Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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LE PÈLERINAGE DOULOUREUX
de
L'ÉGLISE A TRAVERS LES ÂGES




4. Persécutions et exils

Dès leur début, ces églises avaient été exposées à des persécutions intermittentes, qui devinrent par la suite plus générales et plus rigoureuses en raison des changements, dans la situation politique. La forme autocratique du gouvernement, qui supprimait brutalement toute liberté individuelle, conduisit à la formation de sociétés secrètes, cherchant à briser la tyrannie par tous les moyens, même les plus impitoyables. Les meurtres et les atrocités de ces Nihilistes terrifièrent les autorités qui intensifièrent les mesures de répression. Le tzar Alexandre Il désirait personnellement une réforme quoiqu'il ne réalisât pas la terrible menace d'un orage fait de haine et de rancunes, qui s'était amassé pendant des siècles d'oppression. Il cherchait donc sérieusement à introduire des changements importants dans cette direction lorsqu'il fut tué dans une rue de St-Pétersbourg par l'éclatement d'une bombe lancée par un Nihiliste. Ce qui provoqua une violente réaction et une recrudescence de l'absolutisme le plus complet. Ses successeurs et leurs conseillers se mirent à supprimer, non seulement les révolutionnaires exaspérés, mais encore tout ce qui ne cadrait pas avec leur idéal d'une Sainte Russie, où l'autocratisme domine dans l'Etat et dans l'Eglise. Les dissidents politiques, les éléments non russes de la population, - surtout les juifs --- les universitaires et d'autres, tombèrent sous la discipline, et il devint évident que les croyants hors de l'Eglise orthodoxe ne seraient pas épargnés.

Ils trouvèrent un adversaire acharné et persévérant en Pobiedonostzef, procureur du St Synode. Ils connurent les emprisonnements, les amendes, les exils, tandis que les prêtres poussaient le peuple à les attaquer, à les maltraiter, à détruire leurs foyers et leurs biens. Leurs réunions furent interdites et, lorsqu'ils s'assemblaient secrètement pour prier et lire la Bible, ils étaient brutalement dispersés, et des arrestations et des condamnations s'en suivaient. Les bannissements en Sibérie et au Caucase ne firent qu'augmenter, surtout parmi les anciens et les conducteurs des églises. Par ce moyen, l'Evangile fut annoncé au loin, car les exilés témoignaient pour Christ en tous lieux. Parfois, les disciples comparaissaient devant les tribunaux et étaient formellement jugés et condamnés. Souvent ils étaient exilés par ordre administratif; il n'y avait alors ni accusation ni procès.

L'exil était un châtiment particulièrement cruel. De lourdes chaînes étaient fixées aux mains et aux pieds des condamnés, et celles des pieds étaient si longues que le prisonnier devait les soulever et les tenir à la main, pour pouvoir marcher. Dans les premières années, les centaines de lieues conduisant à l'exil se faisaient à pied. Plus fard, quantité d'exilés furent enfermés dans des trains, dont les wagons n'admettaient l'air et la lumière que par une petite ouverture grillée. Quand les moyens le permettaient, femmes et enfants pouvaient les accompagner en exil. Tous étalent exposés aux brutalités de la soldatesque, chargée de surveiller le misérable convoi, où les criminels côtoyaient les dissidents politiques et religieux. Ces gardiens augmentaient encore les souffrances à coups de knout, ou par tout autre châtiment, selon leurs caprices. Les haltes avaient lieu dans les prisons égrenées le long de la route. Il fallait attendre parfois des heures, parfois des mois, jusqu'à ce que fussent assemblées les différentes bandes avec leur ordre de marche. Les prisons étaient déjà bondées. Souvent, la nuit venue, l'espace ne permettait pas à tous de s'étendre, il fallait s'entasser les uns sur les autres. Il n'y avait ni installation sanitaire, ni moyens de se laver. Aussi les souffrances étaient-elles encore accrues par les poux et autre vermine assaillant les prisonniers déjà couverts de plaies. La nourriture était affreuse. Hommes, femmes et enfants ne pouvaient échapper aux injustices et aux insultes infligées par les surveillants. Il se trouvait parfois des fonctionnaires humains, mais ils ne pouvaient guère modifier le système d'oppression auquel ils appartenaient. Dans les lointains lieux d'exil, les prisonniers devaient pourvoir de leur mieux à leur subsistance. Il leur était interdit de quitter la ville ou le village qui leur était désigné et dont ils ne comprenaient souvent pas le langage. Un grand nombre moururent en route, suite des privations et des cruautés endurées. Si l'exil n'était pas pour la vie, un certain nombre d'années était fixé. Mais souvent, quand le terme était expiré et que le captif soupirait après la liberté, un nouveau terme était ajouté au premier.

Année après année, dans de nombreux villages russes et dans toutes les villes, le conflit se poursuivit. D'une part un nombre toujours croissant de gens de toutes classes, instruits par l'Ecriture, acceptaient Christ comme leur Sauveur et Seigneur, puis marchaient sur ses traces en prenant la Parole de Dieu comme guide suprême. D'autre part, toutes les ressources du puissant Empire russe étaient mises en oeuvre pour arrêter ce courant, pour forcer ces chrétiens à renier leur foi et à retourner aux formes mortes de l'idolâtrie, dont Christ les avait libérés. Toutes les forces, impériales et orthodoxes, échouèrent pourtant en face de la patience invincible et du zèle ardent des saints.

Au temps même de ces persécutions, la vente du N. Testament fut favorisée, et il y eut des cas où, grâce à quelque influence personnelle en haut lieu, autorisation fut donnée de visiter les prisons pour y distribuer le Livre. Dr Baedeker se dévoua sans compter à ce service. Mais ceux qui agissaient selon les préceptes bibliques étaient traités comme criminels et souffraient en conséquence.

'Voici quelques incidents, entre beaucoup, qui donneront une faible idée de l'ensemble (110). En Pologne, un jeune homme suivait les réunions. Il y entendit l'Evangile, se donna à Christ et délaissa sa vie légère et coupable. Il ne put s'empêcher de parler à d'autres du salut reçu et plusieurs pécheurs se tournèrent vers Dieu. Arrêté, il fut joint à un groupe de treize jeunes hommes qui furent exilés en un lieu au delà d'Irkoutsk, en Sibérie. De ce nombre, sept moururent en route; les autres passèrent trois ans et demi en prison, puis furent libérés. Six moururent assez vite de la tuberculose contractée en prison. Le dernier survivant avait perdu tout contact avec sa famille en Pologne (bien qu'il s'y fût marié, laissant derrière lui femme et enfant). N'ayant pas de ressources pour entreprendre le long voyage de retour, il obtint du travail comme forgeron et demeura en Sibérie. Il ne cessa de témoigner pour Christ, si bien que, là où il se trouvait, une église fut fondée et prospéra.

Une jeune femme vivait avec ses parents, des fermiers aisés. Elle se convertit et se mit à parler avec zèle de son Sauveur à ses amis et voisins. Elle fut bientôt condamnée à l'exil perpétuel en Sibérie. Il lui fut possible de voyager en chemin de fer. Quand le wagon des prisonniers, où se trouvait Maria, arriva à la gare près de son village, il fut entouré d'une foule d'amis et de connaissances. On pouvait à peine percevoir son visage à travers les épais barreaux de la petite ouverture, mais elle pouvait mieux les voir. «Je vous aime - dit-elle - père, mère, frères, soeurs, amis. je ne vous reverrai jamais. Mais ne pensez pas que je regrette ce que j'ai fait; je suis heureuse de souffrir pour mon Sauveur qui a tant souffert pour moi». Le train s'ébranla et on n'entendit plus jamais parler d'elle. Mais un garçon du milieu de la foule rentra à la maison en pleurant. Il se décida bientôt à suivre Christ et plus tard, devint un prédicateur béni de l'Evangile qui amena beaucoup d'âmes à l'obéissance de la foi.

Un paysan habitait un village un peu au nord d'Omsk, où le sol peut être cultivé dans les clairières des vastes forêts de mélèzes et de bouleaux argentés. Il fut appelé au service militaire et prit part à la guerre russo-japonaise. Il obtint d'un camarade un N. Testament et fut transformé en le lisant. Son ivrognerie et ses mauvaises habitudes firent place à la sobriété, à l'honnêteté et à la paix qui conviennent au chrétien. Quand il revint à son village natal, on remarqua ce changement; mais ses amis furent moins frappés par sa conduite transformée que par ce qui leur semblait être un manque de religion. Il ne prenait plus part aux cérémonies de l'Eglise orthodoxe et n'avait chez lui aucune icône, ou image sainte. Il se mit à lire le N. Testament avec un voisin, qui, ayant accepté Christ par la foi, le montra par une vie nouvelle. Ceci alarma le prêtre. Sur son avis, le second converti fut saisi et battu par son père et ses frères, au point qu'il passa pour mort. Cependant sa femme l'ayant traîné dans leur maisonnette, le ramena à la vie. Entre temps, d'autres, entendant lire le N. Testament, suivirent Christ, et ces nouveaux croyants se rencontrèrent aussi souvent que possible pour lire ensemble. Ce faisant, ils apprirent que les premiers disciples avaient eu pour coutume de baptiser ceux qui avaient cru. Ils se rendirent donc vers la rivière Irtish, qui traversait leur village, et là, l'ancien soldat commença à baptiser. Avec d'autres, il continua cette pratique, selon les besoins. Dès le début, ces croyants comprirent, en lisant la Parole, qu'ils formaient une église telle qu'elle est décrite dans les Ecritures. Les dons du St-Esprit leur furent accordés ; ils eurent leurs anciens, capables de diriger, leurs docteurs et leurs évangélistes. De fait, chacun fut, en quelque manière, utile à l'assemblée. Chaque premier jour de la semaine, ils se réunissaient et rappelaient la mort du Seigneur en rompant le pain, obéissant ainsi à ce qu'ils avaient lu.

Le prêtre et ses amis prirent les mesures qui devaient, à leur avis, entraver le mouvement. Les croyants furent battus et l'on brisa les portes et les fenêtres de leurs maisons. Leur bétail fut dispersé. On leur infligea toute espèce d'outrages qui furent endurés avec patience et courage et dont ils firent un sujet de prière. Ces violences cessèrent quand près de la moitié des villageois firent partie de l'église. Le prêtre se mit alors à affirmer que la nouvelle religion ne pouvait venir que d'un ignorant moujik (paysan russe), mais qu'aucune personne intelligente ne croyait ces choses. Un jour, quatre étrangers arrivèrent en voiture dans ce village écarté. A leur surprise, ils furent aussitôt entourés de villageois qui les invitèrent à venir chez eux et leur adressèrent tant de questions qu'ils ne savaient comment y répondre assez vite. Bientôt tout le village fut assemblé et chaque étranger déclara, à son tour, qu'il avait été sauvé par la grâce de Dieu, par la foi au Seigneur Jésus-Christ et que, désormais, il désirait agir en toutes choses selon la Parole de Dieu. Ces témoignages causèrent une grande joie aux frères du village. Ils ne se seraient pas détournés de l'Evangile si les étrangers avaient parlé autrement; mais la présence de ces croyants venait confirmer leur foi et plusieurs qui hésitaient encore confessèrent Christ. Des Bibles furent apportées et, durant tout le séjour des visiteurs, l'étude biblique fut l'occupation continuelle de l'église, jour et nuit.

Un ouvrier de la Russie méridionale travaillait avec zèle et fidélité dans la congrégation des frères de l'endroit. Ceci lui valut bien des souffrances, et, une nuit, sa maison fut cernée par la police armée qui, s'introduisant chez lui, le brutalisa, ainsi que sa femme et ses enfants. Il fut arrêté et emmené. Sa femme, ayant donné naissance à un enfant, mourut, ainsi que le bébé. Il restait encore quatre enfants, dont l'aînée n'avait que treize ans. Ils n'eurent alors plus qu'une pensée: retrouver et rejoindre leur père. Ayant appris qu'il avait été banni à Vladikavkas, dans le Caucase, ils décidèrent de le suivre là-bas. Lentement, ils traversèrent les steppes immenses, tantôt secourus par les frères, tantôt mendiant leur pain. Arrivés à destination, ils apprirent que leur père avait été transféré à Tiflis. Les croyants les gardèrent quelque temps et les restaurèrent, puis leur indiquèrent la belle route de montagne remontant la vallée du Térek. Ils virent le grand massif du Kasbek et descendirent les pentes ensoleillées du versant caucasien vers Tiflis. Là, ils furent reçus avec bonté par les frères, russes, arméniens et allemands, mais apprirent que leur père venait d'être expédié dans un lieu éloigné, parmi les Tartares, à la frontière persane. Ils ne pouvaient continuer leur voyage. Alors voyant leur détresse, deux frères se chargèrent de suivre le père, de lui porter des provisions et de le rassurer sur le sort de ses enfants. Ils arrivèrent à destination peu après le prisonnier, mais seulement pour apprendre que, le coeur brisé et la santé ruinée, il avait cessé de souffrir.

En 1893, on publia un décret, conforme aux décisions prises auparavant par le St-Synode, présidé par Pobiedonostzef, selon lequel les enfants des stundistes devaient être enlevés à leurs parents et confiés à des gens de leur parenté, membres de l'Eglise orthodoxe, ou placés sous le contrôle du clergé local. Les noms des sectaires devaient être communiqués au ministre des communications qui en dressait des listes placées dans les bureaux et les ateliers des chemins de fer, afin que tout emploi leur fût refusé. Tout patron employant un stundiste était exposé à une forte amende. Il était interdit aux stundistes de louer ou d'acheter du terrain, et même de se déplacer. Ils étaient déclarés légalement incapables de diriger une banque ou un commerce. En quittant l'Eglise orthodoxe, on s'exposait à la perte des droits civiques et à l'exil, pour le moins à passer dix-huit mois dans un pénitencier. Les prédicateurs et auteurs d'ouvrages religieux devaient subir de huit à seize mois d'emprisonnement; en cas de récidive, de trente-deux à quarante-huit mois dans une forteresse; pour une troisième offense, c'était l'exil. Toute personne répandant des doctrines hérétiques, ou aidant à le faire, étaient punie de l'exil en Sibérie, en Transcaucasie, ou en quelque autre région lointaine de l'empire.

Les baptistes, en tant que corps organisé, jouirent d'une certaine mesure de tolérance, refusée à ceux que l'on appelait souvent «chrétiens évangéliques», chez lesquels chaque congrégation formait une église autonome. Ces derniers, n'ayant ni chef, ni centre terrestres, ne pouvaient être placés sous l'influence ou te contrôle du gouvernement, même de façon limitée, comme c'était le cas pour la fédération baptiste. On les pressa de plus en plus de s'organiser et de nommer quelque représentant avec lequel le gouvernement pût traiter. Certaines églises cédèrent pour obtenir du soulagement. D'autres refusèrent, dans la pensée que ce mode de faire les détournerait de l'attitude de dépendance directe du Seigneur Jésus-Christ et de leur responsabilité envers Lui.

Les mesures de répression, en Russie, ne faisant que croître, elles suscitèrent de nouveaux désordres. La guerre japonaise n'excita aucun enthousiasme et son insuccès éveilla l'espoir d'une révolution victorieuse. Des grèves et des émeutes éclatèrent en maints endroits et une grève générale des cheminots paralysa les communications. Des réformes très insuffisantes ne firent qu'augmenter l'irritation. Les attaques des Tartares contre les Arméniens, fomentées au Caucase, les pogroms contre les juifs, les insurrections des peuples baltes contre les Russes allemands se muèrent en d'horribles massacres qui n'arrêtèrent en rien l'action révolutionnaire. Bientôt la Russie entière fut dans le chaos le plus complet.

Contraint par les événements, le gouvernement accorda à contrecoeur de plus larges réformes, entre autres, en 1905, un édit du Tzar qui promettait la liberté de foi, de conscience et de culte. Pobiedonostzef se retira et le métropolite de l'Eglise russe déclara: «La vraie foi provient de la grâce de Dieu, par l'instruction, l'humilité et lies bons exemples. L'emploi de la force est donc refusé à l'Eglise, qui ne juge pas nécessaire de retenir des enfants égarés absolument contre leur volonté. C'est pourquoi l'Eglise orthodoxe ne s'oppose pas à l'abolition de la loi interdisant la séparation d'avec elle.

La nouvelle liberté fut aussitôt largement mise à profit. Des réunions se tinrent partout, attirant la foule qui semblait ne pouvoir assez entendre prêcher la Parole. Beaucoup confessèrent Christ. Souvent la prédication était interrompue par les réactions des auditeurs. Les uns tombaient à genoux, ou sur leur face. Pendant la prière, plusieurs priaient simultanément à haute voix: c'étaient des réponses, des confessions de péché, des actions de grâces pour le salut reçu. Plusieurs groupes secrets de croyants vinrent ainsi à la lumière; ce qui prouva que les disciples du Seigneur existaient en beaucoup plus grand nombre qu'on ne l'avait supposé. Les obstacles à l'étude de la Parole ayant disparu, les études bibliques et les exposés des Ecritures se multiplièrent. On vit le même désir qu'autrefois d'obéir en tout à la Parole de Dieu, et les dons de l'Esprit pour le ministère se manifestèrent parmi les croyants, quelle que fût leur position sociale.

Cette liberté ne dura pas longtemps. Quand le gouvernement et l'Eglise orthodoxe regagnèrent leur pouvoir, ils refusèrent les concessions qu'on leur avait arrachées. La persécution reprit son cours et, en peu de temps, les croyants eurent à souffrir comme auparavant. Lorsqu'en 1914 la guerre éclata, beaucoup de frères anciens, appartenant aux «chrétiens évangéliques», et des pasteurs baptistes furent exilés en Sibérie et sur les bords de la mer Blanche. En 1917, la Révolution commença qui devait, en peu de temps, amener la chute du Tzar, de ses ministres, de l'Eglise orthodoxe et de toute la vieille Russie. Une nouvelle ère était violemment introduite.



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110 Les quatre incidents suivants sont tirés de la connaissance personnelle de l'auteur.

 

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