est le chef de l'église, tiendra sa promesse, si nous la réclamons et Il posera les dons de pasteur sur qui Il jugera convenable. Peut-être sur quelqu'un qui aura étudié, mais peut-être aussi sur quelqu'un qui sera sans lettres et du commun peuple, mais qu'on reconnaîtra avoir été avec Jésus, instruit à son école, et établi pasteur, ni par les hommes, ni par aucun homme, mais par les dons que Dieu a posés sur lui et que ses frères ne doivent faire que reconnaître, en lui donnant le nom et les pouvoirs de la charge de pasteur, et se chargeant de son entretien.

N'est-il pas vrai, mes frères, qu'on ne demande pas au milieu de nous des pasteurs comme une chose nécessaire, que Dieu a promise, et qu'Il veut donner ?
N'est-il pas vrai qu'à cet égard, comme à beaucoup d'autres, nous n'obtenons pas, parce que nous ne demandons pas ; et si nous ne demandons pas, n'est-ce point parce que nous ne souhaitons pas l'accomplissement de la promesse ?
Et si nous ne le souhaitons pas, quel est notre motif ? Je ne veux pas le sonder ; je dirai seulement qu'il n'est pas possible que ce soit un motif selon Dieu, qui nous pousse à ne pas souhaiter et à ne pas demander l'accomplissement d'une promesse du Seigneur, faite pour le bien de son église.

Avant d'en finir sur cet article je vous prierai de remarquer, mes frères, la promesse contenue dans Jérémie chap. III, 15, où Dieu déclare qu'Il donnera à son peuple des pasteurs selon son coeur, promesse faite pour les derniers temps glorieux de l'Église, comme vous pourrez vous en convaincre en lisant les versets qui suivent le passage cité.
Ce passage me paraît combattre ceux qui croient qu'on peut très-bien se passer de pasteurs, disant qu'ils ne sont nécessaires que pendant que les fidèles sont dans un état de faiblesse et d'enfance. De plus, il me paraît montrer l'importance de la charge de pasteur, puisque c'est le rétablissement de cette charge avec tous les dons nécessaires, que le Seigneur promet à son peuple dans les derniers temps.


Seconde observation. Vous dites que vous vous sentez le besoin d'être excités plus énergiquement à la sainteté. C'est la une bonne disposition, et le but que vous vous proposez est excellent ; car Dieu nous a appelés par une vocation sainte ; et « comme Celui qui nous a appelés est saint, nous devons être saints dans toute notre conduite. »
Mais cette sainteté à laquelle nous sommes appelés, ne se trouve, comme vous le savez, que dans l'union avec Christ. Elle ne croît en nous qu'à proportion que nous croissons dans la grâce et dans la connaissance du Seigneur Jésus. Elle prend sa racine dans la foi à l'amour que Dieu a eu pour nous, et qui fait que nous l'aimons, parce qu'Il nous a aimés le premier. Aussi selon l'Esprit saint, être puissamment fortifié en l'homme intérieur, c'est être fortifié dans l'habitation de Christ en nous par la foi. Selon l'Esprit saint dans le même passage, le moyen d'être rempli de toute la plénitude de Dieu, c'est de connaître toujours mieux l'étendue de l'amour de Christ, qui passe toute connaissance (Ephés. III, 14-19).

En deux mots, selon l'Écriture et selon l'expérience, on n'avance en sainteté, qu'à mesure qu'on avance en foi, et on n'avance en foi, qu'à mesure qu'on sent mieux sa misère et tout ce que Christ est pour nous. Je suis bien persuadé que c'est ainsi que vous l'entendez, quoique vous n'ayez fait que le sous-entendre dans votre lettre. Cependant j'aurais préféré que vous l'eussiez dit positivement ; d'abord parce que cela eût été plus conforme au langage de la Parole qui me paraît ne jamais parler de progrès, d'affermissement et de sainteté, sans rappeler de quelque manière que tout cela se rattache à la foi en Christ.
Par exemple, lorsque l'apôtre dit aux Romains « qu'il souhaite fort de les voir pour leur faire part de quelques dons spirituels, afin qu'ils soient affermis, » il ajoute : « C'est-à-dire, afin qu'étant parmi vous, nous nous consolions ensemble par la foi qui nous est commune à vous et à moi. »

S'il exhorte les Colossiens à être affermis et à faire des progrès, c'est en leur disant : « Comme vous avez reçu le Seigneur Jésus, marchez en Lui ; étant enracinés et fondés en Lui, et affermis en la foi, selon qu'elle vous a été enseignée, y faisant des progrès avec des actions de grâces » (Coloss. II, 6, 7). Exhorte-t-il les Éphésiens à croître, c'est : « croître en toutes choses, en Celui qui est le chef, Christ » (Ephés. IV, 15). C'est par le Seigneur Jésus qu'il conjure les Thessaloniciens « d'abonder de plus en plus dans l'obéissance aux commandements qu'il leur a donnés de la part du Seigneur Jésus » (1 Thess. IV, 2).

L'apôtre Pierre exhorte les fidèles à croître dans la grâce et dans la connaissance du Seigneur Jésus. L'apôtre Jean les excite à se purifier par l'espérance qu'ils ont d'être « rendus semblables au Fils de Dieu, quand Il paraîtra » (1 Jean III, 2, 5). L'apôtre Jude leur écrit pour les exhorter à combattre pour la foi qui a été donnée aux saints, et pour les exhorter à « s'édifier sur leur très-sainte foi » (Jude 3, 20).

Ce n'est pas sans une profonde sagesse, que l'Écriture rattache toujours ainsi la sainteté à la foi, parce qu'elle connaît qu'un des penchants de notre coeur orgueilleux, c'est de faire de la sainteté hors de Christ, ou du moins de mettre le sang de Christ comme en seconde ligne, et la sainteté en première. Or, comme le Seigneur qui sonde toutes choses, sait que dès que la sainteté ne prend plus sa racine dans le sentiment continuellement renouvelé du pardon des péchés par le sang de Christ, elle a dès lors en elle une racine d'orgueil qui l'empoisonne, Il a soin de nous ramener continuellement à ce qui est le commencement de notre subsistance (Hébr. III, 14), et Il ne parle jamais des fruits, sans rappeler l'arbre qui les produit.

Je crois, mes frères, qu'il est essentiel que notre langage soit en cela, comme en toutes choses, conforme à celui des saintes Écritures, afin de prévenir un mal dans lequel on tombe quelquefois, lorsqu'un réveil, après avoir langui, tend à se ranimer. Dans un pareil cas, comme on sent plus fortement le besoin de la sainteté, l'ennemi qui ne dort jamais, et qui sait se déguiser en ange de lumière, ne pouvant plus alors retenir ceux qui veulent marcher en avant, cherche à les pousser de côté, c'est-à-dire à les faire subtilement cheminer à côté du sang de Christ. Alors, sans nier l'efficace de ce sang et sa nécessité, non plus que la justification par la foi, on donne à entendre que ce sont là des choses convenues une fois pour toutes, qu'il ne faut pas s'attacher à poser de nouveau, puisque c'est le fondement.

On dit qu'il faut aller en avant, ce qui est vrai, et quelquefois sous ce prétexte, on parle beaucoup plus de sanctification que du sang de Christ ; beaucoup plus de l'amour qu'on doit avoir pour Dieu, que de l'amour qu'Il a eu pour nous ; beaucoup plus des fruits de l'Esprit, que de l'union par la foi avec Celui de qui procède l'Esprit, et dont il est dit, que « celui qui est uni au Seigneur, est un même Esprit avec Lui. »
Ou si l'on parle d'union avec Christ, c'est plus de l'union qui résulte d'une conformité de sentiment et de vie avec Lui, que de celle qui résulte du besoin que l'on a, comme pauvre pécheur, de prendre journellement Jésus-Christ pour son avocat, son intercesseur, et de chercher en Lui sa sagesse, sa justice, sa sanctification et sa rédemption. On parle plus de Jésus sanctifiant que de Jésus sauvant. On parle plus du pardon reçu autrefois, que du pardon qu'on reçoit chaque jour, en disant avec l'oraison dominicale : « Pardonne-nous, comme nous pardonnons. » Ainsi, on néglige de retremper chaque jour son âme dans le sang de Christ, et d'y puiser cette repentance humble et ce sentiment frais et nouveau de pardon, qui sont la source de toute vraie sanctification.

Je pense, mes frères, que vous n'en êtes pas là ; mais il est bon d'être averti, et de se tenir sur ses gardes, quoiqu'on soit affermi dans la vérité présente. C'est pourquoi ayons soin que même dans notre manière de nous exprimer, nous rappelions toujours, en parlant de sainteté, le fondement, qui est Christ crucifié.

Exprimons-nous toujours de manière à rappeler à nous et aux autres, que tout en tendant à la perfection et en aspirant à devenir semblables au Fils de Dieu, nous ne mettons pas notre sanctification au premier rang dans l'affaire du salut, nous n'y cherchons pas notre justice, et qu'aussi c'est dans le sang de Christ et dans le sentiment du pardon qu'il nous accorde chaque jour, que nous cherchons la force de notre piété. Par ce moyen, nous éviterons de tomber dans une sanctification fausse ou orgueilleuse, et nous serons en sûreté, parce qu'à mesure que Dieu nous fera monter quelques degrés en sanctification, nous nous tiendrons toujours abaissés, et même toujours plus abaissés au pied de la croix, sentant de plus en plus combien nous sommes de grands pécheurs, et connaissant toujours mieux à mesure que nous avançons, combien nous sommes éloignés d'être parvenus à une parfaite sainteté et de répondre comme nous le devrions à l'amour que Dieu a eu pour nous.

LETTRE XLIX
Février 1840.

Veuillez m'expliquer clairement cette contradiction, et me dire de quoi vous demandez pardon si vous ne péchez plus ?

 

« Que vous dirais-je de plus que ce que le frère ...... et d'autres qui ont déjà discuté avec vous, peuvent vous avoir dit ? Comment, d'ailleurs, m'entendrais-je avec vous lorsque nous interprétons les Écritures d'une manière toute différente ? Vous ne paraissez tenir compte que d'une classe de passages, tandis que j'explique l'Écriture par elle-même et que je tiens compte également de tous les passages, quoiqu'ils paraissent opposés les uns aux autres ; comprenant que dans le fondent ils se concilient, en ce que les uns restreignent le sens absolu que les autres paraissent avoir, quand ou les considère isolément.

Dans sa lettre, notre frère cite le Ps. XVIII pour prouver que David avait reçu un coeur pur, c'est-à-dire entièrement sanctifié, et il ne tient aucun compte de tant de passages où David reconnaît qu'il est encore pécheur, demande à Dieu de lui donner un coeur net, d'incliner son coeur vers les témoignages de l'Éternel, etc., etc.
Pour moi, tout cela se concilie parfaitement, comprenant que David dit, non pas qu'il est entièrement sanctifié, mais qu'il est intègre et droit, comme Jacob, à qui Dieu rendit témoignage de l'être, et qui cependant murmura dans ses afflictions et mit la main sur sa bouche, en reconnaissant qu'il était un homme vil.

Notre frère combat aussi ceux qui disent avoir deux coeurs, en citant le passage d'Ezéchiel où Dieu promet d'arracher le coeur de pierre et de donner un coeur de chair. ensorte que selon ce passage, pris à la lettre, il ne reste plus que ce dernier chez le régénéré.
De cette manière, tous ces chrétiens, auxquels l'apôtre disait « Faites mourir ce qui compose en vous le vieil homme : « Mortifiez par l'Esprit les oeuvres de la chair : » « Que le péché ne règne point en vos corps mortels pour lui obéir dans ses convoitises ; » et ceux, à plus forte raison, que l'apôtre appelait charnels (1 Cor. III, 3), et qui avaient des procès les uns avec les autres ( 1 Cor. VI, 7), étaient des gens qui n'avaient pas encore reçu le coeur de chair, et dont le coeur de pierre n'avait pas été ôté, puisqu'ils péchaient. Cependant l'Esprit saint dit qu'ils ont été sanctifiés au nom du Seigneur Jésus et par l'Esprit de notre Dieu (v. 11), et au verset 19, qu'ils sont le temple dit saint Esprit qui est en eux.

Votre grande erreur est de croire que l'opération de la purification du coeur se fait entièrement et une fois pour toutes, taudis que, selon la Parole, nous admettons qu'elle se commence au moment où l'on reçoit la vraie foi par laquelle Dieu purifie le coeur, et qu'elle se continue à mesure qu'on croît dans la grâce et dans la connaissance du Seigneur Jésus. Voilà pourquoi l'Écriture parle des chrétiens, tantôt comme sanctifiés, tantôt comme devant « achever leur sanctification dans la crainte du Seigneur, et se purifier de toute souillure de la chair et de l'Esprit.

Dans un sens, selon la Parole, les choses sont faites chez le régénéré, et dans un autre sens elles sont encore à faire.
Dans un sens, selon Paul aux Galates, tous ceux qui ont été baptisés en Christ, ont été revêtus en, Christ (Ch. III, 27) ; et dans un autre sens, ceux qui ont été « ensevelis avec Christ en sa mort par le baptême » (Rom. VI, 4), sont encore exhortés à se revêtir du Seigneur Jésus et à n'avoir pas soin de la chair pour en satisfaire les convoitises.
La chair existe donc encore chez eux avec ses convoitises ; car on ne peut pas être exhorté à n'avoir pas soin d'une chose qui n'existe plus.

Dès que l'on n'admet pas cette explication toute simple, que le chrétien reçoit à sa régénération un principe de sanctification qui se développe pendant tout le cours de sa vie ; qu'il reçoit un nouvel homme qui tend continuellement à faire mourir le vieux, lequel résiste jusqu'à la fin, l'Écriture est une énigme inexplicable. Or, deux hommes dont l'un admet la solution de l'énigme et l'autre ne l'admet pas, ne s'entendraient jamais, quand ils discuteraient pendant l'éternité, à moins que la Grâce de Dieu n'intervînt pour éclairer celui qui est dans l'erreur.

Permettez-moi de vous demander comment ceux qui se croient délivrés de tout péché, peuvent dire qu'ils ne subsistent journellement que par un pardon et une grâce sans cesse renouvelés ? Je comprends bien qu'ils aient besoin chaque jour de la Grâce de Dieu, pour être soutenus dans leur état ; mais je ne comprends pas de quoi ils ont à demander pardon chaque jour, puisqu'ils ne pèchent plus. J'ai cru jusqu'à présent qu'on ne devait demander pardon à Dieu, que des violations de sa Loi. Mais voici que des gens qui disent ne la plus violer, c'est-à-dire l'observer en tous points, ce qui est la même chose ; aimer Dieu de tout leur coeur et leur prochain comme eux-mêmes, disent aussi ne pouvoir subsister journellement que par un pardon sans cesse renouvelé ! Veuillez m'expliquer clairement cette contradiction, et me dire de quoi vous demandez pardon si vous ne péchez plus ?

Vous voudriez qu'au lieu de vous prédire des angoisses, je vous aidasse à retenir la Grâce qui vous a été faite. Mais réfléchissez que je ne crois pas que cette grâce de ne plus pécher vous ait été faite. Je ne nie pas que vous n'ayez pu recevoir dans ces derniers temps des bénédictions, mais je crois que comme cela est arrivé dans bien d'autres cas, l'ennemi a cherché à les gâter en y mêlant du sien. Tout ce que je puis demander à Dieu, c'est de maintenir et de développer ce qui est de Lui, et de faire tomber ce qui est de l'ennemi. Je me garde bien d'arrêter personne dans le chemin de la sanctification, car je dirai toujours à tout frère : Avancez ; et ainsi de suite jusqu'à la fin, parce que l'oeuvre de l'entier dévouement à Dieu a, je crois, une telle étendue, qu'il y a de quoi avancer toujours sur cette terre, sans jamais avoir atteint le terme.

Vous paraissez prendre dans un sens de sanctification le passage Rom. V, 20, et jusqu'à présent il m'a paru évident qu'il devait être pris dans un sens d'imputation de la justice de Christ. Tout le morceau est un parallèle entre les deux Adams, dont l'un nous a constitués pécheurs par sa chute, et dont l'autre nous constitue justes par la foi que nous avons en Lui. Une chose fâcheuse, que j'ai remarquée dans ce que j'ai lu à l'appui de votre système, c'est que plusieurs passages qui me paraissent avoir rapport à la justification y sont présentés comme se rapportant à la sanctification.

Sans doute, l'une ne peut pas se séparer entièrement de l'autre, puisque Dieu ne justifie pas sans sanctifier. Toutefois, il est bien évident qu'il est des passages qui se rapportent directement à l'imputation de ce que Jésus-Christ a fait pour nous, et d'autres à l'oeuvre qu'il veut faire en nous. Or, je trouve que c'est une tendance fâcheuse que de détourner les passages de la première classe de leur vrai sens, pour les présenter comme regardant principalement la sanctification. Laissons chaque passage avec son sens particulier. Chaque doctrine se soutient assez, sans qu'on ait besoin de l'appuyer par des passages qui ne s'y rapportent pas. Quand on le fait, cela semble donner à entendre qu'on accorde à cette doctrine une préférence sur les autres, et qu'on veut lui donner une sorte de prééminence. Si cette prééminence appartient à quelqu'une des doctrines évangéliques, c'est certainement à la justification par la foi, qui est le grand mystère de piété, le point où toutes les perfections de Dieu se rencontrent, le fondement de toute joie et de toute assurance, et la source de toute vraie sanctification.

Dans ce moment, je me fais lire l'histoire de l'établissement, du christianisme. J'y trouve, dans les premiers siècles, les vies de quelques saints hommes qui étaient d'une taille telle, qu'il ne me semble pas en voir de nos jours de pareils ; et cependant, je n'ai pas aperçu trace chez aucun d'eux qu'ils fussent dans l'opinion qu'ils ne péchaient plus. Je lisais l'autre jour dans le Journal des Frères la vie du premier missionnaire envoyé au sud de l'Afrique. Cet homme, après avoir travaillé plusieurs années comme forçat, en Bohême, où il avait été condamné pour la cause de l'Évangile, travailla plus de quarante ans dans le midi de l'Afrique au milieu des privations et des renoncements. Hé bien ! voici ce que cet homme si remarquable disait de lui, étant près de sa fin, et ce qui ne semble guère indiquer qu'il se crût sans péché :

« J'ai eu une carrière bien heureuse, mais j'avoue que souvent mon coeur est si froid, si vide, si pauvre, si misérable, que cela passe toute expression. Dans ce sentiment, je ne puis faire autre chose que de l'exposer à mon cher Sauveur, tel qu'il est, et le supplier de m'accorder de nouvelles grâces : alors comme les petits chiens, j'attends qu'il lui plaise de me donner quelques miettes de pain spirituel. »

Si vous avez entre les mains la vie de Scott, le commentateur de la Bible, qui certainement n'a pas perdu son temps en ce monde, et qui n'était pas un chrétien lâche et sans saveur, veuillez lire le récit de sa mort, et me dire s'il se croyait alors sans péché.

Vous me faites cette question : « Avez-vous jamais demandé à Dieu de vous délivrer du péché ? » Si je ne l'avais pas demandé, mériterais-je que vous me donnassiez le titre de frère, puisque le sceau de Dieu est que « quiconque invoque le nom de Christ se retire de l'iniquité ? » Oui, je l'ai demandé, et je le demande habituellement, et je puis le dire, par la Grâce de Dieu, toujours plus sincèrement et toujours plus instamment, quoiqu'à cet égard les moments ne soient pas tous les mêmes, car dans certains moments la chair lutte contre l'esprit, de manière à faire redouter la mortification et le crucifiement de la chair. Mais par la Grâce de Dieu, il m'est donné dans ces moments même d'aller, tel que je suis, me jeter aux pieds de Celui qui produit en nous le vouloir et le faire selon son bon plaisir.
Grâces lui en soient rendues, je ne puis pas dire que je prie en vain. Quoique la délivrance soit lente, cependant je sens qu'elle avance, et j'ai la confiance que Celui qui a commencé en moi la bonne oeuvre, la perfectionnera jusqu'au jour de Christ.

Il est vrai que je n'ai jamais demandé à Dieu de me délivrer à l'instant et tout à la fois de tout le mal qui est en moi ! tellement que je n'eusse plus à combattre contre aucun reste de vieil homme. Je ne l'ai pas demandé, parce que je ne suis nullement convaincu que Dieu nous y autorise. Ce que je Lui demande, c'est que je m'acquitte pleinement de mon devoir dans cette bonne guerre ( 1 Tim. I, 18) ; c'est que « le péché ne règne pas dans mon corps mortel pour lui obéir dans ses convoitises » (Rom. VI, 12) ; c'est que « par l'Esprit, je mortifie les oeuvres du corps » (Rom. VIII, 13) ; que je sois « transformé par le renouvellement de mon esprit, pour éprouver que la volonté de Dieu est bonne, agréable et parfaite » (Rom. XII, 2) ; que je sois « revêtu du Seigneur Jésus ; » que je n'aie pas « soin de la chair pour en satisfaire les convoitises » (Rom. VI, 12) ; que je me « dépouille du vieil homme, et que je me revête du nouveau » (Ephés. IV, 22-24, et Coloss. III, 5-10) ; que j'ajoute à ma foi toutes les parties de la sainteté (2 Pier. I, 5 -7) ; que je « croisse dans la grâce et dans la connaissance de notre Sauveur Jésus-Christ » (2 Pier. III, 18) ; et qu'ayant l'espérance d'être rendu semblable au Fils de Dieu, quand Il paraîtra, je me « purifie comme Lui aussi est pur » (1 Jean III, 2, 3). Enfin, qu'ayant de telles promesses, je me « nettoie de toute souillure de la chair et de l'esprit, achevant ma sanctification dans la crainte du Seigneur, » tellement qu'à mesure que mon homme extérieur tombe, l'intérieur se renouvelle de jour en jour (2 Cor. VII, 1, et Ch - IV, 16).

En demandant au Seigneur l'accomplissement de tous ces passages de sa Parole, je suis bien assuré de prier selon sa volonté. Celui à qui je demande du pain, ne me donnera sûrement pas une pierre, ni un serpent ; et je suis persuadé que selon que je demanderai avec plus de désir et avec plus de foi, j'obtiendrai plus promptement et plus entièrement la victoire sur le péché. Puis, quand la moisson sera mûre, Dieu y mettra la faucille.

Je n'estime pas que les sept choisis pour diacres dans l'église de Jérusalem, furent sans péché, parce qu'il est dit qu'ils étaient remplis du saint-Esprit ; pas plus que les apôtres qui en avaient été remplis deux fois (Acte II, 4, et Acte IV, 31), n'étaient sans péché, comme on le peut voir par exemple par Gal. II, 10-14. Si l'on tirait de pareilles conclusions des expressions de l'Écriture, on irait certes bien loin, et on la mettrait souvent en contradiction avec elle-même.

Par quel passage de la Parole de Dieu savez-vous que « jamais un enfant de Dieu n'est mort sans avoir été auparavant entièrement délivré du péché, car autrement il n'aurait pu voir Dieu ? » Quant à moi, je crois bien qu'aucun enfant de Dieu ne peut mourir et être sauvé sans avoir la haine de tout péché et l'amour de tout bien dans le coeur. Mais lors même qu'il porte encore en lui des restes du vieil homme contre lesquels il combat, je le crois tout aussi prêt à entrer dans le royaume des cieux avec l'amour de la sainteté, qui lui fait regarder comme une délivrance le moment où il quitte tout-à-fait la loi du péché qui est dans ses membres. Dites-moi ce que vous faites de ce grand nombre de fidèles qui sont morts sans avoir adopté votre système, et qui en mourant se reconnaissaient encore actuellement des pécheurs sauvés par grâce, soit de leurs péchés passés, soit de ce qui leur restait du péché ? Et pourtant ils haïssaient le péché.

Vous supposez que je vis seul, sans chercher à connaître ce que je juge. Vous vous trompez. Je ne vis pas si seul que vous le croyez. Je vois des chrétiens de différentes opinions qui passent ici. Je corresponds avec plusieurs qui n'ont pas tous les mêmes vues que moi. J'ai lu de vos lettres, de celles de .... et de plusieurs autres personnes qui parlent, et de l'opinion que vous soutenez et de ce qu'elles pensent à cet égard les unes dans un sens, les autres dans un autre. De plus, j'ai lu et je lis encore des ouvrages qui exposent les doctrines sur l'entière sanctification.
S'il s'agissait de juger les personnes et non pas un système, je dirais : Il faut aller les voir. Mais comme, grâces à Dieu, je cherche à combattre l'erreur en la séparant de toute personnalité, je n'ai nullement besoin d'eu voir les auteurs.

Avant de terminer ma lettre, permettez-moi de vous faire encore une question. Voudriez-vous m'expliquer comment « ce n'est que lorsque le péché a été surmonté, que l'âme peut réellement s'avancer vers l'image toujours plus entière de Celui qui l'a rachetée ? » Quant à moi, je dirai : Ce n'est qu'en surmontant le péché ; car il me semble que surmonter le péché, c'est précisément se renouveler à l'image de Dieu. J'entends par péché, non seulement faire ce que Dieu défend, mais encore ne pas faire ce qu'Il commande.
Adieu, que le Seigneur accomplisse en vous et en moi l'oeuvre de son bon plaisir ! Qu'Il nous perfectionne, nous affermisse, nous établisse et nous rende inébranlables

Votre affectionné.


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