Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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LA PALESTINE AU TEMPS DE JÉSUS-CHRIST


CHAPITRE X
LA VIE PUBLIQUE



Les poids. - Les mesures pour les liquides, - pour les solides. Mesures de longueur. - La coudée. - Les monnaies. - La division de l'année, du mois, - de la journée. - Les dites des grandes fêtes. - Les impôts directs et indirects. - Les publicains. - Les péagers. - L'impôt pour le Temple. - Les impôts payés aux Hérodes.


La vie publique se passait tout entière en plein air dans les rues, sur les placés, et, dans les petites villes, près des portes, là où se trouvait le puits et où se tenait le marché. On s'y réunissait de grand matin ou le soir, après le coucher du soleil. Dans la journée la chaleur était trop forte, du moins pendant la plus grande partie de l'année. Entrons dans une des grandes villes du pays, à Jérusalem par exemple. Le marché s'y tient le matin dans les rues larges, qui sont les moins nombreuses. Nous l'avons remarqué en décrivant la Ville sainte, les boutiques sont en plein air, ce sont des étalages. Les métiers aussi sont installés à ciel ouvert. L'atelier moderne n'existe pas; tout le monde travaille dehors. Les maisons sont trop petites, trop inconfortables, trop chaudes pour qu'on s'y tienne dans la journée. Les anciens même à Rome et surtout en Grèce et en Orient, vivaient hors de chez eux. Chacun porte sur soi le signe distinctif de sa profession. Les changeurs, ceux par exemple qui se tiennent dans le parvis du Temple et dont Jésus a renversé les petites tables, ont un denier suspendu à l'oreille (1), les teinturiers un échantillon d'étoffe, les écrivains publics une plume, les tailleurs une aiguille (2).

Les Juifs ont toujours été commerçants ; ils avaient le génie des affaires au premier siècle comme aujourd'hui. Il suffit, pour s'en convaincre, de remarquer la place considérable que Jésus a donnée dans ses paraboles à la banque, aux talents (3), aux économes, aux questions d'intérêt, de capital, de revenu. Le Christ se servait de telles comparaisons parce qu'il savait combien elles étaient familières à ses auditeurs, et les Pères nous ont conservé un mot de lui qui n'est pas dans les Évangiles, mais qui se rattache au même ordre de pensées : « Soyez de bons banquiers », disait-il un jour (4).
Le procédé employé par les Juifs dans leurs achats nous est révélé par un passage de la Genèse (5). Abraham veut acheter d'un certain Ephron la caverne de Macpélah pour y ensevelir sa femme Sarah. Ephron lui dit « Je te la donne. » Abraham refuse ce présent et veut payer la caverne son prix. Ephron refuse encore, mais en s'écriant « Qu'est-ce que cela ? quatre cents sicles d'argent. » Abraham comprend ; Ephron ne refuse que par politesse ; il vient d'articuler un chiffre. Le patriarche lui compte les quatre cents sicles et, il les accepte. Eli bien, aujourd'hui, en plein dix-neuvième siècle, les Arabes n'agissent pas autrement dans leurs achats. Ce refus poli, cette indication du prix donnée par le vendeur qui s'écrie : « Qu'est-ce que cela ? » cette prétention qu'il élève d'abord de livrer sa marchandise pour rien, tout cela existe de nos jours et se pratiquait certainement au dernier siècle (6).

Les poids étaient en pierre et les marchands les portaient sur eux dans un sac suspendu à leur ceinture (7) comme cela se fait encore en Orient. Des agents de police, sorte de licteurs (virgiferi), délégués par le Sanhédrin, les vérifiaient de temps autre.

Énumérons les poids et mesures qui sont mentionnés dans le Nouveau Testament et commençons par les liquides.

Il nous est parlé du bath dans l'Evangile (8) (en grec Cette mesure fort ancienne, valait exactement trente-huit litres quatre-vingt-huit centilitres. C'était le métrète attique que nomme saint Jean (9). Les anciens Hébreux le divisaient en six hin ; le hin valait donc six litres quarante-huit centilitres ; il se divisait lui-même en douze hog, et le hog n'était autre chose que le des Grecs dont parle saint Marc (10). (En latin, sextarius ; en français, setier). Il valait cinquante-quatre centilitres, un peu plus d'un demi-litre et se trouvait être la soixante-douzième partie du bath (11).

Les Romains se servaient d'une mesure qui était la moitié du hin des Hébreux et qu'ils appelaient le conge. Elle valait trois litres vingt-quatre centilitres et ils divisaient le conge en six setiers (12). Cependant, malgré les assertions de Josèphe et le mot dans saint Marc, il paraît évident, d'après de récentes recherches, que le hin et par suite le setier, n'étaient plus usités en Palestine au premier siècle (13). Cette mesure (en grec) était égyptienne.
Les Juifs du temps de Jésus-Christ avaient adopté une sorte de système décimal, car ils divisaient le bath (appelé aussi Epha) en dix orner (14), et, pour les mesures supérieures, ils avaient le chomer qui valait dix baths et le lethech qui n'en valait que cinq.
Telles étaient leurs mesures pour les liquides. Quant aux solides, le Nouveau Testament ne mentionne que le (15). On n'est pas d'accord sur la valeur véritable de cette mesure. D'après des données qui paraissent exactes, ce corus se divisait en trente modius valant chacun deux litres vingt-quatre centilitres environ. Le corus aurait donc été de soixante-sept litres vingt centilitres. Mais Josèphe (16) donne au corus la valeur de dix médimnes attiques ; et le médimne. mesure des solides chez les Grecs, valant cinquante et un litres soixante-dix-neuf centilitres, le corus aurait été de cinq cent dix-sept litres quatre-vingt-dix centilitres. Il y a tout lieu de croire que c'est Josèphe qui commet ici une inexactitude dans le désir d'assimiler entièrement les usages juifs aux usages grecs.

Pour les longueurs on se servait de la coudée.
L'ancienne coudée hébraïque valait cinquante-quatre centimètres (17) mais, pendant la captivité, les Juifs s'habituèrent à celle de Babylone qui n'avait que quarante-cinq centimètres. Cette longueur de la coudée au premier siècle est généralement adoptée par tous les critiques et c'est sur cette base que nous avons calculé en mètres et centimètres toutes les mesures données par Josèphe (18). Il va sans dire que ce chiffre est approximatif et que la longueur exacte à deux ou trois centimètres près est difficile à apprécier. Elle l'est d'autant plus que chaque peuple avait sa coudée : l'égyptienne valait aussi 450 mill., la royale 525, l'olympique 402, etc. Chaque coudée se divisait en deux empans, chaque empan en six palmes et chaque palme en vingt-quatre doigts. - La brasse valait quatre coudées. Les vingt brasses dont parle le livre des Actes des apôtres représentent donc trente-six mètres et les quinze brasses trouvées un peu plus loin par les naufragés Vingt-sept mètres (19).
Le chemin sabbatique (20), qui était de deux milles coudées, avait par conséquent neuf cents mètres ou près d'un kilomètre. Pour les mesures plus étendues, on avait le stade qui valait, croit-on, cent quatre-vingt-dix mètres environ. Emmaüs, qui était à soixante stades de Jérusalem (21), en était donc distant de onze kilomètres quatre cents mètres.

Sur les monnaies, nous avons des données talmudiques assez précises. Comme nous ne parlons que de l'époque même de Jésus, nous n'avons rien à dire des monnaies si nombreuses et si curieuses frappées par les Juifs pendant la guerre de 66 à 70. Au commencement du premier siècle, les monnaies proprement hébraïques dataient du temps des Macchabées. En outre, on se servait des monnaies grecques et des monnaies romaines (22). Mais l'argent juif pouvait seul être employé dans le Temple; de là, la nécessité absolue de changeurs ; ceux-ci, au lieu de se tenir hors des portes, s'installaient sans aucun droit dans la première cour.
Le denier valait quatre-vingt-huit centimes, c'était le prix de la journée de travail comme le prouve la parabole des ouvriers de la onzième heure (23). La drachme (24), monnaie grecque, avait exactement la même valeur. Elle est appelée zouz dans les Talmuds (au pluriel zouzim). Ainsi les mots zouz, denier, drachme, désignent la même pièce de monnaie; cinquante zouz valaient deux-cent-trois gr. d'argent (25). Le stater (appelé aussi traphik) (26), était de toutes les monnaies la plus répandue, il valait quatre drachmes, c'est-à-dire trois francs cinquante centimes environ, on l'appelait aussi sicle d'argent (27). Deux drachmes formaient la didrachme ou demi-sicle (1 fr. 75) et représentaient l'impôt que tout Israélite payait chaque année au Temple (28). Le sicle d'or avait beaucoup plus de valeur (39 fr. 75). Le denier d'argent (29) montré à Jésus-Christ (30) était une pièce romaine, car le zouz juif ne portait pas l'image de l'empereur.

Les monnaies divisionnaires du denier étaient très nombreuses, La plus petite était le lèpte (31) (prutah en hébreu). Elle ne valait pas même la moitié d'un centime, mais exactement 0 c. 4575. L'Evangile de Marc dit : (32) « Deux lèptes font un quadrant. » Celui-ci représentait donc 0 c. 915, ou presque un un centime de notre monnaie.

Voici comment nous dressons, d'après les indications très exactes des Talmuds (33), la liste de ces petites monnaies au premier siècle : le denier : 0,88 cent.; le meah un sixième de denier ou 14 c. 66; le pondion ou demi-meah 7 c. 33; l'as ou demi-pondion : 3 c. 66; le semisse ou demi-as : 1 c. 83; le quadrant ou demi-semisse : 0 c. 915; le prutah ou lèpte, demi-quadrant: 0 c. 4575. Huit lèptes faisaient donc un as ; seize lèptes un pondion; trente-deux lèptes, un meah ; et six meahs, un denier qui représentait 192 lèptes ou 96 quadrants.

Le talent (34) était une monnaie énorme qui pesait trente-neuf kilogrammes et valait 5280 francs, ou soixante mines (35). La mine, cent drachmes, ou quatre-vingt-huit francs, et la drachme, six oboles, etc.

Un grand nombre de monnaies macchabéennes, celles-là même que les contemporains de Jésus avaient entre les mains, sont conservées à la Bibliothèque nationale, à Paris. De leur nombre se trouve un sicle d'argent semblable à l'un des trente sicles que Judas reçut pour prix de sa trahison (36). D'un côté se voit un lis avec l'exergue : la sainte Jérusalem : de l'autre, un vase qui représente sans doute une coupe à parfum ou un encensoir. Au-dessus de ce vase, la lettre alèph, la première de l'alphabet hébreu et qui signifie ici an I (de la délivrance Macchabéenne); cette pièce a donc été frappée en 142 ou 141 avant l'ère chrétienne. Autour du vase on lit ces mots : sicle d'Israël. Trente de ces sicles valaient cent cinq francs, puisque le sicle était de trois francs cinquante centimes. M. Reuss fait observer (37) que ce chiffre est trop fort et que, d'après le poids du métal, trente sicles ne devaient pas représenter beaucoup plus de quatre-vingts francs de notre monnaie au titre actuel. Mais il faut tenir compte de la valeur relativement élevée de l'argent à cette époque et, d'après ce savant, le prix auquel Judas vendit Jésus équivalait à une somme de cinq à six cents francs.


Table des matières

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LA VIE PUBLIQUE ( suite)

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1 Ils se tenaient aussi sur les places publiques et dressaient leur étalage en plein vent. Cet usage existe encore. (Bovet, Voyage en Terre Sainte, p. 48).
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2 Jérus., Schabbath, 3 b.
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3 Ev. de Matth., XXV, 14 et suiv.; de Luc, XVI, 1 et suiv., etc., etc.
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4 Reuss, Hist. de la théol. chrét. Tome I, p. 258, note 3.
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5 Genèse, XXIII, 3 et suiv.
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6 Pierotti, La Palestine actuelle dans ses rapports avec la Palestine ancienne, p. 330.
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7 Lévit., XIX, 36; Prov., XI, 1 : XVI, 11, etc.
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8 Ev. de Luc, XVI, 6.
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9 Ev. de Jean, II, 6. Voir Il Chron., IV, 5.
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10 Ev. de Marc, VII, 4.
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11 Jos., Ant. Jud., VIII, 2, 9.
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12 Voir Dict. de Littré au mot conge.
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13 Graetz, Geseltichte der Juden, III, pages 671 et suiv.; Herzfeid, Recherches métrologiques, 1865, p. 58. L'erreur de Marc se comprend aisément, il écrit pour les Latins et alors emploie le mot setier qui leur était familier.
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14 Lightfoot, Horae sur Matth., XIII, 33.
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15 Ev. de Luc, XVI, 7.
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16 Jos., Ant. Jud., XV, 9, 2.
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17 Il Chron., Ill, 3:
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18. Winer, R. W. B., art. Elle. - Littré, Dict. de la langue française, art. Coudée. M. Chauvet dit dans l'art. Jérusalem, de l'Encycl. des sciences religieuses, tome VII, p. 268 : « Pour la coudée de Josèphe on hésite entre le djamed de 0 m, 262 ou la coudée royale O m,125. » Ces chiffres sont pour nous incompréhensibles. Il doit y avoir, dans ce passage de ce savant article, une faute d'impression; que l'on calcule non seulement à 125 m/m, mais même à 262 m/m par coudée, n'importe quelle hauteur indiquée par Josèphe, on aura des proportions mesquines, qui ne peuvent avoir été celles du Temple ou de tel autre édifice. Si, au contraire, on prend pour base 45 centimètres pour chaque coudée, on a des proportions très naturelles. Du reste, M. de Sauley a mesuré, dans son voyage en Terre Sainte, les fondations de plusieurs des tours indiquées par Josèphe et ses chiffres s'accordent avec la base que nous choisissons, 45 cent. par coudée. - Voir aussi Munk, Palestine, p. 397.
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19 Actes des Apôtres, XXVII, 28.
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20 Actes des Ap., I, 12.
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21 Ev, de Luc, XXIV, 13.
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22 Nous renvoyons ici le lecteur aux beaux travaux de M. de Saulcy sur la numismatique juive. Voir aussi Schürer, Neutestamentliche Zeitgeschichte, p. 364 et suiv.; Munk, la Palestine, p. 400-403, etc.
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23 Ev. de Matth., XX, 2.
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24 Ev. de Matth., XVII, 24, etc., etc.
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25 Weil, La femme juive, p. 26.
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26 Il y avait un traphik qui ne valait que 40 centimes et qu'il ne faut pas confondre avec le stater.
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27 Jos., Ant. Jud., III, 8, 2.
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28 Ev. de Matth., XVII, 24. Jérôme dit aussi (Comment. sur Ezéch. IV; 10), que le stater vaut quatre drachmes.
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29 Ce terme : « un denier » désignait toujours un denier d'argent. Le denier d'or valait 25 deniers d'argent, 22 fr.
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30 Ev. de Marc, XII, 16.
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31 Ev. de Luc, XII, 59.
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32 Ev. de Marc, XII, 42.
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33 Jérus., Kidduschin, fol. 58, 4; et Maimon. in tractatu Schekalin, ch. I.
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34 Ev. de Matth., XXV, 14 et suiv. Le talent n'était, bien entendu, qu'une monnaie fictive, comme aujourd'hui la guinde anglaise.
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35 Ev. de Luc, XIX, 12 et suiv.
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36 Ev. de Matth., XXVI, 15 et parall.
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37 La Bible, Comm.. sur les synoptiques, p. 625.

 

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