Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



Ténèbres et Lumières
NOUVEAUX SOUVENIRS DE MATHILDA WREDE

Aux travaux forcés et dans les fers.

 

D'autres habitaient dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort ; ils étaient captifs et gémissaient dans les chaînes, pour avoir été rebelles aux paroles de Dieu, et avoir méprisé le conseil du Très-Haut. Il avait humilié leur coeur par la souffrance : ils succombaient sans que personne les secourût. Alors ils ont crié vers l'Éternel et Il les a délivrés de leurs angoisses. Il les a tirés des ténèbres et de l'ombre de la mort ; Il a brisé leurs chaînes. Qu'ils célèbrent donc la bonté de l'Éternel et ses miracles en faveur des enfants des hommes ! Car Il a brisé les portes d'airain et rompu les barreaux de fer. (Ps. CVII, v. 10-16). Pendant l'hiver de 1883-1884, un enfant prodigue retrouva le chemin de la maison du Père. Il avait été enfermé à Wasa en prison préventive. Quoique la sentence du juge portât : « Condamné, pour la quatrième fois pour vol, aux travaux forcés à perpétuité », le jeune détenu, en dépit de cette sentence qui le privait de sa liberté, n'en était pas moins libre : Si donc le Fils vous affranchit, vous serez réellement libres. (Jean VIII, v. 36.)

Un matin de Pâques, de très bonne heure, Mathilda Wrede prépara un gros paquet de pain, de beurre, de fromage, d'oeufs et de viande, le dernier bon repas que devait goûter cet homme avant d'être envoyé à Kakola. Ce matin même de la fête de Pâques la voiture cellulaire devait partir. La jeune fille (ce récit se rapporte aux tout premiers débuts de l'activité de Mathilda Wrede) qui n'avait encore jamais vu un condamné à perpétuité, le suivit dans la voiture. Là, l'homme, qui se repentait sincèrement de ses fautes et croyait en la miséricorde divine, fut mis aux fers, et quels fers ! Ce matin de printemps était chaud, baigné de soleil; de jeunes hommes, plaisantant joyeusement, se dirigeaient vers le train en même temps que la voiture cellulaire... mais quelle différence entre ces voyageurs ! Ces contrastes violents s'imprimèrent, comme au fer rouge, dans l'âme de celle qui, par la suite, devait devenir « l'amie des prisonniers ».

Lorsque, dans le cours de l'année 1885, Mathilda Wrede visita pour la première fois la prison de Kakola, elle s'informa du jeune homme et apprit qu'il avait grandi en sagesse et en grâce devant Dieu et devant les hommes (Luc 11, v. 52). Les liens d'amitié qui s'étaient noués entre ces deux êtres, se resserrèrent d'aimée en armée ; chacun de leurs revoirs leur procurait à tous les deux une grande joie. À l'occasion d'une de ces entrevues, le prisonnier s'exprima ainsi :

- Il y a longtemps que je me sens malade et faible. Le médecin vient de me dire que je suis atteint de tuberculose à un degré fort avancé. Selon toute probabilité, je n'en ai plus pour longtemps à vivre. Vous, mademoiselle, vous savez bien que je suis un habile menuisier. Je voudrais que mon dernier travail sur la terre fût consacré à confectionner quelque chose pour Mathilda Wrede. Commandez n'importe quoi au bureau ; je me mettrai à l'ouvrage et ferai de mon mieux.

Mathilda fut profondément touchée de cette proposition et en parla à son frère, chez lequel elle habitait alors. Comme il était malade lui-même, son coeur compatissant fut touché par le dernier voeu de ce condamné à perpétuité.

- Commande quelque chose de réellement beau et permets-moi de prendre tous les frais à ma charge, dit-il à sa soeur. je serais si heureux de contribuer pour ma part à réaliser la pensée touchante de ce détenu.

Le jour suivant Mathilda dit au pauvre malade :

- Je vous suis profondément reconnaissante de tout ce que vous pourrez faire. Que sera-ce, je l'ignore. Mon frère vous envoie ses salutations et vous promet de faire au bureau l'achat de votre oeuvre, quel qu'en soit du reste le prix.

Quelques semaines plus tard, Mathilda reçut une petite armoire avec un rayon pour les livres, en bois poli d'exquise manière et orné de délicieuses sculptures. Mathilda admira fort ce présent et des larmes de gratitude roulèrent sur ses joues. Le prisonnier lui dit avec un mélancolique sourire :

- Je sais que vous avez la mauvaise habitude de donner tout ce que vous possédez. Mais cette armoire, vous ne la donnerez pas. Pour vous empêcher d'en faire cadeau à quelqu'un je l'ai ornée de signes: voyez d'un côté sont gravées vos initiales « M. W. » et, de l'autre, est également gravée l'armoiries des Wrede.

Dès lors le don du prisonnier occupa une place d'honneur dans la chambre de Mathilda, où il est demeuré comme un vivant témoignage de l'affection du détenu. Cette gracieuse attention fut, en effet, le dernier travail du malheureux qui souffrit d'hémorragies pulmonaires et de crises de faiblesse, qui le contraignirent à garder le lit.

Cependant il devait être donné à Mathilda Wrede de le revoir encore une fois. Pendant l'été de 1891, à son retour d'un voyage en Angleterre, le bateau à vapeur Capella fit escale à Abo. Elle se rendit en toute hâte à Kakola et apprit que son ami était à ses derniers moments. Lorsque Mathilda entra dans sa chambre, le visage pâle et émacié du malade rayonna de joie. Il sourit et dit

- Merci ! pour la dernière fois.

Elle le fortifia encore de tout son pouvoir en vue de son dernier voyage, ce voyage dans l'éternité, puis elle lui caressa doucement la main, jusqu'à ce que l'heure du départ du bateau la contraignît à s'éloigner en toute hâte.

Le lendemain, Kakola comptait un prisonnier de moins.


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