Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



Ténèbres et Lumières
NOUVEAUX SOUVENIRS DE MATHILDA WREDE

« À quoi sert la souffrance? »

 

Un jour, Mathilda Wrede trouva, en prison, un jeune homme qui paraissait extraordinairement sympathique à ceux qui le voyaient. Son attitude était, il est vrai, un peu hautaine et distante, tandis que son costume était très usé. Mais de prime abord on se rendait compte qu'on se trouvait en présence d'un homme cultivé. La finesse de ses traits et les vêtements, tout vieux qu'ils fussent, confirmaient cette impression. Mathilda avait en effet observé que les gardiens, quand ils voulaient humilier les prisonniers d'une certaine culture, leur donnaient les habits les plus méchants. Elle le salua amicalement ; il répondit avec froideur et réserve, paraissant craindre une tentative de conversion.

Elle essaya d'entamer la conversation, mais le jeune homme était avare de paroles et se montrait, en outre, distrait. Elle observa qu'il portait assez souvent la main à sa joue gauche ; aussi, lui demanda-t-elle s'il était souffrant.

- J'ai mal aux dents et les oreilles me font souffrir, répondit-il, mais ces maux sont pour moi un secours et un adoucissement à mes peines, car, quand mes douleurs sont le plus vives, j'oublie à quel point je suis humilié, j'oublie ma honte... Tout est perdu! Mon nom est souillé, ma carrière brisée.... des amis, je n'en ai plus ; je n'ai pas d'avenir, pas d'argent, je n'ai plus rien !

- Si, au moment où vous rentrerez dans la société, je suis moi-même encore en vie, vous apprendrez que vous avez en moi un ami sur lequel vous pouvez compter.

Au lieu de répondre, il se borna à sourire, ce qui fournit à Mathilda l'occasion d'ajouter :

- Je veux vous prêter mon appui, que vous soyez alors converti ou non.

À ce moment son visage parut éclairé pendant quelques minutes par une lueur de naissante confiance.

Un jour, Mathilda le trouva dans un état d'extraordinaire surexcitation. « Combien les hommes ne sont-ils pas différents les uns des autres ! » s'écria-t-il. « L'un vient en bon camarade, en ami, pour prêter secours à son frère et détourner le regard de ce frère de son passé, afin de le diriger vers quelque chose de plus grand, de plus haut. Un autre, au contraire, ne fait que l'aigrir par son impitoyable curiosité ». Peu à peu Mathilda apprit le tourmentait si fort : l'aumônier de service à la prison, était venu le voir. Après avoir salué le prisonnier, il avait fait pleuvoir sur sa tête toute une grêle de questions : - Comment t'appelles-tu ?

- Pour quel crime as-tu été condamné ? - Pour combien d'années ? - Apporte-moi cette chaise,

- Ne la place pas de façon à ce que la lumière me tombe sur la figure.

Le pasteur s'était assis, regardant d'un oeil sévère le coupable qui se tenait là devant lui et il continuait à l'interroger

- Sais-tu lire ?
- Oui.
- As-tu suivi l'école populaire ?
- Non.
- As-tu suivi l'école itinérante ? Non. Apporte-moi ce livre.

Le jeune homme prit sur la planche un Nouveau Testament tout usé et le pasteur lui ordonna de lire. Il lut un verset, sur quoi le pasteur s'écria :

- Tu as sûrement fréquenté l'école populaire ?
- Non.
- Dans quelle école as-tu donc été ?
- A Nya Svenska Läroverket (nom du gymnase suédois de Helsingfors).
- Ah ! voilà un homme cultivé ! et ainsi de suite...

À partir de ce moment-là, le jeune homme avait eu une vraie terreur de l'aumônier.

À ce jeune homme, l'avenir apparaissait sans espoir ; il tomba dans la mélancolie. Aussi Mathilda Wrede chercha-t-elle à donner un autre cours à ses pensées. Elle montra une réelle compréhension de ses circonstances personnelles, lui donna des leçons d'anglais et lui conseilla d'exprimer ses pensées en vers. Voici l'une de ses poésies :

Combien de temps devrai-je encore persévérer sans me plaindre ?
Et défaillant, supporter ma destinée ?
À quoi ma volonté peut-elle me servir et à quoi ma souffrance,
Si je ne puis distinguer mon chemin ?
Les rêves de bonheur ont perdu le chemin de mon coeur,
Où toute espérance est glacée.
Ma tragique destinée me contraint à vivre
Avec des hommes morts au monde.
Ah ! si le pouvais fuir les souvenirs qui m'assaillent !
À quoi sert la souffrance ?

Un jour, c'était en automne, après les premières gelées nocturnes ; pendant la demi-heure de sa promenade quotidienne, il allait et venait auprès d'une plate-bande et s'aperçut que toutes les fleurs penchaient leurs têtes gelées.
Le jour suivant, lorsque Mathilda entra dans sa cellule, il lui tendit un copeau sur lequel il avait tracé ces mots .

Sur moi, pauvre et sans joie,
Le soleil luit doux et chaud.
Les parterres voient déjà leurs fleurs clairsemées.
Elles ont été anéanties par la gelée nocturne.
Un jour ma vie, dès le matin,
Gisait à terre, dévastée par le froid.
Et maintenant mon coeur glacé pleure,
Même quand le soleil m'éclaire de ses rayons.

En racontant ces traits, Mathilda ajouta : « je suis profondément touchée quand les prisonniers donnent parfois essor à leurs pensées profondes et douloureuses. Et, quand je vois l'effort souvent inhabile que tente un prisonnier pour s'améliorer, et que je pense à la méthode, fréquemment employée par les gardiens et les fonctionnaires de la prison, pour contraindre les détenus à la soumission, alors je suis saisie d'épouvante. Sans le savoir et bien souvent ils étouffent ce qu'il y a de meilleur dans le coeur de ceux qu'ils croient améliorer ».



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