ARGUMENS ET
RÉFLEXIONS SUR LES LIVRES ET LES CHAPITRES
DU NOUVEAU TESTAMENT
PREMIÈRE ÉPÎTRE DE
SAINT PAUL AUX CORINTHIENS.
CHAPITRE
VI.
L'apôtre
- reprend les Corinthiens de ce qu'ils avaient
recours aux juges et aux magistrats payens, pour
terminer leurs procès.
- 2. Il dit à cette occasion que ceux
qui faisaient tort au prochain par l'injustice
n'entreront pas dans le ciel, non plus que les
impurs et les autres pécheurs qu'il
nomme.
- 3. Il exhorte les Corinthiens à avoir
égard à l'édification du
prochain, dans l'usage des choses
indifférentes et permises, mais surtout
à fuir l'impureté, montrant, par
diverses considérations, qu'elle n'est
pas du nombre des choses indifférentes,
mais qu'elle est mauvaise par elle-même,
et tout-à-fait incompatible avec la
profession de la religion chrétienne.
I. 1-8 ; II. 9-11. III. 12-20.
RÉFLEXIONS.
LES réflexions qu'il faut
faire sur ce chapitre sont ces quatre :
Que les chrétiens,
étant frères, doivent éviter
les procès autant qu'il leur est possible et
tâcher de terminer leurs difficultés
à l'amiable, et que s'ils ont recours aux
juges, il faut que ce soit toujours dans un esprit
de justice et d'équité, avec
modération et douceur, et sans donner aucun
scandale ;
2. que ceux qui font tort à
autrui, soit par des procès injustes, soit
en quelqu'autre manière, non plus que les
impurs, les larrons et les autres pécheurs,
ne posséderont point le royaume de Dieu.
Sur quoi il faut remarquer que
quelques-uns des Corinthiens avaient vécu
dans ces crimes-là, du temps qu'ils
étaient payens ; mais qu'ils y avaient
renoncé, et que Dieu les en avait
retirés, en les appelant à la
religion chrétienne, et en les nettoyant de
leurs péchés, par le sang de
Jésus-Christ et par la grâce du
Saint-Esprit.
Ce qui nous apprend que cette sainte
religion ne laisse pas les hommes dans leurs
souillures ; mais qu'elle tend à les
purifier et à les sanctifier, et qu'elle
leur fournit les moyens et les forces
nécessaires pour cela.
La troisième instruction
concerne l'impureté. Saint Paul montre, dans
ce chapitre, que ce péché
sépare de la communion de
Jésus-Christ ceux qui le commettent, et fait
qu'ils ne sont plus ses membres ; que les
impurs font un grand outrage à Notre
Sauveur, qu'ils déshonorent leur propre
corps, qui devrait être le temple du
Saint-Esprit, et qu'ils se privent de cet Esprit
saint.
Enfin il déclare que, puisque
nous avons été rachetés par le
précieux sang de Jésus-Christ, nos
corps appartiennent à Dieu aussi bien que
nos âmes, et qu'ainsi nous ne sommes plus
à nous-mêmes, mais que nous devons
glorifier Dieu et par nos corps et par nos esprits.
Toutes ces considérations sont
extrêmement fortes ; et puisque saint
Paul allègue tant de raisons pour
détourner les chrétiens de
l'impureté, on voit par là que ce
péché est très-grand, que nous
devons l'avoir en horreur et nous étudier
à tous égards à une vie pure
et sainte.
CHAPITRE
VII.
Saint Paul répond, dans ce
chapitre, à quelques questions que les
Corinthiens lui avaient proposées touchant
le mariage.
- 1. Il en marque l'institution et les
devoirs.
- 2. Il dit qu'il y a de
l'avantage à ne se
point marier, mais que cependant les
chrétiens ont la liberté de le
faire.
- 3. Il exhorte les personnes mariées
à ne se pas séparer, et il montre
quel était à cet égard le
devoir des hommes et des femmes qui
étaient mariés à des
payens.
- 4. Il ordonne à tous les
chrétiens de demeurer chacun dans leur
vocation et dans l'état où la
Providence les avait mis, et d'y vivre selon la
volonté de Dieu.
- Enfin il parle des vierges et de ceux qui
vivaient dans le célibat, aussi bien que
des veuves, et il dit que l'état de ces
personnes-là était plus heureux,
principalement dans ces temps-là, qui
étaient des temps de persécution,
mais que cependant elles avaient la
liberté, de se marier.
I. 1-5 ; Il. 6-9 ; III. 10-19 ;
IV. 20-24 ; V. 25-40.
RÉFLEXIONS.
CE chapitre nous enseigne,
1. que le mariage est un état
saint et honorable ; mais que le devoir des
chrétiens est d'y vivre dans l'union et dans
la concorde, dans la pureté et dans la
chasteté, aussi bien que dans la
piété, en vaquant au jeune et
à la prière ;
2. que quoique l'état de ceux
qui ne se marient pas soit plus heureux, chacun a
la liberté de le faire, qu'en cela on doit
se conduire selon qu'on se sent appelé
à vivre dans le mariage ou dans le
célibat, mais que ceux qui ne sont pas
mariés doivent vivre dans une grande
pureté et dans la continence ;
3. que les maris et les femmes ne
doivent point se séparer les uns des autres,
mais qu'au contraire ils sont obligés de
vivre ensemble dans la paix, et de s'édifier
en travaillant à leur salut mutuel ;
4. que Dieu ayant voulu qu'il y
eût divers états et diverses
conditions dans le monde, chacun doit demeurer dans
la vocation où il se trouve, pourvu qu'elle
soit légitime, et s'acquitter
fidèlement de tous les devoirs auxquels
cette vocation l'engage, sans chercher à
s'en tirer par de mauvais moyens ;
5. que les personnes qui ne se
marient pas ont des avantages particuliers, pourvu
qu'elles soient chastes, puisqu'elles peuvent
servir Dieu avec moins de distraction, et que dans
les temps de persécution elles sont plus
libres et mieux en état de s'acquitter de
leur devoir ; mais que, soit que l'on se
marie, soit que l'on vive dans le célibat,
on doit être pur, tant du corps que du coeur.
6. Une autre instruction
très-salutaire que l'apôtre nous donne
ici, et qui peut être appliquée
à tous les temps et à toutes sortes
de personnes, c'est que notre vie est courte, que
notre état en ce monde est incertain, et que
les choses d'ici-bas sont passagères et
vaines ; qu'ainsi nous ne devons pas y mettre
notre coeur, mais qu'il faut
posséder toutes choses comme si nous ne les
possédions point ; que ceux qui
pleurent doivent être comme s'ils ne
pleuraient point, ceux qui sont dans la joie comme
s'ils n'étaient pas dans la joie, et ceux
qui jouissent des choses du monde comme s'ils n'en
jouissaient pas, puisque la figure de ce monde
passe.
CHAPITRE
VIII.
Saint Paul
- examine une question sur laquelle les
Corinthiens l'avaient consulté, savoir
s'il était permis aux chrétiens de
manger des viandes qui avaient été
sacrifiées aux idoles et d'assister aux
festins que les payens faisaient dans les
temples des faux dieux. Il dit sur cela que les
chrétiens savaient qu'il n'y a qu'un seul
Dieu, et que les idoles étaient des
choses mortes et vaines, qui ne pouvaient rendre
souillées les viandes qui leur avaient
été offertes, et qu'ainsi il
était permis de manger de toutes sortes
de viandes.
- Cependant l'apôtre ajoute que tous
n'avaient pas le même degré de
connaissance sur ce sujet. C'est pourquoi il
avertit les chrétiens les plus
éclairés de ne pas abuser de la
liberté qu'ils avaient à cet
égard, de peur qu'en mangeant des choses
sacrifiées aux idoles, ils ne donnassent
du scandale à ces chrétiens
faibles, et qu'ils ne les engageassent à
pécher, en mangeant contre leur
conscience, et même à tomber dans
l'idolâtrie.
I. 1-6 ; II. 7-13.
RÉFLEXIONS.
QUOIQUE nous n'ayons pas besoin
qu'on nous instruise aujourd'hui sur l'usage des
choses sacrifiées aux idoles, puisque
l'idolâtrie payenne est abolie et que nous
savons tous qu'il n'y a qu'un seul Dieu et que les
idoles ne sont rien, cela n'empêche pas que
la doctrine que saint Paul établit dans ce
chapitre ne soit d'un usage général.
Il nous y enseigne que tous les chrétiens,
et surtout ceux qui sont les mieux instruits,
doivent avoir bien des égards pour ceux qui
le sont moins, et éviter soigneusement de
leur donner du scandale.
L'apôtre nous apprend de plus
que l'on peut scandaliser le prochain,
non-seulement en faisant ce qui est criminel, mais
aussi en faisant des choses permises ; ainsi
il faut se conduire avec beaucoup de circonspection
et de prudence dans l'usage de ces
choses-là, et ne pas toujours faire tout ce
qui est permis. Il nous montre enfin que c'est un
très-grand péché que de
scandaliser qui que ce soit, puisque par
là on peut être
l'auteur de la perdition du prochain, et se rendre
extrêmement coupable contre
Jésus-Christ lui-même.
Ces maximes sont d'un grand usage,
et nous devons nous les proposer continuellement,
afin de ne rien faire, non pas même dans les
choses permises, par où nous puissions
offenser Dieu, blesser notre conscience, et faire
tomber notre prochain dans le péché.
CHAPITRE
IX.
Le dessein de saint Paul, dans ce
chapitre, est de confirmer par son exemple ce qu'il
avait enseigné dans le chapitre
précédent, savoir, que l'on doit
s'abstenir de choses permises, lorsqu'on peut
avancer par ce moyen l'édification du
prochain. Dans cette vue, il fait trois choses.
- 1. Il dit qu'il avait le droit et la
liberté, en qualité
d'apôtre, de tirer un salaire pour son
entretien.
- 2. Il ajoute qu'il ne s'était point
prévalu de ce droit, mais qu'il avait
usé d'une grande condescendance envers
toutes sortes de personnes, s'accommodant aux
scrupules des faibles, de peur de leur donner de
l'éloignement pour l'Évangile.
- 3. Il exhorte les Corinthiens à
l'imiter en cela et à renoncer aux choses
permises, lorsque l'édification du
prochain et leur propre salut le demandaient, et
il leur propose pour cet effet l'exemple de ceux
qui combattaient autrefois dans les jeux publics
de la Grèce, et qui vivaient dans une
grande continence, s'abstenant de tout ce qui
était contraire au genre de vie qu'ils
avaient embrassé.
I. 1-14 ; Il. 15-23 ; III. 24-27.
RÉFLEXIONS.
LE but général de ce
chapitre est de nous apprendre qu'il ne faut pas
toujours faire ce qui est permis et ce que l'on
aurait droit de faire ; mais que l'on doit
s'en abstenir, lorsque la gloire de Dieu et le
salut du prochain l'exigent et qu'il est du devoir
des chrétiens de s'accommoder, autant qu'ils
le peuvent, à toutes sortes de personnes,
d'avoir toujours égard à
l'édification des autres, et principalement
à celle des faibles, afin de les attirer
à la foi.
Outre cette doctrine
générale, qui est d'un grand usage,
nous avons ici quelques instructions
particulières, dont les principales sont ces
trois :
1. que les Églises sont
obligées, par la loi divine et par le
commandement de Jésus-Christ de pourvoir
à l'entretien et à la subsistance des
pasteurs et de leurs familles ;
2. que les ministres de
l'Évangile doivent, à l'imitation de
saint Paul, se conduire avec beaucoup de prudence
et de charité, n'ayant pas égard
à leur
intérêt particulier, mais
s'accommodant à la faiblesse des hommes, et
tâchant, par toutes sortes de moyens, de
gagner à Jésus-Christ le plus de
personnes qu'ils pourront ;
3. que l'on ne saurait remplir les
devoirs et la vocation de chrétien, à
moins que l'on ne vive dans une grande
tempérance ; que pour cela il faut
mortifier le corps, le réduire en servitude
par la sobriété, la continence et le
travail ; fuir l'oisiveté, la mollesse,
et ce qui flatte trop la chair, et suivre un genre
de vie conforme aux préceptes de
l'Évangile et à l'exemple de
Jésus-Christ et des apôtres, afin que
par ce moyen on puisse obtenir la glorieuse
récompense, qui n'est destinée
qu'à ceux qui se seront acquittés de
ces devoirs.
CHAPITRE
X.
L'apôtre, continuant la
matière qu'il avait traitée dans les
deux chapitres précédens touchant
l'usage des viandes sacrifiées aux
idoles,
- représente aux Corinthiens que
quoique les anciens Israélites fussent le
peuple de Dieu et qu'ils eussent des avantages
semblables à ceux dont les
chrétiens jouissent, ils avaient
été entraînés dans
l'idolâtrie et dans l'impureté en
assistant aux banquets des idolâtres, et
que, par leur sensualité et leurs
fréquentes rebellions, ils avaient
attiré sur eux les jugemens de Dieu. Il
propose ces exemples aux Corinthiens, et surtout
à ceux qui se croient les plus affermis
et les plus éclairés, pour les
empêcher de se rencontrer aux fêtes
et aux repas des idolâtres, de peur de
s'exposer à la tentation et de tomber
dans l'idolâtrie.
- 2. Il ajoute, pour confirmer cela, que
l'usage de la sainte Cène, où les
chrétiens participent tous ensemble au
sacrifice de Jésus-Christ en buvant de la
coupe sacrée et en mangeant tous d'un
même pain, ne leur permettait pas
d'assister aux festins que les payens
célébraient en l'honneur des
idoles, puisque ce serait participer à
leurs sacrifices et avoir communion avec les
démons et les idolâtres ; ce
qui ne pourrait qu'attirer la vengeance divine.
- 3. Il dit que les chrétiens pouvaient
acheter et manger de toutes sortes de viandes,
et même manger dans les maisons
particulières de tout ce qui leur serait
présenté, à moins qu'on ne
leur dît que ces viandes avaient
été sacrifiées aux idoles,
auquel cas ils devaient s'en abstenir, non qu'il
y eût du péché à en
manger, mais de peur de donner du scandale
à ceux qui les avaient avertis. Il
conclut cette matière en donnant pour
règle aux Corinthiens de regarder en
toutes choses à la gloire de Dieu ci
à l'édification du prochain.
I. 1-14 ; Il. 15-22 ; III. 24-33.
RÉFLEXIONS.
LA lecture de ce chapitre nous oblige à
considérer,
1. que si les anciens Juifs ont
été punis avec tant de
sévérité pour avoir
abusé des grâces que Dieu leur avait
accordées, nous le serons beaucoup plus
rigoureusement si nous abusons de celles que nous
avons reçues, puisqu'elles sont infiniment
plus excellentes.
2. L'exemple des Israélites
qui, en assistant aux festins des idolâtres,
tombèrent dans l'impureté et dans
l'idolâtrie, et la vengeance que Dieu en fit,
nous avertit, comme le dit saint Paul,
d'éviter les occasions de
péché, et en particulier de nous
éloigner de la sensualité et de
l'impureté, ces désordres exposant
aux jugemens de Dieu ceux qui s'y laissent
entraîner.
3. Il faut considérer que si
saint Paul dit que les chrétiens ne
pouvaient pas participer à la table du
Seigneur et manger de ce qui avait
été sacrifié aux idoles, la
participation à ce saint sacrement n'est pas
moins incompatible avec une conduite charnelle et
corrompue, et que la commémoration publique
et solennelle que nous faisons du sacrifice de
notre Sauveur dans l'Eucharistie nous oblige
indispensablement à une vie pure et sainte.
4. Nous devons bien retenir cette
maxime générale, que dans toutes nos
actions, et même dans celles qui sont
indifférentes et permises, il faut toujours
avoir pour but la gloire de Dieu et
l'édification du prochain, comme saint Paul
le marque par cette règle qu'il nous
donne : Soit que vous mangiez, soit que vous
buviez, ou que vous quelqu'autre chose, faites
toutes choses à la gloire de Dieu.
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