Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
REGARD
Bibliothèque chrétienne online
EXAMINEZ toutes choses... RETENEZ CE QUI EST BON
- 1Thess. 5: 21 -
(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



Notre Père




Que ton nom soit sanctifié

Nous n'eussions certes pas pensé tout seuls après avoir appelé « Notre Père qui es aux cieux », à lui adresser cette première demande. Il faut même avouer qu'elle nous est fort étrangère, et que la sanctification du nom de Dieu est bien loin d'être le centre de nos préoccupations. Le nom de Dieu, mais qu'en faisons-nous donc ? Il traîne çà et là dans nos pensées ou dans nos conversations. Il recouvre quelques vieilles réminiscences, quelques oeuvres pieuses. Souvent, il ne recouvre rien du tout, ou même, qui pis est, il recouvre des lâchetés, des turpitudes. Il est là dans la chambre intérieure de notre mémoire, comme un objet précieux et inutile, posé sur un guéridon, et qu'on oublie de remarquer. Un nom d'ailleurs, cela nous semble avoir si peu d'importance ! Comment peut-on s'attacher à cela ? Il est vrai que le nom des autres nous importe assez peu, à moins que notre curiosité ne nous mette en appétit de le connaître. La gloire du nom des autres nous touche médiocrement, et nous faisons preuve à son égard d'un « désintéressement » souvent exemplaire.

Mais, notre nom à nous, pensons-nous vraiment qu'il soit de si minime importance ? S'il nous arrive de lire le compte rendu de quelque entreprise ou performance à laquelle nous avons participé, et que notre nom n'y figure pas, cette prose conservera-t-elle pour nous tout son intérêt ? Ou bien si, d'autre part, notre nom figure en bonne place sur quelque tableau d'honneur, prétendrons-nous toujours que cela nous laisse insensibles et qu'un simple nom, cela ne présente aucun intérêt ? À vrai dire, il n'est rien de si révélateur de notre attachement à nous-mêmes que nos réactions en face de notre nom. Rien qui nous fasse mieux connaître combien nous nous aimons et nous attribuons d'importance. Car nous partageons intimement le sort fait à notre nom, et ce qui arrive à notre nom permet d'assister exactement à ce qui nous arrive à nous-mêmes. Notre nom, c'est exactement nous-mêmes, mais nous-mêmes dans notre existence vue par les autres, dans notre vie publique. Seuls au monde, nous pourrions ne porter aucun nom. Mais au milieu des autres hommes, nous n'existons que dans la mesure où notre nom nous distingue et nous désigne. Avoir un nom, c'est avoir la possibilité de révéler son être, sa personne, à son prochain est avoir la possibilité d'une réputation.

De même, si Dieu porte un nom, cela signifie qu'il ne reste pas seul avec lui-même, mais qu'il a la possibilité et la volonté de se faire connaître à nous. Dieu peut nous donner son Nom. Il peut donc exister pour nous. Il peut avoir au milieu de nous une réputation, une célébrité, une gloire : « Célébrez l'Éternel ». Il peut être notre Dieu. C'est pourquoi, lorsque Dieu se révèle à Moïse, sur le Sinaï, C'est son nom qu'Il lui révèle, et c'est ce nom qui accompagnera le peuple, pas à pas, tout au long de son histoire, c'est pour l'amour de ce Nom et pour l'honneur de ce Nom, que le Dieu d'Israël ne cessera d'intervenir. Et Jésus viendra pour manifester ce Nom aux hommes et demander dans la prière sacerdotale : « Qu'ils soient fidèles à Ton nom que tu m'as chargé de faire connaître. »

Et nous maintenant, peuple de Dieu, corps de Jésus-Christ, nous portons devant les hommes le nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Nous, baptisés, nous sommes couverts par ce nom trois fois saint, et le monde ne connaîtra ce Dieu, sa sainteté, sa vérité, sa justice, qu'au travers de notre témoignage. Car nous parlons en son nom, et nous vivons en son nom, et nous ne pouvons empêcher que notre attitude ne rejaillisse sur Lui. Bon gré, mal gré, son nom est attaché à nous, et plus ou moins consciemment, le monde entier a les regards posés sur l'Eglise pour savoir quel est ce Seigneur au nom duquel elle prétend agir et parler, quel est ce Dieu dont elle se réclame, ce Roi dont elle est le ministre.

C'est pour cette raison que le premier souci du chrétien doit être le souci du nom de son Dieu, auquel, depuis le jour de son baptême, est liée sa destinée. Le souci de son nom propre qui est le souci premier de l'incrédule est remplacé par le souci du nom de Dieu. C'est même là en quoi consiste l'humilité du croyant, cette attitude fondamentale où l'a jeté la Révélation - de ne plus pouvoir vivre dans le souci de sa propre gloire, mais dans celui de la gloire du nom de son Seigneur. Et c'est là aussi le signe central de toute conversion, d'être tourné non plus vers son propre nom, mais vers celui de Jésus-Christ ; d'être préoccupé non plus du rôle que l'on joue, mais du rôle que Dieu joue dans toute entreprise humaine. N'est-ce pas merveilleux de voir comment cette première demande de la première prière chrétienne nous convertit, nous tourne vers ce nom de Dieu et nous détourne de nous-mêmes ?

Il est, en effet, impossible de prononcer sérieusement cette demande sans faire le mouvement de la foi et de la conversion, sans être arrachés à nous-mêmes, jetés dans l'adoration du Dieu Saint et la préoccupation unique de sa gloire. On peut dire que déjà tout est fait en nous par cette demande et qu'en la plaçant dans notre bouche, en nous la faisant prier, vraiment, toute notre vie chrétienne, toute notre attitude d'enfant de Dieu est accomplie, attitude où ce n'est pas nous qui importons, ni ce qu'on pense de nous, ni même notre salut, mais bien seulement la sainteté et la gloire au nom de Dieu.

Il fallait bien commencer par là pour être débarrassé du souci infernal de notre réputation, pour désirer que le seul nom de Dieu soit à l'honneur sur toute la terre. Et si notre vie chrétienne ne commence pas et ne finit pas par cette demande, par cette recherche première de la gloire du nom de Dieu, nous sommes alors sur le chemin de la perdition, quels que soient nos efforts. Si notre obéissance chrétienne entend donner la moindre importance à notre nom, elle n'est plus qu'une fausse obéissance, une hypocrisie, une recherche de nous-mêmes et pas de Dieu, et nul n'a plus précisément que les Réformateurs répété et dénoncé la ténacité démoniaque de cet orgueil secret, de cette recherche de nous-mêmes qui se cache au coeur de la vie religieuse.

Cette prière demande justement l'élimination de toute gloire humaine, la sanctification exclusive du nom de Dieu sur le seuil de notre obéissance. C'est exactement ce que la Réforme a voulu remettre en lumière, aussi n'est-ce pas le moment de mettre en avant un nom d'homme quel qu'il soit, mais exclusivement Celui de Jésus-Christ. Par des voies insondables et au moyen de quelques hommes sans force auxquels il adressa sa Parole dans la Bible, il sanctifia tout à nouveau son grand nom, dans une chrétienté qui s'attachait à d'autres noms, en proclamant qu'il n'en était aucun autre par lequel nous devions être sauvés. La Réforme n'est qu'une redécouverte du nom de Jésus comme Sauveur unique et comme maître unique, c'est-à-dire rien d'autre qu'une volonté absolue de sanctifier ce seul nom.

En effet, tentons de serrer d'un peu plus près le sens de l'expression « sanctifier le nom de Dieu », en comprenant à quoi elle nous engage dans le monde présent. Sanctifier le nom du Dieu trinitaire, c'est reconnaître jalousement ce qui n'appartient qu'à lui, les titres qui lui sont réservés. Par exemple, je ne puis sanctifier le nom de Jésus-Christ en appelant, ou en laissant affubler qui que ce soit sur la terre, fût-ce le chef de l'État le plus vénérable, du titre de sauveur, et en profanant ainsi un titre qui fait partie du nom de Dieu et qui n'est qu'à Jésus-Christ. Car Jésus-Christ est le seul sauveur de l'Eglise, et il est aussi le seul sauveur de la France et de tous les peuples de la terre. Il n'est point d'autre nom, serait-ce celui de Marie, serait-ce celui du Maréchal, serait-ce celui de tous les saints, par lequel nous devions être sauvés. De même, il est une certaine manière, constante aujourd'hui, d'appeler certains hommes « chefs », ou « seigneurs », ou « conducteurs », ou « rois », qui est une profanation du Nom qui est au-dessus de tout nom, et à qui seul appartiennent tous ces titres d'une manière absolue. Certes, il est des hommes que nous pouvons appeler chef, sauveur ou roi, mais alors d'une manière toute profane, relative et provisoire, et dans la seule mesure où ces hommes sont pour nous les représentants du seul Sauveur et du seul Chef. Quand donc nous prions : « Que ton nom soit sanctifié », nous demandons en somme à Dieu qu'il nous garde de toute idolâtrie, qu'il garde les peuples de toute transposition catastrophique et mensongère de sa sainteté et de sa divinité sur quelque créature ou quelque réalité humaine.

Mais aussi et surtout, nous demandons que jamais son nom ne serve à couvrir des infamies, que jamais notre lâcheté n'en vienne à laisser compromettre son saint nom dans les entreprises de l'iniquité. Que plutôt nous confessions notre athéisme que de proférer quelque mensonge en son nom ! Que plutôt nous avouions : « Je suis un incrédule » que d'abriter derrière son nom la peur que nous avons d'accueillir des malheureux sans asile et de nous déclarer solidaires des opprimés. Que plutôt nous disions : « Je n'ai rien à faire avec lui », que d'en faire le Dieu des victoires humaines et la Providence des triomphateurs de ce monde. Sanctifier le nom de Dieu, certes, ce n'est pas nous qui le pouvons et il n'a pas besoin de l'être ; il l'a été parfaitement par Jésus-Christ, et une fois pour toutes. Mais que les hommes, à travers nous, remarquent pour leur désespoir ou pour leur joie (cela ne nous regarde pas) que nous appartenons à un Dieu saint qui a sanctifié son nom par Jésus-Christ et qui ne cesse de le sanctifier par son Esprit, un Dieu saint qui ne peut pas voir l'injustice ni le mensonge, qui a horreur de la violence, qui ne supporte l'oppression d'aucune de ses créatures, ni la spoliation de leurs droits humains. Que le monde puisse se rendre compte de ce qu'est Dieu à travers ce qu'est l'Eglise ; que les hommes voient nos oeuvres, et glorifient notre Père qui est aux Cieux, voilà ce que nous demandons.

Encore une fois, nous ne pouvons pas sanctifier le Nom de Dieu, mais Jésus-Christ l'a sanctifié jusqu'au bout. Il lui a donné toute la gloire et toute la place qui lui était due. Il est mort de la pire des morts plutôt que de consentir à ce que le Nom de Dieu soit associé à quelque turpitude, à quelque hypocrisie. Il a résisté jusqu'au sang à tout ce qui pouvait le déshonorer. La sanctification du Nom de Dieu l'a mené sur la Croix, mais par là même, la sainteté de Dieu éclate en lui, pure et totale. Plus encore, elle nous est offerte et nous pouvons la prendre. En recevant le corps du Seigneur, nous pouvons devenir le lieu où Dieu sanctifie son nom, recevoir la vie de Celui qui n'a jamais rien voulu d'autre que la gloire de son Père.
Que ton nom soit sanctifié ! je l'ai sanctifié, dit le Seigneur, et je le sanctifierai encore.


Table des matières

Page suivante:
 

- haut de page -