Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



L'APPEL DU GRAND NORD-OUEST CHINOIS
LE KANSU ET LES PROVINCES LOINTAINES

CHAPITRE VIII
La lointaine Liangchow.

 

Si l'amour divin apporte partout en lui-même une puissance régénératrice, il en est surtout ainsi parmi les païens. En premier et en dernier lieu, c'est l'amour qui les subjugue, cet amour qui leur expose clairement le message du salut et fait comprendre à ces coeurs enténébrés l'amour de Dieu en Christ.

Nous trouvant un jour parmi des femmes qui étaient parvenues récemment à la connaissance de la Vérité, nous fûmes surpris de les entendre aborder d'elles-mêmes ce sujet de l'amour. « Qu'avons-nous ressenti, se demandaient-elles l'une à l'autre, lorsque nous sommes venues ici pour la première fois? »

Or l'endroit était des plus rustiques, une simple demeure de quatre pièces, bâties autour de deux petites cours qui étaient constamment remplies de malades et de visiteurs. « Oui, qu'était-ce? reprit une autre, car à mesure que nous arrivions ici, nous étions conscientes que nos coeurs étaient satisfaits et apaisés, tandis que nous n'éprouvions jamais la même pas même dans la maison de notre mère. Oh! dites-nous proviennent le repos et le bien-être que l'on ici ? »

Cette impression était en effet utile grande réalité, c'était l'épanouissement spontané d'âmes remplies de l'amour de Christ. Des larmes jaillissaient des yeux de ce, pauvres femmes en le constatant, et pour nous, quelle joie nous éprouvions à leur expliquer la source de cet amour divin, c'est-à-dire ce que Jésus est venu apporter au monde, et ce qu'Il veut être pour chaque coeur qui Le reçoit.

Nous arrivions à Liangchow, la station la plus reculée de notre mission en Chine, sachant que l'Oeuvre y avait débuté par une longue période de sécheresse et d'aridité.

Pendant trente ans les missionnaires avaient semé avec larmes, et maintenant la semence germait et portait des traits réjouissants. La mission comptait actuellement cent soixante membres baptisés, chacun de ces cas étant, un trophée chèrement disputé à l'ennemi par la grâce régénératrice du Seigneur. Il nous tardait de faire la connaissance de ces amis si longtemps isolés et mis à l'épreuve, mais dont l'isolement n'avait pas racorni les coeurs, comme nous pûmes nous en convaincre.

La chaude poignée de mains de M. Belcher fut déjà une cordiale bienvenue lorsqu'il nous rencontra, à quelques milles de la ville. Il nous parla avec tant de chaleur de plusieurs de ses convertis, qu'il nous semblait les connaître avant même d'avoir été accueillis à la Mission par leurs visages épanouis.

À notre arrivée à Liangchow la belle apparence des bâtiments nous impressionna vivement, mais ce ne furent pas les chambres spacieuses, le bon feu de cheminée, ni l'excellente tenue de la maison qui réjouirent le plus notre coeur quoique pour des voyageurs fatigués et transis cet accueil parût merveilleux. Les missionnaires, M. et Mme Belcher et Miss Malheur portaient comme nous le costume indigène et vivaient très simplement, à la manière de leur entourage chinois.
Ce qui rendit cette visite mémorable pour nous, ce fut l'atmosphère d'amour que nous y respirâmes et ce repos intérieur que rien ne peut donner, sinon la paix du Seigneur. Et nous découvrîmes bien vite que l'esprit qui animait les missionnaires était le même qui remplissait aussi les autres chrétiens.

Que d'affection ils nous témoignèrent ! Jamais encore nous n'avions reçu tant de cadeaux, et des provisions de route si abondantes ! Si nous avions pu craindre que les gens du Kansu fussent réfrigérés comme leur climat, cette appréhension se serait vite dissipée sous la chaude cordialité de leur accueil. Ce qui nous frappa également fut la manière dont les chambres confortables de la Mission étaient aménagées pour l'usage des Chinois; le culte du matin, par exemple, avait lieu dans la chambre à manger où l'on se tenait d'habitude. Un bon feu y était allumé et chaque soir la maisonnée s'y réunissait pour chanter des cantiques autour de l'harmonium.
À ces moments-là la chambre était pleine, car plusieurs personnes de la campagne étaient accourues pour nous voir, les chaises avaient été retirées autour de la table et sur trois côtés les gens étaient groupés, craindre de salir les tapis ou de gâter les meubles.

Quelles heureuses soirées nous passâmes là tous ensemble lorsque le froid piquant de ces nuits d'hiver faisait paraître la chaleur du foyer encore plus attrayante ! Les enfants de l'école qui vivent dans l'établissement étaient au premier rang, tant garçons que filles, désireux d'écouter les nouveaux chants. Des paysans et leurs familles coudoyaient des chrétiens de la ville, mieux habillés qu'eux; et dans l'ombre on apercevait quelques figures étrangères qui avaient l'air de fumeurs d'opium. Tous étaient accueillis avec honte et à part de rares exceptions tous les visages étaient joyeux parce qu'ils regardaient à Jésus. Jamais encore nous n'avions tant apprécié notre petit recueil de chants du Honan, avec leurs simples mélodies si bien adaptées aux paroles; car ces braves gens aiment beaucoup chanter et en éprouvent un vrai besoin. Les réunions ne commençaient pas toujours avec l'entrain qu'elles avaient en finissant. Une heure ou deux de chant pendant lesquelles nous leur apprenions les nouveaux cantiques et où nous commentions avec eux les précieuses vérités que ces chants renfermaient, en constituait toute la différence. Les mélodies chinoises sont particulièrement appréciées par eux, et, taudis que des étrangers se les assimilent difficilement, pour les Chinois elles font partie de leur nature même. Qu'ils les aient entendues déjà ou non, ils les retiennent très vite, car la mesure plutôt étrange et les répétitions un peu plaintives parlent à leur coeur d'une manière irrésistible.

Il faisait particulièrement bon les entendre chanter de tout leur coeur ce refrain :

Le ciel est ma belle patrie, allons à la Maison,
Rien ici-bas n'est digne de nous en empêcher.

Puis venait un beau cantique parlant du retour du Seigneur, cantique souvent redemandé, car il contenait autant d'instruction biblique qu'un vrai sermon. Les hymnes du pasteur Hsi avec leurs mélodies si spéciales avaient leur place bien marquée rappelant cette pensée allemande que quelques versets de la Bible avec un cantique de Luther forment à eux seuls un culte édifiant, même si le sermon laisse à désirer. Mais, chose étrange, ce fut un petit chant tout simple qui parut leur apporter la meilleure bénédiction. Le refrain en était :
Bien que je sois pauvre et souvent en détresse, Le Tout Puissant Sauveur m'aime avec tendresse.
C'était touchant d'entendre l'évangéliste indigène remercier le Seigneur pour la consolation reçue par ce cantique.

Les courtes journées d'hiver à Liangchow aussi bien que les longues soirées ont été des plus intéressantes. M. Belcher était très enthousiasmé par la nouvelle construction qui se préparait pour les besoins de l'église, enthousiasme que nous partagions.
Le travail missionnaire des années précédentes avait été entravé par le manque de place, surtout le dimanche, et un don généreux reçu d'Écosse venait d'être la réponse à beaucoup de prières. Ce don avait rendu possible l'achat d'un terrain bien situé, mais qui malgré son étendue possédait peu de maisons utilisables. M. Belcher, en homme pratique a de suite compris le parti qu'il pouvait tirer des matériaux déjà existants. Il fut très instructif de remarquer le soin et la minutieuse économie apportés dans le travail des nouveaux bâtiments. Les planches de l'église, par exemple, ont été ajustées sans le secours d'aucun clou. Des trous ont été percés dans les planches à la place qui aurait dû recevoir les clous, puis de longues chevilles en bois trempées dans la colle forte y avaient été introduites; l'économie réalisée de cette manière a atteint plusieurs livres sterling. L'église peut contenir six cents personnes et, possède des appareils de chauffage très appréciés. Autour de l'église se trouvent des chambres pour les hôtes et de grandes salles de classe que l'on utilise pour l'école du dimanche, ainsi qu'une chapelle et un petit hôpital dirigé par un Chinois chrétien possédant quelques notions médicales.

Nous ne nous attarderons pas davantage sur les détails matériels concernant les édifices : les occasions d'annoncer la Bonne Nouvelle sont plus grandes que jamais, mais il y a si peu d'ouvriers pour entrer dans la Moisson ! Un trait qui travail parmi les femmes, qui nous a spécialement intéressés, est la manière dont elles ont été habituées à prendre leur part de responsabilité spirituelle dans l'oeuvre. La classe de semaine, dirigée ailleurs par les missionnaires, a pris à Liangchow un tout autre caractère; elle est devenue une réunion de prières et d'études bibliques à laquelle toutes les femmes peuvent participer; Mme Belcher et Miss Malheur sont présentes, car si l'on attend que les femmes de l'église y viennent, il faut aussi donner l'exemple. La réunion est présidée alternativement, par nue Chinoise ou par l'une des dames missionnaires. Celle innovation a beaucoup encouragé ces femmes et a développé en elles des dons remarquables concernant le ministère de la Parole; elles choisissent elles-mêmes leur message auquel les missionnaires ajoutent quelques mots si c'est nécessaire. Celle réunion est une des plus populaires de la semaine; l'auditoire varie entre quarante et cinquante femmes dont huit ou neuf sont capables de diriger la réunion.

Ce résultat est dû en bonne partie aux études bibliques du dimanche et à celles faites par ces femmes à la maison, auxquelles Miss Malheur attache beaucoup d'importance. Ce système d'études a beaucoup enrichi la vie spirituelle des chrétiens, un grand nombre s'y sont adonnés avec ardeur ayant en vue de compléter leur instruction et d'obtenir un bon certificat. C'est une toute nouvelle sphère de développement pour la femme et la mère chinoise.

Nos coeurs se sont beaucoup réjouis au sujet de l'École des filles pour laquelle un bel emplacement a été obtenu dans une partie de la cité où filles et femmes peuvent venir librement. Des centaines de jeunes femmes, instruites dans cette institution, occupent maintenant des places utiles.

La position de Liangchow, en tant que siège d'une pareille école, peut sembler isolée dans une province si vaste, mais il y a douze cités plus qui n'ont jamais eu de missionnaire. Dans cette région longtemps négligée, l'Esprit de Dieu travaille d'une manière spéciale.

Nous savons que le temps est court; il se peut que le Seigneur, avant Son retour, attende qu'il y ait ici un bon centre projetant Sa lumière au loin. Où sont les ouvriers prêts à consacrer leur vie pour cette tâche solitaire, lointaine et difficile?


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CHAPITRE IX
Plus loin...

Nous étions à Liangchow depuis une semaine quand un jour, pendant le repas, la porte s'ouvrit pour laisser entrer un ancien ami. Combien nous étions heureux de le revoir! Nous connaissions si bien son expression franche, ses manières joyeuses, mais fois-ci nous découvrions en lui un quelque chose qui ne se pouvait définir et nous nous demandions ce qui, depuis notre dernière rencontre, avait bien pu se passer dans sa vie. Nous avions connu ce jeune homme lors du dernier voyage de notre cher père, M. Hudson Taylor, et il avait pu observer de près notre vie de famille. Les paroles que notre père lui avait adressées au moment de le quitter l'avaient fortement impressionné : « Que le Seigneur soit avec, vous, je vous attendrai au ciel ». « L'attendre au ciel », cette pensée ne le quitta plus et lorsque, quinze Jours plus tard, il apprit la mort de M. Taylor, il se consacra tout à nouveau au Seigneur, désireux de vivre une vie dont il n'aurait pas à rougir lorsque l'appel viendrait pour lui.
Ce fut le premier pas qui fit de lui un missionnaire de ces vastes contrées enténébrées du Nord-Ouest lointain où tant de créatures humaines attendent encore les messagers du salut. Le récit des motifs qui l'avaient amené si loin de son pays natal et comment le, Seigneur est à l'oeuvre dans ces pays nous impressionna vivement. Il nous raconta comment, à de longs intervalles, quelques rayons de lumière avaient percé ces ténèbres lorsque des missionnaires de Liangchow ou de Sinkiang y avaient, fait des tournées d'évangélisation. Ces voyages avaient été rares; celte vaste région ne possédait encore que deux missionnaires et cependant des milliers de Chinois y sont déjà établis pour leur commerce, dans l'espoir d'y faire une rapide fortune. Tous ces hommes arrivent de provinces fertiles et populeuses et réalisent peu à l'avance le froid et les privations qui les attendent sur ces hauts plateaux. Le Kansu dessille leurs yeux à cet égard et avant qu'ils aient atteint la frontière occidentale, beaucoup d'entre eux soupirent après leur pays natal.

Quelques-uns s'établissent dans les villes qu'ils rencontrent sur leur route, d'autres continuent vaillamment à avancer. Mais tous sont plus ou moins atteints par le mal du pays et pleins d'appréhensions lorsqu'ils dépassent l'enceinte de la Grande Muraille et voient devant eux les solitudes incultes du désert de Gobi. Les inscriptions qu'on peut lire en dedans et en dehors de cette fameuse porte sont pathétiques.

Quelques-unes sont écrites dans un style littéraire et d'autres dans un langage plus simple, comme le prouvent ces lignes bien connues qui ont presque passé en proverbe :

En s'éloignant de Kia-yü-Kwan
Les yeux obscurcis par les larmes,
Regardant en avant - rien que le désert,
Regardant en arrière - la Grande Porte fermée,
Femme et mère bien loin de la vue,
En pensant à elles, les larmes ne cessent plus!

La Porte ne s'ouvre qu'à certaines heures et le voyageur doit faire inscrire son nom à Kia-yü-Kwan et payer deux cents pièces de monnaie pour obtenir son permis de passage, puis il s'éloigne dans la direction de l'ouest où plus de deux cent mille personnes se rendent chaque année et dont si peu reviennent...

Cependant, aucune des villes de ces contrées lointaines n'a jamais eu de missionnaire et M. Arthur Moore, au cours de son premier voyage, n'avait rencontré que peu d'encouragement. Mais un changement survint en 1914 lorsqu'il accompagna M. Mather qui rejoignait M. Hunter à Ti-hwa-fu. En dépit de leur fatigue extrême ils avaient saisi toutes les occasions d'annoncer l'Évangile, rencontrant de ville en ville un auditoire sympathique. M. Moore écrivait : « Nous avons été partout respectés et nous avons reçu une grande bénédiction en parlant dans les rues. Les foules, dans les grands centres, se chiffraient par centaines et nous obtenions leur attention des heures durant. M. Mather et moi pouvions à peine faire face à toutes les demandes d'évangiles, et à Kanchow, nous fûmes obligés de réclamer l'aide d'un de nos voituriers pour cette distribution. Les vieillards plus spécialement nous aidèrent à trouver la place la plus propice pour la prédication; les commerçants nous avaient fourni des bancs et nous permirent de stationner devant leurs étalages. Nous restions souvent au même endroit pendant trois heures; puis, changeant d'emplacement, nous prêchions encore jusqu'à la nuit sans prendre de nourriture.
Je mentionne ces faits afin que vous réalisiez combien la moisson est mûre. »
Ceci se passait en 1914 et les villes situées à l'ouest de Liangchow attendent toujours les messagers de la Bonne Nouvelle, car aucun missionnaire protestant n'a passe après M. Moore sur la Grande Route ».

Pas un, disons-nous, et cependant oui, il y en avait un, car Dieu se préparait un ouvrier dans la personne d'un jeune converti du Honan.
Il était à cette époque un médecin déjà doué d'une grande expérience dans le travail des hôpitaux.
Des affaires de famille l'avaient obligé à retourner chez lui où ses préoccupations lui avaient fait perdre de vue sa vision céleste.Une lettre de son ancien chef l'avait ensuite réclamé pour l'hôpital du Honan où il avait déjà passé de si belles années. C'est là, eu effet, qu'il avait fait ses études médicales, en même temps qu'il apprenait à connaître sa Bible et à s'occuper des âmes. C'est là que l'efficacité fie la prière lui avait été révélée, qu'il avait été transformé par la puissance du Saint-Esprit et avait assisté à un superbe réveil dans l'église.

Là aussi Dieu l'avait employé pour le salut de plusieurs et lui avait fait entendre l'appel missionnaire pour la province éloignée du Kansu. L'hôpital du Honan venait d'être agrandi et le docteur Kao se trouva bientôt absorbé par son travail de prédilection.
Or, ce moment coïncidait précisément avec celui ou Ni. Moore revenait, le coeur chargé par la pensée de ces villes où son message avait été si bien accueilli. Comme nous venons de le dire, le docteur Kao, au milieu de ses multiples occupations, avait oublié l'appel du Kansu.
Son habileté comme docteur était, considérable et il jouissait d'une grande popularité; des propositions flatteuses qui lui assuraient succès et richesses venaient de lui être adressées.

De plus il devait penser à l'avenir de ses enfants et insensiblement il se sentait attiré vers un genre de vie bien différent de celui qu'il avait entrevu. Un soir, dans sa chambre d'hôpital, il venait d'adresser à Dieu une courte prière pour Le remercier de Son aide pendant la journée, lorsque soudain une Voix se fit entendre à son coeur : « Ne Me remercie pas, ce n'est pas Moi qui L'ai conduit aujourd'hui, ton chemin n'est pas le Mien ».

Effrayé, il comprit que Dieu parlait à sa conscience. « As-tu manqué de quelque chose ces dernières années? continua la Voix céleste, n'ai-Je pas été fidèle à mes promesses? Est-ce pour te créer une brillante position que Je t'avais choisi ou était-ce pour prêcher l'Évangile? »

Profondément remué, le docteur Kao se rappela sa consécration dans cette même localité, son premier appel, et fut obligé de reconnaître qu'il s'était laissé entraîner bien loin de ce que Dieu attendait de lui; le coeur brisé et contrit, il supplia le Seigneur de lui révéler Sa volonté. Avant de se relever, sa décision était prise concernant le Kansu.

Il se mit donc en route avec sa femme et ses enfants. Or, pour une femme chinoise qui ne s'était jamais éloignée de chez elle, et qui devait entreprendre avec deux petits enfants un pareil voyage vers un pays si différent du sien, un courage peu ordinaire était nécessaire. Six ans ont passé depuis ces événements et la vaillante jeune femme persévère, soutenue par Dieu et par les, progrès de l'oeuvre, mais avec un coeur qui soupire cependant souvent après son ancienne demeure et le dialecte familier qui avait réjoui son enfance.

Au commencement, ils vécurent à l'hôpital de Kanchow et assistèrent le docteur King dans son oeuvre naissante. Celui-ci, étant missionnaire tout autant que médecin, encourageait le zèle de Kao et le libérait de temps en temps pour l'évangélisation. Chacune de ces tournées fortifiait le jeune homme dans son désir d'annoncer Christ là où Il n'avait pas encore été prêché, et finalement il prit la route de Liangchow et au delà.
Depuis ce moment, le chemin s'est merveilleusement ouvert devant lui bien qu'il soit seul et sans appui humain. Il a trouvé la place pour laquelle Dieu l'avait appelé dans cette même ville de Kanchow citée par M. Moore et il sait que Dieu travaille avec lui. Qu'est-ce qui aurait expliqué sans cela la chaude réception qui l'avait accueilli et la foi qui naissait dans les coeurs?

Dans, la première auberge où il arriva comme étranger, il entendit un jour avec joie un soldat qui venait de se convertir avec lui, parler doucement à son cheval rétif au lieu de le frapper avec brutalité. Ce nouveau converti, ignorant que l'on entendait ses paroles, étrillait son cheval et le reprenait pour son mauvais vouloir : « Tu sais bien ce que j'étais avant ma conversion, lui disait-il, tu sais combien je t'aurais battu, et comme j'aurais juré contre toi, ne vois-tu pas que je suis changé? Il faut que tu changes aussi et que tu apprennes de meilleures minières ».
Que le cheval eût compris ou non, le missionnaire fut réjoui de constater que sa prédication n'avait pas été vaine. Un tel amour pour la Bible s'était développé dans le coeur de ce soldat, M. Liu, qu'il lut le saint volume d'un bout à l'autre, pendant la première année, jusqu'à trois fois de suite. La prière :lui était devenue chose si naturelle que le docteur était toujours béni par la manière confiante dont il apportait tout au Seigneur.

Un autre converti était M. Wang-Fah, un homme de quarante ans qui habitait la même auberge, et avait un commerce de cuivre qui l'absorbait beaucoup, mais une partie de son temps se passait à écouter l'Évangile. Il ne savait pas lire, mais se mit à l'apprendre, s'arrêtant longuement sur les paroles du cantique qu'il affectionnait spécialement :

Le ciel est ma patrie, allons à la maison,
Rien ici-bas n'est digne de nous en empêcher.

Un jour qu'il était assis près du feu, surveillant la fonte de son cuivre, il se répétait en lui-même son hymne favori, totalement inconscient d'un groupe de personnes qui le regardaient avec amusement, s'apercevant qu'il avait oublié le cuivre qu'il fondait. Wang-Fah répétait sans se lasser les paroles devenues une réalité pour lui. « Il se peut que le ciel soit ta patrie, lui cria l'un des spectateurs, mais en attendant d'y aller, tu ferais mieux de surveiller ton feu. »
Wang prit ces paroles en bonne part et poursuivit sa lecture tout en surveillant mieux son travail. Lorsque le docteur Kao vint habiter à Kanchow un an plus tard, cet homme pouvait déchiffrer presque tous les caractères dit Nouveau Testament.

Dans cette première visite de Kao, M. Ch'en fut dit nombre de ceux qui écoutèrent l'Évangile avec un coeur bien préparé. L'orfèvre Lin avait besoin d'un traitement spécial. Il était venu auprès du docteur Kao, souffrant de tuberculose dans l'épine dorsale et celui-ci lui avait ordonné de rester couché pendant trois mois. Mme Ch'en, la mère d'un ami, entreprit de le soigner, et la garde-malade comme l'invalide attendaient impatiemment les visites du docteur. Ce n'était pas seulement parce que celui-ci était joyeux et encourageant, mais ils aimaient à entendre parler du grand Médecin, Sauveur de l'âme aussi bien que du corps.
Et la meilleure preuve de ce qu'était pour eux le Sauveur, fut la conversion de cinq autres personnes qui se confièrent aussi en Lui, par le moyen de l'orfèvre et de sa bonne vieille infirmière.
Ainsi la bénédiction s'étendait d'un coeur à un autre. L'un de ces cinq convertis, marchand ambulant de bijouterie, se mit à répandre l'Évangile en faisant ses tournées. Un autre, l'oncle Yu, devint l'instrument de la conversion de sa belle-fille dont la vie douloureuse fut merveilleusement adoucie en se donnant à Dieu. Elle était mère de six petites filles; aucun fils n'était venu apaiser le déplaisir du père.

Après sa conversion, une septième fille lui naquit qui reçut un accueil bien différent de celui de ses soeurs. L'on pouvait s'apercevoir de l'irritation grandissante causée par chacune de ces naissances par les noms qui avaient été donnés; la chose étonnante était qu'on ait laissé vivre ces fillettes.
La première, dans un esprit d'espérance, avait été, nommée « Ling-ling » (conduit, conduit), car un petit frère devait sûrement arriver après elle, mais le second enfant fut encore une fille. Les parents, dissimulant leur déception, l'avaient appelée, « Ts'ing, ts'ing » (invite, invite). Certainement, cela amènerait la réponse désirée! Alarmés à la vue d'une troisième fille, ils lui donnèrent le nom de « Kwan, kwan » (contrôle,contrôle). Rien ne pouvait rompre la chaîne de cette désastreuse succession !
La suivante fut simplement nommée « Sï-nü » (quatrième fille) comme si rien ne pouvait être pire que cela. De même pour les deux suivantes.

Mais la septième fille arriva dans une maison débordante d'affection. Le père, bien qu'il ne fût pas encore chrétien, ne prit pas une autre femme, et la mère ne considéra plus ses fillettes comme un fardeau et une disgrâce. Le dimanche matin, elle se levait de bonne heure pour tresser et orner les nombreuses nattes de ses aînées et les envoyer ensuite au culte qui avait lieu dans la meilleure chambre du docteur Kao. C'était une joie d'entendre celui-ci nous parler de vingt-cinq ou trente personnes réellement converties, dont la plupart sont des commerçants ou des propriétaires du voisinage. Taudis qu'il nous décrivait la grande vallée fertile, on croyait apercevoir les nombreux villages, cachés au milieu de leurs beaux vergers d'arbres fruitiers. L'eau y est si abondante que le riz y croît naturellement, chose très rare au Kansu, et la ville possède trois ruisseaux qui coulent dans ses rues. Le docteur Kao nous parla aussi des temples nombreux, du fameux « Bouddha dormant » de proportions colossales, du culte des démons et des milliers de pèlerins qui assistent en foule aux fêtes qui ont rendu Kanchow célèbre.
Il nous entretint aussi de sujets plus profonds, concernant les difficultés permises par Dieu pour former ses missionnaires, car tout n'avait pas été facile pour eux ! La solitude, la pauvreté, un hiver très rude dans une maison en mauvais état, le manque d'amis sympathiques et l'apparent oubli de ceux dont les lettres tardent parfois à venir, tout avait été combiné pour leur faire sentir douloureusement leur isolement. En outre la famille Kao était entrée dans une maison hypothéquée que les locataires précédents avaient fortement détériorée. Les portes avaient disparu, les lits de briques (Kang) étaient brisés et les murs extérieurs démolis. On avait pu réparer les lits, mais il n'y avait aucun moyen pour se protéger des voleurs qui pouvaient à tout moment faire intrusion, et de ce fait les voisins étaient plutôt hostiles aux jeunes missionnaires.

Leur position financière était de plus très précaire, le docteur Kao ayant renoncé à son salaire, en quittant son travail de Kanchow. Il devait donc soutenir sa famille par sa vocation médicale, mais, comme il ne réclamait aucune rétribution fixe, ses clients étaient libres de le payer ou non. C'était bien là une vraie marche de foi, d'autant plus que si les chrétiens de Kanchow l'avaient cordialement accueilli et l'appréciaient beaucoup, ils ne se rendaient pas compte de sa situation.

Mme Kao, souvent seule dans sa grande maison, avait de fréquentes atteintes de mal du pays. Les convertis étaient des hommes pour la plupart, et quant aux quelques femmes qui faisaient partie de l'église, quoique très sympathiques et aimables, elles avaient trop d'occupations dans leurs propres ménages pour venir la visiter. Chacun ignorait donc que la petite famille manquait de vêtements et de couvertures pour affronter l'hiver si rigoureux, qu'elle ne pouvait se chauffer suffisamment et qu'elle se demandait souvent d'où lui viendrait le prochain repas.

Les réunions des dimanches étaient bien suivies et joyeuses; nombreux étaient les convertis et sans limites les opportunités qui s'ouvraient à eux, dans l'oeuvre qu'ils aimaient. Mais, en revenant de la réunion, M. Kao trouvait sa femme en larmes, les enfants grelottants et les chambres inconfortables. La nuit, les voleurs revenaient constamment et la tension nerveuse qui en résultait était des plus déprimantes. Les voisins ne comprenaient pas pour quelle raison il ne faisait pas reconstruire le mur extérieur de la maison : « Où est votre Dieu? criaient-ils au docteur, pourquoi ne prend-Il pas soin de vous si vous êtes trop pauvres pour le faire vous-même? » Dieu avait permis cette situation dans une pensée d'amour et pour un temps déterminé, car si notre foi est précieuse, « l'épreuve de notre foi l'est encore davantage, elle est beaucoup plus précieuse que l'or périssable qui, cependant, est éprouvé, par le feu » !
Ils avaient l'immense privilège d'être les seuls témoins du Seigneur dans ces vastes régions négligées, et les résultats de leur travail furent abondants : une église de laquelle la lumière rayonne auprès et au loin !

Le combat est pénible pour eux, plus pénible qu'ils ne l'avaient supposé au début et il faut que leur patiente endurance se maintienne jusqu'au bout afin que personne ne puisse leur prendre leur couronne. En dépit de ces longs mois d'épreuve, lorsque M. Kao vint nous visiter l'hiver suivant, il pouvait parler avec un regard qui pénétrait nos coeurs et avec une profonde reconnaissance de l'école « bénie » par laquelle. Dieu les avait fait passer.


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