Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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LE PÈLERINAGE DOULOUREUX
de
L'ÉGLISE A TRAVERS LES ÂGES




4. Philadelphie

Au dix-huitième siècle furent fondées les sociétés ou églises de Philadelphie qui combinaient deux courants d'expérience spirituelle. Le premier provenait du besoin d'une étroite union de l'âme avec Dieu. Le second était l'expression du sentiment de l'unité essentielle de tous les enfants de Dieu, et du désir de manifester cette communion de la véritable Église.

De bonne heure, l'Église catholique romaine avait placé son clergé et ses sacrements entre l'âme et le Sauveur. Mais, tandis que ce système détournait beaucoup d'âmes de Lui, il y avait ceux qui soupiraient après la communion avec Dieu, telle qu'elle est révélée dans le Christ Jésus, et leur attachement à l'Époux céleste était si intense qu'ils ne poursuivaient que le seul but d'arriver à une pleine connaissance de sa Personne, et d'expérimenter l'union avec Lui. Ils pensaient y parvenir en suivant Jésus, en l'imitant; ou encore en méditant longuement sur Lui, afin que sa beauté, son caractère divin leur soient de mieux en mieux révélés. Ils pratiquaient l'ascétisme dans la pensée d'assujettir leur corps et leur volonté naturelle.

Le protestantisme accentua les divisions parmi les chrétiens de profession et provoqua des luttes acharnées entre les nombreux partis. Toutefois, il y en avait qui déploraient ces choses et s'efforçaient de mettre en lumière l'unité fondamentale de vie et d'amour chez tous les hommes séparés du monde, mais unis à Christ et aux membres de son corps par la foi.

Pendant longtemps, les croyants de l'Église catholique, appelés souvent mystiques ou quiétistes, furent regardés comme des modèles de vie chrétienne, et les plus connus furent canonisés. Mais, sous Louis XIV, ils furent persécutés, grâce à l'influence des jésuites. Venu à Rome, vers 1670, le prêtre espagnol Miguel de Molinos (1640-1697) devint la plus grande force spirituelle dans cette ville. Son livre, le «Guide spirituel», servit de règle de vie à beaucoup d'hommes, surtout à des gentilshommes et à des prêtres. Il était le confesseur et le conseiller le plus écouté du pape Innocent XI, qui s'opposait personnellement à la persécution. Cependant Molinos fut finalement condamné à la prison perpétuelle et mourut entre les mains des inquisiteurs, on n'a jamais su comment.

Par ses écrits et par sa vie, Madame de Guyon (1648-1717) entraîna beaucoup de gens, appartenant à des cercles divers, à la recherche d'une vie de parfait amour et de soumission totale à la volonté de Dieu. L'éminent et pieux archevêque Fénelon, accepta et défendit l'enseignement de Madame de Guyon, au prix de sa popularité et de ses perspectives à la cour. Louis XIV la fit incarcérer à plusieurs reprises, finalement à la célèbre Bastille. Mais ces murs de quatre mètres d'épaisseur ne purent entraver l'influence croissante de son enseignement.

Dans les milieux protestants, les écrits de Gottfried Arnold (1666-1714) eurent un grand retentissement. Ayant étudié à Wittenberg, il devint professeur d'histoire à Giessen. Mais il renonça à cette position lorsqu'il s'aperçut que sa vie intérieure de communion avec le Seigneur était entravée par ses obligations sociales et professorales. Spener n'approuva pas ce point de vue. Il maintenait que, tant que l'on petit aider à d'autres, il faut persévérer dans une voie que l'on condamne, même au détriment de sa propre âme. Mais Arnold regardait l'Église luthérienne comme une Babylone, incapable de réformation. Il estimait que le chemin solitaire de séparation, choisi par lui, était celui qu'indiquait l'exemple des apôtres. Son ouvrage initial, «Premier amour, ou une fidèle description des premiers chrétiens, d'après leur foi vivante et leur vie sainte», était une histoire de l'Église, depuis les temps apostoliques jusqu'à Constantin ; il y montrait les maux engendrés par l'union de l'Église à l'État. De plus en plus persuadé que l'histoire de l'Église avait été écrite par des représentants des églises dominantes et dans un esprit de parti, il se décida à présenter cette histoire si importante de façon impartiale, en écrivant l'ouvrage si répandu en sa génération et en celles qui suivirent: «Histoire impartiale des Églises et des hérétiques, depuis le début du Nouveau Testament jusqu'en l'an de grâce 1688». Abandonnant l'idée que l'Église se rattache à quelque société, ou organisation spéciale, il mit en lumière l'Église universelle, cachée et dispersée dans le monde entier, parmi tous les peuples et dans toutes les églises. Naturellement, le livre suscita des critiques diverses. Un théologien déclara que c'était le livre le plus nuisible qui eût paru depuis la naissance de Christ; un autre le nomma le meilleur et le plus utile des livres de ce genre, après les Stes-Ecritures.

Les écrits de Madame de Guyon démontrèrent à beaucoup d'âmes qu'il leur était possible de vivre en intime communion avec Dieu.

Le livre d'Arnold éveilla l'espoir de la séparation d'avec le monde et de la communion avec tous les saints.

Vers 1700, ces divers éléments dispersés se rapprochèrent en formant ces sociétés, ou églises nommées Philadelphie (amour fraternel).

Le petit pays de Wittgenstein (98), à l'extrémité sud de la Westphalie, fut gouverné par une série de souverains capables et tolérants, ce qui y attira une nombreuse population composée d'éléments variés. Des fugitifs des Cévennes y furent reçus avec bonté, d'autant plus que les deux frères, gouvernant respectivement le nord et le sud du pays, avaient épousé deux soeurs (1657), filles d'un gentilhomme français, qui avait fui en Hollande, lors du massacre de la St-Barthélemy. Ces deux familles étaient sincèrement chrétiennes. En 1712, la partie nord du pays, Berlebourg, était gouvernée par un descendant d'une de ces familles, le comte Casimir, qui, de même que sa femme et sa mère veuve, fut le constant protecteur de tous les opprimés.

Ces croyants se rattachaient aux églises de Philadelphie, très répandues à l'époque. Jane Leade de Norwich, et d'autres, enseignaient que, dans les deuxième et troisième chapitres de l'Apocalypse, les messages aux églises, avaient un sens historique progressif. Sardes représentait le protestantisme, passant pour être vivant, mais étant mort. Plus tard, viendraient l'indifférence et l'apostasie de Laodicée. Toutes les âmes réveillées étaient appelées à imiter la fidèle Philadelphie et à s'y joindre. En 1695, une église de ce nom se fonda à Londres, non pas, dit-on, pour créer une nouvelle secte, mais pour maintenir dans ses réunions, l'esprit d'amour et la forme de la première Ste-Église catholique et apostolique. Les membres ne se séparaient pas nécessairement des églises auxquelles ils appartenaient et n'engageaient personne à le faire. Cependant les réunions se tenant aux mêmes heures que celles d'autres églises, cela rendait impossible la fréquentation des deux cultes. Pour le moment - disaient ces croyants - l'église de Philadelphie est faible. jusqu'à ce qu'elle se manifeste avec puissance, nous ne saurions nous attendre à l'accomplissement de certaines prophéties, telles que la conversion des Juifs, des Turcs et d'autres infidèles, la fin de l'apostasie, le rétablissement de toutes choses et la venue personnelle du Christ sur la terre.. On tint des réunions semblables en plusieurs parties de l'Allemagne, de la Hollande et d'ailleurs. Berlebourg devint le centre d'un important réveil qui s'étendit à toute l'Allemagne occidentale, des Alpes à la mer.

En 1712, ces églises publièrent la Bible de Marbourg, sous ce titre: «Bible mystique et prophétique, renfermant toutes les Stes-Ecritures de l'A. et du N. Testament, récemment traduite de l'original, avec explications des principaux types et prophéties, spécialement du Cantique des Cantiques et de l'Apocalypse, avec leurs doctrines essentielles, etc.» Plus tard, de 1726 à 1742, on édita une oeuvre plus considérable, la Bible de Berlebourg, en huit volumes, magnifiquement imprimée en gros caractères. Elle contenait des notes détaillées, y compris des extraits de l'enseignement de Madame de Guyon.

L'église de Philadelphie représentait les aspirations d'une grande variété de mouvements. Elle se proposait de faire disparaître les différences entre églises, d'unir tous les croyants dans l'amour, et plaçait la purification et le perfectionnement de l'âme au-dessus des rites et observances des «églises».

Pour s'aider mutuellement, les membres consacraient chaque matin, à la même heure et en tous lieux, un certain temps au recueillement dans la présence de Dieu.

A Berlebourg, le Dr Carl, médecin du comte Casimir, était un membre actif de la société. En 1730, il publia l'«Invitation philadelphienne », un appel aux âmes les exhortant à se détourner de la circonférence des opinions et des passions pour se fixer au centre, par l'adoration en Esprit et en vérité. Ceux qui ont des oreilles ouvertes (dit l'écrivain) ont les mêmes sentiments: ils sont un par le langage, les goûts et les affections. Mais cette unité centrale ne se trouve que chez ceux qui, abandonnant la lettre charnelle et les articles de conception humaine, se recueillent continuellement en Esprit et en vérité, pour goûter la théologie du coeur, qui est la douce Parole de Dieu. Qu'ils se nomment catholiques romains, luthériens, réformés, etc., sur ce terrain, tous sont un: Tauler, Kempis, Arndt et Neander. La partie réelle, durable du christianisme, c'est la mise à mort du vieil homme et le renouvellement de l'Esprit.

Cet appel eut un écho dans de nombreuses vies, surtout en Würtemberg et en Suisse. Beaucoup de croyants, sans se rattacher extérieurement aux églises de Philadelphie, leur appartenaient de coeur. Ils cherchaient tous le Royaume de Dieu et vivaient pieusement. Philadelphie était pour eux une société à laquelle ils étaient spirituellement unis, car ils y trouvaient tout ce qui est essentiel au Royaume de Dieu. Tandis que dans les différentes églises et confessions, ils ne voyaient que des formes et des rites, sous lesquels se cachait l'esprit de l'Antichrist. Zinzendorf essaya d'organiser ces sociétés pour les incorporer à l'Unité des Frères moraves; mais il n'y réussit pas.

A cette époque, la prédication de Hochmann von Hochenau fut un grand moyen de réveil. Des pécheurs se convertirent et des églises philadelphiennes furent fondées. Il entreprit de nombreux voyages et fut souvent attaqué par la populace, ou jeté en prison, ce qui n'empêchait pas la foule de se presser pour écouter ses prédications. Ce fut une vie de service enthousiaste pour le Seigneur et il fut en bénédiction à une multitude d'âmes. Il ne connaissait d'autre repos que celui qu'il prenait de temps en temps au petit ermitage qu'il possédait dans les forêts de Wittgenstein. Autrement, son amour pour tous les hommes, et surtout pour les juifs, l'obligeait à voyager en prêchant dans tout l'ouest et le nord de l'Allemagne. Les paroles de Hochmann amenèrent la conversion d'un jeune étudiant en théologie, nommé Hoffman, dont les réunions en dehors de l'Église luthérienne contribuèrent à la conversion de Gerhard Terrsteegen. Celui-ci devint plus tard un puissant témoin de Christ, qui édifia bien des générations par ses beaux cantiques. Joung Stilling (1740-1817), dont la vie et les écrits exercèrent une grande influence, a dit de cette époque. «Jamais encore, dans l'histoire de l'Église, il n'y eut une attente si réelle et si universelle de la venue du Seigneur que dans la première moitié du siècle qui s'achève. Ce furent d'abord les réveils de Halle, suivis immédiatement de la restauration de l'Église des Frères par Zinzendorf, puis de la fondation de la société mystique de Philadelphie à Berlebourg, qui eut pour fruit la Bible de Berlebourg. A cette même époque parurent deux hérauts de l'Evangile, Friedrich Roch et Hochmann von Hochenau, puis Gerhard Tersteegen et bien d'autres encore».


5. Divers essais pour retrouver l'unité

Les Vaudois, les Anabaptistes et d'autres chrétiens du même type ne furent pas des réformateurs de l'Église catholique romaine, ni plus tard, des Églises luthériennes et réformée. Leur origine remonte plus haut; ils mirent en pratique les enseignements bibliques et les formes de culte des premiers chrétiens, et maintinrent cette attitude au cours des siècles qui virent naître et grandir les Églises nommées ci-dessus.

Les Pauliciens, et d'autres, spirituellement en rapport avec eux, ne furent pas non plus les rénovateurs de l'Église orthodoxe grecque. Ils la précédèrent et restèrent toujours séparés d'elle.

Mais il y eut d'autres mouvements qui furent vraiment une réforme, soit de l'Église catholique, soit de l'Église protestante. Quelques-uns s'efforcèrent d'influencer ces églises en y restant attachés; d'autres en sortirent de leur plein gré ou en furent exclus. C'est le cas de la «Réformation», mouvement né dans l'Église catholique romaine et aboutissant à la formation de dénominations protestantes, qui représentent, à des degrés divers, une réforme du catholicisme romain.

Il y eut aussi des essais de réforme au sein de l'Église catholique, tels que ceux de François d'Assise et de plusieurs papes. Ce furent des efforts sincères de faire disparaître les abus, mais qui ne purent triompher des coutumes longtemps établies et de l'écheveau inextricable des obligations financières.

De même, certains cercles, comme les piétistes, cherchèrent à influencer les Églises luthérienne et réformée sans les quitter. D'autres, comme les Labadistes, s'en séparèrent.

Les Frères bohémiens furent à l'origine de la même foi que les Vaudois. Mais, lorsque Zinzendorf réorganisa ces congrégations sur le plan piétiste, il les rapprocha plutôt des Églises de l'État.

Les mystiques représentent les croyants qui, ne voyant aucune possibilité de revenir à l'ordre de l'église primitive, se retranchèrent dans la sanctification personnelle, la communion avec Dieu, tout en restant dans leurs milieux religieux respectifs, qu'ils appréciaient plus ou moins, selon leur caractère individuel. Ils eurent des affinités spirituelles avec les meilleurs éléments des ordres monastiques et appartinrent aux deux Églises, protestante et catholique. Après la publication de «l'Invitation philadelphienne», ils essayèrent de constituer des églises.

La chrétienté s'était grandement éloignée des commandements du Christ et de la doctrine apostolique, et cela dans tous les détails des enseignements scripturaires. Aussi fallut-il du temps pour revenir à la source, en découvrant une vérité après l'autre. Ces réveils spirituels, ayant lieu dans des sphères variées et à des époques différentes, devaient produire un grand nombre d'églises, d'évolution très diverse, dans la mesure où elles saisissaient la révélation biblique et retournaient aux pratiques primitives. On reproche à ces divers réveils d'avoir multiplié les sectes, mais il s'agit en réalité de plusieurs sentiers convergeant vers un but commun - l'unité première, qui sera définitive un jour, car les voyageurs atteindront enfin l'objectif exprimé par le Seigneur dans sa prière: « ... Moi en eux et Toi en moi, - afin qu'ils soient parfaitement un, et que la monde connaisse que Tu M'as envoyé et que Tu les as aimés comme tu M'as aimé» (Jean 17. 23)



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98 «Geschichte des Christlichen Lebens in der rheinisch-westphälischen evangelischen Kirche», Max Goebel.

 

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