L'APPEL DU
GRAND NORD-OUEST CHINOIS
LE
KANSU ET LES
PROVINCES LOINTAINES
CHAPITRE XIV
Les
Salars de
la frontière thibétaine.
C'est un merveilleux pays que cette
frontière avec sa population de Musulmans,
de Thibétains et d'indigènes sous la
domination chinoise. Le petit endroit où
nous passâmes le dimanche est une ville
fortifiée avec un gouvernement officiel.
Nous trouvâmes là une famille de
missionnaires, pionniers solitaires, ne
dépendant d'aucune organisation, aimant le
Seigneur et le peuple et ne se préoccupant
pas des sacrifices que cette vie entraîne
pour eux. Vivant dans les trois petites chambres
d'une maison indigène, la mère
nourrissait son bébé âgé
d'un mois, s'occupait du ménage, soignait
les trois autres enfants, recevait des visites,
distribuait des remèdes et dirigeait les
cultes chinois comme si la prédication de
l'Évangile eut été son unique
occupation. Son mari, bien que prenant sa part de
tout ce travail, s'occupait plus
spécialement des Thibétains. Le
dimanche, la petite chapelle se remplissait d'un
auditoire attentif.
La grande difficulté
était de terminer les réunions, car
les gens attendaient toujours, désireux
d'écouter encore et de chanter davantage. Un
homme, à l'aspect distingué et
intelligent nous intéressa
spécialement; c'était leur professeur
thibétain, appartenant à une branche
de la Secte Rouge, dont les membres sont
appelés Bonzes, reconnaissables à
leur extraordinaire chevelure qu'on ne touche
jamais et qui croit sans aucune entrave. Elle est
portée en un lourd rouleau au-dessus de la
tète, protégée de la pluie et
de la poussière par une sorte de bonnet de
bains. Ce prêtre paraissait porter un grand
chapeau, car ses cheveux débordaient tout
autour de sa tête et il fut assez aimable, eu
se séparant de nous, de retirer son bonnet
afin de, nous montrer son étonnante
chevelure. Elle n'avait jamais été ni
lavée, ni coupée, ni peignée
et présentait l'aspect, de ficelles
emmêlées qui, étant toujours
enroulées, avaient l'air d'un câble de
navire. Cette espèce de câble
était presque aussi gros que le bras d'un
homme et touchait presque la terre bien qui, leur
propriétaire fut grand. Cette chevelure
formait l'orgueil et la gloire de ce prêtre,
bien qu'il essayât de prendre un air modeste
en la recouvrant de sa coiffure. Cet homme aimable
et bienveillant était d'un grand secours
pour les missionnaires, il semblait aimer les
enfants d'un amour qui était
réciproque.
Combien il est impossible à
nos amis en Angleterre de se représenter la
vie de cette famille dans la solitude d'un tel
milieu. La mère n'avait pas vu une femme
européenne depuis plus d'un an et les
enfants n'avaient ni école, ni compagnons de
jeu, ni endroit pour s'ébattre, sauf la
petite cour derrière la maison. Cependant,
dans cette demeure inconfortable, ces amis sont
aussi joyeux et confiants qu'il est possible de
l'être. Ils aiment les indigènes et
leur travail, mais par dessus tout ils aiment Celui
au Nom duquel ils sont venus s'établir en
cet endroit, et le Seigneur leur donne bien des
sujets d'encouragement.
Mais ensuite, quel contraste
frappant entre la splendeur de la nature dans
laquelle nous poursuivions notre route et l'humble
Maison missionnaire que nous venions de quitter et
dont les habitants ne se lassaient pas de prier et
de demander à Dieu du renfort. Nous montions
toujours plus haut jusqu'à un plateau
verdoyant où quelques Thibétains
paissaient leurs moutons; puis, en montant encore,
nous aperçûmes un spectacle
merveilleux, une vision inoubliable de hauteurs et
de profondeurs enveloppées dans un
brouillard épais et mystérieux qui
descendait du sommet que nous avions atteint; pas
un être vivant, pas une habitation, rien que
de hautes cimes surgissant de cette mer de
brouillard, avec des vallées
dans le fond et plus loin
une
rivière gelée. C'était un
endroit propice au recueillement et à
l'adoration.
Quelques heures plus tard nous
écrivions dans notre journal :
« Nous voilà redescendus
dans la plaine par des chemins impossibles à
décrire; comment nous avons pu, sans avoir
des ailes, franchir certains de ces passages
dangereux ou contourner certains coudes où
l'étroit sentier à nos pieds se
déroulait comme les spirales d'un
tire-bouchon, je l'ignore!
Avec un précipice vertigineux
d'un côté et des parois d'argile
rougeâtre de l'autre, il me fallait tenir ma
pensée fixée sur les teintes exquises
du paysage pour échapper à la
conscience du danger.
Nous étions reconnaissants
envers les muletiers qui se tenaient à la
tête de leurs bêtes,
spécialement lorsque la mule de
derrière semblait glisser sur la
litière en avant et qu'on n'apercevait plus
que la queue, de celle de devant. »
Et maintenant nous arrivions
dans la
spacieuse, vallée du Fleuve Jaune qui forme
déjà, quoique si près de sa
source, une imposante masse d'eau. En contemplatif
ces terrains fertiles arrosés par les
méandres du fleuve, nous comprenions les
raisons qui avaient décidé les Salars
à s'établir ici depuis plus de cinq
cents ans. Ils représentent les Turcs de la
Chine, venus de Samarcande
d'où ils furent chassés, à ce
que l'on raconte, à cause de leurs instincts
turbulents et voleurs.
Le courage et la
détermination ne leur manquaient pas, car
ils eurent à traverser les parties les plus
sauvages de l'Asie centrale en suivant la Grande
Route jusqu'à Kanchow, puis, vers le Sud,
à Sining, toujours en quête d'un
endroit convenable pour s'y arrêter.
L'étoile qui les guidait était
représentée pour eux par une
bouteille d'eau et une boite renfermant de la
terre, offertes par un grand prêtre,
descendant de Mahomet, qui les avait bénis
avant leur départ de Samarcande et leur
avait dit : « Conservez-les soigneusement et
quand vous trouverez une vallée dont la
terre et l'eau seront semblables à
celles-ci, alors établissez-vous là
et multipliez-y, car ce sera l'endroit que Dieu a
choisi pour vous ». Les Salars emmenaient avec
eux un chameau blanc qui était
considéré par eux comme un heureux
présage pour leur avenir.
Ce chameau les avait
accompagnés jusqu'à ce que la
caravane eût atteint et traversé le
Fleuve Jaune et se fût, arrêtée
dans cet endroit romantique où Ils avaient
organisé leur halle du milieu du jour. Le
fleuve coulait à leurs pieds, des rochers
abrupts se dressaient de chaque côté
de la vallée et des pies neigeux
s'apercevaient au loin.
Aucune ville n'existait alors
à l'emplacement qu'occupe aujourd'hui
Sünhwa. La vallée était
silencieuse et déserte. Tout à coup
un cri s'éleva parmi les Salars :
« Le chameau blanc n'est plus
là! Où peut-il être
?»
La bête avait en effet disparu
et on la chercha en vain d'un bout à l'autre
de la caravane. Tandis que les chefs discutaient
entre eux sur la raison d'être d'un tel
événement, ils se souvinrent tout
à coup de la bouteille d'eau et de la
boîte de terre qu'ils se mirent à
examiner. La terre ayant été reconnue
identique à celle de cette vallée et
l'eau pareille à celle du fleuve, la
question fut résolue pour eux. C'est
là qu'ils devaient
s'établir.
Comme pour confirmer cette
décision, le chameau blanc leur apparut se
profilant sur les rochers. On peut encore
aujourd'hui, nous fut-il dit, apercevoir les
contours de l'animal sur une pierre plus claire que
les autres.
Les Salars se sont donc
établis le long du fleuve,
disséminés en huit tribus qui se
subdivisent en Kokandi, Samarkandi et Tashkandi.
Ils sont aussi féroces et maraudeurs que par
le passé.
Leur ancienne passion pour la
guerre
a encore été alimentée par
leurs continuelles escarmouches avec les
Thibétains, sans parler du terrible
rôle qu'ils jouèrent
dans les révoltes des
Musulmans contre la domination chinoise. Maintenant
encore, leur dicton : « Il faut un Salar pour
gouverner les Salars », est resté
populaire. et même pour celui-ci la
tâche est difficile.
Pendant que nous séjournions
parmi ce peuple aux traits réguliers, aux
grands yeux noirs, au teint clair et qui parle un
jargon plutôt turc que chinois, il nous
semblait revoir les peuplades de l'Asie Mineure.
Quelques-unes des femmes sont réellement
belles et leurs enfants paraissent
intelligents.
Nous fûmes frappés du
grand nombre de leurs mosquées et de leurs
écoles, bien conditionnées même
dans les campagnes, mais ce ne fut que plus tard
que nous comprîmes à quel point ce
peuple est désireux de
s'instruire.
Dans un journal turc publié
à Constantinople, le missionnaire musulman
Abdul Aziz donne beaucoup de détails sur les
communautés mahométanes en Chine. Il
parle des Salars comme étant, plus
avancés dans l'instruction et dans
l'industrie que, leurs voisins musulmans et attire
l'attention sur leurs sommaires fameux, les
capacités de leurs professeurs et le bon
renom de leurs scribes.
La grammaire, les lois, la
logique,
l'interprétation du Coran sont
enseignées dans leurs écoles par des
livres arabes importés des Indes. Ils
régissent leurs propres
lois et sont d'habiles agriculteurs ; ils
exploitent aussi le coton, la soie et le cuir en
vue de l'exportation.
Ces Turcs laborieux et
inlassables,
dit-il, ont obtenu en Chine des positions
importantes. Plusieurs d'entre eux ont
visité la Terre Sainte, le Hedjaz et la
glorieuse patrie de Mahomet. M. Abdul Aziz avait
rencontré à Kuldja un savant Salar
très distingue, qui avait
résidé en Égypte et à
Constantinople et avait visité la Mecque. Sa
dignité et son intelligence
impressionnèrent le prêtre musulman
qui parlait plus tard du privilège qu'il
avait eu à faire sa connaissance. Sa
demeure, disait-il, était
fréquentée par les hommes les plus
éminents de la ville; il répondait,
à leurs questions avec une grande sagesse;
la distinction et la simplicité de son
langage prouvaient sa parfaite connaissance de
l'arabe, du persan et de l'ancien turc. Il
fascinait tous ceux qui l'écoutaient par ses
discours inspirés de Platon. Le désir
intense de cet homme était
l'amélioration des écoles et des
séminaires musulmans. «
Dernièrement encore, avouait-il, je croyais
avec vous que nos institutions et nos principes
d'éducation étaient parfaits, mais
mes voyages m'ont démontré que nous
devons réformer nos méthodes. J'ai
visité à Constantinople et en
Égypte des librairies
célèbres, remplies de livres nouveaux
dont nous aurions un urgent besoin. J'ai
obtenu les programmes de
ces
universités et je désire les voir
appliqués pour le perfectionnement de nos
écoles. Sitôt de retour chez moi
j'espère inviter tous les musulmans
lettrés afin d'attirer leur attention sur
ces programmes et de chercher avec leur concours
à réformer nos écoles et nos
séminaires. Si nous arrivons à
réaliser ce projet, nous conduirons fous les
musulmans chinois dans la bonne voie.
»
Il suggérait ensuite trois
projets que les Salars du Kansu devraient adopter :
après avoir amélioré les
écoles, ils feraient venir des professeurs
de Constantinople et des Indes, ainsi qu'une presse
à imprimer afin d'éditer
eux-mêmes les livres nécessaires et de
publier un journal national pour encourager le
peuple a s'instruire. « Si nous pouvons
réaliser ce plan, ajoutait-il avec
confiance, les musulmans chinois acquerront une
meilleure position; et je crois avoir raison
d'espérer que le gouvernement chinois, si
cela est nécessaire, encouragera cette
entreprise et lui prêtera son assistance.
»
Une génération
s'était écoulée entre le
retour de cet homme distingué au Kansu et
notre arrivée dans cette partie de la
province. Vivait-il encore et les réformes
qui lui tenaient tant à coeur avaient-elles
été accomplies ? Je ne pense pas que
dans tous ses voyages ce savant ait
rencontré quelqu'un pour lui parler de la
vie éternelle ; et encore
aujourd'hui, dans ce beau pays des Salars, il
n'existe aucun témoin de l'amour de Dieu en
Christ.
C'était cette
réflexion qui étreignait nos coeurs,
tandis que nous traversions le fleuve, en face de
la ville de Sünhwa, et que nous avancions du
côté des montagnes sur lesquelles les
Thibétains ont été
refoulés.
Les vallées qui, de ces
montagnes, se dirigent vers le sud sont d'une
magnificence qui dépasse toute description,
spécialement dans certains passages
où elles atteignent treize mille pieds
d'altitude.
Peu de voyageurs étrangers
fréquentent cette route, M. Ridley
lui-même et nos muletiers ne la connaissaient
pas, aussi, en nous mettant en route, par cette
matinée de mars, ignorions-nous
complètement ce qui pourrait nous arriver.
« Nous avons quitté le Fleuve Jaune,
écrivait, le soir, l'un de nous, et avons
suivi l'un de ses affluents. Tout le jour nous
avons ascensionné jusqu'à ce que nous
ayons atteint la limite des neiges, passant
à côté de champs
irrigués, de belles mosquées, de
fermes isolées, d'une petite ville et de
quelques sépultures thibétaines assez
remarquables. Et dans le fond du paysage, quelle
merveilleuse vision des cimes neigeuses perdues
dans les nuages avec des vallées
noyées dans la brume! Des sentiers
escarpés longeaient ces dernières,
jusqu'aux habitations indigènes.
Tout le long du voyage, nous
avons
rencontré cette race thibétaine si
pittoresque dans ses accoutrements bizarres, hommes
au bonnet de fourrure pointu, femmes aux tresses
flottantes, prêtres vêtus de rouge avec
des rosaires de lourdes perles, vieillards
récitant leurs longues prières
monotones.
Un jeune couple attira
spécialement, notre attention; l'homme
était grand, d'allure dégagée
et portait une écharpe de soie pourpre
enroulée autour de sa tête, la femme
détournait timidement les yeux. Elle
était vêtue d'une peau de mouton neuve
retenue par une ceinture, ses longs cheveux
étaient tressés en une
quantité de nattes couvertes d'une
étoffe rouge qui retombait comme un voile
depuis le front; elle paraissait heureuse et
florissante et nous donnait l'impression d'une
aimable personne. Une autre fille s'approcha de
nous lorsque nous repartions après le repas,
ses cent huit nattes étaient réunies
en deux longues tresses et son soupire était
gai et attrayant.
Ces femmes thibétaines
m'attirent beaucoup et quand on se
représente la somme d'amour et les services
qu'elles pourraient rendre à Celui qui donna
Sa vie pour leur salut, quel Intense, désir
nous éprouvons de les gagner à
Christ! Nous cheminions dans la neige à ce
moment-là, la dernière auberge
était loin derrière nous et nous
cherchions à découvrir un gîte
pour la nuit, mais bien
qu'avançant toujours
malgré le froid et la fatigue, ni aucun
village n'apparaissait à
l'horizon.
En réalité, nous
avions atteint une altitude où nous ne
pouvions plus espérer rencontrer même
une cabane de berger. Rien que des sommets de
montagnes; tout autour de nous, c'étaient
ces pics neigeux qui nous avaient paru si
splendides depuis le fond de la vallée et
qui, maintenant que nous y étions parvenus,
revêtaient un aspect sévère et
inhospitalier. « L'auberge est-elle encore
loin d'ici? », demandâmes-nous à
un homme qui redescendait. « Pas trop, pas
trop et la route est bonne », fut la
réponse plus polie que vraie.
Cette «bonne route» se
rétrécissait tellement qu'elle
finissait par devenir un sentier perdu dans la
neige. Plus loin nos mules rencontrèrent des
champs de glace sur lesquels elles glissaient sans
cesse, puis un sentier à pic parmi les
rochers et les pierres, mais le passage se trouvait
devant nous, et, depuis le sommet nous allions
apercevoir un endroit pour y passer la nuit. L'un
après l'autre, atteignîmes la cime,
formant un groupe silencieux. S'il n'avait pas fait
si froid et si sombre, la vue eût
été superbe, mais en de telles
circonstances notre courage
défaillait
Aussi loin que l'oeil pouvait
voir,
aucune maison n'apparaissait, rien que de la neige,
du brouillard et des abîmes
ténébreux où des
précipices descendaient à
porte de vue. La vallée
elle-même semblait se perdre parmi ces pies.
Il nous fallait descendre, mais comment y parvenir
? Nous n'en savions rien. La descente fut
impossible à décrire et nos
sentiments le furent aussi lorsque nous
découvrîmes, après avoir
marché longtemps parmi les rochers et la
neige, que ce sentier au lieu de nous amener au but
recommençait à monter à perte
de vue. Le vrai chemin se trouvait devant nous, et
le premier n'avait été qu'un moyen
d'y arriver.
« Voici, Je suis avec vous tous
les jours. » Combien cette assurance nous
était précieuse alors que nous
devions regrimper vers les hauteurs, cherchant un
refuge à travers l'ombre toujours plus
épaisse. La descente sur l'autre versant fut
raide et difficile, la vallée en dessous de
nous nous apparaissait plus profonde encore que
celle que nous venions de quitter, mais
hélas ! aucun vestige d'habitation ne venait
réjouir notre vue ! Devant nous se
déroulait toujours le même lugubre
tableau : rien que des rochers, de la neige, du
brouillard et des ténèbres. Mais nous
étions conscients d'une Présence qui
respirait la paix.
Trébuchant et glissant sur
des champs de neige aussi inclinés que le
toit d'une maison et qui s'étendaient sur
des centaines de pieds nous descendions toujours.
Les mules nous suivaient, transportant nos
litières vides et c'est encore un
mystère pour nous de savoir comment
ces bêtes parvinrent
à descendre ce chemin tortueux. Il faisait
si obscur maintenant que nous pouvions à
peine distinguer le sentier, et nous avions presque
oublié, dans le péril du moment,
comment nous passerions la nuit... Aussi avec quel
immense soulagement nous découvrîmes
enfin, cachée derrière un repli de la
montagne, une auberge où nous
trouvâmes de la nourriture pour nos
bêtes et un grand feu pour nous
sécher!
Le lendemain, nous arrivions
dans la
magnifique plaine de Hochow.
.
CHAPITRE XV
Les fils d'Ismaël.
Les actifs, remuants et, tapageurs qui habitent
près de la porte est de Hochow, ne sont pas
des Salars. Devant l'excitation fébrile de
tous ces gens, on pourrait croire qu'une foire
spéciale a lieu, qui va leur fournir une
occasion unique de faire fortune, mais ce
marché, situé en dehors de la porte,
se renouvelle tous les jours. Pour échapper
à la foule et obtenir une vue d'ensemble
plus étendue, nous escaladons la muraille de
la ville, déserte à cette heure, et
d'où nous pouvons voir sans être
vus.
Bien qu'ils ne soient ni Salars,
ni
Turcs, ces gens sont des descendants d'Ismaël.
Les établissements des Salars sont
derrière nous, le long du Fleuve Jaune,
tandis que cette ville de Hochow est formée
d'un élément très
différent, venu primitivement d'Arabie. La
ville elle-même est chinoise et aucun
Mahométan ne peut résider à
l'intérieur de ces murailles, mais la
population des faubourgs est en grande partie
musulmane. Plus loin, dans les montagnes, se
trouve, une autre race
également musulmane descendant des
indigènes de la province qui furent
convertis à l'Islam par la pointe de
l'épée. Plus au nord, comme nous
l'avons vu, les aborigènes conservent leurs
anciennes croyances, mais, ici, cette branche de
l'arbre primitif isolée par le Fleuve Jaune,
ne pouvait faire autrement que de se soumettre
lorsque les adeptes du Prophète
s'emparèrent de la plaine.
Parmi cette foule, on distingue
bien
vite grâce à son extérieur
très spécial, peuple à
l'aspect robuste et malpropre, dû en bonne
partie à sa rude vie dans les montagnes, et
qui diffère entièrement des Musulmans
des faubourgs qui sont lettrés ou
commerçants.
Comment peut-on expliquer
l'extraordinaire habileté et l'intelligence
des Musulmans comparée à celle des
Chinois? Leur sagacité en fait de commerce
est devenue proverbiale et on citera
fréquemment ce proverbe : « Un
Thibétain peut manger un Mongol et un
Chinois peut manger un Thibétain, mais un
Huei-Huei (Musulman) peut manger l'un et l'autre
», et encore celui-ci : « Un Chinois
réveillé ne vaut pas un Huei-Huei
endormi ». Les Musulmans sont en effet
toujours en éveil et leur but semble
être de surpasser tout. le monde, comme
profits et supériorité.
Mais d'où est venue cette
race si différente des
autres,
disséminée, dans toutes les provinces
de la Chine ?
Comment se sont-ils introduits
en
Chine et que se cache-t-il derrière la haine
et la méfiance avec lesquelles ils sont
considérés? Pendant des
siècles, ils ont vécu côte
à côte avec les Chinois tout en
restant aussi séparés d'eux que de
l'huile et de l'eau, ou, pour mieux dire, que de
l'eau et du feu.
Les relations entre la Chine et
l'Arabie datent de loin et peuvent être
racontées brièvement dans les lignes
suivantes : au commencement, les Chinois
considéraient les Arabes comme de simples
aventuriers qui arrivaient par mer dans les ports
de Canton et de Hangchow.
Ceci se passait avant la
naissance
de Mahomet, vers le Ve siècle, alors que le
commerce d'exportation de la Mecque était
déjà énorme. Hira sur
l'Euphrate, au sud de Babylone, était en ce
temps-là un port important, des jonques
étranges venues de Chine y arrivaient
fréquemment et des récits sur leur
navigation sont encore, conservés dans les
annales de la dynastie de Yang, cette époque
brillante dans l'histoire de la Chine, A. D.
618-907 et qui est contemporaine du point culminant
de la puissance mahométane. L'histoire de la
première ambassade arabe venue en Chine
appartient à cette époque; ou suppose
qu'elle a eu lieu pendant, la
vie du prophète. Atterrissant, à
Canton la délégation se mit en route
pour la capitale Sian où elle fut
reçue avec faveur. Elle apportait avec elle,
pour le remettre à l'Empereur, un portrait
de Mahomet en lui expliquant qu'il ne fallait pas
l'adorer. L'histoire mentionne ensuite une nouvelle
ambassade dont les membres, au lieu de retourner
chez eux, préférèrent pour la
plupart, demeurer en Chine. Ils entreprirent avec
leurs chefs un long voyage de retour par terre
ferme à travers cette province et se
séparèrent les uns des autres sur la
Grande Route. « Huei'chu, huei'chu »,
leur disaient leurs chefs, ce qui veut dire dans
leur langue : « Retournez, retournez
».
C'est ainsi que ce mot de
Huei-huei
est devenu le surnom de ce peuple en
Chine.
Lorsque ces « Huei-Huei »
s'établirent à Sian, une
difficulté s'éleva quant à la
manière dont ils fonderaient un foyer.
Plusieurs jeunes filles auraient été
libres de les épouser, mais leurs familles
appréhendaient les pires catastrophes si
elles s'alliaient à ces étrangers. Ce
fut l'Empereur qui trancha la difficulté; il
organisa des représentations
théâtrales qui devaient avoir lieu au
palais. Une journée rut spécialement
réservée aux jeunes filles et, ce
jour-là, les Huei-huei s'étant
cachés, attendirent le signal qui devait
leur permettre de capturer chacun son
épouse. Le plan
réussit, et les citoyens
qui s'y étaient opposés furent ainsi
obligés de recevoir les Arabes dans leurs
familles.
Plus tard le prestige de ces
émigrants arabes augmenta à cause des
nouvelles de leurs marches victorieuses. Un
siècle à peine s'était
écoulé depuis la naissance du
prophète que l'Empire mahométan
s'étendait déjà depuis
l'Atlantique jusqu'aux rives de I'Indus et à
Kashgar, et ces merveilleux exploits pas
ignorés des successeurs de T'ang. De son
côté, l'Empire chinois
s'étendait sur les pays Ouest de la Chine
proprement dite. jusqu'aux frontières de la
Perse. C'est aux Chinois que la Perse demanda du
secours lorsque l'épée victorieuse de
l'Islam la menaça à son tour. La
Chine ne pouvait faire grand'chose pour la Perse;
dans cette extrémité, elle envoya une
aux Arabes vainqueurs, autant pour se rendre compte
de leurs forces et, de leurs intentions que pour
plaider la cause de la Perse, parmi les
étrangers qui résidaient alors
à Sian.
La Chine, plus tard, devait se
trouver assujettie avec les Arabes sous la
domination des Khans, ces conquérants qui
fondèrent la dynastie des Yüen (1260 -
1368)
Aucun autre fait dans l'histoire
de
l'Islam, raconte T.-W. Arnold, ne peut être
comparé à la terreur et
à la désolation
apportées par la conquête mongole
lorsque « comme unie avalanche les
armées de Yenghis-Khan se
précipitèrent à travers les
campagnes musulmanes et les transformèrent
en déserts et, en ruines informes ».
Yenghis-Khan épargna les intellectuels et
les artisans qui pouvaient être utiles
à son peuple; ses descendants prirent ces
hommes à leur service et, se choisirent
parmi eux des ministres, des gouverneurs, des
généraux, des docteurs et dos
astronomes, fous mahométans. C'est ainsi
qu'à de Marco Polo et de Raymond Lulle,
beaucoup de mahométans occupaient des
positions importantes dans tout l'Empire
chinois.
Se mêlant aux descendants de
leurs premiers pionniers établis là
depuis le Ve et le VIIIe siècle, ils se
formèrent en larges communautés,
mettant souvent leur intelligence et leurs dons au
service du gouvernement chinois.
Des mosquées furent
érigées et le commerce se
développa par mer et par voie de terre,
plusieurs corporations arabes venant apporter leurs
marchandises sous le nom de tribut.
Avec le commencement de la
récente dynastie mandchoue (1644-1912), un
changement remarquable se produisit dans les
relations jusqu'alors plutôt pacifiques des
Chinois et des Musulmans. À ce
moment-là, des troubles
éclatèrent dans la province dit Kansu
et de là s'étendirent plus loin; cet
état de choses s'est prolongé
à intervalles plus ou moins longs
jusqu'à nos jours. Dans ces
rébellions, des millions de gens ont
péri et, les atrocités commises par
les Huei-Huei furent si terribles que leur nom est
prononcé par les Chinois avec
horreur.
La première de ces
révoltes survenue quatre ans après
l'avènement de la dynastie mandchoue, fut
rapidement suivie par une seconde dans la
même partie du Kansu, non loin de la
capitale. Une troisième s'éleva
également parmi les Salars en 1785. Trois
nouvelles rébellions se
succédèrent dans le Yünnan,
province frontière de lit Birmanie, dont la
première dura une année, la seconde
deux arts et la troisième fut
réprimée en 1840, au bout de six ans.
Ceci nous amène au grand soulèvement
du Yünnan qui, pendant dix-huit années
(1855-1873), inonda la province de sang, et
à la grande révolte du Kansu qui
éclata au milieu de l'autre et dura trois
terribles années de plus (1863-1816). Un
million d'hommes périrent dans la
révolte du Yünnan; le commerce fuit en
grande partie anéanti, et la province n'a
pas encore recouvré son ancienne
prospérité.
Au Kansu, les ravages furent
encore
pires; la population réduite, affirme le
colonel Bell, de quinze millions
à un million, neuf Chinois sur dix ayant
péri, et deux musulmans sur trois ! Des
bandes de rebelles parcouraient la contrée
et la détresse était si grande que
l'on prétend que le cannibalisme
régnait parmi eux.
Dans un voyage accompli par M.
Bell
à travers la contrée, il traversa des
districts dans lesquels, sur de grands espaces,
toutes les fermes étaient détruites
et les terrains cultivables en bonne partie
abandonnés. Les monceaux de ruines qui
avaient si fort excité, notre
curiosité dans la grande plaine de Liangchow
sont la meilleure preuve de la haine si fortement
enracinée que l'on respire dans
l'atmosphère chargée
d'électricité de cette province.
Chinois et Musulmans. Thibétains et
Musulmans vivent perpétuellement à
couteaux tirés et même, lorsque cet
état d'esprit n'apparaît pas à
la surface, le danger d'un nouveau
soulèvement n'est jamais
écarté. Mais en dépit de tout
l'intérêt que peut nous offrir
l'histoire de ce Peuple, dans le passé comme
dans l'avenir, nous sommes plutôt
préoccupés par les grands besoins du
moment présent. Pour nous, disciples du
Christ, le fait principal consiste en ce que ces
gens sont aujourd'hui facilement accessibles. Trois
millions de Musulmans vivent dans cette seule
province, dix à douze millions sont
répandus dans tout l'Empire et, pour les
évangéliser, peu ou point de
missionnaires ne se
préparent actuellement. Aucune
Société n'est
préoccupée spécialement de cet
important problème et pas un homme,
libéré de toute autre
responsabilité, ne se consacre à
cette oeuvre difficile entre toutes, de
présenter Christ aux disciples de Mahomet.
Quel défi jette une, ville comme celle-ci,
la Mecque de la Chine, à l'Église
chrétienne! Lorsqu'on envisage l'état
politique, social ou religieux de ce pays, l'appel
devient urgent, et le fardeau qui pèse sur
le coeur de nos missionnaires est que,
jusqu'à présent, presque rien n'a
été lente pour modifier cette
situation.
Considérons ce centre
important de, la population musulmane, avec ses
quatorze mosquées, ses écoles de
théologie, ses professeurs connaissant les
langues turques, arabes et persanes; ces milliers
d'enfants élevés dans l'avarice et la
ruse; ces femmes accablées des plus durs
travaux, n'ayant ni liberté, ni droit, et
pour ainsi dire pas d'âme.
La souffrance de ces
créatures ne peut, être décrite
et, pour leur apporter la Bonne Nouvelle de la
Grâce de Dieu et la lumière divine
dans leurs ténèbres, aucun
missionnaire ne se présente. Dans la ville,
M. et Mme Snyder, de l'Alliance Missionnaire,
travaillent parmi les Chinois, mais ce fait
même les éloigne des Mahométans
qui considèrent un tel contact comme
souillé et
déshonorant pour eux. Il faudrait, pour
atteindre ces gens, vivre de leur vie, dans leurs
propres quartiers, et se conformer aux usages
auxquels les Musulmans attachent une grande
importance, en particulier s'abstenir de toute
viande de porc.
C'est dans un but, pratique que
nous
attirons l'attention de nos lecteurs sur les
besoins de ces millions de Musulmans du grand
Nord-Ouest chinois. Ils sont accessibles,
serviables souvent, mais mis en défiance par
leurs querelles intestines et la haine que leur
témoignent les autres sectes. Cependant ils
sont vaguement conscients de ce qui manque à
leur religion pour satisfaire les coeurs et
résoudre les problèmes du nouvel
état de choses qui existe actuellement en
Chine. Emportés par le courant rapide de ces
temps mouvements ces hommes cherchent à
renouveler leur système religieux par une
vie factice que ce système ne peut donner.
Ils cherchent à contrebalancer leur manque
de pureté et de puissance par une meilleure
éducation et par une nouvelle impulsion de
mysticisme et de spiritualité. J'ignore ce
qui se passe dans le reste du vaste monde de
l'Islam, mais en Chine des occasions
spéciales s'offrent aujourd'hui aux
missionnaires chrétiens.
L'Islam ne possède rien qui
puisse satisfaire la conscience et le coeur, ni
expiation, ni Sauveur. Il ne
possède par
conséquent aucun pouvoir moral pour relever
le niveau de la vie individuelle ou collective dont
la corruption est admise, comme jamais auparavant,
par des Musulmans sérieux, en Chine et
ailleurs. « Nous ne pouvons ressentir beaucoup
de considération pour les femmes,
écrivait un Musulman hindou qui avait pris
ses grades à Oxford, avec un système
qui permet à l'homme de prendre quatre
femmes (il aurait pu ajouter que ce système
autorise un concubinage
illimité).
« La polygamie détruit
chez nous la paix domestique et la moralité
sociale.
« Nous ne pouvons pas avoir de
base solide pour notre vie de famille, puisque nos
femmes sont, laissées dans un étai
d'ignorance absolue et deviennent la proie des
pires superstitions. » Mais où est la
puissance qui pourra changer le coeur des hommes et
leur donner la volonté de libérer
leurs femmes de cet esclavage dégradant,
alors que leur religion les encourage à la
licence dans ses formes les plus brutales et leur
promet un paradis de sensualités
suprêmes ? Des tragédies qui ne
peuvent se raconter, se dissimulent souvent
derrière les hautes murailles de plus d'une
demeure musulmane.
Heureusement qu'ici, en Chine,
les
mariages ne sont pas si précoces que dans
les autres territoires musulmans
et le divorce n'y inspire pas la même
terreur, bien qu'il puisse être accorde pour
des offenses insignifiantes sur la demande du mari
seulement. Dans une maison musulmane, en
Égypte, un missionnaire fut attristé
en constatant la souffrance et la crainte qui se
lisaient, sur le visage d'une Jeune fille de
quatorze ans. Il semblait qu'il y eût
là quelque chose d'anormal, mais lorsqu'il
lui en demanda la raison, il n'obtînt aucune
réponse. Finalement un autre fille lui
expliqua que le père était trop
pauvre pour garder sa fille à la maison, et
que l'enfant était dans l'angoisse parce que
son père lui cherchait un troisième
mari ; ses souvenirs de ses deux premiers
époux étaient si affreux que la
malheureuse appréhendait fort cette nouvelle
épreuve. Nous ne pouvons entrer ici dans de
plus amples détails; mais partout où
règne la puissance de l'Islam, les jeunes
filles ont à supporter des tortures sans
nom. Eu Égypte, malgré l'influence
anglaise, un docteur mahométan a
certifié que les souffrances des femmes et
des fillettes sont tellement entrées dans
les moeurs que l'on n'y fait plus
attention.
Abandonnant la femme à un tel
esclavage et la livrant aux passions les plus
basses de l'homme, l'Islamisme ne leur offre ni
délivrance du péché, ni
puissance capable de transformer leurs vies. Ses
enseignements, quant à l'unité de
Dieu et sa compréhension
de Ses glorieux peuvent être admirables, mais
comme le dit, le docteur Lessup, lorsqu'on examine
de près ces superbes théories, elles
s'écroulent dans la plus complète
dégradation morale.
Lorsque vous regardez la
bibliothèque d'une université,
musulmane, vous rencontrez ce contraste sur chaque
rayon.
Si vous feuilletez leurs livres
sacres sur Dieu et, Ses attributs, Sa
miséricorde, Ses compassions, Son
omnipotence et Son omniscience, vous pourriez les
assimiler à tout ce qui s'enseigne dans un
séminaire sur les doctrines théistes,
mais dans ces mêmes livres vous trouverez
certains passages sur les traditions, de l'Islam
qui ne peuvent être traduits à cause
de leur bassesse.
Tel est le système que nous
avons à combattre dans le Nord-Ouest chinois
et cette lutte demande des hommes instruits autant,
que pieux, et avant tout des hommes de
prière et de foi, prêts à
affronter les ennemis spirituels, retranchés
dans les mosquées et derrière les
règlements du Coran ; car la force de
l'Islam ne réside pas dans sa croyance ou
dans la bigoterie de ses
adhérents.
Ces Musulmans du Kansu sont,
nés combatifs et, peuvent devenir en
certains cas des fanatiques dangereux
ils disent avec fierté,
: « Lorsqu'on est, un Huei-huei, on le reste
toujours ». L'un disait à M. Andrew
avec amertume : « Savez-vous et, que nous
ferions à l'un des nôtres qui
embrasserait votre religion Nous le tuerions
». Mais il existe quelqu'un de plus fort que
« l'homme Fort et bien armé » ; et
ceux qui savent continent, enchaîner le
diable, par la foi à la suprême
victoire, du Calvaire, peuvent
pénétrer dans la maison de l'homme
fort et piller ses biens. Un des aides dit pasteur
Hsi dans la province du Shansi, un vieillard
illettré, mais rempli de la divine avait
coutume de dire en face d'une difficulté qui
paraissait insurmontable : « Tout va bleu.
Jésus est ressuscité des morts.
» L'efficacité de ce fait glorieux
qu'il expérimentait chaque jour
était, le terrain sûr de ses victoires
en toutes circonstances. Jésus est
ressuscité des morts, tout ce qu'Il peut
réclamer de nous est donc
possible.
Ces millions de Musulmans en
Chine
sont un problème presque insoluble pour ceux
qui les évangélisent.
Mais le Maître l'a
commandé, Il est vivant et Il est sur le
Trône. Cette certitude est suffisante pour
celui qui est mi avec Lui dans Sa mort, Sa
résurrection et dans hi place
prééminente qu'Il occupe dans le ciel
à la droite de Dieu.
Bien que ne voulant pas
amoindrir
les difficultés qu'impose un tel travail
dans un tel milieu, nous ne voulons pas non plus
les exagérer ni perdre de vue la victoire
remportée, une fois pour toutes, lorsque le
Fils de Dieu fut manifesté pour
détruire les oeuvres du diable. À
Hochow même, nous combattons un ennemi vaincu
d'avance et qui n'ignore pas sa défaite. En
substance, la Croix est déjà
victorieuse et, quoiqu'il puisse y avoir bien des
souffrances pour les serviteurs unis à leur
Maître, le résultat éternel
leur est assuré.
Nous ne pouvons douter de la
volonté de Dieu à l'égard de
ces millions de disciples du faux prophète,
selon ces versets: « Dieu, notre Sauveur, qui
veut que tous les hommes soient sauvés et
parviennent à la connaissance de la
vérité ». « Il y a un seul
Dieu et un seul Médiateur entre Dieu et les
hommes, Jésus-Christ, homme, qui s'est
donné Lui-même en rançon pour
tous ». (1 Tim. 2 : 3-6.)
Ceux qui suivent les directions
de
Sa providence, désireux d'être
ouvriers avec Lui, ne peuvent faire autrement que
de croire que l'heure est venue d'agir en Son Nom
parmi les Bouddhistes et les Musulmans du
Nord-Ouest. Voulez-vous, en participant à
notre foi et à nos prières, regarder,
avant de quitter la porte est de Hochow, ce terrain
vague au milieu des maisons avoisinantes? Acquis
par le docteur George King, de
l'hôpital de Langchow, ce
terrain est une promesse et une prophétie
qui témoignent de la foi du docteur qui
espère, avec l'aide de Dieu, y ouvrir
bientôt un dispensaire. Connaissant la
bigoterie du peuple, car il a eu l'occasion de
parler à de nombreux auditoires musulmans
dans ces mêmes rues, il est prêt
à venir depuis Langchow, pour surveiller le
travail qu'il confierait à ses meilleurs
étudiants. Les femmes et les enfants
pourraient avoir libre accès à ce
dispensaire dont l'emplacement est retiré et
tranquille et l'Évangile pourrait ainsi y
être vécu et,
annoncé.
Aucun bâtiment n'est encore en
construction et aucun étudiant, homme ou
femme, ne serait libre à Langchow pour
entreprendre cette nouvelle oeuvre ; mais le
terrain est acheté et nous avons toujours
accès au Trône de la grâce. Ne
prendrons-nous pas à coeur ce sujet de
prières, afin que les fonds et les aides
soient donnés pour cette population des
faubourgs, des collines et de la plaine, y compris
les Salars du Fleuve Jaune?
Beaucoup parmi eux ne
seraient-ils
pas préparés à recevoir
là, plus que la guérison de leur
corps?
Lorsque le docteur King vint
avec M.
Marc Botham pour la visite qui amena l'achat du
terrain, ils vécurent des heures critiques
dans leur auberge du faubourg, mais en même
temps de belles occasions d'annoncer
l'Évangile leur furent offertes. Le courage
est nécessaire pour
affronter un ici travail qui exige à la fois
une grande endurance physique, un esprit toujours
en éveil et de la puissance spirituelle; ce
fut une courageuse initiative que celle d'annoncer
une série de conférences publiques
sur des sujets religieux, mais l'auditoire accouru
leur démontra que leur foi n'avait pas
été vaille.
Les discussions à l'auberge,
où leur chambre se remplissait d'ardents
antagonistes, devinrent tellement orageuses que
l'aubergiste ferma les portes et que nos
missionnaires furent obligés de continuer
leurs discussions en plein air. Ils avaient
apporté avec eux une forte lampe à
acétylène qu'ils suspendirent
à l'entrée d'une place où se
groupa, même par la neige, Un auditoire de,
cent à deux cents hommes.
Les sujets choisis étaient
fort intéressants, les deux premières
conférences sur Adam et Noé furent
suivies d'une causerie médicale
écoulée avec le plus vif
intérêt.
Puis d'autres sujets furent
traités sur Abraham. Moïse et David, et
se terminèrent par le récit de la
vie, de la mort et de la résurrection du
Seigneur.
Les grands hommes de l'Ancienne
Alliance ne sont pas Inconnus des Musulmans qui les
considèrent comme des prophètes; ils
connaissent aussi la vie de Christ qui est
mentionnée dans le Coran sous le nom du
prophète Ersa, mais Ils nient absolument que
Jésus soit le Fils de
Dieu, affirmant avec véhémence que
Dieu ne peut pas avoir engendré de Fils. Ils
nient également Sa mort sur la croix et,
même le fait de Sa mort, prétendant
que ce fut Judas qui souffrit à Sa place.
« En réalité, disent-ils, on ne
L'a pas crucifié. » Tels sont
l'enseignement du Coran et la croyance, absolue de
chaque Musulman sincère.
L'Islamisme s'enorgueillit
beaucoup
de la place historique qu'Il occupe dans le monde,
car c'est la seule religion qui ait parti depuis
l'ère chrétienne, qui nie la
puissance de l'Evangile et qui se substitue
à ses doctrines. Mahomet, disent-ils, fut un
prophète plus grand et plus récent
que le Christ et les révélations
qu'il a reçues sont donc le dernier mot de
Dieu. Et cependant, quoiqu'en se plaçant
à ce point de vue, cette manière de
voir puisse paraître plausible, cette
religion sans Sauveur ne peut satisfaire les
besoins des coeurs. « Il est très
significatif de constater, dit le Docteur Wherry,
des Indes, que l'histoire de la théologie
musulmane démontre que
l'hétérodoxie a, presque toujours
été liée au désir
d'avoir un Médiateur. » Ce besoin d'un
Intercesseur, besoin qui ne peut pas se trouver
satisfait par le fait que le prophète
Mahomet se reconnaissait lui-même
pécheur, cette question a surgi tout
à nouveau au cours d'un remarquable
mouvement survenu dans cette même province.
Son fondateur, Ma-Sheng-ren,
était le grand Chef musulman tué lors
du tremblement de terre de décembre 1920,
mais la secte fondée par lui sous le nom de
Djeheriya s'est répandue dans toute la
Chine. « Une des différences
essentielles, déclare Marc Botham, entre
cette doctrine et celle des mahométans
orthodoxes est, que ses adhérents sont
profondément impressionnés par la
nécessité d'un médiateur. Les
autres mahométans désapprouvent cette
secte, spécialement à cause de cette
tendance. Pendant ma visite à Pékin
en 19-21, j'ai visité la mosquée qui
est le centre de ce nouveau culte dans ce district.
J'y fus très cordialement reçu et
l'ou m'y offrit l'hospitalité pour toute la
durée de mon séjour dans la
capitale...
Le chef spirituel de ce district
me
disait qu'il considérait leur secte comme
étant celle qui, entre toutes les sectes
musulmanes, se rapproche le plus de
l'Évangile, par le fait qu'elle
réalise que pour qu'un homme puisse
pénétrer en la présence de
Dieu, il lui faut un autre homme pour l'y
introduire. J'ai toujours été bien
accueilli par tes membres de ces communautés
partout où je les ai rencontrés.
« Il existe donc une expiation pour le
péché, s'exclamait un prêtre
musulman qui pour la première fois entendait
l'Évangile, ces paroles sont pour moi plus
douces que le miel ! »
Si beaucoup d'âmes dans ces
profondes ténèbres
prennent conscience de ce qui manque à leur
salut, que devons-nous faire pour eux ? Nous
répondons avec assurance : prier, beaucoup
prier, afin que le travail du Saint-Esprit
s'accomplisse, et aussi pour que beaucoup de
missionnaires se consacrent aux Musulmans de la
Chine, et que ce soient des hommes et des femmes
qui non seulement aiment les âmes des
pécheurs, mais aiment surtout la
Croix.
La plus grande difficulté ne
serait pas de trouver l'argent, une fois que les
missionnaires, hommes et femmes, animés de
cet esprit, se présenteront,
« Notre espérance est
dans la Croix », écrivait un auteur
dans le journal le Monde musulman et notre crainte
est que nous ne cherchions à nous y
dérober. Les Croisés ont renié
la croix en prenant l'épée;
l'épée, utilisée même
comme moyen de défense, disait Kesley Page,
implique l'essai de tuer le coupable pour sauver
l'innocent. La Croix symbolise la bonne
volonté de l'innocent de mourir pour le,
coupable. » L'épée produit la
brutalité, la Croix la tendresse;
l'épée détruit la vie humaine,
la Croix confère à la vie une valeur
inestimable; l'épée attire la haine,
la Croix attire l'amour. Celui qui prend
l'épée périra par
l'épée et celui qui prend la Croix
héritera de la vie éternelle. En
gagnant au Christ les terres musulmanes, l'appel
s'adresse à des hommes et des femmes qui
veulent suivre le chemin de la
Croix, avec le même courage et le même
abandon de soi-même qu'un soldat qui
défend son pays.
L'Épée ou la Croix, la
vie propre ou la vie de Christ,
l'égoïsme ou le dévouement, des
armes charnelles ou des armes spirituelles, telles
sont les alternatives qui se présentent
à nous. Les amis de Dieu, les vrais amis de
l'humanité, qui partageront l'humiliation de
la Croix, ne pourront être vaincus. La marque
des clous et celle de la lance sont encore la
suprême évidence de la puissance, de
la résurrection de la divinité de
Christ, et la preuve de notre vie
chrétienne.
Cet appel s'adresse aux hommes
et
aux femmes qui veulent, s'offrir eux-mêmes
ainsi que leurs biens pour ce service de
sacrificateur.
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