Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



LA FORCE DE LA VÉRITÉ.

DEUXIÈME PARTIE. (Suite 2 )


Après avoir avancé de la sorte dans la connaissance de la vérité, je me rapprochai de M. Newton. Nos relations, avaient presque entièrement cessé, dès l'interruption qui eut lieu dans notre correspondance, c'est-à-dire, depuis décembre 1775 jusqu'en avril 1777. À parler franchement, je me souciais fort peu de son amitié; je ne pouvais souffrir qu'il fût mon directeur ; et je ne voulais pas que le monde nous crût unis en aucune manière. Mais j'eus occasion de recourir à lui dans de pénibles circonstances ; et ses pieuses conversations me fortifièrent et m'édifièrent tellement, que je m'attachai à sa personne. Dès ce moment, je fus intérieurement satisfait de l'avoir pour mon ami, quoique je ne trouvasse pas alors le même plaisir que je trouve aujourd'hui à lui donner ce titre. En me rapprochant de lui, je n'étais pas dans le dessein de lui demander des instructions sur la doctrine. Craignant d'être surpris dans sa compagnie, j'allais le voir de temps en temps à la dérobée. Je l'entendis une fois prononcer un discours ; mais sa prédication me parut encore une folie, parce qu'elle roulait principalement sur les expériences chrétiennes et sur quelques détails auxquels j'étais étranger ; ensorte que, tout en aimant et en estimant sa personne, je le croyais encore égaré par l'enthousiasme ; et je soutenais fortement que nous ne pourrions penser de la même manière que dans le ciel.

À mesure que j'acquérais de nouvelles lumières sur ces doctrines, les inquiétudes que j'éprouvais sur ma réputation allaient en croissant. Je me voyais toujours pencher davantage vers le système que le monde appelle Méthodisme, et je ne pouvais l'éviter sans aller contre ma conscience ; car j'avais pris la ferme résolution de chercher sincèrement la vérité, et de l'embrasser partout où je pourrais la découvrir, sans écouter aucune considération mondaine. Soutenu par le Seigneur et par le sentiment que j'avais agi avec intégrité, j'avais vu, avec résignation, et même avec joie, s'évanouir la perspective de mon futur avancement. Cependant, je n'oserais assurer que mon orgueil ne tirât pas quelque consolation du vain espoir que ma réputation ne serait pas perdue ; car la soif des louanges l'emportait en moi sur celle de l'or. J'avais toujours entendu représenter les Méthodistes comme des gens ignorans et abusés, et quelquefois comme des fanatiques furieux ; et, en m'applaudissant moi-même de la supériorité de mon jugement, je les avais jusqu'alors méprisés comme de misérables enthousiastes. Aussi je commençais alors à craindre que la censure ne se dirigeât contre moi-même, si je professais leur doctrine. Dès-lors je ne devais plus être considéré comme un homme d'un jugement sain, et je devais passer pour être de ces gens dont la tête, naturellement faible, a été tournée par les études religieuses, et qui, tombés dans l'enthousiasme, ne sont plus que des fous on des frénétiques.

Cette épreuve fut la plus terrible de toutes celles que j'eus à supporter ; car je n'avais pas encore appris que nous sommes heureux quand on nous insulte pour le nom de Christ. Je ne me souvenais pas que les Apôtres ont été aussi regardés comme fous pour l'amour de lui ; qu'ils ont été considérés comme ayant perdu le sens ; qu'ils ont été les objets de la calomnie comme de la bonne renommée ; qu'ils ont été traités de séducteurs, quoiqu'ils ne dissent que la vérité ; que partout ils ont été décriés et méprisés comme des hommes qui troublaient les peuples, comme de vains discoureurs, comme les balayures du monde et le rebut de la terre.

Je ne considérais pas que Jésus lui-même, la splendeur de la gloire du Père, et l'image empreinte de sa personne, Jésus, la parole et la sagesse de Dieu, Jésus, qui allait de lieu en lieu faisant du bien, qui parlait comme aucun homme n'a jamais parlé, a été rejeté et méprisé comme ne méritant pas même d'être entendu, comme étant possédé du Diable, et ligué avec lui, comme un samaritain, un frénétique, un blasphémateur, un démon.

Mon esprit ne comprenait pas encore ces déclarations positives :
« Si vous étiez du monde, le monde vous aimerait ; mais parce que vous n'êtes pas du monde, et que je vous ai choisis d'entre le monde, c'est pour cela que le monde vous hait. Souvenez-vous de la parole que je vous ai dite : le serviteur n'est pas plus grand que son maître ; s'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront aussi (Jean XV. 19.)
Le disciple n'est pas au-dessus de son maître, ni le serviteur au-dessus de son Seigneur. S'ils ont appelé le Maître de la maison Belzébut, combien plus donneront-ils ce nom à ses domestiques ? ( Matth. X : 24. 25. ).
Vous serez heureux, lorsqu'à mon sujet on vous chargera d'injures, qu'on vous persécutera, et qu'on dira faussement de vous toute sorte de mal : réjouissez-vous alors, et faites éclater votre joie, parce qu'une grande récompense vous attend dans le ciel ; car c'est ainsi qu'on a persécuté les Prophètes qui ont été avant vous (Matth. V. 11. 12.). Et c'est ainsi que tous ceux qui veulent vivre selon la piété en Jésus-Christ seront persécutés. » (2. Tim. III. 12).

Quand je formai la résolution de chercher la vérité, je n'avais pas prévu ces conséquences ; j'étais semblable en cela à un homme qui a commencé à bâtir sans calculer les frais de son entreprise ; aussi je fus bien troublé, lors que je vis l'idole favorite de mon coeur, ma réputation, exposée à un danger imminent.
On comprend sans peine que cette crainte m'empêchait de recevoir à la légère, pour importantes et pour vraies, des doctrines qui devaient sûrement me nuire, et qu'elle me rendait très-circonspect sur la manière de les prêcher.

La lutte fût, en général, opiniâtre ; mais Dieu me donna la force de demeurer fidèle.
« La nécessité m'en est imposée, et malheur a moi, si je ne prêche l'Évangile. »
Telles étaient les paroles ordinairement présentes à mon esprit, lorsque j'écrivais mes sermons, et que je montais en chaire pour les prêcher. J'avais secrètement résolu, pour me soustraire à l'opprobre, d'être plus considéré, lorsqu'une déclaration hardie de mes sentimens, et une exhortation vive, adressée aux consciences, m'attireraient des reproches, et me mettraient en butte à la calomnie. Mais, quand ce moment fut venu, ma conscience ne me permit pas de cacher rien de ce que je croyais vrai et utile. Tout en accomplissant, au milieu de vives inquiétudes, la mission qui m'était confiée, j'avais soin d'accuser d'enthousiasme ceux qui prêchaient les doctrines que je n'avais pas encore reçues, afin de moins blesser mes auditeurs, et de me mettre moi-même à couvert de l'accusation de Méthodisme. D'un autre côté, le grand désir que j'avais de conserver ma réputation animait beaucoup mes prières, et me rendait plus attentif dans l'examen des Écritures ; car je voulais bien m'assurer que je ne sacrifiais pas mon honneur à la profession publique de « fables inventées avec art. »

Dans cette disposition d'esprit, que l'expérience, mieux que toutes les descriptions qu'on en pourrait faire, fait comprendre, je lus l'Essai de M. Venn sur la prophétie de Zacharie ( Luc 1. 67 -79). Je n'ignorais pas le peu d'estime qu'on en fait dans le monde ; aussi je ne mis pas beaucoup d'empressement à le lire, et ne m'attendis pas à en recueillir un grand fruit. Toutefois, les sujets intéressans qu'il y traite fixèrent mon attention ; en sorte que je le lus d'une manière très-réfléchie, et avec quelque impartialité. J'y désapprouvais beaucoup de choses ; mais l'importance et la vérité de plusieurs autres frappèrent mon esprit et ma conscience. J'y trouvai quelques mots sur ma fausse honte et sur les précautions insensées que je prenais pour ménager ma réputation. Ils firent une profonde impression sur mon coeur :

« Si l'esprit de mondanité, d'orgueil, d'indolence relativement au salut des âmes, et d'indifférence envers Christ, n'est pas odieux au Seigneur, et souverainement, funeste aux hommes, l'Évangile est faux. Avez-vous donc en horreur la pensée blasphématoire que la parole de Dieu n'est qu'une vaine fable ? Eh bien, vous devez également avoir en horreur de cajoler Christ, chaque jour, dans votre cabinet ; de l'appeler là votre Seigneur, votre Dieu, votre bon Sauveur, votre ami, et d'en sortir ensuite pour entrer en accommodement avec le monde, et demander aux enfans du siècle jusqu'à quel point ils vous permettront d'obéir aux ordres précis de votre maître, sans vous appeler Méthodiste. Cessez de témoigner extérieurement une fausse fidélité envers Christ, plutôt que de le traiter avec autant de mépris, tout en faisant profession de l'honorer. Plût à Dieu, dit-il à l'Ange de l'Eglise de Laodicée, que tu fusses froid ou bouillant ; mais parce que tu es tiède, et que tu n'es ni froid ni bouillant, je te vomirai de 'ma bouche. »

Il eût été aussi difficile de me persuader que le St.-Esprit n'était pas dans mon âme, lorsque je lus ces paroles, que de me prouver qu'il n'y a pas de Saint-Esprit. Elles parlèrent si fortement à mon coeur, qu'elles m'élevèrent au-dessus du monde, et me procurèrent cette victoire que la foi seule donne ; cette liberté qui accompagne ordinairement la présence de l'Esprit du Seigneur. Je fus enfin confus de mon ingratitude et de ma ridicule timidité, et rempli de consolation et de joie, à la vue du sacrifice que j'allais faire de ma réputation, et de l'opprobre auquel j'allais être exposé. Dès-lors, à l'exception de quelques momens d'incrédulité, je ne me suis point mis en souci de ce qu'on pourrait m'appeler enthousiaste ou Méthodiste.

Mais, délivré de la crainte de me voir en butte à des insultes non méritées, je continuai à redouter l'enthousiasme réel et je devins toujours plus ennemi de tout ce qui peut justement porter ce nom ; ensorte que plus mes opinions se rapprochaient de celles que je regardais injustement autrefois comme le fruit de l'enthousiasme, plus j'appréhendais que mon zèle et mon caractère ardent ne me jetassent dans des erreurs. Je ne pouvais, me délivrer de cette crainte qu'en m'attachant plus étroitement à la parole de Dieu et en priant le Seigneur avec zèle de me préserver de toute illusion, et de m'apprendre à discerner les vérités de sa parole des inventions de l'homme, des imaginations de mon coeur et des séductions de l'esprit de mensonge.

La doctrine de trois personnes égales dans l'unité divine n'entrait pas encore dans ma profession de foi. Je méprisais le grand mystère de piété. Je blâmai d'abord les articles de notre liturgie relatifs à cette doctrine, et, à cause des objections que me présentait ma raison téméraire, je finis par les rejeter. Mais, en 1777, je commençai à concevoir des doutes sur la solidité de mes opinions, et sur l'hypothèse du docteur Clarke. Je venais de lire l'Apologie de Lindsey, et les prières qui la suivirent. Avant de connaître ces traités, j'avais tourné en ridicule les personnes qui prétendaient réfuter Clarke., et j'avais même songé à défendre son système. Mais quand je vis que Lindsey accusait hautement ce docteur de Socialisme, ma surprise fut extrême, et je résolus d'examiner le sujet avec plus de soin. Il s'éleva alors, pour la première fois dans mon esprit, de fortes objections contre mes propres idées, et j'aperçus avec étonnement que j'étais incapable de défendre mon système. La conviction et l'orgueil se disputèrent opiniâtrement la victoire. D'un côté, je ne voulais, à aucun prix, devenir Trinitaire dans le sens strict de ce mot (car dans mon propre sens j'avais pendant quelque temps prétendu l'être) ; de l'autre, plus je considérais mes opinions, plus j'en étais mécontent.

Jusqu'alors j'avais caché à M. Newton mes sentimens à cet égard ; mais mon estime pour lui s'étant beaucoup accrue, je désirais m'entretenir avec lui sur ce sujet. En général, j'avais tâché d'acquérir la connaissance des vérités religieuses, recourir à ses instructions mais sachant que son opinion sur la Trinité était celle que l'Eglise avait reçue dans les premiers siècles, tandis qu'elle avait toujours condamné, comme une hérésie, celle que j'admettais, je cherchai à profiter des lumières qu'il avait sur cette importante doctrine. Dans l'anxiété que me causaient mes doutes, je m'adressai fréquemment au Seigneur, et je le suppliai de me faire connaître la vérité.

Enfin, après de longues méditations, et un examen attentif des Écritures, je reconnus que mes anciennes opinions étaient tout-à-fait insoutenables, et j'y renonçai pour embrasser un dogme que j'avais long-temps méprisé. Je vis, et je ne pus m'empêcher de voir, que les perfections, les charges et les oeuvres attribuées, dans l'Écriture, au Fils et au Saint-Esprit, ne pouvaient appartenir qu'à Dieu. J'aperçus qu'il y avait une contradiction manifeste à nier que Jésus-Christ fût le vrai Dieu, lorsqu'on croyait à la satisfaction réelle et infinie qu'il a offerte par sa mort à la justice divine.
Je compris également que le Saint-Esprit ne pouvait être, pour les croyans, la source de la vie spirituelle, et habiter dans leur coeur, pour les régénérer, les éclairer, les convaincre, les sanctifier ou les consoler, sans être le Dieu Tout-Puissant, Tout-Sage, présent en tous lieux. Convaincu, d'un autre côté, par la raison et par l'Écriture, qu'il n'y a et ne peut y avoir qu'un seul Dieu, et sentant que Dieu peut seul connaître pleinement le mode de son existence, et les mystères impénétrables de sa nature, j'adoptai enfin la doctrine de la Trinité, telle qu'elle est révélée dans l'Écriture sainte. Une raison moins importante, qui contribua à me la faire recevoir, c'est qu'il la fallait nécessairement pour mettre de l'harmonie dans mon système. Cependant, toutes les difficultés que j'avais rencontrées sur ce sujet ne disparurent que long-temps après.

J'avais eu, jusqu'alors, de fortes préventions contre M. Hervey ; tout en reconnaissant son éminente piété, et en goûtant quelques-unes de ses méditations je le regardais comme un enthousiaste en fait de doctrine, et ce préjugé m'avait ôté le désir de connaître ses autres écrits. En juillet 1777, j'ouvris heureusement ses dialogues intitulés Theron et Aspasio, et le premier passage qui se présenta à moi m'enchanta et m'engagea à lire tout l'ouvrage avec une attention extraordinaire. Je le lus deux fois d'un bout à l'autre, et, à mesure que je rencontrais des choses contraires à mes sentimens, je priais Dieu de me faire connaître si j'étais dans l'erreur. Il daigna exaucer mes prières ; et, quoique je différasse, en quelques points, de M. Hervey, comme j'en diffère encore aujourd'hui, les preuves et les explications qu'il présente servirent à la fois à me convaincre de la chute de l'homme et de son état de misère, et à m'instruire sur la manière dont le croyant est justifié devant Dieu. La description animée de la partie de chasse, et l'heureuse application qu'il en fait, m'éclairèrent beaucoup plus sur ce sujet que tout ce que j'avais lu jusqu'alors.

J'avais donc enfin adopté la plupart des doctrines que je crois et que je prêche actuellement, à l'exception de l'élection personnelle et des vérités qui y sont liées intimément. Elles m'étaient encore une folie, et je déclarai même à M. Newton, en août 1777, que j'étais assuré de ne jamais admettre ses sentimens à cet égard. Il me répondit qu'il n'avait point voulu m'en entretenir le premier, vu que nous étions maintenant d'accord sur toutes les vérités qu'il jugeait absolument nécessaires au salut ; mais qu'il ne doutait nullement que je ne devinsse bientôt Calviniste, parce que je reconnaîtrais que, sans l'élection, mon système demeurerait incomplet et incohérent. Après avoir été obligé de reconnaître mes erreurs sur tant d'articles, à l'égard desquels je me croyais autrefois dans la vérité, je commençai à me défier de moi-même touchant ceux sur lesquels je différais des Chrétiens de ma connaissance. Cette disposition ne me portait pas à adopter aveuglément leurs opinions sur leur simple autorité, mais à les examiner avec plus de soin, et à prier Dieu de me préserver de l'erreur.

Dans le même temps, je fus plus fréquemment consulté par des personnes qui étaient fort alarmées touchant l'état de leur âme. Je mettais le plus vif intérêt à cette nouvelle occupation. Touché de leurs doutes et de leurs peines, le désirais sincèrement les bien dissiper, et leur fournir de solides consolations ; mais je n'avais à leur offrir que des conseils, qui, loin de les rassurer, ne faisaient qu'augmenter leurs angoisses. Dans cette position embarrassante, je priai ardemment le Seigneur de me donner lui-même les moyens de les consoler efficacement.
Dans ces circonstances, je lus l'Économie des deux Alliances, de Witsius ; je remarquai l'usage qu'il fait de la doctrine de l'élection, et je conclus que si cette doctrine était vraie, elle fournirait à ces fidèles les encouragemens solides dont ils avaient besoin. Sortis de leur ignorance, et sentant combien étaient vaines les formalités dont s'étaient contentés jusqu'alors, ou bien, arrachés à une impiété ouverte et à une conduite vicieuse, ou enfin, tirés d'une profonde indifférence sur la religion, ils avaient été amenés à s'occuper de leur salut avec sollicitude et ardeur. Ils paraissaient maintenant avoir une foi sincère et véritable ; ils désiraient rester appuyés sur le sacrifice et les mérites du Seigneur ; mais, alarmés de leur faiblesse et de leur malice, ils craignaient de succomber encore aux séductions du monde et aux tentations de Satan, et tremblaient d'être entraînés de nouveau dans la carrière du péché. Si leurs dispositions actuelles étaient sincères, elles étaient l'aurore de la grâce ; elles étaient l'effet du dessein arrêté de Dieu ; et, la nature entièrement libre et gratuite de ce don qu'ils avaient reçu pendant qu'ils étaient dans un état de rébellion contre lui, l'immutabilité de ses desseins, et la fidélité de ses promesses, étaient des gages assurés qu'il achèverait en eux la bonne oeuvre qu'il avait commencée, et les garderait puissamment par la foi, pour leur faire obtenir le salut.

Découvrant l'usage qu'on pouvait faire de cette doctrine, après l'avoir auparavant considérée comme inutile, et même comme pernicieuse, j'examinai les objections que j'avais élevées contre elle. Je commençai à l'envisager comme un mystère que la raison de l'homme ne peut comprendre, et qu'elle ne doit pas sonder avec trop de curiosité, mais. que la foi doit recevoir humblement, sur le témoignage de la parole infaillible de Dieu. Je me vis ainsi contraint de laisser non résolues plusieurs de mes objections, ou de les résoudre par la considération de la nature incompréhensible de Dieu, dont les desseins sont impénétrables ; de sa souveraineté, en vertu de laquelle il est le maître absolu de ses créatures, et ne rend compte de ses actions à personne ; et enfin, par lés déclarations de sa parole, qui nous enseigne que ses pensées et ses voies sont autant au-dessus des nôtres que les cieux sont au-dessus de la terre.

Ici, j'abandonnai le sujet, intimément persuadé que la connaissance de ce mystère surpassait infiniment la portée de mon intelligence, et que, puisque Dieu l'avait révélé, ce n'était pas à moi à contester avec lui. Je sais qu'une pareille soumission ne satisfait pas l'orgueilleuse curiosité de l'homme, qui voudrait connaître autant que Dieu, et qui ose même critiquer les oeuvres de son Créateur. Moi-même J'ai de la peine quelquefois à me contenter de cette solution. mais certes, il nous sied bien mieux, à nous créatures dont l'entendement est si limité, de nous soumettre aux déclarations précises que le Dieu Tout-Sage nous fait dans sa parole, que de l'accuser de mensonge par notre incrédulité ; et c'est aussi ce que l'Écriture sainte exige positivement de nous, car notre Seigneur déclare « que si nous ne recevons le royaume de Dieu comme de petits enfans, nous n'y entrerons point. » Le jour viendra où toutes les objections seront résolues. « Ici nous marchons par la foi. Nous ne connaissons qu'en partie et nous voyons à travers un verre obscur mais alors nous verrons face à face, et nous connaîtrons comme nous avons été connus. »

Espérant donc de trouver, dans ce monde de lumière, l'éclaircissement de toutes ces difficultés métaphysiques, je commençai à examiner les abus de cette doctrine, car ils m'avaient toujours paru une des objections les plus formidables. Mais je reconnus bientôt que, si des hommes impies, couverts du masque de la piété, tournent quelquefois la grâce de Dieu en dissolution, il est cependant possible d'exposer la doctrine de l'élection de telle manière que les pécheurs ne puissent pas en abuser, sans être réprouvés par leur conscience, et sans dévoiler eux-mêmes leur hypocrisie. Je craignis d'abord qu'elle ne troublât l'esprit du petit nombre de mes auditeurs bien disposés ; mais je vis que je pourrais prévenir, en grande partie, cet inconvénient, en l'exposant avec circonspection, et surtout en dissipant, par les promesses générales faites à tous ceux qui croient, les craintes que cette doctrine pourrait inspirer aux fidèles. D'ailleurs, pour de telles personnes, une conférence privée ne manquerait pas de les satisfaire, et leur montrerait les consolations qu'elles peuvent en retirer ; et quant à celles qui vivent dans un état d'impénitence, l'élection les effrayerait : or, c'est là le grand but de la prédication.

Il me restait donc uniquement à résoudre cette grande question : Cette vérité est-elle dans la Bible ? Jusqu'alors j'avais opiniâtrement négligé de méditer les parties des Écritures qui en parlent expressément, ou je m'étais efforcé de leur donner un sens différent de celui qu ! elles présentent. Je me mis donc à les examiner et à implorer les lumières du Saint-Esprit ; et bientôt je reconnus que mes anciennes opinions étaient insoutenables, et qu'en dépit de toutes les explications subtiles que je faisais de ces parties de nos saints Livres, et de toutes les peines que je prenais pour en tordre le sens, elles contenaient la prédestination, l'élection et la persévérance finale des saints.

Je reconnus que ces grands dogmes, décrédités de nos jours, étaient universellement reçus par nos vénérables Réformateurs ; qu'ils étaient, à l'époque de la réforme, admis dans toutes les confessions de foi, et dans tous les catéchismes des Églises Protestantes ; et en particulier dans nos Articles et dans nos Homélies.

Je vis qu'après un mur examen, un grand nombre d'hommes sages et profonds les avaient adoptés, non-seulement comme vrais et comme utiles, mais encore comme des articles de foi que devaient recevoir nécessairement ceux qui se jugeaient appelés aux fonctions du saint ministère.

Je m'aperçus aussi que, sans ces doctrines, mou système religieux demeurait incomplet. En effet, je croyais que les hommes, nés dans le péché, enfans de colère par nature, ennemis de Dieu par leurs mauvaises actions, impies et sans force par eux-mêmes, sont sauvés par pure grâce ; je croyais que cette grâce non méritée leur est accordée uniquement en vertu de l'obéissance de Jésus-Christ, laquelle ils embrassent par la foi, qui est un don et une oeuvre de l'Esprit-Saint ; je croyais enfin, qu'en conséquence de cette grâce, ils sont nés de Dieu, réformés à son image, par la puissance de son Esprit, et créés de nouveau pour les bonnes oeuvres. C'est pourquoi il me vint dans l'esprit de chercher de quelle source étaient originairement découlées ces précieuses bénédictions, gratuitement répandues sur les pécheurs. Je fus ainsi conduit de la considération des effets à celle de la cause, et des promesses faites à l'homme déchu au dessein qui avait engagé Dieu à les lui faire ; je fus appelé à méditer sur sa toute-science, son immutabilité, son éternité, et sur la manifestation de ses glorieux attributs, manifestation qu'il s'est toujours proposée dans toutes ses oeuvres ; et je compris que, « toutes les oeuvres de Dieu lui étant connues de toute éternité, » la rédemption devait être aussi l'accomplissement du dessein éternel qu'il avait formé d'exalter sa grâce et sa miséricorde, en même temps que sa justice et sa sainteté.

Il me parut qu'il s'était proposé de manifester sa sagesse infiniment variée, en glorifiant à la fois toutes les perfections qu'il paraissait impossible de concilier entr'elles. En effet, avant que la chute de l'homme et sa rédemption eussent fait éclater la miséricorde divine, cette perfection, autant que nous en pouvons juger, n'avait point été mise en évidence, et n'était connue que de Dieu seul. Il n'eût donc pu la faire briller, s'il n'eût choisi des objets sur lesquels elle pût s'exercer, et s'il n'eût mis en oeuvre quelque moyen de la manifester, en exaltant ses autres attributs. Mais, tous les hommes ayant transgressé la loi divine et étant déchus de la gloire de Dieu ; aucun d'eux n'étant disposé de lui-même à embrasser le salut que Dieu lui offre par Jésus-Christ, ou seulement à s'en occuper, je fus convaincu que la miséricorde seule de Dieu avait pu le porter à choisir un certain nombre de pécheurs parmi les hommes déchus, pour en faire les objets de son amour, et que son bon plaisir et sa volonté souveraine sont les seules raisons pour lesquelles il élit l'un plutôt que l'autre. Je vis que le salut est entièrement l'oeuvre de Dieu ; que sa sagesse en a conçu le plan ; que son amour et sa puissance ont pourvu, dans la personne, dans les offices et dans l'oeuvre de Jésus-Christ, à tout ce qui est nécessaire pour l'opérer ; que sa providence, pour appeler ceux qu'elle avait choisis, a veillé à ce que l'Évangile fût prêché partout ; et que son Saint-Esprit seul incline et dispose leur âme à accepter ce salut par la foi. De-là, je conclus que Dieu, qui peut faire ce qu'il veut de ses créatures, parce qu'aucune d'elles ne mérite rien,
« nous a élus (chaque fidèle individuellement) en Christ, avant la fondation du monde, afin que nous fussions saints et irrépréhensibles devant lui en charité ; nous ayant prédestinés pour nous adopter à lui par Jésus-Christ, selon le bon plaisir de sa volonté, à la louange de la gloire de sa grâce, par laquelle il nous a rendus agréables en son Bien-aimé. » (Eph. I. 4-6.)

En un mot, malgré mes nombreuses objections, ma longue résistance et ma grande anxiété, je fus enfin convaincu, par la parole de Dieu et par mes propres méditations, de la vérité de ces doctrines. Dieu sait avec quelle agitation et quelle crainte, après les avoir méprisées jusqu'alors, je leur accordai une place dans ma confession de foi.

À Noël 1777, je commençai à les exposer avec circonspection, pour la consolation de pauvres fidèles dont l'âme était timorée. Alors, je ne les croyais propres qu'à cet usage ; mais je vois maintenant qu'elles sont intimement liées à toutes les parties du système évangélique. Dès-lors, j'ai continué de les professer, en me renfermant dans les limites de la parole de Dieu, ne voulant pas m'élever, par mes propres raisonnemens, à des choses qu'elle n'a point révélées.
Ici je dois dire que, bien que je les croie fermement, et que je les regarde comme absolument nécessaires à mon système, soit pour bien m'acquitter de mes fonctions pastorales, soit pour me consoler et me rassurer contre les séductions de mon coeur, contre les illusions du monde, et contre les pièges d'un méchant et rusé séducteur, je suis loin de leur donner la même importance qu'à celles dont j'ai déjà parlé. Je puis aisément concevoir qu'un chrétien humble, pieux et spirituel, puisse être entièrement étranger à ces doctrines, ou même ne les pas recevoir, parce que, faute de lumière, il en redoute les conséquences. Mais j'ai peine à concevoir qu'un homme qui se dit chrétien puisse méconnaître son état de chute, la corruption de son coeur, son éloignement naturel de Dieu, et les souillures qui entachent ses meilleures actions : j'ai peine à concevoir qu'il puisse chercher, en tout ou en partie, sa justification et son pardon en autre chose que dans le sang et la justice du Dieu Sauveur, manifesté en chair ; et espérer parvenir à l'héritage des saints dans la lumière, par une autre voie que par la régénération et la sanctification, qui sont opérées par la vertu du Saint-Esprit.

En novembre 1777, un ami m'envoya un nombre considérable de livres composés, la plupart, par d'anciens théologiens, les uns Dissidens, les autres membres de l'Eglise Anglicane. La lecture de ces ouvrages me convainquit de plus en plus que les doctrines taxées aujourd'hui d'innovations, et attribuées aux Méthodistes, étaient alors des vérités généralement connues et adoptées, et que le système que je n'avais voulu apprendre d'aucun homme, et que je ne m'étais formé qu'après trois ans de travaux et de sollicitudes, était universellement reçu à l'époque de la Réformation.
Je ne m'étonne pas que les membres de l'Église Anglicane aient, en général, une grande prévention contre les écrits des Dissidens, car moi-même je l'ai éprouvée à un degré extrême ; et nous la suçons tous avec le lait de nos mères. Cependant, tout ami sincère de la vérité doit en redouter l'influence, et faire tous ses efforts pour la rejeter. Comment, en effet, pourrions-nous savoir où est la vérité, si nous refusions d'examiner les deux partis ? Tous ceux qui connaissent l'histoire de notre Église savent que, jusqu'au règne de Jacques 1er, il n'y eut point de controverse touchant la doctrine, entre les Chrétiens qu'on nomma dans la suite Puritains, et l'Église établie.

Après l'introduction de l'Arminianisme, ceux qui restèrent fidèles à la doctrine des Réformateurs, et en particulier à celle de Calvin, furent appelés Puritains. Jusqu'alors, tous nos écrivains ecclésiastiques avaient été Calvinistes ; et même, après l'époque dont je viens de parler, plusieurs docteurs de l'Eglise Anglicane s'opposèrent à ces innovations, et continuèrent à professer la doctrine évangélique telle que je l'ai exposée. Il suffira de citer entr'autres les ouvrages du docteur Reynolds, et ceux de l'Évêque Hall, et en particulier, l'excellent ouvrage de ce dernier auteur, qui a pour titre : Contemplation de la vie de Jésus. Il n'est aucun partisan de l'Église Anglicane qui puisse élever d'objections raisonnables contre ces deux docteurs : or, en général, Je n'enseigne rien qu'ils n'aient clairement enseigné avant moi.

Les traits principaux de mon système étaient déjà formés ; mais les recherches auxquelles je m'étais livré sur la doctrine, m'avaient tellement occupé, que j'avais négligé l'étude de mon propre coeur, et que je connaissais à peine, par expérience, les vérités que je venais d'admettre. Mon orgueil, et la vaine pensée que j'avais un esprit supérieur, exerçaient encore sur moi une grande influence. Jusqu'alors, persuadé qu'il n'y avait, dans tout le cercle de mes connaissances, personne qui fût capable de me donner les instructions dont j'avais besoin, je n'avais pas été entendre les prédicateurs de mon voisinage. Mais considérant enfin que M. Newton m'avait précédé dans la connaissance de la vérité, je compris qu'il devait posséder, sur ces doctrines, dont il faisait depuis long-temps l'objet de sa prédication, des connaissances que je n'avais pas encore. En conséquence, je résolus de suivre ses prédications et celles de quelques autres ministres ; mais je ne pus me dépouiller entièrement de toutes mes préventions, et j'assistai à leurs discours, autant avec les dispositions d'un juge qu'avec celles d'un écolier. J'en reconnus bientôt l'avantage, car j'y vis dévoiler les secrets de mon coeur ; et je m'en retournais rarement sans avoir acquis une connaissance plus étendue de mes défauts, de mes faiblesses et de mes besoins, sans avoir une moindre opinion de moi-même, sans avoir trouvé de nouveaux motifs de prier et de veiller. J'appris en même temps l'usage l'usage qu'on pouvait faire des expériences chrétiennes dans la prédication, et je fus convaincu que le meilleur moyen d'émouvoir les coeurs était de parler d'après ce qu'on avait éprouvé soi-même. Je sentis de plus en plus le besoin que j'avais d'instruction, et je m'aperçus que je n'étais encore qu'aux premiers élémens de la science du salut. Je commençai à comprendre, par expérience, le sens de ces paroles du Sauveur
« Si vous ne recevez le royaume de Dieu comme de petits enfans, vous n'y entrerez point..»
Car, quoique mon coeur se révoltât souvent, et que ma présomption s'efforçât d'édifier de nouveau son ancienne Babel, je priais Dieu continuellement, et je le prie encore, d'abattre mon orgueil, et de me rendre un petit enfant, humblement assis aux pieds de son maître, pour en écouter les paroles avec empressement et avec docilité. Dès ce moment, j'ai pu regarder, comme des pères et de précieux conseillers, ceux dont les années et l'expérience ont mûri les connaissances ; je pus goûter leur compagnie, apprécier leurs avis, et suivre avec plaisir leurs prédications.
Ainsi, cet édifice d'erreurs que j'avais fondé s'écroulait, et le nouveau, bâti par la main de Dieu, commençait à s'élever.
« Les choses vieilles passaient : toutes choses devenaient nouvelles. Tout ce que j'avais regardé comme un gain, je l'estimais actuellement une perte. »

Je reconnus que ma raison avait été pour moi un conducteur aveugle, jusqu'au moment où mon coeur fut humilié, éclairé et sanctifié par le Saint-Esprit ; je reconnus que toute ma sagesse n'était que folie et mon prétendu savoir qu'une véritable ignorance. Depuis ce temps, tout ce que j'ai éprouvé, tout ce que j'ai lu ou entendu, tout ce que j'ai observé autour de moi, m'a affermi dans ces doctrines. Je ne doute pas plus maintenant, qu'elles ne viennent de Dieu, que je doute que le soleil m'éclaire et me réchauffe, quand je vois sa lumière et que j'éprouve la salutaire influence de ses rayons. Je vois tous les jours les grands effets qu'elles produisent sur ceux à qui je les prêche, et moi-même j'en goûte constamment les bons fruits. En les méditant, « en me glorifiant en la croix de Christ, j'éprouve que le monde m'est crucifié, et que je suis crucifié au monde. » Je vois que quand le leur prêche Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié, des hommes dont l'immoralité était reconnue, « apprennent de la grâce salutaire à renoncer à l'impiété et aux passions mondaines, pour vivre dans le siècle présent, selon la tempérance, la justice et la piété. »
Éclairés et sanctifiés par le Saint-Esprit ils édifient ceux pour qui ils furent autrefois des sujets de scandale.

Or, qu'ai-je perdu, même à l'égard de cette vie, par ce changement dont je redoutais si fort les résultats ? J'ai perdu, il est vrai, quelque degré de considération, et je n'ai pas échappé à la pitié, aux censures, au mépris, à la persécution ; mais le Seigneur m'a fait trouver de nouvelles relations, plus désirables que les précédentes, avec des hommes que le St-Esprit a appelés « les Excellents de la terre ; » ce divin. Esprit a daigné devenir lui-même mon « consolateur. » Ma conscience jouit, en général, d'une paix solide, fruit du sang de l'Agneau de Dieu qui ôte les péchés du monde ; et de mon coeur, mort à cause de mes doctrines erronées, s'élèvent continuellement des prières et des actions de grâces, inspirées par le Saint-Esprit. J'éprouve un doux contentement, et, « déposant toutes mes inquiétudes aux pieds de celui qui prend soin de moi, je connais cette paix de Dieu qui surpasse toute intelligence, » et je ne suis pas tout-à-fait étranger à « la joie ineffable et glorieuse des enfans de Dieu. » Le monde ne pourrait me donner ces choses, si j'avais sa faveur ; et ses dédains ne sauraient m'en priver. Mon désir, Dieu le sait, est de vivre pour sa gloire, de faire honneur, par toute ma conduite, à la doctrine de Dieu mon Sauveur, de célébrer les louanges de celui qui m'a appelé des ténèbres à sa merveilleuse lumière, d'être utile, autant que je le pourrai, à ses Bien-aimés, et d'inviter les pauvres pécheurs « qui marchent parmi ce qui n'a que l'apparence, et se tourmentent pour néant, à goûter et à savourer combien le Seigneur est doux, et combien sont heureux ceux qui. se confient en lui. »

C'est ainsi que le Seigneur m'a conduit, moi pauvre et aveugle pécheur, par un chemin que je ne connaissais pas ; c'est ainsi que pour moi il a changé les ténèbres en lumière ; qu'il a redressé les chemins tortus, aplani les montagnes et comblé les vallées ; et qu'il m'a amené dans un lieu découlant de lait et de miel, où je ne désirais point aller ; et puisqu'il a tant fait pour moi, je crois et le suis assuré qu'il ne me laissera point et ne m'abandonnera point. Que la gloire soit donc au Seigneur, à cause de cette grâce qu'il a accordée au mortel le plus indigne ; et à moi la confusion que je mérite, à cause de mes péchés et de la coupable résistance que j'ai opposée aux dispensations de son amour. Mais Dieu a permis tout cela pour humilier et dompter mon esprit et mon cœur, et pour « me faire ressouvenir de ma honte, afin que j'en fusse confus, et que je n'ouvrisse plus la bouche maintenant qu'il est apaisé envers moi, à l'égard de tout ce que j'ai fait. »

Je viens de donner, en la présence de Dieu, qui sonde les coeurs, une histoire fidèle de ce qu'il a fait à mon âme ; et si cette expression ne plaît pas au lecteur, je dirai un récit du changement qui, à la grande surprise de quelques-uns de mes amis, et peut-être au déplaisir de quelques autres, s'est opéré naguère dans mes sentimens et dans ma conduite. On prétend que les doctrines que j'ai adoptées favorisent la licence, et détruisent les principes. de la morale ; mais, bien. que je sois convaincu que toute « ma justice est comme un vêtement souillé, » je crois pouvoir remercier Dieu de ce qu'il m'a soutenu par sa grâce depuis ce changement, et n'a point permis que je déshonorasse, par une conduite immorale, la cause que j'ai embrassée. Je me réjouis de « ce que je me suis conduit dans le monde avec un cœur simple et sincère, devant le Seigneur, non selon la sagesse de la chair, mais selon la grâce de Dieu. » Je puis dire, avec confiance. que la foi en ces doctrines a produit sur moi un effet tout-à-fait contraire à celui qu'on leur attribue faussement ; car le sujet de mes plus ardens désirs et de mes prières les plus ferventes, c'est que Dieu me rende capable de l'aimer, de garder ses commandemens sans hypocrisie, et de pouvoir, par une bonne conduite, imposer silence à l'ignorance des hommes insensés. Si, malgré cela, je pèche en beaucoup de choses, ce n'est pas dans ces doctrines qu'il faut en chercher la cause, mais dans la corruption du vieil homme et les séductions de mon coeur.

O Dieu ! créé en moi un cœur net, et renouvelle au-dedans de moi un esprit bien disposé !


Table des matières

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DEUXIÈME PARTIE. Changement qui eut lieu dans les opinions de l'auteur. (Début)
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TROISIÈME PARTIE. Observations sur le récit précédent.
 

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