ABRÉGÉ
DE LA DOCTRINE DU SALUT
VIII
La
grâce.
71.
Le mot grâce a divers sens dans l'Écriture. En voici les
principaux:
1°
La libre et souveraine charité de Dieu, amour gratuit et non
mérité, source de tous les dons qui sont faits à des pécheurs
(1).
2°
La puissante efficace du Saint-Esprit sur le cœur de l'homme,
particulièrement dans les fidèles (2).
3°
L’état de réconciliation avec Dieu, heureux partage de ceux
qui croient (3).
Sous
tous ces rapports, le salut est par grâce (4).
1)
Il fait miséricorde à qui il veut. Rom. IX, 18; Ex. XXXIII, 19;
Jean III, 16; Rom. XI, 5, 6; Luc XII, 32.
2)
À chacun de nous la grâce est donnée selon la mesure du don de
Christ. Eph. IV. 7; Luc II, 10; 1 Cor. XV, 10; 2 Cor. XII, 9; Hébr.
XII, 28; Rom. XVI, 24.
3)
Justifiés par la foi, nous avons la paix auprès de Dieu par le
moyen de notre Seigneur Jésus-Christ, par lequel aussi nous avons eu
accès par la foi à cette grâce dans laquelle nous nous tenons
fermes. Rom. V, 2.
4)
C'est par la grâce que vous êtes sauvés. Eph. II, 8.
72.
Être sauvé, ou être en état de grâce, c'est donc une
même
chose; et quand il est dit que LE SALUT EST PAR GRÂCE, cela signifie
que les rachetés doivent leur relèvement tout entier
au libre et souverain amour de Dieu, sans aucun mérite de leur part.
C'est dans son immense charité que le Père nous a donné un
Sauveur, et dans sa charité encore qu'il nous donne, par l'Esprit,
les dispositions convenables au salut.
73.
Il ne saurait effectivement se trouver en nous aucun titre à la
faveur de Dieu. Puisque nous avons violé sa loi; que nous l'avons
fait volontairement, et même après avoir connu quel est le droit de
Dieu contre ceux qui commettent le mal (1), il est manifeste qu'avant
d'appartenir à Christ par la foi, nous ne méritons devant Dieu que
la redoutable malédiction de la loi (2). [18, 19.]
74.
Il est vrai que si nous avons cru du cœur à justice, la foi
a
produit en nous l'obéissance aux commandements saints, justes et
bons du Seigneur notre Dieu (1); mais ce n'est pas cette obéissance
qui nous sauve(2), puisque ce qui nous y a formé c'est la foi, cette
foi même qui, dès à présent, nous procure le pardon de nos péchés
et qui nous assure pour plus tard la vie éternelle. Or, de ces deux
bénédictions, la loi ne peut, dans aucun cas, donner la première,
et si elle promet la seconde c'est uniquement à ceux qui auraient
accompli ses prescriptions dans tous leurs points et articles (3).
-
Ainsi, l'obéissance, comme la foi, comme la justification et comme
la gloire à venir: tout est grâce (4).
75.
Si nous nous obstinions à chercher, en tout ou en partie, le
principe de notre salut dans nos œuvres; non plus sans doute dans ce
que l'Écriture appelle «les œuvres mortes (2), mais dans celles
mêmes qui résultent d'une certaine foi à l’évangile, nous nous
mettrions de nouveau sous la loi, et il serait avéré que notre
adhésion à l'évangile n'est pas la foi qui justifie. Par cette
double raison, nous nous replacerions nous-mêmes sous la
condamnation (2).
1)
Hébr. VI, 1.
2)
Vous êtes séparés du Christ, vous tous qui vous justifiez par une
loi; vous êtes déchus de la grâce. Gal. V, 4.
76.
Puis donc que c'est bien par la foi seule que nous sommes sauvés, et
non par aucune œuvre de justice que nous ayons faite (1), il en
résulte que c'est gratuitement, PAR LA GRÂCE DE DIEU; c'est-à-dire
par l'effet d'un amour complètement immérité, et par un acte de
Dieu, libre et souverain comme la création du monde.
1)
Nous étions aussi nous-mêmes autrefois dépourvus de sens,
rebelles, égarés, asservis à diverses convoitises et à diverses
voluptés, vivant dans la malice et dans l'envie, dignes d'être
haïs, nous haïssant les uns les autres. Mais quand la bonté de
Dieu, notre Sauveur, et son amour envers les hommes sont apparus, il
nous a sauvés, non en vertu d'œuvres qui fussent dans la justice et
que nous eussions faites, mais selon sa miséricorde, par le moyen du
bain de la renaissance et du renouvellement de l'Esprit saint, qu'il
a répandu richement sur nous par Jésus-Christ notre Sauveur; afin
que, justifiés par sa grâce, nous devinssions héritiers selon
l'espérance de la vie éternelle. Tite , 8-7.
77.
Souvenons-nous d'ailleurs de ce qu'est la foi qui sauve. [67.]
Y a-t-il rien en elle qui ressemble à une œuvre, dans le sens
ordinaire que les Écritures attachent à ce mot, et qui leur fait
opposer les œuvres à la grâce (1)? Serait-ce en effet une œuvre
méritoire? Regarder du cœur à Jésus-Christ; recevoir le
témoignage qui lui est rendu, est-ce mériter qu'il nous sauve?
est-ce payer ce qu'il a fait et souffert pour
nous sauver? Oui, si l'on veut, la foi est une œuvre; œuvre divine
(2), œuvre du cœur et de la conscience, puisqu'elle consiste à
regarder vers Jésus-Christ pour être sauvé; mais ce n'est pas en
sa qualité d'œuvre qu'elle nous sauve, ou par son travail et par
son mérite propre. Il faudrait pour cela qu'elle fût parfaite; or
l'homme le plus croyant ne peut que gémir des nombreuses
défectuosités de sa foi (3).
1)
Si c'est par grâce, ce n'est plus d'après des œuvres, autrement la
grâce n'est plus grâce; et si c'est d'après des œuvres, ce n'est
plus grâce, autrement l'œuvre n'est plus œuvre. Rom. XI, 6.
2)
Jean VI, 29.
3)
Je crois, Seigneur! subviens à mon incrédulité. Marc IX, 24.
78.
En tous cas, il est sûr que la foi qui justifie, est une œuvre de
la grâce de Dieu, et, le plus ordinairement, le résultat de
nombreuses et de lentes opérations de cette grâce.
Dire
qu'un homme puisse se donner la loi ou l'acquérir par ses forces
naturelles, ce serait dire qu'il est, en dernier résultat, l'auteur
de son salut et qu'il a sujet de se glorifier, ce que la parole de
Dieu déclare impossible (1). Il est donc bien clair que si nous
sommes sauvés par le moyen de la foi, c'est cela même qui constate
que nous le sommes PAR GRÂCE (2).
1) Où
donc est le sujet de se glorifier? Il est exclu. Par le moyen de
quelle loi? Celle des œuvres? Non, mais par le moyen de la loi de la
foi. Rom. III, 27.
2) Il
nous a été gratuitement donné, quant au Christ, de croire en lui.
Philip. l, 29. C'est par la foi, afin que ce soit selon la grâce.
Rom. IV, 16; Eph. II, 8; Math. XVI, 17; Jean VI, 37, 44, 65; Act.
XIV, 27; Jacq. I, 16-18.
79.
Au-dessus de tous ces raisonnements, lesquels
d'ailleurs sont
appuyés sur les déclarations de l'Écriture, viennent, pour décider
ce point important, les nombreuses portions de la Parole infaillible
du Dieu éternel qui établissent la doctrine solennelle et si
consolante aux fidèles: la doctrine de l'élection de grâce
(1).
1)
Il y a aussi dans le temps présent quelque chose de réservé selon
l'élection de grâce. Rom. X, 5.
80.
Le monde entier s'étant volontairement plongé dans le mal (1), Dieu
pouvait sans injustice le rejeter tout entier (2).
Mais
il a, de tout temps, élu ou choisi, en Christ, ceux qu'il lui a plû,
afin de les éclairer, de les justifier, de les sanctifier et de les
glorifier (3); ce qui constitue les quatre grâces fondamentales du
salut (4).
1)
Nous savons que nous sommes de Dieu, et que le monde entier gît dans
le mal. 1 Jean V, 19.
2)
L'ordonnance de Dieu est que ceux qui commettent de telles choses
sont dignes de mort. Rom. l, 32; Jér. XVIII; Rom. IX, 11, 19-22.
3)
Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous
a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes,
dans le Christ; selon qu'il nous élut en lui avant la fondation du
monde, pour que nous fussions saints et sans défauts devant lui dans
l'amour, ayant déterminé d'avance de nous adopter à soi par le
moyen de Jésus-Christ, selon le bon plaisir de sa volonté, à la
louange de la gloire de sa grâce, par laquelle il nous a reçus en
grâce dans le bien-aimé. Eph. l, 3-6; 1 Pier. I, 1, 2; Math. XI, 25, 26; XXIV, 22, 24, 31; Jean X, 16; Act. XIII, -18:
Rom. VIII, 30, 33; IX, 23, 24; XI, 5, 6; 2 Thes. II, 13, 14; Tit. I,
1, 2; Jacq. II, 5; Jean XIII, 18; XV, 16,19.
4)
Jésus nous a été fait sagesse, justice, sanctification et
[entière] délivrance. 1 Cor. l, 30.
81.
Rien, dans les élus de Dieu, ne les rend par nature plus dignes du
salut que les autres (1). Le Seigneur a sans doute des raisons qui
ont motivé son choix; mais ces raisons ont leur fondement en
lui-même et non dans les objets de sa faveur. Elles sont enveloppées
d'un mystère que nous devons respecter et qui ne nous sera révélé
que plus tard (2).
Alors
nous comprendrons et nous adorerons toute la sagesse des conseils de
Dieu. En attendant, ce qu'il nous en a révélé ne peut nous laisser
aucun doute sur ce point; c'est que ceux qui sont sauvés, le sont
PAR LA GRÂCE.
1)
Nous tous aussi, parmi les fils de la rébellion, nous avons
autrefois vécu dans les désirs de notre chair et de nos pensées,
et nous étions par nature enfants de colère aussi bien que les
autres. Eph. II, 3. 2)
O profondeur de la richesse et de la sagesse et de la connaissance de
Dieu! Combien sont insondables ses jugements, et inscrutables ses
chemins! Car qui connut la pensée du Seigneur, ou qui fut son
conseiller, ou qui lui donna le premier et la pareille lui sera
rendue? Rom. XI, 33-35; 1 Cor. XIII, 12.
82.
Redisons encore que c'est en Jésus-Christ qu'est
l'élection
de grâce. [80.] C'est-à-dire qu’au lieu de nous
inquiéter
l'esprit à savoir si nous sommes élus, nous devons regarder du cœur
vers Jésus-Christ, et recevoir le témoignage de Dieu à son égard.
[67.] Avec le pardon de nos péchés, nous trouverons
en lui
notre élection; tout comme c'est en continuant de regarder vers lui
que nous l'affermirons (1).
1)
C'est pourquoi empressez-vous d'autant plus à rendre fermes votre
appel et votre élection; car en faisant ces choses, vous ne
broncherez jamais; car ainsi l'entrée dans le royaume éternel de
notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ vous sera richement accordée.
2 Pier. l, 10, 11.
83.
Et si nous recevons ces doctrines, ce sera pour nous la source d'une
joie ineffable de penser que nous avons été aimés d'un amour
éternel (1); en sorte que Jésus ne s'est pas donné pour nous afin
que Dieu pût nous aimer, mais parce qu’il nous a aimés (2). Nous
comprendrons aussi qu'ayant été aimés de Dieu lorsque nous étions
des méchants, il n'est rien que nous ne puissions maintenant
attendre de son amour infini, ou de sa GRÂCE (3).
1)
Je t'ai aimé d'un amour éternel; c'est pourquoi je t'ai attiré par
ma miséricorde. Jér. XXXI, 3; 2 Tim. I, 9, 10.
2)
Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin
que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie
éternelle. Jean III, 16; Rom. VIII, 35-38; Eph. III, 17, 18.
3)
Dieu constate son amour envers nous, en ce que lorsque nous étions
encore des pêcheurs, Christ mourut pour nous. A bien plus forte
raison donc, justifiés maintenant en son sang serons-nous sauvés de
la colère par son moyen. Rom. V, 7, 8; VIII, 30, 31, 37, 38.
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