Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



CONTRE LE COURANT

TROISIÈME PARTIE


XIII

(Si vous saviez combien j'ai honte)

 

 Tous les matins, à la même heure, Daphné et sa gouvernante allaient faire une promenade au bord de la mer et à la même heure remontaient la pente légère qui conduisait à la villa.
Presque tous les jours, elles rencontraient le facteur qui leur remettait les lettres.

Le lendemain du jour où Miss Duncan avait exprimé ses appréhensions à Mme Duclavel, le facteur lui remit une lettre aux timbres des États-Unis.
Tout en marchant, elle l'ouvrit, pendant que Daphné continuait à jouer avec un ballon neuf que l'on venait d'acheter.
Mais soudain, la jeune fille s'arrêta.
- Asseyons-nous ici, dit-elle à son élève, je suis un peu lasse.

Quelques pierres plates superposées offraient, le long du sentier montant, des sièges où les promeneurs pouvaient se reposer.
Miss Duncan, une fois assise, relut sa lettre, mais elle avait peine à en tenir les feuillets, sans que l'on voie ses mains trembler.
- On dirait que vous avez froid, fit Daphné, surprise, et mai qui ai si chaud !

La gouvernante leva les yeux.
Que tout était beau autour d'elle ! Quel ciel de saphir, quelle mer d'azur et de moire, quelles fleurs éclatantes, quels parfums suaves, quels chants d'oiseaux !
Pourquoi toute cette beauté lui parut-elle ironique et cruelle ? Pourquoi la Nature s'obstine-t-elle à railler la douleur humaine et à prodiguer ses joyeux sourires quand les gens pleurent et se désespèrent ?

Une seconde fois, puis une troisième, la jeune fille relut sa lettre, comme si elle espérait lui découvrir une autre signification et d'autres conséquences. mais les lignes écrites à la machine, sur le papier d'un homme d'affaires de New-York, demeuraient les mêmes, dans leurs termes précis et inexorables.
Miss Duncan était tout simplement informée que l'entreprise dans laquelle elle avait placé, toutes ses économies, ainsi que la petite fortune héritée de ses parents, avait fait faillite. Le Directeur s'était enfui et avait probablement pu passer à l'étranger. Il ne. fallait donc rien espérer.
Lentement, elle replia les feuillets, les mit dans son sac et dit à Daphné. :
- Rentrons, maintenant, c'est l'heure du déjeuner.

Prétextant un violent mal de tête, Miss Duncan ne vint pas à table. Mme Duclavel, en lui portant ensuite une légère infusion, remarqua son visage rigide, et, tendrement, s'informa des causes de son chagrin.
- Mon chagrin, répondit Miss Duncan, d'une voix farouche, vient de ce que, une fois de plus, j'ai eu, confiance en quelqu'un et que ce « quelqu'un » m'a trompée.
Et elle raconta les détails de l'affaire.
- Plaie d'argent n'est pas mortelle, dit Mme Duclavel,. en mettant sa main sur celle de la jeune fille. Il y a pires malheurs que cela. Vous êtes jeune, en bonne santé, vous travaillez... Puisque vous ne pouvez rien changer au passé, n'y pensez plus et tout simplement, recommencez à gravir la pente. Pour le moment, rien ne vous manque.
- Vous avez raison quant aux choses matérielles, dit la jeune fille, et ce n'est pas cela qui me cause le plus de déception. Mais...

Elle hésita une minute, puis reprit :
- Je vais tout vous dire... car vous êtes si bonne... et indulgente... J'étais fiancée à l'homme qui vient de s'enfuir lâchement, après avoir commis une malhonnêteté. Son entreprise semblait bien marcher et lorsque sa fortune aurait été faite, nous nous serions mariés et aurions servi la cause de l'Athéisme... car nous étions tous deux membres de l'Association. je devais faire des conférences...

Elle s'arrêta et se couvrit le visage de ses mains. Il y eut un long silence, car Mme Duclavel ne trouvait rien à dire qui ne fût déjà dans la pensée de la pauvre enfant et celle-ci lui sut gré de cette silencieuse et discrète sympathie.
Enfin à travers les doigts, filtrèrent des larmes.
Puis, elle se jeta à genoux devant sa maternelle amie et appuyant sa tête sur son épaule, 'elle balbutia :
- Si vous saviez combien j'ai honte !
- Il y a certainement de quoi, dit la mère de Roseline, mais c'est là le début de la sagesse. Vous commencez à voir la folie du passé. Et considérez la bonté de Dieu qui a permis cette épreuve décisive pour vous ouvrir les yeux sur la valeur de là vie sans Lui ! Il vous arrête sur la voie du malheur, ici-bas et pour l'éternité.
- Il m'arrête, en effet, fit Miss Duncan, un peu ironiquement... Il m'arrête par la force.
- Vous êtes encore libre de résister à cette force d'amour et de miséricorde, dit Mme Duclavel, 'avec fermeté.

La jeune fille sécha ses yeux mouillés, puis se releva :
- J'ai le dégoût de moi-même, fit-elle. Si vous saviez toutes! Les bassesses que j'ai commises pour plaire à cet homme ! Tous les compromis que j'ai fait avec ma conscience (car l'éducation de ma jeunesse m'a tout de même laissé son empreinte) ! Tous les sacrifices que j'ai' consentis de plusieurs manières, pour devenir plus tard, une compagne utile... pour lui... et pour la cause !

Elle eut de nouveau l'air sardonique.
- Oui, de cette cause qu'il vient de si bien servir ! Il a fui, sans penser à l'honneur perdu, sans penser à moi, car il y à longtemps que je sentais dans ses lettres une sorte de malaise et de détachement. Vous avez raison : s'il n'y a pas de Dieu, il n'y a aucune raison de se gêner. Après tout, la morale tout court, n'est qu'une affaire de convention ! Il me l'a assez souvent répété, mais je ne pensais pas que cela pourrait s'appliquer à moi un jour...

Elle s'excitait et Mme Duclavel crut prudent de ne pas continuer cette conversation.
- Ma pauvre petite, dit-elle, calmez-vous. L'heure viendra où vous considérerez ce qui vous arrive aujourd'hui, comme le plus grand bonheur qui puisse vous être accordé. Venez avec mol au jardin. Daphné fait sa sieste et vous pourrez vous reposer dans le hamac, à l'ombre du tilleul, pendant ce temps. Après le thé, le crois que nous aurons la visite de Roseline. Cela vous distraira.

Miss Duncan se jeta au cou de Mme Duclavel.
- Quel coeur vous avez ! murmura-t-elle à son oreille. Vous ramèneriez l'enfant prodigue le plus endurci !


.
XIV

Le moteur de la volonté, c'est le coeur

 

Roseline soignait un « cas » à Menton, dans une pauvre famille d'ouvriers où l'argent gagné chez M. Barrett et chez d'autres riches, lui permettait d'apporter ses soins désintéressés.

C'étaient les gardes qu'elle préférait, où elle sentait qu'elle pouvait mieux, là, qu'ailleurs, réaliser cette parole du Maître : « Ce que vous avez fait, en mon nom, à l'un de ces petits, vous me l'avez fait à moi-même » (Matthieu 10 : 42.).
La naissance d'un sixième enfant (mort, d'ailleurs, peu après) avait épuisé 'la mère, au point qu'elle ne se rétablissait pas. Le ménage et toute cette famille, habitait trois pièces minuscules et sombres, dans le vieux Menton, où les rues sont si étroites que l'on toucherait presque les deux côtés en même temps.
La saleté, l'humidité, la misère y font leurs ravages habituels et l'infirmière avait eu fort à faire pour apporter un peu d'hygiène dans. pareil taudis.
Le médecin lui avait déclaré que si là malade ne sortait pas de ce milieu, elle serait menacée de tuberculose et qu'il fallait aviser au plus tôt.

C'était surtout pour causer avec ses parents de la solution de ce problème, que Roseline avait prié une de ses collègues de la remplacer auprès de la pauvre femme, pendant quelques heures, et qu'elle arriva, vers la fin de l'après-midi, pour trouver la famille réunie au jardin, autour de la table à thé, en face du panorama splendide.

Elle avait amené avec elle un des plus jeunes enfants de la malade, un frêle garçonnet de cinq ans, au visage pale et aux grands yeux noirs intelligents. Elle avait l'intention de le laisser quelque temps au grand air salubre de La campagne et aux soins maternels et éclairés de Mme Duclavel, qui accepta celte tâche avec sa bonne grâce habituelle.
Elle avait, d'ailleurs, l'habitude des générosités de sa fille, heureuse de ce qu'après l'avoir formée à faire le bien, elle trouvait enfin sa récompense dans cette réalisation.
Daphné prit tout, de suite le petit Jean sous sa protection.
- Il viendra se promener avec nous, déclara-t-elle, de son air de petite femme. Puis, on jouera ensemble avec le sable.

Roseline regarda Miss Duncan, dont elle avait de suite remarqué l'attitude préoccupée et les yeux rougis.
- Pourquoi pas ? dit la jeune gouvernante. Ce petit garçon. a l'air sage et obéissant...
- Ne le jugez pas sur les apparences, dit Roseline, en riant, car il n'est ni l'un ni l'autre, n'y 'ayant pas été habitué. Mais il est affectueux et il est malheureux, ce qui suffirait à nous le faire aimer. Daphné pourra faire la petite institutrice et lui apprendre à lire, car il ne sait pas même ses lettres...

Les yeux de Daphné brillèrent de joie et elle allait se précipiter dans la maison pour chercher son vieil alphabet, 'lorsqu'on lui fit comprendre que, pour ce jour-là, jean jouirait de sa liberté et que les leçons ne commenceraient que le lendemain.
Le cas de la mère était plus difficile à résoudre, car les Duclavel et leurs hôtes devaient sous peu, partir pour Meirage, Roseline y comprise.
Mireille et Claude y étaient déjà, depuis une quinzaine de jours, pour préparer l'installation générale.
- Il faut emmener la malade à Meirage, dit M. Duclavel, de sa voix calme, si elle est transportable.
- En. auto, oui. Par le train, non, répondit fit sa fille.
- Va pour l'auto. On louera pour elle une banquette du grand car qui doit nous emmener. On l'installera sur des coussins. C'est tout simple.

Les problèmes les plus ardus sont vite résolus, lorsque la volonté y est, et le proverbe anglais : Where there is a will, there is a way (où il y a la volonté, il y a le chemin pour y arriver) est presque toujours vrai.
Mais le moteur de la volonté, c'est le coeur.
Alors, tout devient possible, sinon facile.
Tout devient « simple » si l'on veut faire les sacrifices nécessaires.
Il y eut donc nombreuse société dans le vieux manoir des Vateau, à Meirage.

Claude, tout grand garçon qu'il était, ne dédaigna pas ses petits compagnons et lui, Daphné et jean, passèrent des jours dans le ravissement, à parcourir le, parc, à contempler la volière, à monter sur la collinette embaumée de lavande, où les lézards gris s'enfuyaient à leur approche, sous les pierres chaudes.
Pour le petit Jean, surtout, toute cette nature libre et à l'air si pur, était un enchantement, et bientôt, un peu de rose à ses joues témoigna du bien qu'il recevait.
Ce fut plus lent chez la mère, mais le jour vint, cependant, où on put espérer que cette santé si précieuse, serait conservée et rendue à sa famille, en parfait état.


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