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TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE

EMPIRE D'ALLEMAGNE.
Empire d'Allemagne - Le Anabaptistes (continuation)
Pays Romand
La revue du passé: Les suites de la réformation à Neuchâtel
Noms propres de cette page

Les Anabaptistes (Continuation).

Les populations de l'Allemagne méridionale, soulevées par l'anabaptisme, ne procédèrent pas à l'insurrection sans une certaine modération et un certain ordre.
Dans les villes dont les paysans prenaient le gouvernement, ils créaient des magistrats populaires, et ceux-ci régissaient la cité avec un sentiment remarquable de justice et d'égalité sociale. Après avoir obtenu quelques succès, ils formulèrent leurs prétentions. Ils demandaient, d'abord et avant tout, de pouvoir se choisir des pasteurs qui leur enseignassent la Parole de Dieu sans mélange de traditions humaines.
Ils ne voulaient à l'avenir payer de dîme que celle du froment, et de cette dîme ils désiraient qu'il fût fait trois parts, la première pour leurs pasteurs, la seconde pour les pauvres, et la troisième pour les réparations publiques. Ils ne se refusaient pas d'être soumis aux magistrats dans les choses honnêtes; mais ils rejetaient toute servitude, montrant que le sang de Christ leur avait acquis la liberté. Ils regardaient comme contraire à l'équité, qu'on leur défendit de chasser, de pécher, et qu'il ne leur fût pas même permis de préserver leurs champs et leurs moissons contre les bêtes fauves.

Les forêts qui n'étaient pas propriété des particuliers devaient être rendues à l'usage de tous. Les censes devaient être réduites, les redevances foncières déclarées rachetables, le commerce et les arts rendus à la liberté. Ils finissaient par déclarer, que si l'on ne faisait raison à leurs demandes, ils sauraient conquérir par les armes ce que la parole de Christ ne leur refusait pas. Ils protestaient toutefois que, s'ils se trompaient en quelque chose sur le sens de l'Écriture, on les trouverait disposés à suivre de meilleurs conseils. Ils invitaient tout particulièrement Luther à juger de la justice de leurs réclamations.

Luther leur répondit Il est vrai que les princes qui ne permettent pas la prédication de l'Évangile, et qui accablent le peuple en tant de manières, méritent les châtimens, de Dieu. Mais vous, vous n'en devez pas moins travailler à avoir une conscience irréprochable; autrement vous perdrez vos âmes en voulant sauver vos corps.
Vous couvrez vos desseins du nom de Dieu; vous donnez à votre multitude le nom de chrétienne; ignorez-vous donc ce que Dieu veut? Dieu vous ordonne d'être soumis à vos magistrats et il vous déclare que ceux qui s'arrogent le pouvoir de juger et de punir périront par l'épée. Les magistrats, dites-vous, se conduisent d'une manière que vous ne sauriez tolérer. Cela serait vrai, qu'il ne vous appartiendrait pas de réprimer le mal; mais à celui seul à qui a été donnée la puissance du glaive. Ce n'est point à vous à être juges et arbitres dans votre propre cause.

Que deviendraient vos congrégations, s'il y était permis à chacun de venger sa propre querelle? Sachez qu'en renversant ce droit que la nature nous enseigne et qui est commun à tous les hommes, vous vous montrez pires que les Turcs et que les nations les plus barbares, tant s'en faut que vous soyez dignes du nom de chrétiens. Comment donc pourrez-vous supporter la présence de Christ quand il viendra pour vous juger? Comme vous n'a pas agi Luther, puisque vous voulez que Luther vous parle de lui-même. Luther n'a employé aucune violence, Luther n'a excité aucun soulèvement, Luther n'a provoqué aucune vengeance. S'il avait aimé l'émeute, il eût pu, lorsqu'il était à Worms, ébranler tellement la multitude, qu'on y aurait nagé dans le sang et que l'Empereur lui-même n'y eût pas été en sûreté. Mais toujours j'ai respecté l'ordre civil, me reposant de tout entre les mains de Dieu, et c'est en suivant cette voie que j'ai été préservé jusqu'à ce jour et que j'ai vu ma doctrine reçue de tant de peuples; malgré la rage du pape et l'opposition de mes adversaires.

Vous au contraire, vous excitez des soulèvemens et croyez réussir par l'épée. Aveugles, ne voyez-vous pas les obstacles qu'en agissant ainsi vous apportez à vos desseins? Pour moi, je vois clairement que le Diable qui n'a pu me détruire par le pape, cherche à le faire aujourd'hui par le moyen de vos prédicateurs sanguinaires. Mais il n'y réussira pas; je vais prier, bien certain que je suis de l'issue de vos entreprises; je vais prier le Seigneur de vous regarder en pitié et de renverser vos projets. Que ne vous conduisez-vous de manière à ce que je n'aie pas à adresser mes prières contre vous ; car quoique je ne sois qu'un pécheur, je ne doute pas que, justes qu'elles sont, elles ne soient exaucées. Peut-être subsisterez-vous quelque temps; il se peut même que vous ayez des succès; n'importe, vous allez à votre ruine. »

Un second écrit de Luther était adressé aux princes et à la noblesse : « C'est à vous seuls, leur dit-il, que vous devez attribuer les troubles qui bouleversent l'Empire. C'est à vous, princes de l'Eglise, qui ne cessez de persécuter l'Évangile, et le faites malgré votre conscience. C'est à vous, magistrats civils, qui ne songez qu'à faire de l'argent pour fournir à votre luxe et qui faites peser sur le pauvre peuple des fardeaux qu'il ne peut tolérer. Les paysans vous ont fait douze demandes, dont plusieurs sont si raisonnables que les rejeter vous couvrirait de honte, et vous avez tout repoussé.

J'ai lu dans le livre des Psaumes, qu'il arrive que Dieu rende les princes méprisables (Ps. 106.) Je vous ai avertis de vous préserver d'un tel malheur; mais vous n'y avez point pris garde et vous vous précipitez à la mort. Allez donc, les prodiges n'annoncent rien de favorable. La colère de Dieu se tient prête à éclater sur vos têtes. Déjà gronde cette sédition populaire qui sera la ruine de l'Allemagne, si Dieu n'écoute mon oraison et n'y met le remède encore à cette fois. Les choses y sont maintenant en tel état, que les hommes ne peuvent, ne veulent, ni même ne doivent souffrir plus long-temps votre domination. »

Dans un dernier avis, Luther s'adressait aux deux partis, et les conjurait encore de mettre fin à leurs querelles par une composition. Il remontrait aux magistrats, combien la fin de toute tyrannie a toujours été funeste; au peuple, comment ont péri misérablement la plupart des séditieux. Il conseillait aux uns de relâcher quelque chose de leurs demandes; aux autres, de leurs droits; et il les exhortait à remettre à un petit nombre de gens de bien la discussion de leurs prétentions réciproques. Pour lui, qui voyait les deux partis courir dans des voies criminelles, il déclarait pouvoir ne prier pour l'un non plus que pour l'autre; il ne savait que demander à Dieu d'incliner les coeurs de tous à la paix; encore craignait-il que la colère divine ne pût être apaisée et que la prière des justes ne réussît pas à arrêter les coups qui étaient près de tomber sur la nation.

Cependant les paysans s'avançaient par armées nombreuses. Leurs bandes avaient fini par se livrer au pillage et par répandre dans les provinces l'incendie, la dévastation et l'effroi. Alors Luther s'adressa encore à l'Allemagne; mais cette fois c'était pour l'appeler aux armes et pour dévouer à la mort ces parricides impies qui, sous le nom de Christ, donnaient l'exemple du vol, du meurtre et de la sédition.

Le principal corps des insurgés se trouvait en Franconie, fort de 30,000 hommes. À sa tête était Muncer, que les Anabaptistes regardaient comme le Gédéon destiné à rétablir, par l'épée, le royaume de Jésus-Christ. Il défendait aux paysans, au nom de Dieu, de payer aucun tribut : « Hommes du peuple, s'écriait-il, ne vous laissez pas séduire par les conseils lâches et insensés des impies ; vous périrez tous, si vous n'écoutez le Ciel, qui vous parle par ma bouche. Prêtez attention, et apprenez que 500,000 paysans sont en armes sur les bords du Necker. L'Empereur va commencer la danse, les gens impurs des châteaux auront leur tour et nous, nous aurons ce que Dieu nous a promis. Hommes du peuple, ne vous laissez pas séduire par les flatteries des Philistins. Dieu veut que vous les traitiez comme il traita jadis les races Cananéennes. C'est là ce qu'il m'a révélé. »

De jour en jour l'espoir du butin et celui d'une meilleure fortune grossissait les rangs des insurgés. « Plus de lois, plus de magistrats, plus d'impôts, » criait Muncer; et à ces paroles magiques accouraient des bandes nouvelles. Il leur promettait une victoire certaine, qui ne vint point à leurs essaims tumultueux.

Il est près de Frankhuisen une montagne sur laquelle les paysans s'étaient réunis et ils y attendaient, dans une grande confusion, que les nobles vinssent les attaquer. Point d'ordre ni de commandement. Ils achevaient de chanter un cantique, lorsque l'assaut commença par le canon. Alors surpris, stupéfaits, les malheureux ne surent ni s'enfuir, ni se défendre; ils attendaient, selon les promesses de Muncer, leur délivrance du Ciel. Ne la voyant pas venir, ils finirent par s'ébranler et par prendre tous ensemble une fuite précipitée. Ce fut un massacre et non pas une bataille. Muncer fut pris et mis à mort.

Plusieurs semaines durant la noblesse poursuivit sa victoire, faisant marcher la terreur devant ses pas et exerçant en tous lieux des vengeances effroyables. Même après que l'insurrection fut étouffée, les gens des châteaux organisèrent et permirent l'incendie des villages et livrèrent aux flammes les habitans avec les maisons.

Partout on rencontrait des paysans pendus aux arbres des chemins. Une seule division commandée par le duc de Lorraine fit périr, en huit jours, Plus de 50,000 personnes et elle en chassait devant elles des milliers. Ainsi périt par le glaive, comme Luther l'avait prévu, la première insurrection des Anabaptistes. L'orage tomba, mais. pour se relever. L'anabaptisme n'avait pas péri; les germes en étaient demeurés répandus sur le sol de l'Allemagne, et il se releva bientôt dans les provinces du nord, pour y déployer une énergie et une fureur nouvelles. Nous allons le voir perdre sur cette scène, ce qu'il avait conservé dans le midi du calme, du bon sens et du caractère modéré des populations; soit qu'il ait dû, dans le nord, prendre le caractère mystique, entier et absolu des imaginations, soit que les tempêtes soulevées par les idées soient soumises à la loi de devoir croître jusqu'à ce qu'elles aient produit toutes leurs conséquences, jeté toute leur écume et donné leur dernier mot.

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PAYS ROMAND.

 

Genève, 31 mai. Les premiers soins, après la malheureuse affaire de Peney, avaient été pour la sûreté de la république; on ne songeait, les jours qui suivirent, qu'à fondre les cloches en artillerie, à élever des remparts et à faire mouvoir les bons alliés de Berne. On a ensuite levé une troupe soldée de 50 hommes et on leur a donné deux bons capitaines, Jean Lambert et H. Dolens, pour les conduire contre les traîtres de Peney et procurer des vivres aux citoyens; les 50 soldats sont logés chez autant d'habitans, qui sont chargés de les nourrir 15 jours, après quoi d'autres habitans les recevront à leur tour.
Ces mesures prises et la première frayeur passée, les esprits sont revenus à la grande affaire de nos jours, à la dispute et aux choses de la religion. Il n'est dès lors conversation d'autre chose.

Le Conseil, au dire du peuple, penche aujourd'hui bien fort du côté de l'Évangile; à vrai dire, il renferme dans son sein quelques papistes zélés, quelques zélés réformateurs, et un milieu tout politique; celui-ci composé d'hommes qui ne pensent qu'à tenir les partis bien en bride, à éviter de briser le char de la république sur la pente où il est entraîné, et à ramener doucement les citoyens sur le chemin de l'obéissance, de la concorde et de la paix. Ce sont ces hommes politiques qui dictent les résolutions du Conseil. Ils savent que Genève finira par être de la religion de ses alliés de Berne; mais ils veulent y façonner insensiblement les esprits. lis évitent donc de heurter les papistes; ils se bornent à les surveiller, à les réprimer, et ils ne les frappent que lorsqu'ils prêtent à la correction par des actes dignes du blâme universel.

Un jour, par exemple, il fût parlé en Conseil des faux miracles que faisaient les moines dans l'église de Notre-Dame de Grâce, qui est au couvent des Augustins. « Savez-vous, dirent quelques personnes, où gît la grande vertu de la bonne dame? c'est qu'elle engraisse ses moines bel et bien; car ils ont tous la face rouge comme écrevisse et les yeux comme quassidoine. Or le moyen qu'ils emploient nous allons vous l'apprendre, le voici.

Les beaux pères donnent à entendre que cette image de Notre-Dame de Grâce revicoule et ressuscite les petits enfans morts sans baptême, du moins pour autant de temps qu'il est nécessaire pour les pouvoir baptiser. Vous n'ignorez pas la doctrine qu'ils prêchent sur ce sujet : Mieux vaudrait, disent-ils, que dix cités fussent péries, qu'un enfant fût mort sans baptême; car la pauvre petite créature s'en irait tout droit aux limbes, qui sont les faubourgs de l'enfer. Et les mères (que ne donnerait pas une mère pour le rachat de celui qu'elle aime!), les faibles mères viennent, apportant de grosses sommes pour procurer le ciel à leurs enfans. Il en arrive de tous côtés. C'est comme à Notre-Dame de Lausanne ou comme à Notre-Dame de Bure, les idoles les plus renommées pour les merveilles qu'on leur attribue. Eh bien, apprenez par quelle fourberie se font ceux de ces miracles qui se pratiquent dans nos murs.

Il est dans l'église dont nous parlons certaines femmelettes que les moines nourrissent; ce sont elles qui portent les enfans au pied de la statue de la Vierge. Et là par de subtils moyens, elles remplissent d'air le corps des petits enfans, si bien que cet air sortant par la bouche fait remuer une plume qu'elles y ont placée. Et aucune fois aussi l'enfant sue et se mouille par le moyen de pierres qu'elles ont chauffées; et alors madame la matrone de crier au miracle et les bons moines de sonner les cloches et de faire valoir celle-ci. Mais remarquez que jamais le prodige ne se fait sinon devant les moines et que jamais enfant n'a été rendu vivant à son père et à sa mère; mais qu'il les faut incontinent ensevelir après ces miracles bien différens de ceux de Jésus-Christ. »

Le fait ainsi récité se trouvant être comme on le disait, et le Conseil l'ayant fait bien constater, il n'hésita pas sur ce qu'il avait à faire; Messieurs les syndics se rendirent au couvent et ils défendirent aux moines de faire des miracles à l'avenir, sous peine de l'indignation de la ville, à moins qu'ils ne pussent soutenir par les Écritures que la chose pouvait se faire.
Le même jour, MM. du Conseil n'ont pas hésité à dépouiller de sa robe et de ses charges un des guets de la ville, parce qu'il ne se contentait pas d'être papiste, mais qu'il n'avait jamais aimé la liberté et le bien de la république; ains avait toujours désiré la servitude (en laquelle il est né hors de Genève), avait donné son fils pour servir de trompette aux traîtres et larrons de Peney; et lorsque Pierre de la Baume, alors évêque de Genève, incitait contre nous ses adhérens, le dit guet logeait les traîtres, les aidait et travaillait à la mort des citoyens.

Le Conseil a cru encore devoir user d'autorité à l'égard des cordeliers et des chanoines, qui, voyant venir la fin de leurs maisons, travaillent à n'y rien laisser à prendre. Il a fait mettre en sûreté dans la grotte les chasubles et les draps de soie de St-Pierre ; et parce que les cordeliers vendent leurs hardes, pour pouvoir vivre, disent-ils, le duc de Savoie ne leur envoyant plus rien, Messieurs ont ordonné à Jean Bordon de vendre les dits effets et on leur en baillera peu à peu l'argent.

Quelque temps après on a appris que les châtelains de St-Germain avaient vendu leurs calices, disant qu'il ne leur restait autre bien. Sur quoi il a été ordonné au procureur des altariens de St-Germain de ne leur payer aucune distribution qu'ils n'aient donné l'inventaire de leurs calices.

Le même jour (c'est le 25 dernier), révérend Aimé de Gingins, abbé de Bonmont, ci-devant vicaire, a invité MM. les syndics à assister à la procession qui devait se faire, selon la coutume, le jeudi suivant, jour de la fête de Dieu. Messieurs ont trouvé que les temps n'étaient pas propres pour de telles cérémonies et que les prêtres devaient faire comme ils avaient accoutumé en temps de peste. S'étant le lendemain occupés de nouveau de cette question, ils ont formulé en ces termes leur résolution unanime : « Puisqu'il y a une dispute établie, par laquelle on pourra connaître si la procession est sainte, on ne la doit point faire, du moins jusqu'après la dispute, et s'il se trouve qu'elle soit salutaire, on la proclamera dévotement à son de trompe, et on obligera tout le monde à y venir avec des flambeaux. Cependant afin que les prêtres ne disent pas que nous voulons entièrement renverser leurs ordres, s'ils veulent aller en procession par leurs temples qu'ils le fassent, pourvu qu'ils n'aillent pas par la ville. »

Il a aussi été résolu qu'on ne ferait point le banquet accoutumé de la confrérie de la Fête-Dieu.

Ainsi en agissent MM. du Conseil envers ceux de la vieille religion. Ils évitent d'un autre côté de se montrer trop favorables à ceux de la nouvelle. Ayant accepté de laisser tenir une dispute, ils veulent qu'elle se fasse avec grand ordre et grand appareil d'impartialité. La trompette a donc fait le tour de la ville, publiant que nulle injure ne se fasse, nulle querelle à personne et que tout le monde, soit de la ville, soit du dehors, puisse librement disputer. Bonne garde a été mise aux portes, aux tours et sur les fossés de St-Gervais. Les secrétaires et les commissaires de la dispute ont été choisis également dans les deux partis, à savoir pour secrétaires : Claude Roset, André Viennois, Richard Vellut et François Vuarier notaires, et pour commissaires : M. Sept, CI. Savoie, J. Balard, nonobstant la lettre pleine d'injures que cet honnête papiste vient d'adresser à Messieurs, Gir. de la Rive, CI. de Châteauneuf, CI. Richardet, Amy de Chapeaurouge et J. Amy Curtet. Enfin MM. les syndics ont de nouveau avisé prêtres et moines que la conférence aurait lieu en langue française, afin qu'hommes et femmes, petits et grands pussent connaître ce qui se dirait et qu'ils se tinssent prêts à y venir bien disputer.

Sur ce nous avons entendu des étrangers faire les réflexions suivantes : « Ah! si telle licence était donnée de par tous princes chrétiens comme MM. de Genève baillent, l'affaire serait tantôt définie, sans tant brûler, tuer et meurtrir de pauvres fidèles chrétiens. Mais le pape et les siens savent bien que cette licence baillée, leur cas serait incontinent découvert; aussi défendent-ils de disputer de ceci, sinon au feu et à l'épée. Et ont appris cette manière de faire du grand Turc qui se défend étroitement que personne ne dispute de sa loi, car elle est, dit-il, assez approuvée, et ne veut avoir gens lettrés en son pays, afin qu'on n'y connaisse que l'Alcoran. Voilà pourquoi le pape et les siens ne craignent rien tant que disputes et vrais conciles par lesquels tous lisent dans l'Écriture et apprennent à connaître la loi, les décrets et les ordonnances. »

Au milieu de ces discours et de bien d'autres, et les préparatifs étant achevés, la dispute a été enfin dressée, ce hier dimanche 30 mai 1535, en grande solennité, et sous l'autorité de la seigneurie de Genève. Les auditeurs et les députés ordonnés par le Conseil se sont assis sur le théâtre (ou l'échafaud) pour juger et veiller au bon ordre; les secrétaires ont pris place et la lice a été déclarée ouverte aux combattans.

Mais voici que de tant de prêtres et de moines qu'il y a dans Genève, aucun ne se présente. Ceux-ci, se dit-on, ont absenté la ville pour leur plaisir; ceux-là s'en sont allés sans prendre congé et ceux qui sont demeurés ne viendront, car l'Évêque a défendu aux ecclésiastiques de se rencontrer à la dispute, et le duc de Savoie a fait la même défense à ses sujets, de sorte que nous n'en verrons guère.

Quelqu'un raconte que de tous les religieux il en est un seul qui ait fait mine de vouloir venir, c'est un jacobin de Palais, citoyen de Genève, et du nom de Pierre Chapuis, le plus instruit de son ordre si l'on dit vrai, « Pourtant, a-t-il fait observer à MM. du Conseil, nous vous prions de considérer que nous n'avons parmi nous aucun homme lettré; nous vous supplions donc qu'on nous relâche frère Guy Furbity, pour qu'il puisse se trouver à la dispute. Messieurs ont trouvé bonne son observation et considérant qu'on a promis au frère Guy de le libérer dès qu'il aurait payé ses dépens, ils ont ordonné qu'il fût mis au large pour paraître à la dispute, et qu'il retournerait en prison après la conférence, jusqu'à ce qu'il ait satisfait à son jugement. Mais, ajoute-t-on, Furbity s'est excusé.

On parle encore de deux étrangers qui doivent venir; l'un est un docteur de la Sorbonne nommé Pierre Caroli, homme chaud et subtil, et dont on attend l'arrivée. L'autre, nommé de Cornibus, aussi de Paris et le plus renommé de la Sorbonne, s'est vanté de vouloir se montrer; Farel lui a écrit à Lyon pour le prier, et l'on avait délibéré de le recevoir fort honnêtement; mais il ne parait vouloir se mettre en chemin. Les réformés de leur côté ne sont pas sans embarras voyant tous leurs adversaires faire défaut. Farel conseille de contraindre les prêtres à venir librement se justifier. Messieurs, qui voudraient atteindre au mieux leur but, viennent de se décider à faire auprès des moines et des prêtres une dernière tentative, et les syndics iront en personne au chapitre de St-Pierre chercher à amener des combattans dans la lice. Je vous raconterai ce qu'ils auront obtenu.

SOURCES. Celles de nos articles précédens.
 

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REVUE DU PASSÉ.

LES SUITES DE LA RÉFORME A NEUCHÂTEL.

 

« Le vent continua de souffler avec violence, et cependant les uns voulaient d'une manière et les autres d'une autre, ensorte qu'ils ne s'entendaient point. Dans cette confusion et malgré cette obscurité, on distinguait pourtant toujours la croix. »
(Ancien voyage).

L'héritage des chanoines : 1° leurs biens et ceux des abbaies et des cures; 2° leurs places aux audiences; 3° leur ministère dans la société chrétienne. Prétentions opposées des pasteurs, de la seigneurie et des bourgeois. Ce que dit le peuple. Consolation réelle.

Un champ couvert de débris, tout autour des regards avides, des fortunes, des pouvoirs dispersés, dépouilles dont chacun veut une part, voilà le lendemain de toutes les révolutions et il n'en sera pas différemment dans la Principauté. Nos lecteurs, à qui nous n'avons sur ce sujet rien à apprendre, consentiront-ils à reprendre avec nous le chemin de Neuchâtel ?

Les chanoines, en se retirant, laissaient un triple héritage à recueillir. Ils laissaient des biens, des pouvoirs dans l'État, et dans l'église tout un ordre de choses à reconstruire. Voyons d'abord ce qu'il advint de leurs biens et de ceux des abbaies, des prieurés et des cures.

Dans la plupart des pays où la réforme s'est établie, on a jugé que ces biens, donnés par la piété, devaient être consacrés à un saint usage; on les a appliqués aux besoins de l'Eglise, à la fondation des écoles et à l'entretien des indigens. Farel et ses collègues parurent ne pas se douter qu'à Neuchâtel il pût en être fait un autre emploi; mais la seigneurie ne jugea point comme eux. Elle commença par prendre en séquestre la fortune de l'Eglise, en attendant le jour où les Neuchâtelois, revenus d'un premier entraînement , retourneraient à la religion de leurs pères. Puis elle sut trouver des motifs pour ne pas s'en désaisir : « Toute propriété abandonnée revient à l'État, c'est-à-dire au seigneur. Les comtes ont un droit d'autant mieux fondé sur les propriétés de l'Eglise, qu'elles se composent en grande partie des offrandes faites par la piété de leurs pères.

La société à laquelle ces dons avaient été faits, se trouvant éteinte, les fonctions auxquelles ils étaient destinés à pourvoir étant venues à cesser, le retour est naturel. Ou penserait-on que cette richesse, donnée pour entretenir le culte de la sainte mère Eglise, pût être employée légitimement à solder les ennemis de ce culte? qu'elle doive appartenir à ceux qui l'ont détruit? La seigneurie estime que ce serait déraison d'y songer. Mais, toujours juste et loyale, elle est prête à faire ce que demande l'équité; selon l'équité les dons doivent être restitués aux donateurs et les legs pies aux héritiers de ceux qui les ont faits; que les héritiers, que les donateurs se présentent, qu'ils viennent munis de bonnes preuves, qu'ils justifient leur droit et ils retireront ce qu'ils auront montré leur appartenir. Ce qui n'aura pas trouvé son légitime propriétaire demeurera aux mains de la seigneurie. »

Ce fut le moyen que les princes de Neuchâtel trouvèrent de colorer des apparences de la justice une spoliation évidente. Ils instituèrent une justice légataire pour reconnaître et juger de la restitution des legs pies. Il n'y eut qu'un petit nombre de personnes qui purent apporter les titres attestant les offrandes faites par elles ou par leurs ancêtres. Il existait bien un livre dans lequel ces dons se trouvaient portés avec le nom des donateurs; mais un eut garde d'en ouvrir les pages devant les particuliers. Lors donc que quelques restitutions eurent été faites, la seigneurie s'attribua, avec toutes les formes de justice, le reste de ce qui avait appartenu au corps religieux. On n'omit pas de réserver les droits de l'Eglise catholique, le cas advenant que Neuchâtel revint à son ancien culte; mais cette phrase mise sur le papier, le prince, nous l'avons vu, se garda de travailler au rétablissement de la religion des chanoines (1*).

Mais MM. de Neuchâtel n'avaient pas vu sans une vive peine le riche héritage passer tout entier dans les mains de la seigneurie. Eux aussi parlaient de droits, eux aussi faisaient valoir les convenances et, puissans comme ils sont devenus, ce n'était pas par le mépris que l'on pouvait répondre à leurs réclamations. Il fallut donc enfin que le prince et les bourgeois s'entendissent. Le prince accorda aux Neuchâtelois de nouvelles franchises; il leur fit une part aux biens de l'Eglise : « C'était, fut-il dit, pour réparer l'appauvrissement de la ville, occasionné par dix années de révolution.» Le Gouverneur mit ensuite en vente les propriétés en litige; plusieurs des citoyens les plus riches en firent l'acquisition.
Jean Merveilleux acheta des dîmes du chapitre et de celle de Fontaine-André pour une valeur de 700 livres. Tous les pouvoirs se trouvèrent dès lors intéressés à maintenir l'oeuvre de la révolution.
Restaient les prêcheurs, restait l'Eglise nouvelle.

Dans ce sac d'une fortune qui avait été destinée à entretenir dans le pays une institution religieuse et morale, n'y aura-t-il aucune part pour les ministres de la religion? Ne leur réservera-t-on pas même les moyens de la plus chétive existence? Ils réclamèrent et ne furent pas écoutés. Ces hommes de Dieu, d'une voix si nette et si puissante quand il s'agissait de publier le salut, ne savaient que bégayer dès qu'il était question de leurs intérêts présents. Leur attitude devenait timide, embarrassée; ils ne savaient pas se faire chemin à travers les subtils détours dont s'enveloppent les hommes intéressés. Ils eussent cru se rendre criminels en donnant à ces débats, d'un intérêt secondaire, un temps qu'ils devaient à leur haute mission. La plupart, ils étaient sans fortune, quelques - uns sans moyens d'existence ; on abandonna aux personnes pieuses la charge de leur entretien. « Le peuple a fait la révolution, que le peuple la paie et nourrisse ses pasteurs, » dirent les hommes qui s'étaient partagé les dépouilles des chanoines; et ces grands briseurs d'images, et ces hommes qui avaient secrètement secondé l'oeuvre des zélateurs se retirèrent les uns après les autres, lorsqu'il fut question de pourvoir aux besoins de l'Eglise régénérée.

À Neuchâtel, il fallut l'intervention de Berne pour que Farel fût défrayé de la dépense qu'il avait faite durant le temps qu'il avait prêché l'Évangile et pour qu'une pension fût enfin assurée aux pasteurs. Les gens des campagnes, fort mécontens de la charge nouvelle qu'on faisait peser sur eux, élevèrent leurs plaintes de toutes parts; mais sans beaucoup de succès. Le Gouverneur adressait les villageois à Messieurs, Messieurs les renvoyaient au Gouverneur, et cependant l'entretien des prêcheurs demeurait aux frais des communes et à ceux des personnes pieuses, qui y pourvoyaient par leurs offrandes et par leurs subventions.

Il est tel pasteur qui, se trouvant dans l'impossibilité de subsister par ce moyen, a dû quitter sa paroisse. À grand' peine a-t-on abandonné aux ministres les presbytères des anciens curés; encore leur laisse-t-on la charge des reconstructions et le soin de l'entretien. À Pontareuse, MM. de Neuchâtel avaient dans les commencemens exigé qu'il fût fait une pension au prédicateur; il lui fut assigné par an deux muids de blé, trois de vin, 30 livres d'orge et 4 livres pour une maison; « ce qui n'était raisonnable, observait-on, vu les grands revenus de la cure de Pontareuse; » mais le pasteur ne reçoit pas même ce qui lui a été assigné. Telle est à ce jour la condition de ceux qui prêchent l'Évangile dans la Principauté. Ils vivent de foi, de piété, et des miettes tombées de la table de ceux qu'ils nourrissent du pain de vie.

Passons à la seconde part de l'héritage des chanoines; nous voulons parler de leur pouvoir et de la place qu'ils occupaient dans les audiences du pays.
Leurs sièges y sont demeurés vacans ; qui les occupera ? Sera-ce le clergé nouveau ? Mais les pasteurs du culte réformé sont pour la plupart des étrangers, des religieux sortis des monastères, pauvres, sans autorité, ignorant les choses du monde et qui se fussent sentis fort déplacés dans une assemblée de juges séculiers et de législateurs. De leur côté, ni le prince, ni les bourgeois n'étaient disposés à relever l'Eglise comme corps indépendant et comme pouvoir entre les pouvoirs de l'État. Des égards, du respect, c'était toute la part qu'ils voulaient faire aux ministres de l'Évangile. Ils leur ont conservé les premières places, qui étaient celles que les chanoines occupaient dans les repas, dans les fêtes et dans les cérémonies. Ils souhaitent de voir la religion redevenir un moyen d'ordre, la conseillère du peuple et la régulatrice de ses moeurs; mais ils se gardent de faire davantage pour elle et de favoriser l'accroissement d'une puissance populaire, rivale de leur propre puissance.

La question de savoir qui héritera de la place laissée vide dans les audiences demeurait donc tout entière, lorsque la seigneurie a pris sur elle d'y répondre. Un jour le Gouverneur et Messire Olivier de Hochherg se présentent devant les États, le Gouverneur tenant le bâton et représentant la personne d'illustre et excellente Dame la princesse de Neuchâtel : « Nobles Seigneurs et Messires, dit-il, pour plusieurs causes Madame a été pressée de tenir les audiences générales et mêmement pour le fait des ecclésiastiques à quoi ni elle, ni Monseigneur le Duc son fils n'ont voulu contrevenir. Et pource qu'il est plus que nécessaire, vu le déplaisir qu'ils ont eu de voir les ecclésiastiques déchassés, d'accomplir le nombre des trois États, ils se sont vus contraints d'y appeler pour quelque temps les quatre banderets de Neuchâtel, de Landeron, de Boudry et de Vau-Travers, et vous prient de ne le vouloir prendre à male part; car ce qui a été fait ne l'a été sinon pour obvier à scandale, et pour que le comte ne demeure dépourvu de justice. »
À quoi les États ont répondu, « que puisqu'ainsi il a plu à Madame et à Monseigneur, attendu les importunités et occurrences de par deçà, de substituer les banderets pour nouvel état, ils laissent la chose ainsi pour cette fois, néanmoins protestent n'y avoir consenti, et que ci-après il ne soit préjudiciable à leurs libertés, usances et droitures, avec ce qu'ils ne se doivent tenir être perpétuel état. Ains Monsieur le Marquis de son autorité absolue l'a voulu de cette façon jusqu'à ce qu'il en soit plus amplement advisé. »
De ce jour donc les hommes du prince, juges et banderets des quatre villes se sont aussi aux sièges des chanoines dans l'assemblée des trois États (2*). n'admettre et de n'envoyer aucun ministre, qu'il n'ait été examiné par les frères de la congrégation, en la présence de la seigneurie et conseigneurie, et de jurer de l'élire fidèlement, sans aucune faveur ni amitié charnelle, ni du pays, n'ayant égard à autre chose qu'à l'honneur de Dieu et au salut des âmes, et aussi de ne laisser prêcher aucun duquel ne puissent rendre raison de sa vie et de sa foi. C'est tout ce que les pasteurs jugent pouvoir accorder à un prince dont la religion n'est pas celle que le pays a embrassée. Ils demandent de leur côté d'être préservés envers et contre tous dans leur bon droit, selon l'équité, et d'être tenus quittes de la main morte à laquelle étaient sujets les curés du pays par le passé. Quant aux biens de l'Eglise, il en a été disposé; il ne leur reste donc plus de voeux à former sur ce qu'ils eussent considéré comme en étant le légitime emploi.

Le différent des pasteurs avec les bourgeois porte sur d'autres points. Les bourgeois sont de la religion réformée; ils ne s'opposent pas à ce que les ministres de l'Évangile soient consacrés par le synode; mais ils voudraient être en droit de choisir leurs pasteurs, de les censurer s'il y a lieu, et de les renvoyer s'ils le trouvent à propos. Ils ne leur refusent point de pouvoir nommer les maîtres d'école. Les parties ne sont point encore d'accord sur la composition des consistoires. Quant au reste, le Conseil et la Communauté de Neuchâtel ont fait, il y aura bientôt deux ans, des ordonnances qu'il nous parait intéressant de donner dans leur entier. Ces ordonnances portent ce qui suit :

« Voulons et statuons par ces présentes que désormais nul de nos ministres n'ait à tenir, dans ses sermons et prêches, paroles, dits et propos, termes, comparaisons, similitudes ou autres cas semblables que facilement il ne puisse montrer par la Parole de Dieu ; autrement lui sera remontré bénignement en Conseil, jusqu'à la troisième fois ; et si icelui voulait persister, tellement qu'il ruine plus qu'édifie, sera par nous toute l'église, sans tumulte, alors avisé par un avis et mûre délibération de lui donner un congé honorable, sans offenser Dieu ni scandaliser notre prochain.

» Item, ordonnons et statuons que pour le présent, nos dits ministres et pasteurs ne s'entremettent à nous introduire la pratique et usage d'excommunication, qu'ils apellent autrement la correction ou discipline de l'Eglise, puisque sur les vices et péchés avons ordonnances et statuts portant punition corporelle et pécuniaire, passée par la seigneurie et conseigneurie, et ce jusqu'a ce que voyions autres églises voisines de notre réformation recevoir la dite discipline ecclésiastique, ou que le Seigneur notre Dieu nous ait plus amplement touché le coeur et fortifiés en la foi de son saint nom, pour icelle recevoir et admettre, autrement leur sera remontré bénignement et puis en user comme dit est, s'ils persévèrent.

» Ordonnons de plus que nos dits ministres ne s'entremettent en rien, sinon en tant que l'Écriture Sainte portera, de la seigneurie et conseigneurie, ains seulement de ce qui procède de leur ministère évangélique.

» Ordonnons en outre et statuons que nos pasteurs dorénavant n'aient à refuser la sainte cène à personne de suffisant âge, et qui de sa foi rende bonne confession, réservé que ce ne fût d'exprès commandement de la seigneurie, ou que dans le personnage n'y eut causes et raisons manifeste, de quoi il fût indigne pour icelle recevoir.
Ce néanmoins par les articles susdits n'entendons aucunement vouloir fermer la bouche de nos ministres en la prédication de la Parole, qu'ils ne puissent ouvertement, sans contredit en leurs sermons et prêches, admonester, reprendre, corriger, crier, blâmer et détester les vices et péchés en général, sans nommer lieux et personnes, et entièrement exercer ce que leur ministère porte, autant que Dieu par son Esprit leur en fera la grâce et qu'ils connaîtront être expédient pour le bien de l'Eglise et la correction des vices. »

Il y aurait bien des observations à faire sur ces ordonnances et sur les rapports dans lesquels entraient l'Eglise et l'État; mais ces observations se développeront plus tard; elles naîtront du simple narré des faits qu'amènera cet ordre de choses. Allons maintenant au peuple et recueillons son jugement sur les conséquences de la révolution.

Le peuple se plaint de ce que pour un pape qu'il avait, il lui en soit arrivé trois : le gouverneur d'abord, qui, depuis qu'il s'est remis de sa frayeur, a mis la main sur les biens du clergé, s'est emparé du pouvoir des chanoines, s'arroge le gouvernement de l'Eglise et parle plus haut qu'autrefois; qui vient de contraindre le corps de la ville à implorer grâce pour les insolences proférées et les méfaits commis dans les jours de la révolution; qui ne veut plus permettre ces assemblées populaires, lesquelles naguères avaient lieu en toute liberté ; qui défend aux paysans de faire des ordonnances et d'imposer des amendes, disant qu'ils ne savent que se les approprier et les boire ; qui enfin, dès qu'on hésite à lui rendre ce qu'il appelle justice parle de se retirer vers MM. de Berne, dont Madame, dit-il fièrement, est aussi la combourgeoise. -

Le second pape au dire du peuple, ce sont MM. les bourgeois de Neuchâtel - ils sont aussi entrés en partage des biens du clergé ; ils veulent aujourd'hui se mettre en tête des églises; ils ont fait leur paix avec la seigneurie enfin ils se sont, depuis la réformation, alliés plus étroitement que jamais avec l'aristocratie de Berne, et ne tiennent aujourd'hui le menu peuple pour grand chose. -
Enfin le peuple aura bientôt un troisième pape dans la personne des pasteurs, qui déjà se mettent à dominer sur les autres, qui leur prescrivent des règles de foi et de culte, les obligent à se conformer à leur manière de sentir et persécutent ceux qui ne s'y soumettent pas aveuglément.

Ainsi parlent et agissent les pasteurs, le peuple, les bourgeois et la seigneurie. Tout bruit, tout gronde encore, comme alors qu'une tempête a bouleversé les champs, transporté des terres fertiles, ruiné plus d'une espérance et emporté dans son cours les bornes des propriétés. Mais comme il arrive aussi après l'orage, tout se meut à la face du sol, tout se déploie, tout fait paraître une activité nouvelle.

La nature se trouve avoir été fécondée et le ciel se tourne vers la terre, dans sa grandeur, dans sa sérénité, dans sa pureté et dans sa paix. Tel du moins se montre aujourd'hui le ciel aux hommes droits de coeur, altérés de justice et avides du pardon de Dieu; de quelque pesans nuages que l'horizon soit encore chargé, ils ont vu par dessus les nues se lever le soleil de gloire. Âmes chrétiennes, j'en appelle à votre témoignage, le jour où vous l'avez vu se lever n'a-t-il pas été votre beau jour ?


Table des matières

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1* On nous raconte que le nonce du pape a réussi à inquiéter la Dame de Neuchâtel dans la possession des biens de l'Eglise et à alarmer sa conscience, ensorte que par un traité elle s'est engagée : 1° à rendre à l'Eglise tous ses biens, au cas du rétablissement de la religion romaine à Neuchâtel; 2° à donner en attendant sur ses biens une rente annuelle dé 12,000 francs (?) au souverain Pontife.
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2* Étaient assistans, jugeans et connaissans, les magnifiques, nobles et sages Seigneurs Claude de Bellegarde, lieutenant de Valangin; Claude de Neuchâtel, seigneur de Vaumarcus; Jean Jaq. de Watteville, seigneur Didier de Diesse, seigneur de Champey; Guillaume Regnaud, neveu de Mademoiselle de Belles-Vaux; Jaques de Galéat, pour Marc De Pierre; Claude Des Murs, mari de la Demoiselle de Bariscourt; Pétrement de Gléresse, lié de Bariscourt par sa mère; Sifrid Forbourguer, moine de Delémont, mari de l'une des demoiselles du dit Bariscourt; Claude Du Terreau du Vau-Travers ; François de Treytorrens; Ame Du Terreau pour le grand Jaques ; Rochius de Diesbach ; George de Rolle et Wolfgang Stölli, ces deux derniers de Soleure; Rodolphe de Gleresse pour le S. official de Besançon Gruyère; Pierre Valier, maître d'hôtel de Monseigneur le Duc de Longueville; Jean Merveilleux, châtelain de Thièle; tous de la noblesse. - Pierre Chambrier, receveur et maire de Neuchâtel; G. Valier, châtelain du Landeron; CI. Baillod, châtelain du Vau-Travers; II. Vouga, châtelain de Boudry, J. Barillet, commissaire pour le second état. - Et Jean Lando, commissaire; André George dit Mazelier; Blaise Esmonets, J. de Cornaux; J. Vuillamoz, conseiller de Neuchâtel; G. Merveilleux, banderet de Neuchâtel; G - Gibert, banderet de Landeron; Pierre Favre, banderet de Boudry et Antoine du Bied, banderet du Vau-Travers , pour le tiers-état.


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Noms propres de cette page:
 
Alcoran - Allemagne - Anabaptistes - André - Antoine -

Baillod - Balard - Barillet - Bariscourt - Bellegarde - Berne - Besançon - Bied - Blaise - Bonmont - Bordon - Boudry - Bure -

Cananéennes - Chambrier - Champey - Chapeaurouge - Chapuis - Châteauneuf - Claude - Cornaux - Cornibus - Curtet -

Delémont - Dolens -

Empereur - Esmonets -

Farel - Favre - Fontaine - Forbourguer - François - Franconie - Frankhuisen - Furbity -

Galéat - Gédéon - Genève - George - Germain - Gervais - Gibert - Gingins - Gléresse - Gruyère - Guillaume - Guy -

Hochherg -

Jaques - Jean - Jésus -

Lambert - Landeron - Lando - Lausanne - Longueville - Lorraine - Luther - Lyon -

Marc - Mazelier - Muncer -

Necker - Neuchâtel - Neuchâtelois -

Paris - Peney - Pétrement - Philistins - Pontareuse - Pontife -

Regnaud - Richard - Richardet - Rive - Rochius - Rodolphe - Rolle - Romand - Roset -

Savoie - Sifrid - Sorbonne - Stölli -

Terreau - Thièle - Treytorrens - Turcs -

Valangin - Valier - Vau - Vaumarcus - Vaux - Vellut - Vouga - Vuarier -

Vuillamoz - Watteville - Wolfgang - Worms -

 

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