ARGUMENS ET
RÉFLEXIONS SUR LES LIVRES ET LES CHAPITRES
DU NOUVEAU TESTAMENT
ÉPÎTRE DE SAINT PAUL AUX
ROMAINS.
CHAPITRE
VI.-
Le dessein de saint Paul dans ce
chapitre
- est de montrer qu'en enseignant, comme il
venait de faire, que les hommes sont
justifiés par la foi en
Jésus-Christ et que la grâce de
Dieu avait abondé même sur les plus
grands pécheurs, cette doctrine
n'autorisait en aucune façon les
chrétiens à demeurer dans le
péché, mais qu'au contraire elle
les en retirait puissamment, et que le
baptême les engageait à vivre dans
la sainteté.
Il fait voir, dans la même
vue, que bien loin qu'il nous soit permis de
pécher, parce que nous ne sommes plus
sous la loi, mais que nous
sommes sous la grâce,
la grâce nous retire de la servitude et de
l'esclavage du péché, pour nous
rendre les esclaves de Dieu, c'est-à-dire
pour nous consacrer entièrement à
son service.
I. 1-14; II. 15-23.
RÉFLEXIONS.
LA doctrine qui est contenue dans ce
chapitre doit être bien
considérée. Elle revient à
ceci :
1. que nous ne devons pas croire
que, parce que la grâce de
Jésus-Christ s'est répandue sur les
hommes qui étaient engagés dans une
grande corruption, il nous soit permis de vivre
dans le péché;
2. que bien loin de là, le
baptême que nous avons reçu, et la foi
en Jésus-Christ mort et ressuscité,
nous obligent de la manière la plus forte
à renoncer au péché et
à mener une vie spirituelle et semblable
à celle de Notre Seigneur;
3. que ce serait une chose bien
indigne de notre vocation et de notre état
de chrétiens, si le péché
régnait en nous et si nous nous laissions
entraîner par les désirs
déréglés de la chair; mais que
nous devons plutôt nous attacher à
Dieu, ne vivre que pour lui, et employer nos corps
et nos âmes à sa gloire et à
son service;
4. que c'est abuser de la doctrine
de la grâce et faire un grand outrage
à Jésus-Christ et à
l'Évangile de s'imaginer que l'on peut
pécher sans rien craindre, sous
prétexte que nous ne sommes plus sous la
loi, mais que nous sommes sous la grâce;
qu'au contraire, l'effet que la grâce doit
produire, et le but pour lequel elle nous a
été donnée, est de nous
affranchir de l'esclavage honteux du
péché, pour nous soumettre et nous
assujettir entièrement à Dieu et
à la justice, et nous faire porter les
fruits de la sainteté, afin que nous
obtenions la vie éternelle. Ce sont
là des vérités
tout-à-fait importantes, et ce chapitre
où elles sont contenues doit être lu
et médité avec un soin particulier.
CHAPITRE
VII.-
L'apôtre ayant
enseigné, dans le chapitre qui
précède, que, quoique les
chrétiens ne soient plus sous la loi, mais
qu'ils soient sous la grâce, il ne leur est
en aucune façon permis de vivre dans le
péché, confirme cette doctrine dans
ce chapitre. Il y fait voir,
- 1. que comme une femme a la liberté
de se remarier après la mort de son mari,
les chrétiens avaient pu quitter la loi
de Moïse pour s'attacher à
l'Évangile, et qu'ils n'avaient
été affranchis de la loi que pour
être assujettis à
Jésus-Christ, qui les
appelle et qui les forme
à la vraie sainteté.
2. Il montre ensuite que ce
changement leur était
très-avantageux, puisque par ce moyen ils
étaient en état de porter des
fruits de justice et de servir Dieu dans un
esprit nouveau.
Pour mieux expliquer sa
pensée, il dit que la loi était
sainte et bonne en elle-même, qu'elle
n'était point la cause du
péché; mais qu'elle n'avait pas la
même efficace que l'Évangile a,
pour sanctifier les hommes et pour les
affranchir de leur corruption.
C'est dans ce dessein que
l'apôtre représente en sa personne
l'état d'un homme qui vit sous la loi et
qui est assujetti au péché et
à la mort, et qu'il rend grâces
à Dieu de ce qu'il avait
été délivré de cet
état-là par Jésus-Christ,
Notre Seigneur.
I. 1-4; II. 4-5-6; III. 7-8; IV. 9-25
RÉFLEXIONS.
C'EST ici un chapitre qui doit
être bien entendu et dont il ne faut pas
abuser. Le dessein de saint Paul est d'y enseigner
que la doctrine de la grâce tend à
sanctifier les hommes, comme il l'avait
établi dans le chapitre
précédent.
Ainsi, quand il parle d'un homme
charnel vendu au péché, en qui il n'y
a aucun bien, qui est esclave de la loi du
péché, qui ne fait pas le bien qu'il
approuve et qui fait le mal qu'il
désapprouve, il ne faut pas croire qu'il ait
voulu parler d'un homme
régénéré et d'un
chrétien en qui l'esprit de
Jésus-Christ habite. Car l'apôtre dit,
dans ce même chapitre, que les
chrétiens sont délivrés de cet
état de péché et de
condamnation, afin qu'ils portent des fruits pour
Dieu et qu'ils le servent dans un esprit nouveau;
et il enseigne, dans le chapitre suivant, que les
Fidèles ne sont plus sous l'esclavage de la
chair et du péché, et qu'ils en ont
été affranchis par
Jésus-Christ, Notre Seigneur.
Mais saint Paul a voulu
représenter en sa personne, par une
manière de parler figurée, qui lui
est ordinaire, l'état d'un homme qui est
sous la loi, et qui, n'ayant pas la foi et l'Esprit
de Jésus-Christ, est esclave de ses
passions. La doctrine de l'apôtre revient
donc à ceci : que la loi n'avait pas la
même vertu que l'Évangile, pour
délivrer les hommes de leur corruption et
pour les sanctifier; d'où il suit que, bien
loin que la doctrine de la justification par la foi
leur donne la liberté de pécher, elle
tend à les rendre saints et à les
délivrer de la servitude des passions; et
qu'ainsi ceux qui sont encore engagés dans
cette servitude, et en qui les désirs de la
chair règnent, n'ont pas une
véritable foi et n'appartiennent point
à Jésus-Christ.
CHAPITRE
VIII.-
Saint Paul continue
- à montrer que les chrétiens ne
sont plus assujettis à la condamnation et
au péché, comme ceux qui sont sous
la loi, et qu'ils se conduisent, non par les
mouvemens de la chair, mais par ceux de l'esprit
de Dieu.
Et de là, il conclut que
les Fidèles étaient dans une
obligation indispensable de renoncer aux
désirs de la chair et de vivre selon
l'Esprit, comme étant les enfans de Dieu
et les héritiers de son royaume.
Et parce qu'on aurait pu croire
que les chrétiens n'étaient pas
réconciliés avec Dieu, puisqu'ils
étaient exposés aux
persécutions, l'apôtre fait voir
que ces persécutions n'empêchaient
pas qu'ils n'eussent part à l'amour de
Dieu. C'est ce qu'il exprime, en disant que
toutes les créatures, c'est-à-dire
les Fidèles, souffraient de grands maux,
mais qu'ils attendaient cependant avec une ferme
espérance la manifestation de la gloire
des enfans de Dieu.
Saint Paul ajoute que Dieu les
soutenait par son Esprit, dans leurs
souffrances, qu'il exauçait leurs
prières, et que les afflictions, bien
loin de leur nuire: contribuaient à leur
bonheur, Dieu ayant arrêté que les
Fidèles parviendraient à la gloire
par les souffrances, comme Jésus-Christ.
De tout cela l'apôtre conclut que le
bonheur des élus de Dieu est
assuré, et que Dieu leur ayant
donné son propre Fils, qui est mort et
qui intercède pour eux dans le ciel, il
n'y a aucune créature ni aucuns maux qui
puissent les empêcher de parvenir à
la félicité éternelle.
I. 1-13; II. 14-24; III. 25-29; IV. 30-38.
RÉFLEXIONS.
LES instructions que la
première partie de ce chapitre nous donne
sont :
1. que l'état des vrais
Fidèles est très-heureux, puisqu'il
n'y a plus de condamnation pour eux, et qu'ils sont
affranchis du péché et de la mort,
par la grâce de Notre Seigneur
Jésus-Christ et par l'efficace de son
Esprit;
2. que la vraie et la plus
sûre marque à laquelle on
reconnaît ceux qui appartiennent à
Jésus-Christ, c'est qu'ils ne vivent pas
selon la chair, mais qu'ils en mortifient les
désirs, qu'ils sont affectionnés aux
choses spirituelles, et qu'ils suivent les
mouvemens de l'Esprit de Dieu dans toute leur
conduite; qu'ainsi les chrétiens doivent
s'étudier à une vie sainte; que ceux
qui vivent dans le péché n'ont point
l'Esprit de Jésus-Christ, qu'ils ne peuvent
plaire à Dieu, et qu'ils demeurent
engagés dans la mort; mais que ceux qui
travaillent à mortifier
les passions du corps ont part à la vie
spirituelle et à l'héritage que Dieu
réserve à tous ses enfans.
La seconde partie de ce chapitre
nous enseigne,
1. que les afflictions et les maux
de cette vie ne sont point à comparer avec
la gloire céleste, et que bien loin que ces
maux empêchent le bonheur des enfans de Dieu,
ils y contribuent au contraire, et qu'en
général toutes choses concourent au
bien de ceux qui aiment Dieu;
2. que les Fidèles et ceux
que Dieu aime le plus soupirent et
gémissent, en attendant cette grande gloire
qui leur est destinée; qu'ils passent
même quelquefois par de grandes
épreuves; mais que cependant Dieu les
soutient et les console dans les combats, par son
Esprit, et qu'il se sert des afflictions
même, pour les conduire à la gloire et
pour les rendre conformes à
Jésus-Christ.
3. L'apôtre nous assure que
Dieu glorifiera infailliblement tous ses
élus; que leur ayant donné son Fils,
il n'est pas possible qu'il ne leur accorde tout ce
qui leur est nécessaire; que la mort de
Jésus-Christ, sa résurrection, son
entrée dans le ciel et son intercession, les
remplissent d'une ferme confiance au milieu des
plus grands maux; et qu'il n'y a aucune
créature, ni dans le ciel ni sur la terre,
qui puisse les séparer de l'amour de Dieu.
Ces considérations sont très-propres
à soutenir et à consoler les
Fidèles dans leurs afflictions, à les
remplir de joie et d'espérance, et à
les affermir de plus en plus dans l'amour de Dieu
et dans la piété.
CHAPITRE
IX.-
L'apôtre, ayant
enseigné que les payens avaient part
à la grâce de Dieu aussi bien que les
Juifs, répond à ce qu'on aurait pu
lui opposer qu'il s'ensuivrait de sa doctrine que
les Juifs, qui étaient le peuple que Dieu
avait élu, étaient exclus de ses
promesses, et que les gentils, qui ne descendaient
pas d'Abraham, étaient devenus le peuple de
Dieu. Il déclare sur cela,
- 1. qu'il aimait tendrement les Juifs,
jusque-là qu'il voudrait se
dévouer à la mort et être
traité comme le dernier des hommes, si
cela pouvait contribuer à leur salut.
2. Il montre après cela
que tous ceux qui descendent d'Abraham ne sont
pas regardés comme sa
postérité, ni compris dans
l'alliance divine. C'est ce qu'il fait voir, par
l'exemple d'Isaac, que Dieu choisit plutôt
qu'Ismaël, qui était aussi fils
d'Abraham, et par l'exemple de Jacob qui fut
choisi préférablement à
Ésaü, quoique tous deux eussent le
même père, et la
même mère, et qu'ils fussent
jumeaux.
Saint Paul établit ensuite
que Dieu peut recevoir dans son alliance et
élire pour le salut ceux qu'il trouve
à propos, et que les hommes n'ont aucun
sujet de s'en plaindre, puisqu'il est libre dans
la distribution de ses grâces, et qu'il ne
fait rien, même à l'égard
des méchans, qu'avec justice et avec
bonté, usant d'un grand support envers
eux, et ne les rejetant qu'à cause de
leur endurcissement.
Enfin il conclut de tout ce qu'il
avait dit, que Dieu avait pu appeler les payens
au salut; ce qu'il confirme par les oracles des
prophètes, qui avaient clairement
prédit la vocation des gentils et la
réjection des Juifs.
I. 1-5; Il. 6-13; III. 14-24; IV. 25-33.
RÉFLEXIONS.
L'ABRÉGÉ et la
substance de ce chapitre est que Dieu, qui est le
maître de toutes choses, et avec cela
parfaitement juste et souverainement bon, peut
faire part de ses grâces a ceux qu'il trouve
à propos, sans que les hommes aient aucun
sujet de s'en plaindre, et qu'ainsi il a pu
destiner le salut aux payens aussi bien qu'aux
juifs, et même rejeter justement les Juifs
incrédules, comme les prophètes
l'avaient expressément prédit.
Cette doctrine nous engage à
louer la miséricorde du Seigneur, qui a bien
voulu nous appeler à son alliance, nous qui
étions payens d'origine, et à
reconnaître que si nous sommes élus
pour le salut, c'est à la seule grâce
de Dieu que nous en sommes redevables. Nous devons
considérer après cela que, comme tous
ceux qui descendaient d'Abraham n'avaient pas part
aux promesses de Dieu, et que même les Juifs,
à qui ces promesses avaient
été faites, furent rejetés
nonobstant les privilèges de leur vocation,
pour n'avoir pas cru en Jésus-Christ, aussi
les avantages de l'alliance divine ne nous
serviront de rien, si nous ne répondons pas
à la bonté du Seigneur envers nous,
et si nous nous excluons nous-mêmes du salut,
par notre ingratitude et par notre
incrédulité.
CHAPITRE
X.-
Saint Paul
- continue à parler de la
réjection des Juifs et de la vocation des
gentils. il fait paraître une tendre
affection pour les Juifs, il leur rend
même le témoignage qu'ils avaient
la plupart du zèle pour Dieu; mais il dit
qu'ils avaient rejeté l'Évangile,
parce qu'ils cherchaient leur
justice dans la loi de Moïse, ne comprenant
pas que la loi les conduisait à
Jésus-Christ.
- Il fait voir ensuite, par les paroles de
Moïse, que la foi est Un moyen beaucoup
plus facile d'être justifié devant
Dieu que la loi ne l'était, et que ce
moyen d'obtenir le salut consiste à
croire de coeur en Jésus-Christ, et
à faire une profession publique de sa
doctrine.
- 3. Il dit que ce salut était offert
à tous les hommes, par la
prédication de l'Évangile, et il
prouve par les prophètes, et en
particulier par les oracles de Moïse et
d'Esaïe, que les payens devaient être
appelés et que les Juifs devaient
être rejetés, à cause de
leur endurcissement et de leur
incrédulité.
I. 1-14; II. 5-12; III. 13-21.
RÉFLEXIONS.
Nous apprenons d'ici,
1. qu'il n'y a point de moyen de
parvenir au salut que celui qui nous est
présenté en Jésus-Christ, et
que ceux qui cherchent d'autres moyens que
celui-là ne sauraient être
Sauvés;
2. que la voie que l'Évangile
prescrit pour être justifié n'a rien
qui soit au-dessus de nos forces et qui ne soit
même très-facile, et qu'ainsi nous
serons inexcusables, si nous ne nous
prévalons pas d'un si précieux
avantage.
3. Saint Paul nous apprend, dans ce
chapitre, que tous ceux qui croient en
Jésus-Christ du coeur, et qui le confessent
de la bouche, seront sauvés; ce qui fait
voir qu'une foi sincère et une profession
publique de l'Évangile sont d'une absolue
nécessité pour le salut.
4. L'apôtre nous enseigne de
plus que Dieu a voulu que sa grâce fût
offerte à tous les hommes par
l'Évangile, que la foi se produit par la
prédication de la parole de Dieu, et qu'afin
que cette parole soit entendue, il faut qu'il y ait
des personnes qui soient envoyées pour
l'annoncer. Par là nous devons
reconnaître la nécessité, de la
prédication de l'Évangile et le cas
qu'on doit faire de la parole de Dieu et du
ministère évangélique.
Enfin nous voyons dans ce chapitre
que la vocation des gentils et
l'incrédulité des Juifs avaient
été formellement prédites. Ce
qu'il y a à considérer
là-dessus c'est, d'un côté, que
Dieu avait prévu et prédit long-temps
à l'avance ce qui devait arriver un jour
tant aux Juifs qu'aux payens; ce qui prouve, d'une
manière invincible, qu'il y a une Providence
qui conduit toutes choses et que la religion
chrétienne est d'une origine divine. D'un
autre côté, cela nous avertit que les
chrétiens qui n'obéissent pas
à l'Évangile et qui sont rebelles
à la vocation divine,
seront privés du salut,
comme les Juifs le furent autrefois, et que
même la punition de ces chrétiens sera
beaucoup plus rigoureuse.
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