LE SOIR DE
LA VIE
OU
PENSÉES
POUR LES VIEILLARDS
TROP VIEUX POUR ÊTRE UTILE.
« Quel plaisir de voir des jeunes gens
qui savent s'employer avec activité à
faire le bien, » disait une vieille dame,
en surveillant de sa fenêtre ses
petits-enfants qui s'éloignaient, chacun
dans une direction différente, pour
accomplir quelque mission de charité
auprès des pauvres et des malheureux.
Oui, en effet, c'est un plaisir de voir de jeunes
chrétiens, brillants de santé et
d'énergie, consacrer leurs talents et leur
temps au service de leur Dieu, et au bien de leur
prochain ; et cependant la vieille dame
soupira tristement en achevant ces mots.
Pourquoi ? Écoutez ce qu'elle ajouta
quelques moments plus tard.
« Ah ! il fut un temps où moi
aussi j'étais occupée comme ils le
sont tous. J'avais mon école du dimanche, je
visitais les pauvres, je collectais pour les
sociétés de mission ; mais
à présent me voici
oisive et inutile. Mes forces et
mes facultés m'échappent
graduellement ; je suis un serviteur inutile
et usé. Mais je ne devrais pas me plaindre,
j'ai eu ma part d'activité dans les jours
écoulés ; mon lot aujourd'hui
c'est de me tenir tranquille et de laisser
travailler les autres, je suis trop vieille pour
être d'aucune utilité. »
Cette vieille dame avait-elle raison ? Et
cependant, elle aussi avait le désir du
bien. Elle s'efforçait de supporter avec
patience et résignation, l'obligation
où elle était de renoncer à
prendre part aux oeuvres actives de bienfaisance de
ses jeunes enfants ; mais les personnes
âgées aussi bien que les jeunes
peuvent se tromper, et il est possible que notre
vieille dame ne se fît pas une idée
plus juste de ce qu'est l'utilité
chrétienne que ne s'en font peut-être
quelques-uns de nos lecteurs.
Il est vrai que les vieillards ne peuvent pas
travailler dans la vigne du Seigneur, comme ils le
faisaient avant que la vieillesse et la mauvaise
santé ne les rendissent incapables d'un
service actif ; mais cependant ils ne sont pas
trop vieux pour être utiles.
Trop vieux pour être utiles !
Ces paroles sont une critique de leur
caractère et une insulte à leurs
facultés. Il n'est pas possible que la vie
d'un chrétien soit continuée sur la
terre, sans qu'il ait quelque chose à faire
pour son Créateur.
Voyez les derniers jours de l'existence du
vénérable Eliot, le premier
missionnaire parmi les Indiens
d'Amérique. Le jour même de sa mort,
à l'âge de quatre-vingts ans, il
enseignait l'alphabet à un enfant indien
debout près de son lit :
« Pourquoi ne vous reposez-vous pas de
vos travaux ? lui dit un ami. - Parce que,
répondit cet homme vénérable,
j'ai demandé à Dieu de me rendre
utile selon mes capacités, et il a entendu
ma prière ; je ne peux plus
prêcher et voici, il m'a conservé
assez de forces pour enseigner l'alphabet à
ce pauvre enfant. »
À quatre-vingts ans et confiné dans
son lit ! Qui pourrait, après cela, se
prétendre incapable de faire le bien ?
Qui ne voudrait, au contraire, recueillir ce qui
lui reste de forces et de talents et les employer
au service de son Dieu ? Comme la pite de la
veuve, votre offrande paraîtra
peut-être pauvre et mesquine ; vous
êtes presque honteux de la jeter dans le
trésor public ; c'est égal,
apportez-la sans hésitation ; - et
mieux encore, apportez-la avec joie ; - que
pourriez-vous donner de plus. C'est tout ce que
vous avez ; vos faibles efforts sont
accueillis avec bonté par votre Sauveur
souverainement aimable ; n'est-ce pas lui qui
a dit : Elle a fait ce qui était en
son pouvoir
(Marc XIV, 8).
Ah ! travailler pour Christ est une
chose si excellente, que le vrai chrétien
devrait persévérer jusqu'au bout
comme le faisait Eliot, le
missionnaire.
Le révérend John Campbell se rendait
un matin à un comité qui se
réunissait de bonne heure pour s'occuper
d'une société religieuse. En montant
l'escalier, il aperçut un de ses amis, homme
fort âgé et bien connu par son
dévouement à la cause du Seigneur qui
s'appuyait sur la balustrade et paraissait hors
d'état de continuer tant il avait de peine
à respirer.
« Eh quoi ! vous ici, M. S*** !
comment vous êtes-vous aventuré
à sortir dans votre état de
santé ? Vous avez assisté
à nos réunions pendant longtemps,
vous devriez maintenant laisser la besogne aux
jeunes gens. »
M. S*** le regarda avec un aimable sourire : -
« Ah ! mon ami, »
s'écria-t-il avec son énergie
habituelle ; mon ami, il est dur de renoncer
à servir un pareil
maître. »
N'est-il pas encourageant de penser que les hommes
avancés en âge ont encore des
occasions de se rendre utiles. Nous avons grande
envie de rappeler à nos lecteurs
quelques-uns des moyens à leur portée
de faire du bien aux autres.
Il en est, parmi vous peut-être, qui ne
peuvent plus marcher et par conséquent plus
faire de visites ; ne pourraient-ils alors
envoyer de temps en temps des livres, des
traités à leurs voisins. Une personne
vient de mourir dans la rue où vous habitez,
- un enfant est né dans la maison voisine, -
en face une famille mondaine est
dans l'affliction ; - un voisin a
éprouvé un accident ; dans
toutes ces occasions et d'autres encore, vous
pouvez envoyer un petit messager de
miséricorde, qui dans plusieurs cas sera
certainement une « parole dite à
propos. » Le récit suivant en est
la preuve.
Le gardien d'une écluse d'un de nos grands
canaux, avait vécu plusieurs années
sans paraître éprouver aucun sentiment
religieux. Cependant il était d'un naturel
bon et compatissant et il avait sauvé plus
de douze personnes d'une mort certaine ;
quelques-unes d'entre elles s'étaient
précipitées dans les eaux du canal en
proie à de violents chagrins. Dans le
courant de l'été de 1841, le gardien
de l'écluse, que nous appellerons Mathieu,
eut un grave accident et on fut obligé de le
conduire à l'hôpital. Il n'y
était que depuis quelques jours lorsqu'il
reçut une lettre par la poste, renfermant un
traité intitulé :
« Aujourd'hui. » Voici
ce que disait la lettre :
« Vous avez beaucoup souffert, mon
ami ; vous avez besoin de soin et de
sympathie, et vous avez trouvé à
l'hôpital tout ce qui vous était
nécessaire sous ce rapport, plus même
que vous n'auriez trouvé chez vous. Mais
comment se porte votre âme, bien plus
précieuse que votre corps. Êtes-vous
prêt à mourir ? Si votre accident
avait eu pour résultat une mort
instantanée, où serait votre
âme à
présent ?
Où ? Au ciel ou en enfer ?
Pensez-y et lisez le traité que je vous
envoie, ou faites-le-vous lire par quelqu'un si
vous ne le pouvez pas. Ne négligez pas
l'avertissement que vous donne un ami, mais
pensez-y au contraire, aujourd'hui.
Quelle bonté de Dieu de vous avoir
sauvé la vie pour un peu de temps
encore ; puisse ce répit servir au
salut de votre âme. Le Seigneur Jésus
peut et veut sauver tous ceux qui se sentent
perdus ; priez, mon cher ami, pour que le
St-Esprit vous enseigne à croire que la
miséricorde d'en-haut vous est
nécessaire et que le sang de Jésus
lave de tout péché. Ce traité
a été écrit par un monsieur
âgé de soixante et dix ans ; que
le Seigneur en bénisse la lecture pour votre
âme ; non seulement Il veut vous sauver
de l'enfer, mais encore II veut vous
préparer à la sainteté et au
bonheur du ciel. Adieu ! »
Cette lettre n'était pas signée, et
Mathieu ne connaissait personne dans l'endroit
d'où elle était timbrée ;
toutefois le contenu de la lettre l'engagea
à lire le traité, qui par la
grâce du St-Esprit devint l'instrument de sa
conversion, et Mathieu fut dès lors un
chrétien fidèle et conséquent
avec ses principes. Il avait grande envie de savoir
qui lui avait envoyé ce traité ;
un ami à qui il en parlait crut
reconnaître la personne qui en avait
été capable ; cet ami lui
écrivit, et en reçut la
réponse suivante qui lui prouva qu'il ne
s'était pas
trompé :
« Mon cher Monsieur ; c'est pendant
de longues heures de réclusion, qui me
privaient de la joie de fréquenter la maison
du Seigneur, que j'ai été conduit un
dimanche à écrire, au pauvre Mathieu,
la lettre dont vous me parlez. J'ai l'habitude
lorsqu'il m'arrive de faire quelque chose de
semblable, de me dire : « Allons,
j'ai pu jeter encore un grain de la bonne semence
dans le champ du monde, ce monde qui gît dans
la méchanceté. »
Je rends grâces au Seigneur de ce qu'il m'a
permis de jeter cette semence et de ce qu'il a bien
voulu qu'elle prît racine et qu'elle
portât des fruits. Gloire soit rendue
à son saint nom de ce qu'Il a
manifesté les richesses de sa grâce
pour le salut d'une âme, et cela par des
moyens si petits, si misérables en
eux-mêmes.
J'avais choisi dans une collection de
traités nouvellement reçus, celui
intitulé Aujourd'hui, et quelques
autres du même genre, pour les envoyer sous
enveloppes, ce qui est facile de nos jours avec les
timbres à bon marché, et Mathieu a
été l'un de ceux à qui j'en ai
adressé. Plusieurs autres semences ont
été ainsi jetées dans le champ
du monde ; oh ! veuille le Seigneur leur
faire produire des fruits
abondants ! »
Puissiez-vous, mon cher lecteur, suivre l'exemple
que vous donne ce vieillard pieux et impotent. Vous
voyez qu'il n'est pas nécessaire pour se
rendre utile, de posséder
beaucoup d'argent, de talent, d'influence ou de
force. Quelques paroles écrites avec
charité, l'envoi d'un bon traité
à quelque personne de votre connaissance ou
même à un étranger, seront peut
être le canal par lequel la grâce de
Dieu pénétrera dans bien des coeurs.
Jette ton pain sur la surface des eaux, car avec
le temps tu le trouveras
(Eccl. XI, 1).
Vous avez encore comme moyen d'utilité,
l'influence que vous pouvez exercer sur les enfants
et les jeunes gens. Non pas par de continuels
reproches, ou par une exigence égoïste,
ou par des observations railleuses ; mais par
des paroles empreintes de bonté, des
conseils donnés avec l'accent de la
conviction, des manières affectueuses.
Vos petits-enfants, vos neveux pourront en se
réunissant autour de votre feu, recueillir
de votre bouche plus d'un précieux
enseignement, qui les guideront dans les temps
futurs. Si vous n'avez pas de jeunesse dans votre
famille, vous en trouverez certainement au milieu
de vos amis et de vos voisins. N'est-ce pas un
aimable spectacle que celui de la vieillesse et de
l'enfance se mêlant ensemble, le grand
âge tempérant la gaieté de la
jeunesse et la jeunesse à son tour animant
la gravité du grand âge. Le lierre
embellit le chêne et le chêne soutient
le lierre.
- Mais, direz-vous peut-être, les jeunes gens
sont si présomptueux et volontaires ;
ils se croient certainement aussi
sages que les vieux. - Souvent ce n'est que trop
vrai, mais supportez-les cependant, vous rappelant
que vous avez été jeune une
fois ; et vous serez étonnés,
combien, même parmi les plus
indépendants, sont reconnaissants lorsqu'on
leur témoigne un véritable
intérêt. Vous acquerrez une
réelle influence sur eux, si vous leur
montrez que vous voulez atteindre un but vraiment
bon et que vous soyez judicieux dans les moyens que
vous employez pour y arriver.
Sympathisez avec leurs joies et leurs
chagrins ; prouvez-leur que l'accroissement
des années n'a pas pour résultat
inévitable d'émousser les sentiments,
d'amoindrir les affections ; que le
pèlerin qui se voit sur le point d'arriver
à ce lieu de repos après lequel il
soupire depuis longtemps, n'oublie pas, ne
dédaigne pas ceux qui viennent de partir
pour accomplir ce rude et fatigant voyage.
Parlez-leur de vos expériences dans la vie
pratique ; de la discipline par laquelle votre
âme a passé ; des
difficultés que vous avez rencontrées
dans le chemin du devoir, et que vous avez su
vaincre ; des consolations qui vous ont
soutenu à l'heure de l'épreuve et de
l'affliction.
Les faits les plus simples font plus d'impression
que les meilleurs conseils : ils
pénètrent profondément dans la
mémoire, et sont moins sujets à
contestation ; on se les rappellera au moment
où il sera
nécessaireet on en
profitera.
Peut-être serez-vous par là,
l'instrument vénéré qui aura
conduit quelque coeur léger et insouciant au
chemin de la paix et du bonheur, qui aura
donné des principes sûrs et solides
à quelque esprit inquiet et troublé,
principes qui lui serviront de gouvernail au milieu
des tentations ; enfin vous pourrez en quelque
sorte former le caractère de ceux qui, plus
tard, seront peut-être appelés
à exercer un grand empire sur leurs
semblables.
Il est possible ou plutôt il est certain que
vous ne verrez pas cet heureux résultat de
vos efforts persévérants et de vos
prières ; mais lorsque ceux qui meurent
au Seigneur se reposent de leurs travaux, leurs
oeuvres les suivent.
Un vieillard plantait avec soin des arbres à
fruits dans son jardin dans l'espoir qu'ils
serviraient à sa
postérité ; puissiez-vous de
même jeter dans quelques âmes cette
précieuse graine qui germera, poussera et
sera en bénédiction longtemps
après que vous aurez quitté le monde,
et que vous serez entré dans votre
repos.
Il se peut que la destinée de toute une
génération dépende des efforts
chrétiens que vous ferez pour engager un
jeune ami à devenir une des brebis du
Seigneur. Dieu vous donne de comprendre
complètement et d'accomplir la mission toute
spéciale que vous avez à remplir
auprès de la jeunesse. Mais la meilleure
manière peut-être dont un
chrétien âgé, ou
plutôt un chrétien
quel que soit son âge, puisse faire du bien
aux autres, c'est par la pureté et la
beauté de son exemple.
Vous ne pouvez plus faire ou dire grand chose
pour le bien de vos semblables ; - mais rien
ne parle plus haut que le silence éloquent
d'une vie sanctifiée et conséquente
avec elle-même ; et rien n'exerce une
influence plus douce et plus puissante en
même temps sur l'esprit, que l'exemple de
quelqu'un que nous aimons et que nous respectons.
C'est en quelque sorte une prédication
pratique.
Jetez un coup-d'oeil dans cette chambre sombre et
paisible : une dame âgée est
assise dans un grand fauteuil ; un état
de maladie continuel la retient toujours chez
elle ; elle est confinée dans sa
chambre, elle ne quitte presque plus son fauteuil,
d'où elle ne saurait se lever sans le
secours de quelqu'un. Elle a dû renoncer
à voir ses amis, la moindre agitation lui
faisant du mal, elle n'a plus d'autre
société que celle d'une fille
chérie et d'une garde-malade
expérimentée ; elle n'en
désire pas d'autre, la conversation suivie
lui est devenue impossible et quelques paroles de
temps en temps la fatiguent même
beaucoup.
Pauvre femme ! ils sont venus pour elle, les
jours où elle ne trouve plus de
plaisirs ; - tout lui est fardeau ; elle
ne se soucie de rien, - et n'a plus que des
souffrances à attendre.
Sa vie a été remplie par de bonnes
oeuvres ; et maintenant, privée pour
toujours des occupations qu'elle
aimait, elle se console avec cette belle
pensée : Ils te servent aussi ceux
qui se tiennent en repos et qui attendent.
C'est vraiment là une belle
pensée, elle en connaît toute la
vérité, et sa prière
journalière est : Que ta
volonté soit faite.
Cependant ne croyez pas que sa carrière
utile soit finie et n'ait pas trouvé
à s'exercer dans sa chambre de malade. Non,
dans cet étroit espace, pendant cette
cruelle maladie, elle a fait peut-être plus
de bien que vous ou moi n'en avons fait de toute
notre vie. Comment cela ?
Cette brave femme qui la soigne si bien est devenue
peu à peu sérieuse, enfin elle est
arrivée à une vraie
piété et elle sait que ce changement
dans ses sentiments est dû à l'exemple
de sa chère maîtresse ; non pas
à ses conseils, non pas à ses
exhortations, mais à son exemple. Elle a vu
sa patience, son courage, sa
sérénité, sa foi en Christ,
son désir de déloger ; et elle a
senti la valeur d'une religion qui peut donner tant
de paix dans la vie, tant d'espérance dans
la mort. Elle a résolu, avec l'aide de Dieu,
de s'approprier les bienfaits d'une religion
semblable ; et maintenant les derniers moments
de sa maîtresse sont adoucis par la
pensée que cette fidèle servante a
choisi la bonne part qui ne lui sera point
ôtée.
Jetez maintenant un regard dans cette maison de
charité ; vous y trouverez un homme
vénérable, dont les
cheveux blancs, la taille courbée, la
démarche chancelante, sont de sûrs
indices que ses forces physiques disparaissent
rapidement. Est-il trop vieux ou trop infirme pour
être utile ? Oui, en ce qui concerne la
vie active : il est paralysé et
presqu'aveugle ; mais la lumière de son
exemple brille encore, et répand une sainte
clarté sur tout ce qui l'entoure.
Sa bonté, sa droiture, sa douce
gaieté et son esprit sanctifié, sont
une leçon perpétuelle et vivante pour
ses amis et ses voisins. Plus d'un visiteur
insouciant a quitté cette humble demeure en
disant : « Oui, en
vérité, la vraie religion
existe ; je voudrais être aussi bon et
aussi heureux que ce vieillard ; »
et quelques chrétiens,
ébranlés par des doutes ou
fatigués de la vie, sont sortis triomphants
de leur épreuve et ont été
fortifiés et encouragés par le
souvenir de la foi simple et du dévouement
de ce fidèle serviteur de Dieu.
Votre vie, votre exemple ont-ils aussi cette
heureuse influence sur les autres ?
Votre conduite et votre caractère
répandent-ils le parfum de l'Évangile
de Christ ?
Vous êtes-vous donné pour tâche
journalière de glorifier aussi bien que de
professer la doctrine de Dieu votre
Sauveur ?
Tous les chrétiens devraient
être attentifs à l'exemple qu'ils
donnent ; l'exemple étant infiniment
plus important que les paroles quelque bien
choisies que soient celles-ci. Mais le
chrétien avancé en âge doit
être plus soigneux encore
de faire briller sa
lumière devant les hommes ; sa
sphère d'action et d'utilité
étant limitée, il doit tirer le
meilleur parti possible des moyens qu'il a à
sa portée ; bientôt,
bientôt la nuit viendra et il ne pourra plus
rien faire sur la terre ; ce sera fini pour
toujours.
Il est un autre moyen que nous ne devons pas
omettre par lequel le vieillard chrétien
peut avancer le règne de Christ sur la
terre ; c'est « la prière
d'intercession. »
Faible et infirme, il ne vous est
peut-être pas possible de vous entretenir
longtemps, même sur des sujets
religieux ; pauvre quant aux biens de ce
monde, il n'est pas en votre pouvoir de soulager
les nécessiteux, mais malgré votre
pauvreté et votre incapacité, vous
pouvez fermer votre porte et prier votre
Père qui vous voit dans le secret.
Vous pouvez implorer son secours en faveur des
malheureux ; sa sympathie pour les
affligés ; son aide pour les
délaissés ; le conseil de sa
sagesse pour les ignorants ; son pardon pour
les pécheurs ; sa grâce pour les
misérables.
Vous pouvez plaider devant Lui la cause des
païens de notre pays et des païens
sauvages ; vous pouvez demander ses
bénédictions pour le gouvernement et
pour le plus petit parmi vos concitoyens.
Vous pouvez le supplier de conduire dans le chemin
de la vérité ceux qui s'en sont
écartés, ou qui subissent l'influence
de l'erreur ; et enfin le conjurer
d'étendre sa miséricorde sur tous les
hommes.
Abraham intercéda pour Sodome, Job pour ses
enfants, Moïse pour les Israélites,
Jacob pour ses petits-fils, les disciples pour
leurs frères persécutés, et
les apôtres pour les convertis.
Soyez empreints du même esprit, suivez les
mêmes traces, ayez votre part des mêmes
succès. La prière du juste faite
avec ferveur, est de grande efficace
(Jacq. V, 16).
Il est impossible de dire avec quelle abondance la
rosée sanctifiante de la grâce de Dieu
s'est reposée sur des coeurs
désolés et
desséchés ; ou
d'énumérer la quantité de dons
répandus par les soins de sa providence dans
la demeure du pauvre, et tout cela par le moyen des
prières dont vous avez assiégé
le trône de sa miséricorde infinie.
L'éternité seule mettra au jour les
bénédictions qui se rattachent
à la prière d'intercession.
Ne vous affligez donc plus de ce que les occasions
de vous rendre utile deviennent si rares ;
réjouissez-vous plutôt de ce qu'il
vous est encore permis d'occuper une place parmi
les ouvriers de la vigne du Seigneur. Cette place
est à l'arrière-plan, c'est
vrai ; vos occupations ne sont pas difficiles,
mais le sentier que vous avez à parcourir a
été tracé par le maître
que vous servez. C'est avec sagesse qu'Il assigne
à chacun sa position et ses devoirs ;
et à tous ceux qui auront fidèlement
accompli leur tâche, petite ou grande, II
adressera ces paroles pleines de
miséricorde : Cela va bien, bon et
fidèle serviteur ; entre dans la
joie de ton Seigneur
(Matth. XXV, 23).
Et cependant, vous ne pouvez vous empêcher de
soupirer parfois en réfléchissant
combien vous êtes peu capable de travailler
pour la gloire de Dieu et le bien de vos
semblables ; ce que vous faites de bien est
encore si imparfait, vos efforts, même les
meilleurs, sont toujours souillés par le
péché.
À mesure que vous avancez dans la vie, vous
apprenez à mieux vous connaître, vous
êtes mieux éclairé sur la
nature même et sur la volonté de
Dieu ; mais le résultat auquel vous
amène cette connaissance, c'est de vous
humilier toujours plus sous le poids de vos
péchés et de vos manquements.
Oh ! si vous pouviez réellement servir
Dieu comme vous en avez le désir !
combien votre obéissance serait joyeuse,
illimitée, dévouée,
infatigable !
Attendez un peu, et vos désirs seront
satisfaits. Il n'y aura, au ciel, aucune faiblesse
pour vous retarder dans l'accomplissement de vos
efforts, aucune imperfection pour ternir vos
actions. Ses serviteurs le serviront
(Apoc. XXII, 3). Sans
difficultés, sans fautes, ils
exécuteront ses commandements, et feront sa
volonté ; n'est-ce pas une
pensée consolante pour ceux qui s'affligent
de ce que leur oeuvre sur la terre est si
près d'être terminée.
|