ARGUMENS ET
RÉFLEXIONS SUR LES LIVRES ET LES CHAPITRES
DU NOUVEAU TESTAMENT
ÉPÎTRE CATHOLIQUE DE SAINT
JACQUES.
Cette Épître et les suivantes
sont appelées Catholiques ou Universelles,
parce qu'elles ont été écrites
aux chrétiens en général et
non à quelques personnes ou à
quelques Églises en particulier. Celle de
saint Jacques s'adresse aux Juifs des douze tribus,
qui étaient dispersés en divers pays
depuis longtemps et qui avaient embrassé le
Christianisme ; elle tend à les
affermir contre les persécutions et
principalement contre certains faux docteurs et
certains hypocrites qui', faisant profession
d'être chrétiens et se vantant
d'être plus éclairés que les
autres, vivaient dans le péché et
dans la licence. On ne sait pas bien en quel temps
cette Épître a été
écrite.
CHAPITRE
PREMIER.
L'apôtre exhorte les
fidèles :
- Il se réjouir dans les afflictions,
et à chercher dans la prière le
secours dont ils avaient besoin pour les
soutenir.
- 2. Il console les chrétiens, qui
étaient persécutés ou
méprisés dans le monde, et il
exhorte les riches à l'humilité.
3. Il parle contre ceux qui, succombant aux
persécutions et aux autres tentations, en
rejetaient la faute sur Dieu et disaient que
Dieu poussait les hommes au péché,
et il montre que Dieu, étant parfaitement
saint, ne porte les hommes qu'au bien
- 4. Il condamne ceux qui se contentaient
d'écouter la parole de Dieu sans
pratiquer ce qu'elle ordonne, et ces docteurs
orgueilleux qui présumaient
d'eux-mêmes et qui parlaient mal des
autres ; il dit que la religion de ces
gens-là était vaine, et il
enseigne que la vraie religion consistait dans
la pratique des oeuvres de la charité et
dans le renoncement au monde.
I. 1-8 ; Il. 9-12 ; III. 13-18 ;
IV. 19-27.
RÉFLEXIONS.
Nous avons, dans ce chapitre,
plusieurs belles instructions.
La première, que les
afflictions et particulièrement celles qu'on
souffre à cause de l'Évangile, sont
un sujet de joie pour les chrétiens,
puisqu'elles servent à les éprouver,
à les rendre parfaits et
à leur faire obtenir la couronne de vie que
Dieu a promise à ceux qui l'aiment.
La seconde, que Dieu ne refuse
jamais sa grâce et les dons spirituels
à ceux qui les lui demandent avec foi, et
qu'ainsi il ne tient qu'à nous d'en
être enrichis.
La troisième, que ceux qui
sont d'une condition basse dans le monde doivent se
glorifier au Seigneur, pourvu qu'ils soient du
nombre des vrais fidèles, et que les riches
doivent avoir des sentimens d'humilité.
La quatrième instruction doit
être bien remarquable. C'est que Dieu n'est
en aucune façon l'auteur du
péché et des tentations ; mais
que le péché vient uniquement de
nous-mêmes et de notre propre volonté,
et que pour ce qui est de Dieu, bien loin
d'être la cause du mal que les hommes font,
il est l'auteur de tout bien, puisqu'il nous a
régénérés par sa
parole, afin de nous rendre de nouvelles
créatures.
5. Saint Jacques nous enseigne que
ce n'est pas assez d'écouter la parole de
Dieu ; mais que le principal est d'observer ce
qu'elle nous commande, et que pour cet effet il
faut l'écouter avec un esprit paisible, doux
et docile, et avec un coeur dégagé
des passions.
Enfin saint Jacques déclare
ici que ceux qui se croient pieux et meilleurs que
les autres et qui ne tiennent pas leur langue en
bride, mais qui condamnent le prochain, ne sont que
de faux dévots, et que la solide
piété et la vraie religion consistent
principalement à exercer la charité
envers les misérables et à se
conserver pur, en sorte qu'on ne soit pas
souillé par la corruption de ce monde.
CHAPITRE
Il.
Ce chapitre a deux parties.
- Saint Jacques reprend ceux qui avaient des
égards pour les riches et qui
méprisaient les pauvres dans les
assemblées de l'Eglise. Il montre que la
foi en Jésus-Christ ne permettait pas de
faire ces sortes de distinctions, puisque Dieu a
choisi les pauvres aussi bien que les riches
pour leur donner le royaume des cieux, et que la
loi de l'Évangile, par laquelle nous
devons être jugés, est la loi de la
charité et de la liberté.
- Dans la seconde partie saint Jacques
réfute ceux qui croyaient qu'on pouvait
être justifié par la foi en
Jésus-Christ sans les bonnes oeuvres, et
il fait voir, par la nature même de la foi
et par les exemples d'Abraham et de Rahab, que
la foi qui n'est pas accompagnée des
bonnes oeuvres est une foi fausse, par laquelle
on ne peut point obtenir le salut.
I. 1-13 ; Il. 14-26.
RÉFLEXIONS.
LA première partie de ce
chapitre nous apprend,
1. que les chrétiens doivent
faire paraître qu'ils se regardent les uns
les autres comme frères, surtout dans les
assemblées de l'Eglise, et qu'en
général on ne doit pas estimer les
riches à cause de leurs richesses, ni
mépriser les pauvres à cause de leur
pauvreté, puisque la foi et la
piété peuvent se rencontrer dans les
pauvres tout de même que dans les riches et
dans les grands du monde, et que Dieu a aussi
choisi les pauvres qui sont riches en foi pour les
rendre héritiers de son royaume. Cela
apprend aussi aux riches qu'ils ne doivent pas
avoir des sentimens d'orgueil ni mépriser ou
opprimer les petits.
2. Saint Jacques nous enseigne que
la loi de Jésus-Christ est la loi de la
charité, de l'humilité et de la vraie
liberté, et que c'est par cette loi que Dieu
nous jugera.
3. Que celui qui a violé la
loi de Dieu dans un seul commandement est aussi
bien coupable que s'il l'avait violée dans
les autres, puisque tous les commandemens de cette
loi viennent de Dieu, et qu'on ne peut en
transgresser volontairement aucun sans
mépriser l'autorité et la
majesté du législateur. Cela nous
montre que la vraie piété consiste
dans la pratique de tous nos devoirs, et qu'il
suffit de s'adonner à un seul
péché et d'entretenir en nous une
seule mauvaise habitude pour être exclus du
salut.
Il importe, après cela, de
bien remarquer ce que saint Jacques enseigne sur la
justification dans la seconde partie de ce chapitre
et avec quelle force il réfute la doctrine
impie de ceux qui disaient qu'on était
justifié par la foi sans les bonnes oeuvres.
Cet apôtre montre que la vraie foi est
nécessairement accompagnée des bonnes
oeuvres, ce qui est aussi la doctrine de saint Paul
sur cette matière, et que la foi qui ne
produit pas les oeuvres est fausse et morte. C'est
ce qu'il confirme par l'exemple d'Abraham, qui
prouva la sincérité de sa foi en
obéissant à Dieu, lorsqu'il offrit
son fils Isaac, et par l'exemple de Rahab, qui fit
voir, en recevant les espions que Josué
avait envoyés à Jérico,
qu'elle était persuadée que Dieu
donnerait le pays de Canaan aux enfans
d'Israël. D'où nous devons recueillir
que ceux qui négligent les bonnes oeuvres et
qui ne font pas voir, par une vie sainte et par
l'obéissance aux commandemens de Dieu,
qu'ils ont la foi, en sont destitués, et
qu'ils ne sauraient en aucune façon
être justifiés ni avoir part au salut.
CHAPITRE
III.
Saint Jacques
- défend aux Chrétiens, dans ce
chapitre de s'ériger en docteurs et en
maîtres par-dessus les autres, de les
condamner et d'en parler mal, et il
représente combien la langue peut causer
de maux et de désordres.
- Il dit ensuite que la douceur, le support et
l'amour de la paix, sont la marque à
laquelle on discerne les vrais chrétiens,
et c'est par là qu'il montre la
différence qu'il y a entre la vraie et la
fausse sagesse. Il faut savoir que ce que saint
Jacques dit ici regarde certains docteurs qui se
croyaient plus parfaits que les autres, et qui,
poussés par l'envie de dominer,
condamnaient avec beaucoup d'orgueil et de
rigueur ceux qui n'étaient pas dans leurs
sentimens, et troublaient, par ce moyen, la paix
de l'Eglise.
I. 1-12 ; II.13-18.
RÉFLEXIONS.
CE chapitre traite,
premièrement, des péchés
où l'on peut tomber par la langue, et l'on
doit faire une grande attention à ce qui y
est dit sur ce sujet. Saint Jacques nous y apprend
que la langue peut causer des maux sans nombre, et
auxquels il n'y a souvent point de
remède ; que par les discours on peut
pécher en une infinité de
manières contre Dieu et contre le prochain,
ruiner l'édification de l'Eglise et allumer
le feu de la division et de la discorde. Cela nous
oblige à régler nos paroles par la
crainte de Dieu et par la sagesse, à parler
peu, à fuir surtout la médisance, et
à nous abstenir de tous les discours
contraires à la charité et à
l'humilité.
Ce devoir est des plus importans, et
saint Jacques le montre lorsqu'il dit que l'une des
plus sûres marques de la vraie
piété est de savoir régler sa
langue.
En second lieu, cet apôtre
nous donne, dans ce chapitre, un autre
caractère auquel on reconnaît les
personnes qui ont une piété solide et
qui sont véritablement sages : c'est la
douceur, la paix, et une grande modération
dans leurs discours et dans toute leur conduite. Il
déclare, dans les termes le plus forts, que
ceux qui pensent avoir des connaissances plus
sublimes que les autres et une piété
plus parfaite ; mais qui sont indiscrets,
hautains dans leurs paroles, aigres et pleins
d'envie et d'orgueil, qui médisent du
prochain et qui causent du trouble, ne sont que des
hypocrites. Il ajoute que partout où il y a
de l'envie et de l'irritation,
il y a toute sorte de mal et qu'on n'y doit rien
chercher de bon.
Enfin il dit que la vraie
piété qui vient du ciel est pure,
paisible, modeste, pleine de miséricorde et
de bons fruits, sincère et sans hypocrisie.
Tous ceux donc qui prétendent être
véritablement sages doivent s'étudier
à acquérir cette divine sagesse dont
la charité est le principe, et à
revêtir un esprit de douceur, de
modération, de sincérité et de
paix. C'est par là qu'ils
éprouveront, en ce monde et en l'autre, la
vérité de ce que saint Jacques dit
dans les dernières paroles de ce
chapitre : Que le fruit de la justice est
semé dans la paix pour ceux qui s'adonnent
à la paix.
CHAPITRE
IV.
Saint Jacques, après avoir
parlé des maux que la langue et l'esprit
d'aigreur et de dissension peuvent causer, montre,
dans ce chapitre,
- que tous ces désordres venaient des
passions de la chair, et en particulier de
l'amour des voluptés, de l'orgueil, du
désir de s'élever les uns
par-dessus les autres, de l'amour du monde et de
l'esprit d'envie et de jalousie.
- Il exhorte ceux en qui ces passions
régnaient à s'humilier et à
nu particulier, la médisance et les
jugemens téméraires.
- Enfin il condamne ceux qui forment des
entreprises sans penser à la
vanité de la vie, et sans
considérer qu'ils dépendent de la
Providence de Dieu.
1. 1-6 ; Il. 7-12 ; III. 13-17-
RÉFLEXIONS.
SAINT Jacques nous apprend ici,
1. que l'amour des plaisirs, les passions
et l'envie, sont la principale cause des maux que
les hommes se font les uns aux autres et des
divisions qu'il y a dans l'Eglise. C'est pourquoi
il faut garantir son coeur de ces passions, en
particulier de l'amour du monde, qui en est la
source, et de l'orgueil, nous souvenant que ce
n'est pas en vain que l'Écriture dit que si
quelqu'un veut aimer le monde il se rend ennemi de
Dieu, et que Dieu résiste aux orgueilleux,
mais qu'il fait grâce aux humbles.
2. Nous voyons, dans ce chapitre que
quand on s'est éloigné de Dieu par
les passions et par l'amour du monde, il faut se
rapprocher de lui par la repentance, sentir ses
misères, pleurer ses fautes,
résister aux tentations,
renoncer aux choses du monde, et purifier son coeur
et toute sa conduite, moyennant quoi Dieu se
rapprochera de nous.
3. L'apôtre nous enseigne que
la médisance est un très-grand
péché ; ce qu'il prouve par
cette considération particulière, que
celui qui parle mal de son frère, qui le
juge et qui le condamne, fait ce qui n'appartient
qu'à Dieu.
4. Saint Jacques nous avertit de
nous souvenir, dans tous nos desseins et en
particulier dans ceux qui ont
l'intérêt et le gain pour but, que
notre vie est courte et incertaine, qu'elle n'est
que comme une vapeur qui s'évanouit,
qu'ainsi c'est une grande folie de faire des
projets pour l'avenir en comptant sur la vie et sur
notre propre industrie ; mais qu'en toutes
choses nous devons nous remettre à la
Providence de Dieu.
5. Il faut apprendre d'ici qu'il ne
suffit pas de connaître notre devoir, mais
qu'il faut faire un bon usage de nos
lumières et des moyens que nous avons de
faire le bien, à moins de quoi nous n'en
serons que plus coupables devant Dieu ; c'est
l'instruction importante que renferment ces
paroles : Il y a du péché
à celui qui sait faire le bien et qui ne le
fait pas.
CHAPITRE
V.
L'apôtre ayant
parlé, sur la fin du chapitre
précédent, de ceux qui travaillent
à amasser du bien sans penser qu'ils
dépendent de la Providence,
- dénonce les jugemens de Dieu aux
riches avares, à ceux qui vivent dans les
délices, et à ceux qui oppriment
les petits.
- Il s'adresse ensuite aux chrétiens
affligés, et il les exhorte à
attendre patiemment la venue du Seigneur,
à ne se pas plaindre trop
amèrement de ceux qui leur faisaient du
mal, et à éviter tout ce qui
pouvait marquer de l'impatience, et en
particulier les juremens.
- Il marque enfin le devoir de ceux qui sont
dans la souffrance ; il ordonne aux malades
d'appeler les pasteurs de l'Eglise, et il leur
promet qu'ils seraient guéris
après que les pasteurs auraient
prié pour eux et qu'ils les auraient
oints d'huile. Cette onction était une
cérémonie qui se pratiquait en ces
temps-là, et par le moyen de laquelle
Dieu opérait des guérisons
miraculeuses. Saint Jacques parle aussi de la
confession des péchés, de
l'efficace de la prière, et des fruits de
la correction fraternelle.
I. 1-6 ; II. 7-12 ; III. 13-20.
RÉFLEXIONS.
CE qui est dit dans ce chapitre doit
servir d'avertissement, premièrement aux
riches. Puisque saint Jacques menace de la
malédiction divine les riches avares, les
riches injustes et les riches qui se servent de
leurs biens pour vivre dans le faste et dans les
délices, les personnes à qui Dieu a
donné du bien doivent éviter
soigneusement l'avarice, l'injustice et les
voluptés, et considérer, pour cet
effet, la vanité des richesses, les
tentations où elles exposent les hommes et
les malheurs terribles où tombent ceux qui y
mettent leur coeur ou qui en abusent.
2. L'apôtre exhorte les justes
affligés, tels qu'étaient alors la
plupart des chrétiens, à souffrir
leurs maux sans se plaindre, sans murmurer et sans
s'aigrir contre personne, et à attendre
patiemment que le Seigneur vienne les
délivrer ; et il leur apprend que pour
se former à la patience il est
très-utile de méditer sur les
souffrances des saints et sur l'heureuse issue que
Dieu leur en a accordée.
3. On voit ici que tous les juremens
vains et téméraires, quels qu'ils
soient, sont absolument défendus aux
chrétiens, de même que toutes les
paroles d'aigreur et d'impatience ;
4. Que ceux qui sont affligés
doivent chercher leur consolation dans la
prière, qu'en particulier les malades
doivent appeler leurs pasteurs pour prier pour eux,
et que la confession des péchés et
les prières, lorsqu'elles sont faites avec
zèle, avec foi et dans un esprit de
charité, ont beaucoup d'efficace devant
Dieu.
Les dernières paroles de
cette Épître nous enseignent que les
corrections et les remontrances que l'on adresse
aux pécheurs qui s'égarent sont d'une
très-grande utilité tant pour ceux
que l'on avertit que pour ceux qui donnent ces
avertissemens, puisque par là on retire une
âme de la mort et que l'on obtient même
de Dieu la rémission de ses propres
péchés.
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