Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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Ténèbres et Lumières
NOUVEAUX SOUVENIRS DE MATHILDA WREDE

Quelques pages de mon journal.
(Souvenirs d'un séjour à la campagne avec Mathilda Wrede à Punkaharju en 1906).

 

Ascension, 25 mai.

De bonne heure, le matin, nous nous rendîmes à Willmansstrand et montâmes à bord du bateau à vapeur qui se dirige vers Nyslott. La traversée du lac Saima était d'une impressionnante beauté. Un voile gris-bleu recouvrait le ciel et la terre, voile à travers lequel le soleil, comme un grand oeil baigné de larmes, nous regardait. Le lac, parsemé d'îles couvertes de pins et de bouleaux, était uni comme un miroir. Peu à peu les nuées légères se dissipèrent et la vue s'élargit toujours davantage.

C'était jour de fête religieuse ; les ondes étaient sillonnées de grandes barques, sur lesquelles ramaient des hommes et des femmes, se rendant à l'église. À tous les débarcadères montaient des gens, avec lesquels Mathilda, fidèle à ses habitudes, engagea bientôt des conversations animées. Le même jour, nous arrivâmes à Nyslott, puis nous continuâmes notre voyage vers Punkaharju.

La cloche du vapeur avait déjà annoncé le départ pour la seconde fois, quand un grand cortège s'approcha du débarcadère, drapeau flottant. C'était l'association ouvrière de Punkaharju qui s'en revenait d'une excursion à Nyslott.

- ça va être intéressant, s'écria Mathilda, les yeux brillants de joie.

À peine la foule avait-elle envahi le bateau que déjà la conversation était engagée avec beaucoup d'animation.

- Je connais plusieurs associations ouvrières, nous disait Mathilda, et je me réjouis de faire la connaissance de celle-ci. Tiens ! un si grand nombre d'hommes, jeunes et forts, en excursion de plaisir et sans eau-de-vie ! Et tout se passe avec ordre et tranquillité ; c'est un vrai plaisir que de voyager avec eux !

Un peu plus tard, ils se mirent à chanter. Un jeune homme, doué d'une très belle voix, était assis tout près de nous ; à vrai dire, il était seul à chanter, les autres ne faisant guère que l'accompagner. Lorsqu'il eut achevé, Mathilda Wrede lui dit:

- J'aime les mélodies populaires, que vous chantez, puis elle continua : Vous avez reçu de Dieu un don merveilleux. Pensez donc si cette voix était consacrée à son honneur !

Il y avait là un homme trapu, à la barbe noire, aux grands yeux fanatiques. Il tendit la main à Mathilda et lui dit :

- Ne me reconnaissez-vous pas ?
- Je ne puis en ce moment, me rappeler votre nom; mais les traits de votre visage ne me semblent pas inconnus, répondit-elle.
- Eh ! bien, moi, je vous ai reconnue tout de suite, reprit-il. je suis K. ; nous nous sommes rencontrés à la prison de Sörnäs.

Dès lors la conversation ne tarit pas et l'homme avait plus d'une question à poser au sujet de ses compagnons de captivité.

- Voyez-vous, là-bas, cette haute montagne avec l'édifice qui la surmonte, dit-il, après un bref silence, en montrant la maison de l'évêque de Nyslott. Les serviteurs de Dieu devraient être modestes et sans prétention. Mais en Finlande, les ministres de l'évangile du rang le plus élevé habitent sur les plus hautes montagnes. En outre, cet évêque s'est procuré une paire de chevaux blancs avec lesquels il gravit la montagne et en descend, croyant appartenir déjà aux armées célestes, avec les chevaux blancs, dont parle la Bible.
- Vous êtes méchant, K. ; vous ne devriez pas vous moquer et faire un mauvais usage des paroles de la Bible. Vous savez bien que de tels propos me peinent profondément et ne peuvent que vous nuire à vous-même, dit Mathilda. Je puis, en outre, vous rassurer au sujet de ces chevaux blancs. Quand l'évêque en a fait l'acquisition, il y a quelques années, ils étaient gris, c'est l'âge qui a fait blanchir leurs poils.

Chants et propos enjoués firent passer rapidement les heures et c'est avec le plus grand intérêt que toute l'association ouvrière prêtait l'oreille aux paroles de Mathilda Wrede. Bientôt nous abordâmes au débarcadère de Punkaharju ; devant nous se dressait l'arête d'une montagne couverte de puis hauts et élancés.

Animée d'un profond respect pour Mathilda, la foule attendit qu'elle fût descendue à terre. K. portait son lourd sac de voyage et il l'accompagna, en poursuivant une conversation fort animée. Tous deux ouvraient le cortège. J'étais amusée et surprise tout à la fois de voir, les suivant de près, un homme robuste et de haute taille qui portait la bannière de l'association avec une expression fière et solennelle. Au sommet de la montagne nous prîmes congé de nos nouveaux amis, avec l'espoir de nous revoir bientôt.

Encore un dernier coup d'oeil sur le soleil couchant et sur les eaux, puis nous nous retirâmes dans nos chambres, fatiguées des diverses impressions de cette journée.

Vendredi, 26 mai.

 

Premier matin à Punkaharju.

Ployez les genoux et adorez ! c'est là ce que nous crie la nature tout entière. Quelle chose merveilleuse, que de vivre en communion avec le Dieu vivant !... Nous étions assises sur la colline du Runeberg et lisions ensemble un émouvant récit : « Les prisonniers de la forteresse ». Nulle part ailleurs on ne peut le comprendre aussi bien qu'ici, sur la hauteur.

Après notre lecture, nous sommes allés au « Parc des mélèzes ». Le chemin qui y mène, est coupé par la vole ferrée de Nyslott, en construction au moment où nous parcourions ces régions. Là, nous rencontrâmes quelques-uns de nos amis de la ville. L'un d'eux nous raconta que lui aussi avait été en prison ; on voyait clairement à quel point il était sûr de trouver en se présentant ainsi à nous, affection et compréhension auprès de Mathilda.

Les ouvriers nous indiquèrent le chemin qui conduit à une échelle branlante qu'il nous fallut gravir pour arriver au sommet d'une pente sablonneuse, puis, nous continuâmes notre excursion.

Deux femmes ratissaient les feuilles qui jonchaient le chemin. Mathilda naturellement s'arrêta pour causer avec elles. Toutes deux avaient déjà entendu parler de ces dames étrangères qui avaient montré, hier, sur le bateau à vapeur, une si cordiale intelligence des intérêts ouvriers. Une de ces femmes était d'Oesterbotten. Quand Mathilda lui raconta qu'elle était de Wasa, elle dit :

- Alors vous vous appelez Wasastjerna.
- Pourquoi donc ?
- Vous êtes de Wasa et Stjerna signifie bien, en suédois, quelque chose de très beau. (1)

Après avoir échangé quelques agréables propos, nous quittâmes les deux femmes, sur la promesse de leur rendre bientôt visite.
Puis, nous continuâmes notre route, pour arriver à une hutte petite et misérable, tout au fond de la forêt. Là, vivait une femme, entourée de nombreux enfants, Un d'entre eux était malade des suites d'une forte atteinte de rougeole. Avec cette famille et dans la même chambre, qui, certes, n'était pas grande, vivaient encore un homme avec sa femme et une jeune femme, avec un enfant nouveau-né. Cette dernière n'avait pas de domicile fixe; le père de son enfant l'avait abandonnée ; ce vieux ménage l'avait recueillie et l'entretenait.

Nous passâmes tout l'après-midi sur l'arête de la montagne ; il y avait là une place que Mathilda Wrede affectionnait tout particulièrement, parce que le sentier qui la traversait était si étroit qu'aucun voyageur ne pouvait le suivre sans que Mathilda lui adressât quelque parole aimable. Ce sentier nous faisait songer au chemin de la vie éternelle, dont la Bible dit : Il y aura là une route et un chemin qui s'appellera le chemin de la sainteté... Ceux qui marcheront dans ce chemin, les simples même ne s'égareront point. (Es. XXXV, V. 8). il n'y avait, à la lettre, qu'un chemin, qu'un seul chemin ; à s'en écarter, l'homme courait le risque de faire une chute grave, la pente de la montagne étant très rapide et, tout en bas, c'était le lac aux eaux profondes comme l'abîme.

Samedi, 27 mai.

Ce matin, nous nous sommes de nouveau rendues dans le temple de Dieu. Pendant la nuit, il avait plu ; aux premières heures du 1 jour, un brillant soleil nous éclairait de ses rayons. je descendis sur le rivage pour jeter un coup d'oeil sur les pentes du Punkaharju, aux pins élevés. Devant moi, le lac brillait comme un miroir. Sur le rivage un grand nombre de femmes étaient occupées à la fenaison. Elles me regardaient avec curiosité et me faisaient des révérences en me saluant. J'étais fort heureuse que Mathilda Wrede ne fût pas avec moi ; car elle aurait eu à parler avec tant de monde que, selon toutes probabilités, nous aurions dû demeurer tout le jour dans ces régions et ne serions jamais parvenues sur la hauteur.

C'est seulement quand la journée était déjà fort avancée que nous nous rencontrâmes sur la montagne. Des hommes, des femmes, des enfants nous croisèrent en chemin, et, comme toujours, Mathilda s'arrêta pour causer avec eux.

Un homme aux habits extrêmement râpés vint à nous. Quand elle l'aperçut, tout le visage de Mathilda rayonna de joie. De loin, elle se précipita vers lui, lui prît les mains et, du ton le plus familier qui se puisse concevoir, elle lui dit :

- Bonjour, mon vieil ami !

Et celui qu'elle interpellait ainsi était tout aussi heureux qu'elle. C'était N. qui, huit ans auparavant, avait quitté Kakola. Et les habits qui lui avaient été donnés, lors de sa sortie de prison, il les portait encore, bien qu'ils tombassent en lambeaux. Il raconta que son petit enfant était mort et qu'il allait commander le cercueil : car le pauvre petit devait être enseveli le dimanche suivant. Ils avaient tant de choses à se raconter, ces deux bons vieux amis! Il allait de soi que Mathilda lui remit l'argent destiné à payer le cercueil ; puis Ils se séparèrent. Quand nous revînmes à l'hôtel, le soleil disparaissait derrière les îles couvertes de forêts.

Dimanche, 28 mai.

 

Impressions dominicales à Punkaharju.

Le matin était lumineux, le coeur plein d'allégresse et de reconnaissance. Mon âme, bénis l'Éternel et n'oublie aucun de ses bienfaits. (Ps. CIII, v. 2). Sans échanger le moindre propos, nous traversâmes la forêt. Mathilda avait tant de choses à demander à son Père céleste ! Ne devait-elle pas, aujourd'hui même, parler de Dieu aux ouvriers de la voie ferrée ? Nous arrivâmes à ce qu'on appelait la «Caserne» où ils étaient logés et où l'on nous reçut de la façon la plus cordiale. Le bâtiment ressemblait à une grange, longue et vaste ; à chacune des deux extrémités était une porte flanquée de deux petites fenêtres. Le long des murs couraient de larges bancs qui servaient aussi de couchettes. Au centre, se trouvait un puissant foyer. Là, vivaient quatorze familles avec quelques ouvriers célibataires : en tout soixante personnes.

Parmi ces malheureux, il y avait des vieillards paralysés et aussi de tout petits enfants atteints d'éruptions fébriles. Plus tard Mathilda mit le médecin de Nyslott au courant de ce déplorable état de choses. La maison fourmillait de vermine et l'on disait que les conditions d'existence y étaient navrantes.

K. et sa femme nous offrirent du café. C'était un breuvage écoeurant ; Mathilda ne l'absorba pas, pour autant, avec moins de vaillance, sans cesser de s'entretenir joyeusement avec l'hôte et sa femme. Profitant d'un moment où nous étions seules, elle me dit :

- Il est écrit dans la Bible : Quand ils auront bu quelque breuvage mortel, il ne leur fera point de mal (Marc XVI, V. 18).

Les ouvriers étaient assis à quelque distance de là; quand nous eûmes bu le café, Mathilda se tourna vers eux et leur dit :

- Aujourd'hui., c'est dimanche. Je pense que pour nous, la meilleure manière de le passer, c'est de lire ensemble quelques versets du Nouveau Testament. Je ne veux pas vous fatiguer, je réclame votre attention pendant dix minutes seulement.

Elle posa sa montre sur la table.

- Me permettez-vous de mettre mon projet à exécution, ou quelqu'un a-t-il une objection à présenter ?

Non, personne ne songeait à s'opposer à son dessein. Elle demanda si quelqu'un voulait bien lui prêter un Nouveau Testament ; fort embarrassés, ils se regardèrent les uns les autres. Il se trouva que, dans toute cette « Caserne », il n'y en avait qu'un seul.
Mathilda Wrede en exprima son étonnement :

- Est-ce que chaque ouvrier ne devrait pas posséder le livre qui traite du grand ouvrier, fils d'un ouvrier charpentier, jésus de Nazareth ? N'était-il pas l'ami de tous les pauvres et de tous les malades ?
N'allait-il pas de lieu en lieu faisant du bien. Sa belle vie et son exemple magnifique ne valaient-ils pas la peine d'être connus, pour que nous nous efforcions de les imiter

Puis elle prit le Nouveau Testament et lut ces paroles, lentement et avec conviction : Pour moi, frères, quand je suis venu chez vous, je n'y suis pas Venu pour vous annoncer le témoignage de Dieu avec le prestige du langage ou de la sagesse. Car je n'ai pas jugé que je dusse savoir autre chose parmi vous que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié(1 Cor. Il, v. 1-2). Ensuite elle leur raconta comment ce Jésus-Christ était devenu pour elle-même un libérateur vivant et personnel ; elle raconta comment elle l'avait trouvé et les impressions qu'elle avait éprouvées quand, pour la première fois, elle avait connu Dieu. Tandis qu'elle parlait, un jeune homme entra :

- C'est mon jeune fils, dit K. en le lui présentant. Elle lui tendit la main, et continua son allocution.

J'observais les auditeurs : un jeune homme paraissait lire un journal, mais il demeurait tout à fait immobile, sans tourner jamais la page ; un autre écrivait, il avait tout au moins l'air de le faire, mais j'avais beau le regarder très attentivement, pas une seule fois sa plume ne toucha le papier. Plusieurs avaient déclaré d'avance qu'ils ne croyaient pas à ce que les pasteurs disent, et pourtant nous avions l'impression qu'ils buvaient avec avidité chacune des paroles que leur adressait Mathilda, bien que quelques-uns d'entre eux affectassent une complète indifférence.

Ils voulaient nous offrir une place à leur table, nous invitant à partager leur repas ; quand ils entendirent que le dîner nous attendait à l'hôtel, plusieurs de nos sympathiques auditeurs nous accompagnèrent un bout de chemin.

Après le dîner, nous sortîmes de nouveau et de nombreux ouvriers revinrent s'entretenir avec Mathilda ; la soirée se passa en causant jusqu'à ce que le moment vînt d'aller nous livrer au repos.

Lundi, 29 mai.


Quant à vous, demeurez dans la ville jusqu'à ce que vous soyez revêtus de la puissance d'En-Haut (Luc XXIV, v. 49). Une grande inquiétude remplissait le coeur de Mathilda : des lettres qu'elle attendait avec la plus grande impatience n'arrivaient pas, déjà elle parlait de retourner à la maison. Toutefois, ce matin de bonne heure, elle entra dans ma chambre.

- As-tu vu quel est le texte d'aujourd'hui ? Quant à vous, demeurez dans la ville jusqu'à ce que vous soyez revêtus de la puissance d'En-Haut. Nous devons demeurer ici, cela va sans dire, et attendre la force qui nous est promise.

J'étais sur la montagne, plongée dans mes pensées et le considérais un pin qui s'élançait vers les nuages. J'avais entendu dire que cet arbre a une racine principale qui descend droite et profonde dans le sol, mais aussi d'autres racines qui s'étendent à droite et à gauche dans toutes les directions. Ce pin me paraissait être l'image d'une âme grande et noble qui, plongeant ses racines dans la terre, trouve ainsi la force de s'élever plus haut, toujours plus haut, et dont les intérêts s'étendent toujours plus loin. Sous l'arbre, un vrai tapis de mousse, éclairé des rayons d'un clair soleil, offrait au regard le jeu chatoyant de ses nuances variées. La terre produisit des végétaux, des herbes selon leur espèce (Gen. 1, v. 12). je compris alors, mieux que jamais, que Dieu ne voulait pas que fussent semblables ni la mousse, ni le pin, mais que chacun, à sa manière et selon son espèce, devait se développer, à la seule condition que la force d'En-Haut lui fût donnée.

L'après-midi, nous entreprîmes une longue promenade sur l'arête du Punkaharju. À l'endroit même où, entre deux lacs, la montagne s'abaisse comme un immense pont, nous nous assîmes pour nous reposer. De petites vagues heurtaient le rivage ; je croyais les entendre chanter : « Hélas ! je ne suis qu'une petite, toute petite vague sur le Saima !

Ah ! si seulement j'étais une vague sur l'océan immense ! » Voilà que, tout à coup, la petite vague commença à trembler ; peut-être se mettait-elle à redouter l'ouragan, les profondeurs infinies, puis elle devint merveilleusement calme, d'un calme idéal.

Nous rentrions à la maison, quand, poussé par le désir de s'entretenir avec Mathilda, un homme sortit de la « Caserne » et vint à notre rencontre ; Mathilda resta en arrière avec lui, tandis que je poursuivais ma route, seule avec mes pensées.

Le soir, Mathilda raconta que, tout en cheminant avec cet homme, elle lui avait parlé de Celui qui est le chemin, la vérité et la vie. La lumière s'était levée sur cette âme, il avait trouvé le secret de la délivrance. Quand ils s'étaient séparés, il avait pris la ferme résolution de marcher sur la route qui mène au but de la vie, cette route que chaque être humain doit trouver à sa manière, et suivre en prêtant l'oreille à la voix de son Père céleste. La force d'En-Haut était descendue dans un coeur d'homme qui s'était mis à sa recherche et l'avait trouvée.

Mardi, 30 mai.

Adieu ! Punkaharju.

Le dernier Jour de nos vacances était arrivé. Dès le lendemain il nous faudrait partir. Avec beaucoup de regrets nous prîmes congé de nos amis de la « Caserne ». Ils nous tendirent leurs mains rugueuses, touchants d'amabilité. De la « Caserne » nous allâmes à la hutte que nous avions visitée quelques jours auparavant. Le petit garçon qui n'avait pas encore été baptisé lors de notre première rencontre, l'avait été dès lors et se nommait « Matti », parce qu'il ressemblait d'une manière frappante à mademoiselle Wrede qui s'appelait Mathilda. On nous invita à prendre le café qui fut servi sur le gazon. Sur le chemin du retour, nous passâmes près d'un endroit marécageux où croissaient ces fleurs exquises que les botanistes nomment Calla palustris. Mathilda m'en tendit quelques-unes. Quand je lui fis observer que le désirais d'abord jouir de leur fraîcheur, puis les faire sécher en souvenir de Punkaharju, elle me répondit:

- Mets-les plutôt sans retard à la presse : il est préférable de passer de la pleine vie à la mort plutôt que de s'étioler lentement.

Le soir, très tard, quelques ouvriers vinrent encore prendre congé de nous une dernière fois.

Mercredi, 31 mai.

Alors nous partîmes.

Notre dernier matin sur le Punkaharju ! Encore un regard d'adieu sur le chemin et sur les pins ; puis, nous descendîmes sur le rivage. Quelques amis étaient venus nous dire adieu. Bientôt le bateau à vapeur partit et nous glissâmes lentement, lentement, taudis que les sommets s'évanouissaient de plus en plus dans le bleu du lointain horizon Mais les souvenirs, lumineux et profonds tout à la fois, ne s'évanouissent pas : nous les emportions avec nous à la maison.


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(1) Stjerna veut dire étoile.

 

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