Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...


CE QUI SE PASSA LE 28 AOÛT, JOUR DE MONSIEUR SAINT-AUGUSTIN, DANS LE COUVENT DE SAINTE-CLAIRE.

Ce jour de Monsieur St-Augustin, le lieutenant avec dix-huit de ces plus fermes hérétiques, tous gens d'apparence, revinrent au couvent, menant avec eux la femme de Levet, l'apothicaire, qui se mêlait de prêcher. « Dame Claude, lui dirent-ils, faites votre devoir; » et aussitôt elle se mit à prêcher, ne sachant que vilipender la vierge Marie, les saints et toute dévotion, et tenir propos que je tais par honnêteté. Et disait que les apôtres avaient été tous mariés au collège de Jésus, même St-Paul. Et tournait la sainte Écriture tout à rebours, changeant le miel en venin, tant que les soeurs ne le purent endurer, et crièrent toutes, qu'on fit taire cette babillarde, qu'elles avaient horreur de l'ouïr.

Or çà, dit alors le lieutenant, vous méprisez la Parole de Dieu; mais nous vous prendrons une à une et nous saurons ce que vous avez dans le coeur. » Et toutes suivant cette intention furent appelées et examinées l'une après l'autre. Le procès de l'examen serait trop long à décrire, et ne serait qu'horreur et qu'empêchement au lecteur. Qu'il lui suffise de savoir que toutes furent d'une même volonté, d'une même réponse et d'un consentement, comme s'il fût parti tout d'un coeur et tout d'une voix. ils se retirèrent grandement émerveillés de les voir ainsi toutes d'une même parole. Et cette journée tout entière fut employée ainsi.

LA DOULOUREUSE DÉPARTIE DES SOEURS DE SAINTE-CLAIRE.

Le dimanche, assez matin, revint le lieutenant avec grande compagnie. Dans le nombre était Jean Balard et Et. Pécolat, qui étaient les amis des soeurs. Inspirée de notre Seigneur, la mère vicaire se tourne vers eux : « Messieurs, vous êtes nos pères et nos amis, je crois que vous nous conseillerez pour le mieux. Je suis d'avis que nous demandions congé à Messieurs les syndics et que sortions de la ville. Certes, dirent-ils, vous êtes bien inspirée, et combien que votre départie nous sera trop amère, encore plus grief nous serait-il, s'ils vous faisaient violence. - Sus donc, au nom de Dieu, dit la mère vicaire, faites venir Messieurs et leur dites notre vouloir. » Alors les appelèrent et leur dirent : « Voici ces pauvres dames, qui pour vrai ne sauraient nous donner argent; mais sont contentes de vous laisser tout ce qu'elles possèdent et que leur permettiez de sortir. » Et toutes les soeurs dirent d'une voix ; « Nous ne désirons que d'être hors d'ici, pour servir Dieu en paix, et vous supplions de nous mettre hors la ville en sûreté. »

«Or donc, belles dames, dit le syndic, avisez le jour que voulez partir et dites comment vous pensez le faire. Certes, dit la mère vicaire, nous vous supplions que ce soit demain, à la pointe du jour; et vous plaise nous octroyer nos cottes et manteaux, pour nous garder du froid, et à chacune un couvre-chef pour nous reblanchir. - Nous le voulons, dit le syndic, et nous vous conduirons jusqu'au pont d'Arve, hors nos franchises. »

En ces fâcheux discours se passa cette soirée. Chacune fit son fardeau en grand labeur, et après minuit elles s'assemblèrent toutes à l'infirmerie vers la mère abbesse, qui les bénit avec larmes : « Mes enfans, leur dit-elle, soyez de ferme courage, et obéissez à la mère vicaire, que j'ai priée de prendre la conduite. » Lors la mère vicaire les rangea et leur dit: « Tenez-vous deux à deux par la main fermement, tant pris l'une de l'autre que nul ne vous puisse séparer, et tenez bon silence, sans parler pour chose qu'on die. » Elles se promirent la foi l'une à l'autre, que l'une n'épargnerait sa vie pour secourir ses soeurs. Une pauvre débile de cerveau, nommée soeur Jaquemine, étant encore dans son lit fut mandée quérir, laquelle nullement ne voulait sortir, jusqu'à ce qu'on lui dit que la mère abbesse était déjà partie. Alors elle se prit à pleurer si fort que nulle ne la pouvait apaiser, ce qui était grand'pitié.

Un peu après, des amis des soeurs vinrent bien effrayés, disant : « Hâtez-vous, car les jeunes gens de la ville ont juré qu'ils ne laisseraient point sortir au moins six des plus jeunes. C'est pourquoi ne contredisez à ce que Messieurs vous demanderont ; et vous gardez de dire que nous vous avons parlé. » Ils se retirèrent et bientôt vinrent Messieurs. « Nous vous prions, leur dit la mère vicaire, qu'il vous plaise donner ordre pour nous mettre dehors de bon matin, avant la presse des gens. Et quant à nos biens, Monsieur le lieutenant en prendra la charge, s'il lui plaît; » ce qu'il reçut fort volontiers. Et cependant que le notaire écrivait, les soeurs se retirèrent près du cloître, disant le De Profondis, prenant le dernier congé des saintes mères trépassées, et les priant à grands sanglots d'implorer la grâce de Dieu pour les pauvres soeurs. Les entendant prendre ce piteux congé, ces gens reculèrent jusqu'à ce qu'elles eussent fait leur dévotion et leur émouvait tellement le coeur qu'ils ne pouvaient s'empêcher d'en pleurer.
Et encore que cela se lit le plus secrètement qu'il était possible, néanmoins le bruit fut aussitôt répandu par toute la ville, et s'assembla tant de monde par les rues et devant le couvent qu'ils se pressaient l'un l'autre.

En ce moment la porte s'ouvrit et plusieurs des soeurs pensèrent se pâmer de peur, mais la mère vicaire, relevant leur courage, leur dit : « Sus, mes soeurs, faites le signe de la croix et tenez loyauté, ayant notre Seigneur en vos coeurs. » - Puis prenant soeur Catherine qui était la plus malade, elles sortirent les premières de grand courage. Puis la mère abbesse, bien débile d'ancienneté avec une forte soeur qui la soutenait. Puis soeur Jeanne avec la mère portière. Soeur Colette fut donnée à soeur Françoise, la plus forte de la compagnie. Et conséquemment se tenaient deux à deux par la main, toutes la face bien voilée, religieusement en silence, ce qui fut cause d'un grand bien. Car, chose admirable et digne de grande mémoire, furent tellement oins de pitié ces méchantes gens, qu'ils ne désiraient plus la perdition des soeurs, ains furent leurs conducteurs parmi les autres hérétiques.

Ainsi s'avancèrent entre les ennemis de Dieu. Les syndics veillaient subtilement, afin qu'aucun dommage ne nous fût fait. Et puis au devant et à côté marchaient bien 300 archers en armes, que bien nous fut. Car lorsque les enfans de la ville apprirent la sortie des soeurs, ils s'assemblèrent environ 500 et s'allèrent mettre en la rue de St-Antoine, par où elles devaient passer. Et l'un d'eux s'approchait déjà d'une d'elles quand la mère vicaire s'écria : « Ah, Monsieur le syndic, faites reculer ces garçons arrière du chemin. » À cette parole, le syndic d'une voix furieuse et horrible jura, disant : « S'il y a quelqu'un qui remue, il aura à l'heure même la tête tranchée sans pardon. » Et grinçant les dents, ils se reculèrent et regardèrent de loin les soeurs, qui continuaient de cheminer toutes tremblantes de peur, il n'en faut pas douter, vers le pont d'Arve, ou finissent les franchises de la ville. Les uns par moquerie criaient : « Où est cette grande noblesse pour les recevoir? » D'autres feignaient de pleurer, disant : « Hélas, Genève, qui te gardera ? Tu perds ta lumière. » Mais les bons pleuraient amèrement et jetaient de grands sanglots. Même le syndic, quand ce vint à la départie, fut ému de telle pitié qu'il soupirait tout haut et larmoyait en prenant congé des soeurs : « Or à Dieu, belles dames, certes votre départie me déplaît. » Et quand toutes furent sur le pont, il frappa des mains, disant : « Tout est conclu, il n'y a plus de remède; il n'en faut plus parler. »

Et les soeurs étant sur ce pont toutes seules ne savaient de quel côté tirer, car nul de la ville n'osait passer outre, parce que c'était sur les terres de Monseigneur de Savoie. Pourtant par pitié ils permirent à quelques-uns de la ville de les mener hors du pont. Et voici delà le pont, il y avait un hôte, grand homme de bien, qui vint au-devant d'elles et les fit entrer en sa maison, leur disant qu'elles se reposassent, en attendant que leur Seigneur leur envoyât du secours. Mais hélas, leurs ennemis étaient si près qu'elles le remercièrent humblement, ne se tenant encore en sûreté, et le prièrent de les mettre au chemin de St-Julien. Mais le bon homme ne les voulut laisser aller qu'il n'eût donné à chacune une miche de pain blanc et du bon fromage, et un bon verre de vin, du meilleur qu'il avait, disant : « Mangez et demandez si désirez autre chose, car il ne vous sera refusé; jamais je ne fis aumône de si bon coeur et vous dis que j'ai senti une grande consolation de votre venue. » Ce qui fut grand réconfort aux pauvres soeurs. C'est là au vrai la manière de leur pitoyable sortie de leur couvent, qui a eu lieu ce lundi, jour de St-Félix, 29e d'août 1535, à 5 heures du matin.

Nous avons laissé le récit à l'heure de notre départ de Genève et de notre réception en l'hôtellerie du pont d'Arve, Notre pauvre frère convers chercha tant qu'il trouva un chariot pour mettre les anciennes et malades. Lors la mère vicaire leur dit : « Puisque Dieu nous a donné aide, hâtons-nous, car il ne serait pas sûr ni honnête de séjourner à la taverne, encore que l'hôte soit homme de bien et nous ait fait grande miséricorde, ce que ne devons pas oublier. Elles se mirent donc en route, les jeunes soeurs les premières et les pauvres malades sur le chariot. C'était chose piteuse de voir cette sainte compagnie en tel état, tant affligée de douleur et de travail que plusieurs se pâmaient par le chemin.

Le temps était pluvieux, le chemin mauvais, et n'en pouvaient sortir. Il y avait de pauvres anciennes qui avaient demeuré presque toute leur vie en la religion, sans avoir jamais rien vu du monde. Elles s'évanouissaient à tout coup et ne pouvaient supporter la force de l'air. Quand elles voyaient quelque bétail aux champs, comme des vaches, elles croyaient que ce fussent des ours, et quand des brebis laineuses que c'étaient des loups ravissans. Combien que la mère vicaire leur eût fait à toutes de bons souliers, la plupart n'y savaient cheminer; mais les portaient attachés à leur ceinture. Et en tel état elles cheminèrent jusqu'à la nuit, depuis 3 heures du matin qu'elles sortirent de Genève jusques à St-Jullien, qui n'est qu'à une lieue.

Quand ils surent leur arrivée, le hérault de Monseigneur le Duc et le châtelain son frère firent promptement assembler le clergé et la paroisse, et tous vinrent avec la croix en grand dévotion au devant des soeurs. Ils les haranguèrent pour leur paroisse, puis les soutenant par le bras, ils les conduisirent en leurs maisons, les priant d'y reposer cette nuit pour l'amour de Monseigneur.

Le lendemain elles se remirent en route et cheminèrent jusques au château dit sieur baron de Viry. La mère vicaire le salua la première, disant : « Mon cousin, je me suis avisée de vous présenter ces pauvres désolées, pour avoir repos et sûreté. » Alors le bon baron lui donna les clefs du château, en lui disant: « Madame ma cousine, vous êtes de céans avant moi, je vous laisse le château et tout mon bien. » Or il y avait au château trente-six belles chambres à faire feu, et garnies de beaux lits bien encourtinés, de beau satin blanc et rouge et de bonnes couvertures. Les soeurs s'y réconfortèrent tant qu'il leur fut possible, moyennant la grâce de notre Seigneur et le bon plaisir de Monsieur le baron. Pourtant elles vivaient toujours en crainte, bien que le château fût muni de bonne artillerie.

Le samedi, le baron fit préparer ses plus beaux chevaux, et vêtit ses plus beaux habillemens pour accompagner les soeurs. Avant de partir tous entrèrent bien en ordre dans la chapelle. Là le bon sieur ouvrit un coffre où se trouvait une pièce de chair du précieux corps de St-Romain, qui était fraîche et odoriférante. Le bon père Garin la fit baiser à toutes les soeurs et puis en fit la bénédiction sur toute la compagnie. Et moi qui écris ceci j'étais détenue d'une mauvaise fièvre et par les mérites de St-Romain je fus guérie et laissai le bâton sur lequel je me soutenais dans la chapelle, en mémoire de ma guérison. Alors nous sortîmes montées dans des chariots, en belle ordonnance, escortées par des seigneurs bien montés. Nous allâmes ce jour jusqu'à l'abbaye de Bonlieu. Le lendemain, dimanche, nous repartîmes, après avoir entendu la messe, pour Annecy, et nous eûmes bien tant de fortunes que nous y arrivâmes bien tard. Par tous les villages ou nous recevait en procession, cloches sonnantes, et tous les chemins étaient pleins de monde qui courait pour nous voir. Le soleil était couché que nous étions encore à Balme, à une lieue d'Annecy.

Arrivées à Cran, la rivière se trouva grande et menait si grand bruit que jamais cheval ni boeuf ne voulut passer sur le pont. Il fallut nous passer l'une après l'autre, puis à force d'hommes il fallut passer les chariots par dessus le pont, ce qui fut cause que nous y demeurâmes jusques à la nuit. Messieurs d'Annecy envoyèrent des luminaires et des gens pour nous hâter, disant que la ville nous avait attendues tout le jour. Le chemin était couvert de gens portant torches et falots ; toutes les cloches sonnaient mélodieusement et toute la ville était illuminée. Ce fut de cette manière que nous arrivâmes chez Monsieur le Président. Le lendemain, Monsieur de Luxembourg prit la mère abbesse par dessous le bras toute la première, Monsieur le Président la mère vicaire et toutes ils nous introduisirent dans le couvent. L'excellent prince y lit jouer les orgues pour nous donner joie et liesse. Il nous fit acheter 15 florins de beau fil d'Épinal blanc et de bonnes aiguilles pour nous faire passer le temps, et nous fit tant de cordialités qu'il serait impossible de les écrire. Pour nous, nous n'eûmes rien de plus pressé que d'aller nous prosterner au milieu du choeur, où d'une voix belle et haute, nous chantâmes le Salve Regina, rendant grâces à Dieu, qui nous avait conduites au lieu de sûreté.

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LE CHANT DU SOLDAT BERNOIS AU RETOUR DE LA BATAILLE DE NYON (GINGINS).

« Berne, réjouis-toi, car Dieu vient de se montrer pour le salut de tes enfans ; Dieu vient de se montrer fidèle ; Berne, rends-lui tes actions de grâces.
On nous a haïs parce que nous réservons la gloire à ton nom seul ; mais tu t'es chargé de nous venger ; tu as saisi l'épée, tu l'as mise aux mains des fils de la vieille ourse, et quand ils ont combattu, tu les a couverts d'un bouclier. »

« 0 Bern du magst wohl froehlich syn
In dynem Vaterlande,
Den Gott bat wenig moetzli din
Gros gnad than hat Bistande. etc. »

Ce chant se trouve dans le recueil de Werner Steiner. - Nous le croyons de Nicolas Manuel. Quelques strophes qui reproduisent les détails de la bataille ont été retranchées dans notre traduction.

Ils ont marché sans autre but que celui de délivrer Genève pressée elle était par les serviteurs de la messe. La famine ne les a point arrêtés, les obstacles n'ont pas étonné leur courage ; la vue de l'ennemi, bien qu'inattendue, n'a point troublé leurs cœurs.

Ils étaient sept contre un. Un petit nombre d'entre nous avait des armes. « N'importe, nous sommes-nous dit, Dieu sera notre hallebarde ; » et chacun de nous de s'élancer à travers la haie et de courir au combat.

Pas un de tes fils, ô ma vieille ourse, qui n'ait fait bien son devoir. Que si tu en doutais, interroge l'ennemi. « Jamais, te dira-t-il, nous ne vîmes semblable mêlée. »

Nous sentions que Dieu combattait pour nous, qu'il déployait sa grâce envers les siens, et qu'il versait la confusion sur la troupe vaine et parée des fils de Bélial.

Il fallait voir les oursins leur apprendre à danser, et montrer particulièrement leur courtoisie envers les prêtres. C'était à grands coups de hallebarde qu'ils leur donnaient l'absolution.

Dure était la pénitence ; mais la vaillante bête, tout amie qu'elle est de la justice, sait s'irriter et mordre lorsqu'on s'obstine à lui tirer le poil ; elle s'emporte et dès lors malheur aux bonnets ronds et a leurs serviteurs.

À nous, à nous la victoire. En avant, marchons sur Genève, courons secourir l'affligée, consoler nos frères délaissés et sauver ceux dont tout le crime est d'être les enfans de l'Évangile.

Nous disions ainsi lorsqu'arrivèrent les envoyés de Berne. « L'ourse, dirent-ils, ne recourt à la guerre que quand les voies de douceur sont épuisées. Nous venons de recevoir des promesses de paix. Reposez-vous sur nous du soin de terminer l'affaire.

Achevez-la, répondîmes-nous, nous ne voulons, sinon que Genève soit délivrée. Assurez sa paix, Faites que la Parole de Dieu puisse lui être librement prêchée ; sauvez la brebis du Seigneur, et nous reprendrons joyeux le chemin de nos foyers.

Ainsi chante le soldat bernois et ses compagnons d'armes prêtent l'oreille à sa naïve chanson. Ils la redisent tous ensemble, pour s'encourager à marcher dans les sentiers du Seigneur, à louer son grand nom et à se souvenir de lui avec actions de grâces.





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