Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'OFFRANDE DE GATEAU

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Nous en venons maintenant à l'offrande de gâteau, qui nous donne un autre aspect du parfait sacrifice de Jésus. Nous la considérerons d'abord dans les contrastes qu'elle présente avec les autres sacrifices, et ensuite dans ses différentes classes.

I. ET D'ABORD, QUANT AUX CONTRASTES, nous aurons à étudier cinq points principaux, qui feront ressortir à nos yeux le caractère distinctif de cette offrande. Si nous les saisissons bien, nous comprendrons aussi comment Jésus a été pour nous l'offrande de gâteau.

L'offrande de gâteau était un sacrifice d'agréable odeur. En cela, il est en contraste avec le sacrifice pour le péché, mais en parfait accord avec l'holocauste. Je ne développe pas ce point, sur lequel j'ai déjà insisté au sujet de l'holocauste. Qu'il me suffise de rappeler que la pensée du péché ne se trouve pas dans les sacrifices d'agréable odeur; ils représentent l'homme parfaitement obéissant et offrant à Dieu une offrande qu'Il accepte et qui lui plaît. Les sacrifices pour le péché ne sont pas des sacrifices d'agréable odeur; l'homme y est considéré comme un pécheur sous le poids de la peine due à ses péchés.

L'offrande de gâteau différait encore des autres sacrifices quant aux ingrédients qui entraient dans sa composition. C'était la fleur de farine, l'huile et l'encens (v. 1). Ici il n'y a pas de vie sacrifiée. C'est ce point en particulier qui fait la différence entre l'offrande de gâteau et l'holocauste. L'Ecriture nous fournit-elle le moyen de discerner la signification dé cette différence? Je n'en doute nullement, car elle répond à toutes nos questions. Elle s'explique par elle-même. Et d'ailleurs, le Saint-Esprit est là pour nous guider, surtout quand c'est Jésus qui est l'objet de nos recherches. Dieu est son propre interprète. C'est parce que nous oublions cette vérité que l'Ecriture est souvent si obscure pour nous; et c'est là assurément la cause de notre ignorance. Ce que nous recherchons est bien dans la Parole; mais, faute d'être en communion avec Celui qui nous l'a donnée, nous ne connaissons pas assez sa pensée pour saisir ce qu'Il a voulu nous dire, même quand Il a parlé clairement.

Mais revenons à notre sujet. J'ai dit que la grande distinction à faire entre l'holocauste et l'offrande de gâteau, c'était qu'une vie était offerte dans un des cas et des fruits dans l'autre. L'Ecriture explique cette distinction dans plus d'un endroit. C'est ainsi que, dans le premier chapitre de la Genèse, nous lisons que Dieu mit à la disposition de l'homme la partie de la création qui devait satisfaire à ses besoins: « Voici, je vous ai donné toute plante portant semence, qui est sur la face. de toute la terre, et tout arbre dans lequel il y a un, fruit d'arbre portant semence; cela vous sera pour nourriture» Gen. I, 29). Ainsi le fruit de l'herbe et des arbres, voilà la portion donnée à l'homme; tandis que la vie était celle de Dieu et lui appartenait tout entière. Ce ne fut qu'après le déluge (et cela aussi, je le crois, était typique) que l'homme fut autorisé à manger de la chair des animaux. Cependant, même alors, la vie était la portion de Dieu, comme il est écrit: « Vous ne mangerez pas la chair avec sa vie, c'est-à-dire son sang » (Gen. IX, 4).

Nous comprendrons maintenant sans difficulté la signification de la différence qui existe entre l'holocauste et l'offrande de gâteau. La vie est ce que Dieu, dès le commencement, réclamait comme sa part dans la création ; et, comme emblème, elle représente donc ce que la créature doit à Dieu. Tandis que les fruits de la terre sont la part de l'homme dans la création. Comme tels, ils représentent ce que nous devons à l'homme. Ainsi, clans l'holocauste, la vie offerte à Dieu, c'est l'accomplissement de ce que l'homme lui doit; l'homme donnant à Dieu la portion qui lui revient pour satisfaire à ce qu'Il. réclame comme son droit. Dans l'offrande de gâteau, le don des fruits et de l'huile, c'est l'homme s'acquittant de ce qu'il doit à son prochain, tout en se consacrant lui-même à Dieu dans son offrande. Ainsi l'holocauste est le parfait accomplissement de la première table de la loi, et l'offrande de gâteau celui de la seconde. Naturellement, dans un cas comme dans l'autre, l'offrande est celle du corps de Jésus; mais ce corps offert est vu sous des aspects différents. Dans un cas, c'est l'homme satisfaisant aux exigences de Dieu, lui donnant sa portion et recevant le témoignage qu'il est agréé de Lui; dans l'autre, c'est l'homme rendant à son semblable ce qu'il lui doit et lui donnant sa portion comme une offrande faite au Seigneur.

Comme les exemples ici choisis représentent bien la perfection du sacrifice! Les exigences de Dieu sont parfaitement satisfaites dans l'holocauste, celles de l'homme également satisfaites dans l'offrande de gâteau. S'il n'y avait eu d'autre offrande que celle de l'holocauste, l'homme n'aurait pas eu sa part, et il n'aurait pas été fait droit à ses exigences; et, s'il n'y en avait pas eu d'autre que celle de gâteau, Dieu n'aurait pas eu sa part. Mais il ne pouvait en être ainsi; c'est pourquoi, quand vînt la loi, l'offrande de gâteau fut ajoutée à l'holocauste. Ainsi le livre des Nombres parle souvent de l'offrande de gâteau comme liée à l'holocauste. Après avoir indiqué la quantité de fine farine qui devait entrer dans l'offrande de gâteau destinée à accompagner l'holocauste (Nomb. XXVIII, 12. 13), la loi parle, de l'holocauste et de son offrande de gâteau (Nombres XXIX). De même, dans Esdras, il est dit, à propos des offrandes pour l'autel: « Tu achèteras des boeufs, des béliers, des agneaux et leurs offrandes de gâteaux » (Esdras VII, 17) (1).

L'offrande de gâteau était, de fait, l'offrande de Caïn, mais présentée par un homme qui aurait d'abord offert celle d'Abel. L'offrande de Caïn était composée « des fruits de la terre » offerts à Dieu sans effusion de sang. Comment ce qui reconnaissait seulement les droits de l'homme aurait-il pu satisfaire Celui qui avait aussi ses droits sur ses créatures? Telle était la faute et l'erreur de Caïn: celle d'un homme tombé, qui, à cause de sa chute, avait été chassé d'Eden, et qui, méprisant l'aspersion du sang, ne reconnaissait pas les droits de Dieu sur lui. Et cet homme a la prétention de s'approcher de Dieu et de satisfaire à ce qu'il Lui doit en Lui ,offrant les fruits de la terre, c'est-à-dire ce qu'il doit à l'homme. Qu'ils sont nombreux aujourd'hui encore ceux qui offrent le sacrifice de Caïn, se trompant eux-mêmes en entretenant l'idée fausse que, telle qu'elle est, cette offrande peut être agréée. Si un homme avait pu se justifier devant Dieu par un service accompli en faveur d'une autre créature, c'est bien le Sauveur; et cependant Lui-même n'est pas venu sans offrir un sacrifice. Christ a parfaitement accompli toute justice à l'égard de l'homme; mais cela n'a pas suffi, il a fallu encore sa complète consécration à Dieu, même jusqu'à la mort. Et toute cette perfection n'aurait servi de rien aux pécheurs, si cet être parfait n'avait pas été jugé.

D'une manière générale, on peut dire que l'offrande de gâteau, c'est Christ se présentant lui-même à Dieu comme la nourriture de l'homme. C'est très doux et très précieux pour l'âme du croyant de considérer Jésus de cette manière.

Voyons quelle est la signification typique et particulière de chacun des ingrédients qui entraient dans la composition de l'offrande de gâteau.

I. Le premier est la fine farine. Le type est ici en parfait accord avec cette parole d'Esaïe: «Il broie le blé pour le pain» (Es. XXVIII, 28). Le pain est ce qui soutient essentiellement la vie, et Christ, qui est notre pain, nous est ici représenté comme celui qui a été froissé pour nous. Cet emblème de grain moulu réveille en nous l'idée d'une profonde souffrance. Ce n'est pas le blé qui s'élève plein de vigueur et qui mûrit sous l'influence des pluies du ciel et de la chaleur du soleil.

L'idée rappelée ici est celle d'une chose écrasée et broyée, d'une douleur intense. Jésus ne fut pas éprouvé par le feu seulement; ce n'est pas la sainteté de Dieu seule qui l'a consumé. En répondant aux besoins de l'homme, son âme aimante fut sans cesse froissée et affligée. Et l'épreuve, ici, venait de ceux qu'Il assistait, de ceux auxquels Il se donnait chaque jour. Qui peut lire les évangiles sans le reconnaître? Jésus se dépense pour les autres, pour ceux qui ne le comprennent pas. Son âme est affligée, son esprit est abattu à cause de l'aveuglement et de la dureté de leur coeur!

Oh! quel spectacle de complet dévouement cette humble vie ne nous présente-t-elle pas ! Voyez-le quand Il commence sa course avec la parfaite connaissance de toutes les épreuves qui devaient l'atteindre; prévoyant sa réjection et la fin pleine d'opprobre de sa carrière terrestre! Il est rejeté quand Il veut apporter la bénédiction; mal compris quand Il donne une instruction; souffrant non seulement au milieu de ses ennemis, mais bien plus encore par le fait de ceux qui l'entourent; c'est à la foule qui s'attachait à ses pas qu'Il s'adresse en disant : « Jusqu'à quand vous supporterai-je ? » (Marc IX, 19). Rejeté, mal compris, en proie à la souffrance, Il va en avant sans perdre courage; Il ne faiblit pas un instant dans son ministère de dévouement. A la fin de sa course, comme au commencement, Il est la nourriture de tous ceux qui ont besoin de Lui et qui le reçoivent.

Quand l'épreuve fond sur nous, nous pensons que c'est le moment ou jamais de songer à nous. Pour Jésus, il n'en était pas ainsi. Nous jugeons qu'il doit y avoir des limites à notre dévouement. Mais le Seigneur Jésus n'en mettait point au sien. Nous pensons qu'il est de notre devoir de veiller à nos intérêts, à la conservation de notre crédit ou au moins de notre vie; que des avances, une fois rejetées, ne doivent pas se répéter; nous trouvons bien légitime d'aspirer à un temps de repos et de relâche. Oh! comme en tout cela notre Bien-aimé, notre humble Maître était différent de nous et au-dessus de nous! Rien n'ébranlait la fermeté de son coeur, rien ne le détournait de faire le bien; rien ne l'arrêtait, ni la stupidité de ses disciples, ni la rage de ses ennemis, ni les machinations de Satan. Il n'y avait jamais de lenteur ni d'hésitation dans cette vie si absolument consacrée à Dieu. 'Mais Il ne sentait pas toutes ces choses, dirons-nous peut-être. Ah! Dieu seul connaît la mesure de ses souffrances, Dieu seul sait combien Il a été profondément affligé pour nous. En tant qu'homme, Il a été tenté, comme nous le sommes nous-mêmes, mais sans péché; c'est là précisément ce qui aggravait ses souffrances. Dans plusieurs endroits, les Psaumes nous permettent de jeter un regard sur les douleurs qui l'accablaient, mais jamais nous n'entendons un murmure s'échapper de ses lèvres. «L'opprobre, dit-il, m'a brisé le coeur. » (Ps. LXIX, 20). « Ce n'est pas un ennemi qui m'a outragé, alors je l'aurais supporté; ce n'est point celui qui me hait qui s'est élevé orgueilleusement contre moi, alors je me serais caché de lui; mais c'est toi, un homme comme moi, mon conseiller et mon ami nous avions ensemble de douces communications nous allions avec la foule dans la maison de Dieu » (Ps. LV, 12. 13. 14).

Bien des enfants de Dieu ne comprennent peut-être pas cela; c'est qu'ils ne savent rien jusqu'ici du service, mais qu'ils suivent seulement Jésus en se dépensant pour les autres, et ce type du « blé moulu » cessera d'être quelque chose d'étrange pour eux. Et, vraiment, que de choses dans les souffrances de Christ dont nous n'avons pas d'idée jusqu'au moment où, par la grâce, ses circonstances sont devenues les nôtres, et où nos frères, que nous voudrions servir, deviennent pour nous souvent, sans qu'ils s'en doutent, eux-mêmes un sujet d'épreuve et d'amertume!

Après ce coup d'oeil jeté sur quelques-unes des épreuves spirituelles de Christ, que dire de celles qu'Il a endurées dans son corps, des difficultés, des angoisses, de la faiblesse par où Il a dû passer pour subvenir aux besoins des autres! (Ps. XXII, 15; CII, 4. 5). Il était tellement épuisé qu'Il ne pouvait pas même porter sa croix (Marc XV, 21) et qu'on fut obligé d'en charger quelqu'un d'autre. Et, sans doute, ce n'était pas par bonté, mais par nécessité qu'on agissait ainsi envers Lui. Déjà la victime brisée était prête pour l'autel.

Quelle leçon pour le croyant qui désire se consacrer au service de ses frères ! Ce passage, comme d'ailleurs toute l'Ecriture, montre que le service c'est l'abandon, le sacrifice de soi-même. Christ consentit à être froissé pour le salut des hommes; aujourd'hui encore le grain de blé doit être broyé; plus notre service se rapproche de la mesure du sien - quelque éloigné qu'il en soit toujours - plus nous ressemblons à Celui qui a été froissé et brisé pour nous.

Mais il y a encore une autre pensée renfermée dans cet emblème. Ce qui entrait dans la composition de l'offrande de gâteau, ce n'était pas seulement de la farine, c'était de la fleur de farine (v. 1). Dans la fleur de farine, il n'y a point d'inégalité, juste emblème de ce que Jésus était. En Lui, il n'y avait rien d'inégal. Peut-être à aucun autre égard le contraste n'a été plus grand entre Lui et les meilleurs, les plus dévoués de ses serviteurs. Jésus était toujours égal à lui-même, toujours au-dessus et indépendant des circonstances. Sa marche, toujours semblable à elle-même, ne, présentait jamais de contradiction. En Lui, toutes les grâces étaient à l'état de perfection, tout était dans la mesure convenable et rien ne manquait. Quoiqu'Il fût toujours ferme, calme, digne, Il était affable, doux et humble comme personne ne le fut. En Lui, la fermeté ne dégénérait jamais en obstination, ni son calme en stoïcisme indifférent. Sa douceur ne devenait jamais de la faiblesse, et l'élévation de son âme ne se traduisait jamais par du mépris. Chez nous les grâces semblent souvent s'exclure l'une l'autre ou se contredire. Notre désir même de vivre et de mourir pour Celui qui nous a aimés, et nos propres efforts, montrent combien peu nous lui sommes semblables.

Voyez ses disciples, même les plus dévoués, comme Paul, Jean ou Pierre! Partout nous trouvons des inégalités, une grâce qui semble avoir la prépondérance sur les autres: chez Paul c'est l'énergie, chez Pierre le zèle, chez Jean l'amour. Et ces grâces même révèlent leurs infirmités. L'énergie de Paul le pousse à aller en Macédoine quand une porte lui est ouverte en Troade (2 Cor. II, 12. 13): il se repent de sa lettre aux Corinthiens, et ensuite ne s'en repent plus (2 Cor. VII, 8). Pierre aussi, par excès de zèle, prend plus d'une fois une place à laquelle la grâce ne l'a point appelé: il marche sur les eaux et enfonce (Matth. XIV, 28-31); il suit Jésus, mais pour le renier (Matth. XXVI, 58, etc.) Que voyons-nous encore chez le disciple bien-aimé? Son affection pour son Maître ne fait que nous montrer combien il lui est peu semblable: il ambitionnait la première place auprès du Seigneur dans son royaume (Matth. XX, 20-24); une autre fois il voulait faire tomber le feu du ciel sur tous ceux qui ne L'avaient pas reçu (Luc IX, 54).

Et maintenant, pour en venir à nous, nous n'avons pas besoin, je pense, que l'on nous fasse remarquer toutes nos inconséquences. Il nous arrive d'être devant nos frères tout autres que nous ne l'avons été devant Dieu. Nous luttons parfois dans la solitude et nous prions pour être délivrés d'actes insensés que nous commettons en public, tantôt reculant par manque de courage, tantôt nous laissant aller à une hâte intempestive; montrant une grande fermeté dans une circonstance, de l'hésitation dans une autre. Et ce ne sont pas nos péchés seuls qui montrent ces inconséquences. Elles se révèlent par les grâces mêmes que nous possédons quand l'une est en nous à un degré supérieur à l'autre.

Pourquoi remarquons-nous en Paul, en Jean, en Pierre une grâce particulière, tandis que cette pensée ne nous vient pas quand nous considérons notre bien-aimé Sauveur? Serait-ce que ses serviteurs le surpassaient en énergie, en zèle ou en tendresse d'affection? La vraie raison, c'est que Jésus était parfait. Son absolu dévouement était toujours le même. Il n'y avait pas de grâce particulière à remarquer là où tout était parfait.

II. Le second ingrédient qui se trouvait dans l'offrande de gâteau était l'huile. « Il versera de l'huile sur elle » (v. 1) ; sans cet ingrédient, l'offrande n'aurait pas été complète. La signification typique est ici facile à saisir, car le Nouveau-Testament est plein d'allusions à l'huile. L'huile, qui a la propriété de nourrir et de guérir, est le constant emblème de l'action de l'Esprit. Jésus, comme l'homme obéissant, était plein du Saint-Esprit; et c'est dans la puissance de l'Esprit dont Il était oint qu'Il s'offrit lui-même en sacrifice. C'est à quoi Luc fait de fréquentes allusions. Son évangile est celui du Fils de l'homme. Ainsi, au moment où Il entrait dans son ministère public, où Il commençait à offrir son offrande de gâteau, pour parler typiquement, nous lisons que le Saint-Esprit descendit sur Lui d'une manière visible (Luc III, 22). Immédiatement après nous lisons : « Jésus, plein de l'Esprit saint, s'en retourna du Jourdain » (Luc IV, 1). Et plus loin, au verset 14, il est dit : « Et Jésus s'en retourna en Galilée dans la puissance de l'Esprit.» Et aussitôt après (v. 16), dans la synagogue de Nazareth, quand on lui donna le livre du prophète Esaïe, Il lut le passage où il est parlé de cette onction de l'Esprit, qu'Il devait recevoir et de ce qui la suivrait: « L'Esprit du Seigneur est sur moi, c'est pourquoi Il m'a oint; Il m'a envoyé pour annoncer l'Evangile aux pauvres, pour guérir, ceux qui ont le coeur brisé » (Luc IV, 18). « Dieu a oint du Saint-Esprit et de puissance Jésus de Nazareth, qui allait de lieu en lieu en faisant du bien » (Actes X, 38). C'est bien là exactement ce que représente l'offrande de gâteau; et c'est aussi ce que nous retrouvons à chaque page des évangiles. Prenons un exemple dans le chapitre de Luc que nous avons cité: pas plus tôt notre Seigneur eut-il commencé son ministère qu'ils « se levèrent, est-il dit, et qu'ils le chassèrent hors de la ville » (Luc IV, 29). Partout où Il allait, Il était toujours l'offrande de gâteau; le grain broyé et l'huile vont toujours ensemble.

Quel contraste frappant entre ce que nous voyons en Jésus et ce qui se passe en nous! Vu dans son humanité, Lui, le grain broyé, est parfaitement oint. C'est pour cela que, tout broyé qu'Il est, Il est rempli de puissance. Mais pour nous qu'en est-il? Nous ne sommes ni broyés ni brisés, mais nous n'avons pas de puissance. Nos efforts sont paralysés, quand le peu que nous faisons pour les autres nous l'accomplissons avec notre énergie naturelle plutôt que dans la puissance de l'Esprit. Si nous allons faisant le bien, est-ce, je le demande, avec la puissance de l'onction d'en haut cru avec celle que nous donnent les circonstances, notre position ou nos talents naturels? Ne nous croyons-nous pas autorisés à rechercher telle et telle chose qui donne de la puissance quand nous nous en sentons dépourvus? Mais ce n'est pas là la force dans laquelle Christ marchait: l'offrande de gâteau était ointe d'huile.

Non, sans l'Esprit, le zèle le plus ardent, la connaissance la plus étendue ne seront d'aucune utilité pour agir sur les autres. Lisez la dernière entrevue de Christ avec ses disciples: « Alors Il leur ouvrit l'esprit pour leur faire entendre les Ecritures » (Luc XXIV, 45). « Il leur montre ce qui est écrit de Lui dans la loi de Moïse, dans les prophètes et dans les Psaumes » (Luc XXIV, 44). Il leur dit encore qu'ils étaient ses « témoins ». « Il éleva alors ses mains en haut et Il les bénit. » - Sont-ils maintenant parfaitement prêts pour l'oeuvre qu'ils ont à accomplir? Non. Il leur dit: «Demeurez dans la ville jusqu'à ce que vous soyez revêtus de la puissance d'en haut. » Ils ont la connaissance de Christ; ils ont reçu de Lui son message; ils ont sa bénédiction: mais il leur manque encore la puissance. C'est la raison pour laquelle Il leur dit: « Demeurez ». Ils doivent attendre la puissance d'en haut, et cette puissance c'est l'Esprit. Quand aurons-nous appris que nous avons besoin non seulement de la vérité, mais de la puissance, et que la seule qu'il nous importe d'avoir dans notre ministère, c'est celle du Saint-Esprit?

J'ai autre chose à remarquer ici. L'huile devait entrer comme ingrédient dans l'offrande de gâteau, mais non dans l'holocauste. Dans l'holocauste, l'Esprit se présente sous la forme de l'eau (Lévit 1, 9. Voir page 65), et dans l'offrande de gâteau, sous celle de l'huile. C'est dans nos rapports avec l'homme, dans le service pour le prochain, que la grâce et la puissance de l'Esprit sont particulièrement nécessaires. La présence de la. chair chez nos frères est pour nous une épreuve, ainsi d'ailleurs que les mille difficultés qu'entraîne notre contact avec le mal. Pour tout cela, il nous faut la grâce et l'onction de l'Esprit. Mais Jésus fut-il assez dépendant pour avoir besoin de cette onction ? En eut-il besoin, pour sa position de serviteur au milieu de ceux qui l'entouraient ? Oui, Il s'est humilié jusqu'à ce point, jusqu'à avoir besoin comme un homme humble et dépendant de la grâce qu'Il apportait aux autres.

Bien-aimé Sauveur! puissions-nous de plus en plus apprendre à être dépendants comme toi!

III. Le troisième ingrédient de l'offrande de gâteau est l'encens: « Il mettra de l'encens dessus » (Lévit. II,1). Tandis qu'il est dit: « Vous ne ferez point fumer de miel comme sacrifice par feu à l'Eternel » (v. 11). La signification de ces emblèmes est facile à saisir et bien remarquable. L'encens est le plus précieux des parfums, il répand longtemps une délicieuse odeur. Comme cela rappelle bien le sacrifice de notre bien-aimé Sauveur! Quant au miel, quoique doux, il se corrompt facilement; il fermente et s'aigrit très vite. L'encens ne répand tout son parfum que sous l'action du feu. Pour le miel, c'est le contraire; la chaleur le gâte.

L'application de tout ceci, comme se rapportant au sacrifice de Christ, se comprend d'elle-même. Jésus a été éprouvé par le feu de Dieu, mais tout en Lui s'est montré parfum précieux, rien que parfum. La sainteté de Dieu a manifesté des grâces que nous n'aurions jamais connues s'Il n'avait pas souffert. Oui, le précieux parfum qui s'exhalait de ce sacrifice de Christ était le résultat de cette rude épreuve. Mais, que voyons-nous chez les croyants ? Chez plusieurs une douceur naturelle qu'il peut être très agréable de rencontrer, mais qui ne tiendra pas à l'épreuve du feu; elle s'aigrira à la première occasion. Quel est celui qui, placé dans des circonstances critiques, où il y a un conflit entre la sainteté de Dieu et nos intérêts, ne découvrira pas en lui beaucoup de choses qui seraient loin de répandre sur l'autel un parfum d'agréable odeur? Et que de fois, quand des saints étaient placés devant tel ou tel commandement de notre Maître, commandement bien clair, mais négligé par eux, n'avons-nous pas vu leur douceur, au lieu d'être du pur encens, se transformer en miel fermenté? Il n'en était pas ainsi pour le Seigneur Jésus: « Oint d'huile de joie au-dessus de ses compagnons, celui dont les vêtements sont myrrhe, aloès et casse » (Ps. XLV, 7. 8). - « Ses parfums sont d'agréable odeur, son nom est un parfum répandu » (Cant. de Salomon I, 3). Chez lui, tout est arôme et douceur; mais non la douceur du miel: c'est une autre douceur, celle du parfum de bonne odeur. Ah! certes, elle pouvait bien s'écrier, son épouse : « Mon bien-aimé est pour moi un bouquet de myrrhe, mon bien-aimé est pour moi une grappe de Henguédi » (Cant. I, 13. 14.). Voilà ce qu'était pour l'épouse le Bien-aimé, voilà ce qu'Il était à ses yeux: Celui qui s'est présenté pour elle devant Jéhova en parfum de bonne odeur.

IV. Le quatrième et dernier ingrédient de l'offrande de gâteau est le sel: « Tu saleras aussi de sel toute offrande de gâteau » (Lévit II, 13). Et, ce qui en t'ait mieux ressortir la signification typique, c'est la défense qui est ajoutée : « Aucune offrande de gâteau que vous présenterez à l'Eternel ne sera faite avec du levain », (v. 11).

La signification de ces emblèmes est claire. C'est la même pensée présentée positivement et négativement. Le sel, le préservatif bien connu de la corruption, est l'emblème de la conservation et de l'incorruptibilité ; tandis que le levain, composé de pâte aigrie, est l'emblème tout aussi connu de la corruption. Ainsi, quand l'apôtre veut résumer en un mot l'incorruptibilité, la gravité, la sincérité qui caractérise un chrétien, il dit: « Que votre parole soit toujours dans un esprit de grâce assaisonnée de sel » (Col. IV, 6). Ainsi encore, quand il est parlé d'une alliance comme étant perpétuelle, elle est appelée une alliance de sel (Nombre XVIII, 19). Le levain est mentionné encore plus souvent. Il est question du « levain des pharisiens » (Luc XII, 1), du levain des Sadducéens (Matth. XVI, 6), et du levain d'Hérode (Marc VIII, 15). Et, dans les épîtres, nous sommes exhortés à ôter le vieux levain » (1 Cor. V; 7) (2). Tous ces passages nous donnent la clé de ces emblèmes. Non seulement le sacrifice de Jésus renferme ce qui en assure le caractère incorruptible, mais il préserve aussi du mal et de la corruption ce avec quoi il est en contact. Mais les goûts de l'homme sont loin d'être toujours en harmonie avec le caractère de ce sacrifice!

1) Voyez aussi Juges XIII, 19

.2) On citera peut-être la parabole du levain (Matthieu XIII, 33), comme donnant une autre signification à ce mot. Mais j'ai la pleine certitude que là, comme partout ailleurs, le levain est l'emblème du mal et de la corruption. La grande pensée, dans la parabole, est l'extension du christianisme de profession. C'est à l'intelligence spirituelle de reconnaître si ce qui est semé maintenant est bon ou mauvais. Mais l'Eglise est si aveugle sur son propre état qu'elle ne le reconnaît pas comme étant annoncé dans les Ecritures, et comme étant son état actuel. Nous sommes un peu comme les disciples auprès du sépulcre: les faits sont devant nous, mais bien peu ont des yeux ou un coeur pour les comprendre.
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