Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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LE SALUT DE DIEU
FEUILLE CONSACRÉE À L'ÉVANGÉLISATION

VOL. II
SIXIÈME ANNÉE 1879



« JE SAIS UNE CHOSE »

« Je sais une chose, c'est que j'étais aveugle, et que maintenant je vois » (Jean IX, 25).


Nous vivons dans un temps où un grand nombre professent d'être chrétiens ; mais la question vitale pour nous est celle-ci : Savons-nous, comme étant une réalité divine, que nous sommes passés « de la mort à la vie » ? (Jean V, 24.)
Dans le IXe chapitre de l'Évangile de Jean, il est parlé d'un homme qui était aveugle dès sa naissance : vraie et frappante image de toute âme qui n'est pas sauvée. Oui, l'homme est, par nature, aveugle dès sa naissance ; il a besoin d'avoir les yeux ouverts aux choses de Dieu, tout autant que l'aveugle-né de ce chapitre qui ne pouvait rien voir des choses de ce monde.

Cher lecteur, vos yeux ont-ils été ouverts ? Ne dites pas que vous n'en savez rien. Non seulement les yeux de l'aveugle avaient été ouverts, mais il le savait et ne pouvait pas ne point le savoir. Or le Seigneur Jésus est venu pour rendre la vue aux aveugles (Luc IV, 19), et II l'a fait. « Comme II passait, » est-il dit, « II vit un homme aveugle dès sa naissance » ; aussitôt la grâce de Jésus est à l'oeuvre pour répondre aux besoins de cet homme. De même, II est « venu pour chercher et sauver ce qui était perdu » (Luc XIX, 10), et s'il voit une âme qui a besoin de Lui, son coeur plein d'amour est aussitôt prêt à répondre à cette âme, en lui révélant tout ce qu'il a fait et tout ce qu'il est.

« Jésus-Christ est le même hier, et aujourd'hui, et éternellement » (Hébreux XIII, 8). Il n'a jamais changé ; son coeur est toujours le même. Cher lecteur, qui n'avez pas encore connu sa grâce, venez à Lui. Lorsqu'il était sur la terre, II secourait et délivrait tous ceux qui s'approchaient de Lui, de même son amour répondra à tout ce qu'il faut à votre âme. Nul autre que Jésus, le Sauveur, ne pouvait rendre la vue aux aveugles -, nul autre que Lui ne peut vous tirer de votre misérable état de pécheur ruiné, perdu et qui ne mérite que l'enfer.

Jésus met de la boue sur les yeux de l'aveugle et l'envoie au réservoir de Siloé pour s'y laver. L'aveugle fait exactement ce qui lui est commandé ; il se confie implicitement à la parole de Celui qui l'envoie ainsi, et quel en est le résultat ? Une guérison immédiate. La foi simple en la parole de Celui qui cherche le pécheur, qui veut le bénir, amène un salut immédiat. Mon cher lecteur, « crois au Seigneur Jésus-Christ, et tu seras sauvé.... » (Actes XVI, 31).

La guérison de l'aveugle était pour lui une réalité certaine ; comment aurait-il pu douter de ce qui venait de s'accomplir ? Il avait été jusqu'alors dans les ténèbres, et maintenant la lumière a resplendi pour ses yeux ouverts et il contemple avec ravissement tout ce qui l'entoure. Il en est de même pour l'âme de celui qui a cru au Seigneur Jésus, qui est venu à Lui comme un pécheur perdu et qui a trouvé en Lui le pardon et la paix. Ses yeux sont maintenant ouverts ; il est passé « des ténèbres à sa merveilleuse lumière » (1 Pierre II, 9), et, dans cette lumière, il voit avec bonheur l'amour de Dieu qui a donné son Fils, l'amour de Christ qui s'est livré pour lui. Comment douterait-il, quand « l'amour de Dieu est versé dans son coeur par l'Esprit-Saint » (Romains V, 5), quand Dieu Lui-même rend ce témoignage : « Celui qui croit au Fils a la vie éternelle » (Jean III, 36) ? Oui, bien-aimé lecteur qui êtes venu à Jésus, comme l'aveugle pouvait dire : « Je sais une chose, c'est que j'étais aveugle, et que maintenant je vois », votre privilège est de dire : « Je sais qui j'ai cru » (2 Timothée I, 12), et de jouir, dans la lumière, de l'amour de Dieu et du Seigneur Jésus. « Je vous ai écrit ces choses, » dit l'apôtre Jean, « afin que vous SACHIEZ que vous AVEZ la vie éternelle, vous qui croyez au nom du Fils de Dieu » ; et encore : « II n'y a pas de crainte dans l'amour, mais l'amour parfait chasse la crainte » (1 Jean V, 13 ; IV, 18).

Mais nous voyons autre chose chez l'aveugle. Le changement opéré en lui était si évident, que chacun pouvait le reconnaître. 0 chères âmes qui croyez en Christ, nous pouvons, n'est-ce pas, nous réjouir de ce que « Lui-même a porté nos péchés en son corps sur le bois » (1 Pierre II, 24) ; de ce que « l'Éternel a fait venir sur lui l'iniquité de nous tous » (Ésaïe LIII, 6) ; de ce que nous avons été amenés à Dieu (1 Pierre III, 18) ; de ce que toutes nos fautes sont pardonnées (Colossiens II, 13), tous nos péchés oubliés (Hébreux X, 17), et de ce que nous sommes « rendus agréables dans le Bien-Aimé » (Éphésiens I, 6) ? Mais la vie de Jésus se manifeste-t-elle dans nos corps mortels, de telle sorte que tous nos amis et nos connaissances, ainsi que le monde en général, puissent voir et soient obligés de confesser que nous avons été avec Jésus (Actes IV, 13) ? Plaçons, chers amis, cette question devant nos âmes en la présence de Dieu.

Cet homme n'avait pas seulement reçu de Christ des bénédictions, mais il rendait témoignage à ce qu'il avait reçu et à Celui qui lui avait fait du bien. Il est vrai qu'il n'était pas du tout au clair quant à la personne de Christ, mais il le confessait selon la connaissance qu'il avait de Lui. Le changement opéré en cet homme était si merveilleux, comme nous l'avons déjà dit, qu'il frappait d'étonnement tous ceux qui l'avaient connu auparavant. Ses voisins commencèrent à en parler et à raisonner sur ce qui lui était arrivé. Si grand avait été le changement, que quelques-uns mettaient en question que ce fût le même homme ; mais lui affirme qu'il est bien la personne qui avait été aveugle, mais qui maintenant voyait. On l'amène aux pharisiens, qui ne peuvent tomber d'accord quant à la personne bénie qui avait opéré le miracle. Les Juifs ne voulaient pas croire le témoignage de l'homme lui-même, à moins qu'il n'y eût d'autres témoins, et ils finissent, refusant d'être convaincus, par appeler « un pécheur » le Fils de Dieu, Celui qui était saint et sans tache. Telle est la triste fin de l'endurcissement du coeur.

N'est-ce pas un grand privilège que de vivre dans un pays où le nom de Christ est connu ? Et cependant, combien peu, avec tous les avantages dont ils se vantent, avec le nom de chrétiens qu'ils portent, combien peu savent ce que c'est que d'être sauvé, - sauvé pour l'éternité à cause du précieux sang de Christ qui purifie de tout péché (1 Jean I, 7). Et parmi ceux qui sont sauvés combien peu qui confessent Christ par leur vie et qui le font connaître à d'autres !

Êtes-vous sauvé, mon cher lecteur ? ou bien êtes-vous du nombre de ceux qui blâment et condamnent ceux qui se disent être sauvés ? Il n'y a aucun mérite dans celui qui est sauvé, il est sauvé par grâce, non par les oeuvres (Éphésiens II, 8-9). Pourquoi donc le condamner ? L'âme sauvée est précieuse à Christ, prenez garde ! En condamnant celui qui, plein de joie, confesse qu'il est sauvé par grâce, vous condamnez Christ.

Mais cet homme ne connaissait encore que l'oeuvre de Christ et non sa personne. Plusieurs connaissent l'oeuvre de Christ qui a ôté leurs péchés et les a rendus capables de subsister devant un Dieu saint ; mais est-ce à cela que Dieu veut que nous nous arrêtions ? Certainement non. Ce n'est que le commencement. La parole de Dieu révèle non seulement une oeuvre bénie et précieuse opérée en faveur des pécheurs, mais elle fait connaître la Personne vivante et adorable qui a accompli cette oeuvre, Celui qui est mort pour les pécheurs, qui est ressuscité pour leur justification, qui aime à sauver à cause de ce qu'ila fait, qui vit maintenant au ciel où II paraît pour les croyants devant Dieu.

Arrêtons-nous un moment à considérer la personne de Jésus comme ce chapitre nous la présente. L'aveugle guéri apprend peu à peu à la connaître. Quand d'abord on lui demande par qui et comment il a recouvré la vue, il répond : « Un homme, appelé Jésus » (vers. 11). Oui, c'était vraiment un homme, « l'homme Christ Jésus » (1 Timothée II, 5), mais la foi le reconnaît pour être plus qu'un homme. A mesure qu'il avance, l'aveugle-né acquiert plus de lumière. Il a une révélation plus complète de Christ. Il dit aux Pharisiens : « C'est un prophète » (vers. 17). Or un prophète, dans le Nouveau Testament, ne signifie pas toujours, ni exclusivement, celui qui prédit les événements à venir. La femme samaritaine dit au Seigneur : « Je vois que tu es un prophète » (Jean IV, 19). Qu'est-ce qui l'amène à dire cela ? Le simple fait qu'elle s'est trouvée en présence de Dieu Lui-même. Il en est de même dans notre chapitre. L'homme qui avait été aveugle reconnaît Dieu à son oeuvre, et c'est ce qui fait sortir de su bouche cette parole adressée à ceux qui ne connaissaient pas Jésus : « C'est un prophète ». Plus loin (vers. 33), il dit que Jésus est « de Dieu ». Ceux qui auraient dû enseigner, sont enseignés par cet homme pauvre selon le monde, mais bienheureux en Dieu ; ils ne peuvent le supporter, et chassent dehors celui qui confesse Christ et n'a pas honte de Lui.

Qu'il est précieux de trouver ensuite que Jésus sait ce qui est arrivé à cet homme et qu'il ne le laisse point. Oui, bien-aimé lecteur, qui croyez en Christ et qui êtes dans l'épreuve parce que TOUS confessez Christ, nous avons son coeur et sa puissance sans cesse en activité pour nous consoler et nous soutenir. Il est toujours près de nous. Puissions-nous ne point l'oublier. Cet homme est chassé dehors pour avoir confessé Christ, et maintenant Christ Lui-même se révèle à lui dans son caractère le plus élevé, comme le Fils de Dieu (vers. 35, 36) ; et il L'adore.

Quel changement dans cet homme ! Au commencement, mendiant, aveugle, n'ayant rien pour cette vie ni pour l'éternité, et maintenant aux pieds de Jésus, voyant clair, adorant, une merveille pour tous ceux qui l'entouraient, et cependant mis dehors parce qu'il appartenait à Christ. Cet homme savait tout cela pour lui-même et le confessait. « Je sais une chose, c'est que j'étais aveugle, et que maintenant je vois. » Lecteur, pouvez-vous le dire aussi ? Alors bénissez Dieu et vivez pour Christ.

LAISSÉ EN ARRIÈRE

Quand les troupes anglaises abandonnèrent la ville de Lucknow lors de la dernière guerre des Indes, un homme fut laissé en arrière. Voici le fait raconté par un témoin oculaire :
« Le capitaine Waterman, s'étant jeté sur son lit dans un endroit retiré, s'endormit et fut oublié dans la retraite qui se fit durant la nuit.

À deux heures du matin, il s'éveille, se lève, et, saisi d'horreur, voit qu'il a été laissé seul. Espérant contre espérance, il visite poste après poste ; tous, jusqu'aux plus avancés, sont déserts et silencieux. Être seul dans une ville ouverte, exposé à la rage de milliers d'ennemis barbares qui allaient y pénétrer, quelle position effroyable ! La terreur s'empare de lui et lui donne des ailes ; il court, court à perdre haleine, du côté où l'armée s'était retirée, et enfin atteint l'arrière-garde presque fou d'angoisse et entièrement épuisé de fatigue. Il était sauvé, mais certainement il n'oublia jamais ce moment terrible et son heureuse délivrance. »

Lecteur, le moment approche rapidement où toute âme qui n'a pas Christ pour son Sauveur se trouvera dans une situation infiniment plus terrible que celle du capitaine Waterman.

À la voix de l'archange et quand la trompette de Dieu sonnera, tous ceux qui sont de Christ, - ceux qui dorment ressuscités, et les vivants transmués, - seront ravis dans les nuées à la rencontre du Seigneur (1 Thessaloniciens IV, 16, 17). Chaque âme née de Dieu, chaque saint, dans lequel habite l'Esprit de Dieu ; chaque vrai enfant de Dieu, de quelque nom que l'homme l'appelle, s'en ira pour être à jamais avec Jésus ; tous ceux qui ne sont pas de Lui seront LAISSÉS EN ARRIÈRE !

Avec qui vous trouverez-vous, mon cher lecteur ? Il sera trop tard pour fuir ; il n'y aura plus moyen d'échapper : « La grêle détruira la retraite du mensonge, et les eaux inonderont le lieu où l'on se retirait » (Ésaïe XXVIII, 17) ; la porte sera « fermée » (Matthieu XXV, 10).

Laissé en arrière, non pour être livré aux passions sanguinaires de barbares cruels, mais au pouvoir du « méchant » ; pour être la proie de la grande séduction d'injustice, de cette énergie d'erreur qui fera croire au mensonge ; pour les terribles malheurs de la « grande tribulation » ; pour les horreurs éternelles de la seconde mort, - l'étang de feu (2 Thess. II ; Apocalypse, VI, VIII, IX, XI, XIII, XV, XVI, XIX ; XX, 15).

Ah ! lecteur, ce ne sont pas là des fables ingénieusement imaginées ; ce sont les RÉALITÉS à venir, - les éternelles vérités proclamées par le Dieu vivant. Le salut du capitaine Waterman fut une délivrance temporelle ; l'Évangile proclame un salut éternel, par le précieux sang de Christ. « Par lui vous est annoncée la rémission des péchés ; - quiconque croit est justifié par Lui » (Actes XIII, 38, 39). La voie du salut est encore ouverte ; la porte de la miséricorde n'est pas encore fermée. Le Sauveur glorifié est encore assis à la droite de Dieu dans le ciel : quand II se lèvera pour venir prendre les siens, alors la porte sera fermée pour toujours (Luc XIII, 25).

Pécheur, le Dieu vivant s'adresse à vous par sa parole. « Comment échapperons-nous, si nous négligeons un si grand salut » (Hébreux II, 3) ? « Voici, c'est maintenant le temps agréable ; voici, c'est maintenant le jour du salut » (2 Corinthiens VI, 2) ; demain sera peut-être trop tard, et vous pourriez demain ÊTRE LAISSÉ EN ARRIÈRE.

LE FILS AÎNÉ

« Or son fils aîné était aux champs, et comme il revenait et qu'il s'approchait de la maison, il entendit la mélodie et les danses, et ayant appelé l'un des serviteurs, il demanda ce que c'était. Et il lui dit : Ton frère est venu, et ton père a tué le veau gras, parce qu'il l'a recouvré sain et sauf. Et il se mit en colère et ne voulait pas entrer. Et son père, étant sorti, le pria. Mais lui, répondant, dit à son père : Voici tant d'années que je te sers, et jamais je n'ai transgressé ton commandement ; et tu ne m'as jamais donné un chevreau pour faire bonne chère avec mes amis ; mais quand celui-ci, ton fils, qui a mangé ton bien avec des prostituées, est venu, tu as tué pour lui le veau gras.
« Et il lui dit : Mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi ; mais il fallait faire bonne chère et se réjouir ; car celui-ci, ton frère, était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé »
(Luc XV, 25-32).

Le coeur de l'homme est, par nature, complètement étranger à la grâce de Dieu ; il ne la veut pas pour lui-même, et ne peut pas supporter de la voir exercer en faveur d'autrui. À moins qu'il n'en soit devenu l'objet bienheureux en la connaissant, il la hait. On est frappé de voir dans les Évangiles combien les miracles de grâce du Seigneur Jésus provoquèrent d'indignation, et cela spécialement parmi les gens qui tenaient le plus aux observances religieuses et aux convenances de la société.

Lorsque, dans la synagogue, un jour de sabbat, Jésus rend force et santé à l'homme dont le bras droit était desséché, les scribes et les pharisiens se mettent à consulter ensemble contre Lui pour le faire périr (Marc III, 6). On sentait bien que ce libre exercice de la grâce accusait une puissance supérieure à toutes les ordonnances auxquelles ces hommes religieux se soumettaient, en imposant leur terrible joug à un peuple qu'ils gardaient dans l'ignorance (Luc XI, 46, 52). Les scribes et les pharisiens aimaient naturellement l'autorité et faisaient grand cas des louanges des hommes qu'ils espéraient s'attirer par l'extérieur de la piété ou de la sainteté. Ils ne voulaient pas se voir dépouillés de cette gloire sans faire des efforts pour se la conserver.

Et ce n'étaient pas seulement les conducteurs religieux qui recherchaient leur propre justice ; le peuple, en général, avait les mêmes sentiments. « Tous murmuraient » lorsque Jésus entra dans la maison de Zachée le publicain (Luc XIX, 7) ; les richesses mêmes de cet homme ne suffisaient pas pour ôter aux yeux du peuple la flétrissure dont son métier détesté l'avait entaché. On trouvait que Jésus ne devait pas entrer chez un tel homme ; il est vrai que l'on ne savait pas qu'il allait là pour y apporter le salut ; d'ailleurs, on ne comprenait pas ce « salut » ; où ne se souciait pas même de savoir ce que c'était, et l'on ne sentait non plus aucun besoin de le recevoir. Le sentiment que l'on possédait déjà une propre justice valable devant Dieu dominait dans les coeurs.

Tel était le cas du « fils aîné » de la parabole du chap. XV de Luc. Il représente cette grande classe de la société qui tient à l'honnêteté, à la religion, aux convenances, et qui, en même temps, cherche son bonheur dans le monde, tout en vivant loin de Dieu.

Les biens de Dieu sont également partagés entre tous les hommes. Ceux qui sont justes et bons en jouissent tout comme ceux qui sont injustes et méchants (Matthieu V, 45 ; Actes XIV, 17). Le « plus jeune fils » représente ces derniers : il avait voulu avoir la part du bien qui lui revenait pour vivre loin de l'autorité de son père, en marchant selon sa propre volonté. L'aîné restait à la vérité près de la maison paternelle, mais son langage montre qu'il était, aussi complètement que son frère, étranger au coeur du père et à tout ce qui s'y passait. Il y avait chez lui une certaine apparence de soumission, mais, au fond, sa pensée était uniquement de jouir des biens qui étaient en son pouvoir, sans que le père prît personnellement aucune part à ce bonheur ; ses « amis » étaient les siens, non ceux de son père ; il en voulait jouir lui seul, tout en prétendant que son père fît les frais d'un festin qu'il aurait gêné par sa présence !

Notre conscience ne nous dit-elle pas, cher lecteur, que ce n'est là qu'un trop fidèle tableau de l'état des hommes vis-à-vis de Dieu ? D'où viennent les biens que les hommes sont contents de posséder, et dont ils ne se servent que pour leur propre avantage ? Tout vient de Dieu, tout dépend, en fin de compte, de sa pluie et de son soleil ; c'est de la terre que sort toute nourriture ; même le roi, est-il écrit, est asservi aux revenus du champ. C'est Dieu qui est l'auteur de tout bien, et cependant le nom de Dieu ne trouve pas de place, il est hors de saison dans les affaires des hommes. L'homme insensé va même jusqu'à nier l'existence de Dieu, preuve de plus, s'il en fallait une, que l'on s'efforce à écarter toute pensée de Dieu en cherchant le bonheur dans un monde qui ne veut pas de Lui.

Le « fils aîné » vivait pour lui-même ; il ne s'inquiétait pas de son frère absent ni n'attendait son retour. Seul, le père le « vit de loin » ; le fils aîné n'y était pas ; il ne fut pas témoin de l'accueil accordé au prodigue ni de sa réception dans la maison : les « champs » l'occupaient jusqu'au moment où le son de la mélodie et des danses parvint à ses oreilles. Il demanda alors à un serviteur ce que c'était ; quoique près de la maison, il était complètement étranger à l'oeuvre de grâce qui s'y opérait : « il se mit en colère et ne voulut pas entrer ».

C'était le moment de lui faire sentir qu'il y avait, pour lui aussi, une place dans cette scène de joie : « son père, étant sorti, le pria d'entrer ». Mais aucune parole de bonté ne put faire d'impression sur ce coeur égoïste, endurci dans sa propre justice et devenu insensible à tout sentiment de délicatesse et d'affection. « Voici tant d'années que je te sers, dit-il, et jamais je n'ai transgressé ton commandement ; et tu ne m'as jamais donné un chevreau pour faire bonne chère avec mes amis ». La relation de fils et l'affection qu'elle suppose lui étaient inconnues ; son misérable coeur légal pensait avec peine à « tant d'années » passées dans un service où « le commandement » dur et inflexible lui imposait les bornes de son devoir. Il ose même accuser son père d'indifférence à son égard, bien qu'il eût partagé son bien entre les deux fils. Son égoïsme ne sortait pas du cercle étroit de ses propres intérêts, d'où son père était soigneusement exclu. Il va plus loin, osant même jeter sur le nom de son père le déshonneur causé par la conduite du prodigue, disant : « Quand celui-ci, ton fils, qui a mangé ton bien avec des prostituées, est venu, tu as tué pour lui le veau gras ». Quant à la bonté et à la grâce de son père, il ne s'en faisait pas la moindre idée ; il ne connaissait pas la relation intime impliquée dans le nom de « père ». Aussi le père l'appelle simplement « enfant », terme d'affection, non pas « mon fils, » qui indique une relation connue dans laquelle son amour avait introduit le prodigue repentant.

Remarquez encore avec quelle force le mépris qu'avait témoigné le fils aîné retombe sur sa propre tête lorsque le père lui dit : « Celui-ci, ton frère, était mort. » II était moralement « frère » du prodigue. Sa méchanceté était cachée sous une apparence d'obéissance rendue à contrecoeur. La vérité de Dieu déchire cette vaine couverture pharisaïque et ne fait pas de différence morale entre les deux « fils ». La grâce qui cherche le pécheur ne fait pas de différence non plus, mais, hélas ! « ... il ne voulut pas entrer » !

Et vous, cher lecteur, resterez-vous plus longtemps, comme lui, ... DEHORS ?

LA GLOIRE DU SEIGNEUR
(2 Corinthiens III.)

Le premier principe du christianisme, tout en reconnaissant de la manière la plus solennelle la responsabilité de l'homme, place le chrétien sur un terrain tout autre et entièrement différent. Ce premier principe, base de toute la vérité chrétienne, c'est qu'il y a un médiateur, une troisième personne, entre l'homme et Dieu. Parce que l'homme ne pouvait pas venir à Dieu, Christ a pris en main la cause de l'homme, et a opéré une oeuvre par laquelle l'homme est accepté de Dieu.

Deux choses sont présentées ici comme étant le résultat de cette oeuvre : « Là où est l'Esprit du Seigneur, il y a la liberté », la liberté de la grâce, et, en second lieu, nous devenons « la lettre de Christ » (plus ou moins effacée sans doute en nous-mêmes, mais nous ne sommes pas des lettres de nous-mêmes), des copies de Christ, « écrites par l'Esprit du Dieu vivant ». C'est là ce que nous sommes. Quoique en nous-mêmes pleins d'imperfections et de manquements, la définition que l'Esprit de Dieu donne d'un chrétien, c'est qu'il est « la lettre de Christ ».

Or la pensée qui surgira naturellement dans une âme sera celle-ci : « Si cela est vrai, je ne sais pas ce qu'il me faut penser de moi-même ; je ne vois pas en moi cette copie de Christ ». C'est vrai, et vous ne devez pas la voir. Moïse ne voyait pas l'éclat qui resplendissait sur son visage ; il voyait resplendir la face de Dieu, et les enfants d'Israël voyaient resplendir la sienne.

La gloire du Seigneur vue sur la face de Moïse remplissait le peuple de crainte ; ils ne pouvaient supporter l'éclat de cette gloire. Mais nous la contemplons maintenant « à face découverte » en Christ (vers. 18), et nous n'en sommes nullement effrayés ; nous trouvons au contraire la liberté, la consolation et la joie en la contemplant ; au lieu de craindre, nous nous réjouissons. D'où vient cette immense différence ? - C'est qu'Israël était sous la loi, c'est-à-dire sous « le ministère de la mort » et « de la condamnation » (vers. 7-9), tandis que nous devenons chrétiens par « le ministère de l'Esprit » (vers. 8), et de « la justice » (vers. 9).

C'est Christ vivant, dans la gloire, que je vois, et non pas Christ ici-bas (tout précieux que cela soit) ; c'est Christ à la droite de Dieu. Et quoique cette gloire soit dans le ciel, je puis la contempler avec assurance. Toute cette gloire (et Christ est au centre de la majesté et de la gloire du trône de Dieu même) ne m'effraie pas, à cause de cette merveilleuse vérité, que cette gloire de Dieu brille sur la face d'un Homme qui a ôté mes péchés et qui est là, dans la gloire, comme démonstration de cette oeuvre qu'il a accomplie (Hébreux I, 3). J'aurais été effrayé d'entendre la voix de Dieu, et j'aurais dit avec les enfants d'Israël : « Que Dieu ne parle point avec nous » (Exode XX, 19) ; ou, comme Adam avec une conscience coupable, j'aurais cherché à me cacher (Genèse III, 8). Mais je ne puis parler ainsi maintenant. Oh ! non ; au contraire, quej'entende sa voix ! Je ne puis voir la gloire de Christ dans le ciel, sans savoir que je suis sauvé. Comment y est-Il arrivé ? Christ est un homme qui a été ici-bas se mêlant avec les publicains et les pécheurs bien que « séparés » d'eux, - l'ami de tels hommes, les choisissant pour ses compagnons ; II est un homme qui a porté le jugement de Dieu à cause du péché ; II est un homme qui a porté mes péchés en son propre corps sur le bois. (Je parle le langage de la foi.) Il est là comme ayant été ici-bas dans les circonstances et sous l'imputation du péché, et cependant c'est dans sa face que je vois la gloire de Dieu.
Je Le vois là en conséquence de son oeuvre de rédemption qui a pour effet d'abolir le péché. Je ne pourrais pas voir Christ dans la gloire s'il y avait un seul péché, la moindre souillure de péché qui ne fût pas ôtée. Plus je vois la gloire, plus je vois la perfection de l'oeuvre que Christ a accomplie, et de la justice dans laquelle je suis accepté.

Chaque rayon de cette gloire est vu dans la face de Celui qui a confessé mes péchés comme les siens propres, et qui, à cause d'eux, est mort sur la croix ; de Celui qui a glorifié Dieu sur la terre et achevé l'oeuvre que le Père lui avait donnée à faire. La gloire que je vois est celle de la rédemption. Ayant glorifié Dieu à l'égard du péché, suivant ce qu'il dit Lui-même : « Je t'ai glorifié sur la terre ; j'ai achevé l'oeuvre que tu m'as donnée à faire » (Jean XVII, 4), Dieu l'a glorifié en Lui-même (Jean XIII, 32).
Quand je le contemple dans cette gloire, aulieu de voir mes péchés, je vois qu'ils sont loin. J'ai vu mes péchés placés sur le Médiateur ; je les ai vus confessés sur la tête de Celui que préfigurait le bouc Hazazel, et ils sont emportés au loin (Lévitique XVI).
Dieu a été parfaitement glorifié en ce qui concerne mes péchés (c'est-à-dire en ce que Christ a fait à cause de mes péchés), en sorte que c'est le droit de Christ d'être là à la droite de Dieu. Je ne crains pas de regarder à Christ dans la gloire. Où sont mes péchés maintenant ? Où les trouvera-t-on, au ciel ou sur la terre ? Je vois Christ dans la gloire. Autrefois ils ont été sur la tête de ce béni Sauveur, mais ils sont loin pour toujours. Si c'était un Christ mort que je visse, je pourrais craindre que mes péchés fussent encore là, mais avec un Christ vivant dans la gloire, c'est en vain qu'on les rechercherait. Celui qui les a tous portés a été placé sur le trône de Dieu, et là il ne saurait y avoir de péché.

Comme conséquence pratique, je suis changé en sa ressemblance. « Nous tous, contemplant, à face découverte, la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur en Esprit. » C'est le Saint-Esprit prenant les choses de Christ et les révélant à l'âme ; c'est là la puissance qui opère actuellement une conformité pratique à Christ. Je prends mes délices en Christ, je me nourris de Christ, j'aime Christ. Il est le vrai modèle ; mon âme est formée selon Christ par le Saint-Esprit qui révèle Christ. Ce n'est pas seulement la gloireque je suis conduit à aimer, c'est Christ Lui-même qui est l'objet de mes affections, Christ que j'admire, Christ dont je m'occupe ; c'est Christ dont je mange la chair et dont je bois le sang ; quoi d'étonnant si je suis semblable à Christ ? Le chrétien devient ainsi la lettre de Christ ; il parle pour Christ, il confesse Christ, il agit pour Christ. Il n'a pas besoin d'être riche, il a en Christ des richesses insondables ; il n'a pas besoin des plaisirs du monde, il a des plaisirs à la droite de Dieu pour jamais.

Le coeur dira-t-il encore : « Oh ! mais je ne vois pas, je ne puis voir cette lettre en moi-même » ? C'est vrai, mais vous voyez Christ, et n'est-ce pas bien meilleur ? Ce n'est pas le regard tourné vers moi-même, mais le regard tourné vers Christ, qui est le moyen établi de Dieu pour me faire croître en la ressemblance de Christ. Si je voulais copier l'oeuvre de quelque grand artiste, est-ce en fixant mes yeux sur mon oeuvre et en me lamentant des défauts que j'y trouve, que je serais capable de réussir ? Non ; c'est en regardant mon modèle, c'est eu y arrêtant mes yeux, c'est en en suivant tous les traits, et en entrant dans l'esprit de ce que l'artiste a représenté. Remarquez combien cela est propre à encourager. Le Saint-Esprit ayant révélé à mon âme Christ dans la gloire comme l'assurance de mon acceptation devant Dieu, je puis regarder vers Lui sans crainte et par conséquent fixement, plein de cette gloire, et me réjouir dans la mesure où je verrai le mieux sa splendeur. Étienne (Actes VII), plein du Saint-Esprit, pouvait arrêter ses regards vers le ciel (sans doute, dans son cas, l'Esprit agissait avec plus que la puissance ordinaire), voir la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu, et la face d'Étienne brillait comme le visage d'un ange. Et voyez sa mort ! Comme son Maître, il prie pour ses meurtriers. Étienne mourant dit : « Seigneur, ne leur impute point ce péché », et Christ en mourant avait dit : « Père, pardonne-leur ; car ils ne savent ce qu'ils font ». En Étienne nous voyons l'expression de l'amour de Christ pour ses ennemis. Par le Saint-Esprit, il était transformé de la manière la plus bénie, en la même image que le Seigneur.

L'âme, en parfaite liberté avec Dieu, regarde en pleine paix et avec bonheur à la gloire de Dieu dans la face du Seigneur Jésus-Christ, et parce qu'elle voit cette gloire, et qu'elle sait ce qu'elle exprime, elle marche devant Dieu dans une sainte confiance. Au lieu d'être heureux et en liberté avec Satan, dans le monde de Satan, le chrétien craint Satan, parce qu'il se connaît lui-même. À l'aise dans la présence de Dieu, il s'abreuve là en esprit de ce qui convient à la présence, de Dieu et devient « la lettre de Christ » présentée au monde, manifestant à tous qu'il a été dans cette glorieuse présence. Quelle différence !

Puissions-nous de plus en plus nous glorifier en Celui dans la face duquel toute cette gloire est déployée, - en Lui, l'Agneau qui est mort pour nous et qui nous a lavés de nos péchés dans son propre et précieux sang.
J.-N. D.

« IL N'Y A POINT DE CRAINTE DE DIEU DEVANT LEURS YEUX »
(Romains III, 18)

Dieu ne cache jamais la vérité à l'homme, si terrible qu'elle puisse être pour lui. C'est ainsi qu'il dit : « II n'y a point de crainte de Dieu devant leurs yeux » ; et le pécheur est forcé de reconnaître l'exactitude de ces paroles et de justifier Dieu dès qu'il est amené sous la puissance de la vérité. Néanmoins, aussi longtemps qu'il court avec la foule et qu'il suit les suggestions de l'ennemi, l'incrédulité a le dessus, et il reste aveugle devant ce triste fait.

Depuis que le monde a commencé, nul plus sage que Salomon n'a existé parmi les hommes, et voici ce qu'il dit après avoir tout observé avec soin : « Seulement j'ai trouvé ceci, c'est que Dieu a fait l'homme droit, mais ils ont cherché beaucoup de discours » (Ecclésiaste VII, 29). En d'autres termes, « que Dieu soit vrai, et tout homme menteur » (Romains III, 4). Salomon justifie Dieu, et c'est ce que fait tout homme qui a reçu la vérité. « La sagesse est justifiée par tous ses enfants » (Luc VII, 35).

Il y a plus de quatre mille ans que l'Éternel disait des hommes que « Toute l'imagination des pensées de leur coeur n'était que mal en tout temps » (Genèse VI, 5) ; telle était la ruine complète de l'homme. Hélas ! ils ne le crurent pas, ne se repentirent pas de leurs péchés, et ainsi tombèrent victimes du jugement du déluge. Cette triste histoire va bientôt se répéter : « Comme ilont été les jours de Noé, ainsi sera aussi la venue du Fils de l'homme » (Matthieu XXIV, 37-39).

Cette vérité concernant l'état de ruine de l'homme étant volontairement oubliée et rejetée, on a été conduit à la présomption et à la propre justice. Et cependant, quelle vaine prétention que la propre justice de l'homme, en présence de l'histoire que Dieu a eu soin de transcrire fidèlement ! Par ce récit inspiré, nous voyons que l'homme, à travers toutes les générations, a manqué dans tout ce qui avait été confié à sa responsabilité. Sorti de la dépendance de Dieu, il ne s'inquiète pas de ses commandements ; puis il va jusqu'à mépriser sa grâce et crucifier son Fils. Tel est l'homme. Il a changé la vérité de Dieu en mensonge et voudrait bien se persuader, en dépit de sa conscience, qu'il n'existe rien au delà de ce qu'on voit sur la terre. Mais la vérité n'est pas modifiée ou changée parce que l'on s'obstine à ne pas la croire. Dieu a résumé le caractère des hommes dans ces mots significatifs : « II n'y a point de crainte de Dieu devant leurs yeux ». Il a levé le voile aussi sur l'avenir ; II ne nous a pas caché le fait qu'il y a un jugement.

Le dieu de l'homme, c'est lui-même. Il n'aime point Dieu, et, semblable à Caïn, qui tua son frère, il a fui la présence de Dieu, cherchant à se rendre heureux lui-même sur la scène de mort et de péché, qui parle hautement de la transgression d'Adam et de la haine de l'homme envers Celui qui est le Bien-Aimé de Dieu. Du matin jusqu'au soir il travaille pour la nourriture quipérit, ou pour acquérir un nom qui sera enseveli dans la poussière, bien que gravé peut-être sur les fondements mêmes de quelque cité. Sans avoir la moindre pensée de ce qui est dû à Dieu, il ne cherche que sa propre gloire.

Ah ! combien ce que l'homme fait maintenant correspond à ce que Caïn fit autrefois ! Voyez Caïn se fatiguant pour élever une cité, et contemplez l'homme de l'année 1879, travaillant sans relâche, du matin jusqu'au soir, et, - quand même il interrompt son travail le dimanche, - n'employant le jour du Seigneur que pour réparer ses forces afin de les faire servir à ses plaisirs, son avarice ou son ambition.

En vérité, il n'y a POINT DE CRAINTE DE DIEU devant leurs yeux, et « il n'y a personne qui recherche Dieu ». 0 mon lecteur, n'est-ce pas la vérité ? Fuyez, fuyez donc loin de cette scène de mal ; cherchez un refuge près de ce propitiatoire établi de Dieu, Jésus-Christ, dont le sang purifie de tout péché. Son sang parle mieux qu'Abel. (Romains III, 25 ; 1 Jean I, 7 ; Hébreux XII, 24.) Dieu est venu à notre recherche. Il ne désire pas la mort du pécheur ; bien au contraire, II veut nous avoir auprès de Lui dans la gloire, et c'est pour cela qu'il a envoyé son bien-aimé Fils pour faire, selon la justice, l'expiation de nos péchés.

L'ÂME SAUVÉE, OU CHRIST REÇU

La neige tombait à gros flocons et couvrait la terre comme d'un vaste linceul. J'avais rapproché mon fauteuil de la cheminée où pétillait un bon feu, et je pensais à ceux qui, dans cette saison rigoureuse, étaient privés du confort dont j'étais entourée, quand un coup frappé à la porte interrompit, le cours de mes réflexions.

« Quelqu'un demande madame », me dit la servante. Je sortis aussitôt et me trouvai devant une jeune fille du village que je connaissais depuis quelque temps.
Elle venait prier mon mari de se rendre chez une pauvre femme qui se mourait et qui avait refusé de laisser entrer chez elle aucun de ses voisins. « Mais vous, madame, ajouta-t-elle, vous ne pouvez y aller. Sa chambre n'est jamais nettoyée ni aérée. C'est la femme d'un braconnier ; son mari est un ivrogne qui la néglige complètement.
- J'irai la voir demain, si mon mari n'est pas de retour », répondis-je, et je retournai à mon coin de feu. Mais j'étais agitée et mal à l'aise. « Demain, me disais-je, cette âme sera peut-être en enfer. »

Je m'enveloppai à la hâte de mon manteau et m'acheminai vers l'endroit qui m'avait été indiqué, priant le Seigneur de me diriger. J'atteignis une cour sombre et malpropre, entourée de maisons d'un aspect misérable. Arrivée à la dernière, je me trouvai devant une porte fermée. C'était là. Je frappai doucement et j'attendis. Ne recevant aucune réponse, je frappai de nouveau à plusieurs reprises et j'essayai de soulever le loquet, tout en vain. Enfin, une femme parut à la fenêtre d'unemaison voisine et me dit : « C'est inutile de rester là au froid, madame ; elle ne vous ouvrira pas. »

J'élevai mon coeur à Dieu en silence ; je savais que c'est Lui qui ouvre et personne ne ferme ; puis je frappai encore une fois et prêtai l'oreille. Un léger mouvement se fit entendre dans l'intérieur ; alors j'appliquai mes lèvres au trou de la serrure : « Ouvrez-moi, dis-je, j'ai un message pour vous. »

Lentement on tira le lourd verrou qui fermait la porte ; je me trouvai introduite, et aussitôt le verrou fut repoussé. À moitié suffoquée par l'air impur qui remplissait cette misérable demeure, je m'appuyai un moment contre le mur, puis je jetai les yeux autour de moi. À la faible lueur d'une petite lampe, je distinguai la figure hâve d'une jeune femme accroupie près d'un feu presque éteint qu'elle essayait de ranimer au moyen de quelques morceaux de bois humide. En la voyant, je fus saisie d'une profonde compassion. Une toux creuse, qui ébranlait son corps amaigri, ses grands yeux cerclés de noir et ses pommettes saillantes, montraient qu'elle était arrivée à la dernière période d'une maladie de poitrine ; en même temps ses traits altérés étaient empreints d'une sombre tristesse. Elle portait le costume des montagnardes écossaises, mais ce n'était plus que des lambeaux à travers lesquels on voyait ses membres décharnés.

Elle me regarda un moment, puis me dit : « Qu'est-ce qui vous amène ici, et qu'avez-vous à me dire ?
- J'ai appris que vous étiez malade, et je suis venue de la part de quelqu'un qui aime ceux qui souffrent et qui sont fatigués.
- Asseyez-vous donc, mais ne dites rien à personne », répondit-elle en montrant du doigt deux fusils et une carnassière suspendus à la muraille, puis un grand chien noir dont j'aperçus sous le lit les yeux brillants et qui grondait sourdement de temps en temps contre moi, malgré les injonctions de sa maîtresse.
En ce moment, on frappa à la porte, et une voix d'enfant cria en pleurant : « C'est moi, maman, ouvre-moi.
- Faut-il ouvrir ? dis-je.
- Oui, c'est Johnny. »

Un enfant âgé de cinq ou six ans, mouillé de la tête aux pieds, sans bonnet ni chaussures, parut et vint se serrer près de sa mère. Les misérables haillons qui le couvraient ruisselaient d'eau, et sa mère essayait en vain de les sécher en les pressant de ses faibles mains.
Comme l'enfant continuait à pleurer, elle lui dit pour l'apaiser :
« Ne pleure pas, mon petit Johnny, papa va bientôt rentrer.
- Oh ! j'ai si froid et si faim, maman, je ne puis plus attendre. Papa est si long à revenir » ; et il se remit à sangloter.

La pauvre mère laissa tomber sa tête entre ses mains. L'expression de tristesse de son pâle visage devint plus profonde et plus navrante, mais elle ne dit pas un mot et ne versa pas une larme.
« Depuis quand cet enfant n'a-t-il pas mangé ? lui demandai-je.
- Depuis hier, je pense. »
Je courus au buffet. Il n'y avait rien, sauf deux ou trois peaux de lapin, quelques plumes d'oiseaux, une tasse et une assiette cassées.
« N'avez-vous absolument rien à manger dans la maison ? lui dis-je.
- Rien ; j'ai employé mon dernier sou à acheter un peu de charbon, et il n'en reste plus ».
Et elle se cacha de nouveau le visage.
« Ne fermez pas la porte, je reviens à l'instant », et, en disant ces mots, je sortis et courus à une boutique voisine où je me procurai les choses les plus nécessaires, demandant en outre que l'on envoyât sans tarder du charbon. Je revins à la hâte.
Comment dire la joie de l'enfant qui dévorait plutôt qu'il ne mangeait ce que j'avais apporté ? Sa mère regardait, trop malade elle-même pour partager ce repas, et des larmes inondaient mes joues.
« Vous avez un coeur compatissant, me dit la pauvre femme ; il y a bien longtemps que je n'ai versé une larme ; pas depuis que ma petite fille est morte. »

Pauvre créature ! malade, dénuée de tout, affligée et sans Christ ! Quelle situation terrible ! Oh ! qu'il me tardait de lui parler de son âme ! Et pourtant il me semblait que le moment n'était pas encore venu de lui apporter le message de Dieu.

Je rapprochai ma chaise de la sienne, et, lui prenant la main, je lui demandai depuis combien de temps elle était malade ; puis, lui montrant le petit Johnny profondément endormi sur le plancher, je lui dis : « Vous pouvez avoir confiance en moi, n'est-ce pas ? Racontez-moi toutes vos peines, car je désire vous aider.
- Vous êtes bonne, répondit-elle, de venir ici par un temps pareil et de vous asseoir près de moi pour me parler ainsi. Personne ne se soucie de Marie B..., la femme du braconnier.
- Votre mari est donc un braconnier ? Dites-moi comment vous avez été conduite à l'épouser ?
- Ah ! j'étais bien jeune quand je me suis mariée, et je pensais que c'était un métier comme un autre. Puis il m'assurait que je ne manquerais de rien. Mais sa mère et lui boivent tout ce que lui rapporte la chasse, et il est rare qu'il m'en revienne quelque chose. Avec cela, je n'ose laisser entrer personne dans la maison, de peur que l'on ne prenne les fusils et le chien, ou qu'on ne le saisisse lui-même, et il arrive plus d'une fois que l'enfant et moi nous n'avons pas de quoi manger ou nous chauffer. Je suis si faible, que je suis malade quand je quitte le lit, et j'ai froid quand je suis couchée. »

En jetant les yeux sur le lit, je vis qu'il se composait seulement de copeaux et n'avait pour toute couverture qu'une courtepointe en coton toute rapiécée et un vieux morceau de tapis.
« Maintenant, lui dis-je, parlez-moi de votre petite fille qui est morte. »

J'avais touché une corde sensible dans le coeur brisé delà pauvre mère ; quelques grosses larmes coulèrent le long de ses joues amaigries, et elle essaya de raffermir sa voix pour répondre à ma question.
» II y a cinq mois qu'elle vint au monde. Je fus bien malade. Quand le médecin et la femme qui me soignaient m'eurent quittée, personne ne vint me voir, et mon mari était dehors tout le jour et même la nuit, chassant le gibier. J'aimais ma petite, mais je n'avais rien à lui donner, et je la vis dépérir, dépérir à côté de moi, jusqu'à ce qu'un jour elle poussa un faible soupir et mourut. Depuis ce moment, je n'ai plus eu la force de m'occuper ni de prendre soin de rien ; car elle est morte de faim, je le sais bien, et mon coeur en a été brisé, tellement, que je n'ai plus pu ni pleurer, ni dormir, ni manger. Alors la toux est venue, et mon mari a amené le médecin qui a dit que c'était un dépérissement et que je ne pouvais pas guérir. Et c'est bien vrai, car je me sens plus mal chaque jour, et quelquefois je ne puis pas même me lever. »

Un violent accès de toux l'interrompit. Je suppliai le Seigneur de me donner la parole qui convenait à ce pauvre coeur. Quand elle fut un peu calmée, je lui dis :
« Marie, le message que j'ai pour vous est de la part du Fils de Dieu qui est mort pour sauver des pécheurs tels que vous et moi ; et voici ce qu'il vous fait dire : « Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi jevous donnerai du repos. » Vous avez grandement besoin de repos ; ne voulez-vous pas venir à Lui ce soir ?
- J'aimerais bien avoir du repos ; mais je ne suis pas en état d'aller, et je n'ai pas la force de me rendre à l'église ou à une réunion.
- En effet, Marie, vous êtes bien faible, et vous êtes une pécheresse ; mais Christ a tout fait précisément pour ceux qui sont comme vous. Avez-vous la force de me regarder, Marie ?
- Oui, dit-elle en levant vers moi ses yeux chargés de tristesse.
- Eh bien, Marie, le Seigneur vous invite à regarder à Lui pour avoir la vie.
- Le veut-Il ? Oh ! mais je suis une pauvre misérable créature. Je sais que je suis une pécheresse ; on me l'a appris à l'école, il y a longtemps, et je le sens tous les jours. Mais maintenant personne ne se soucie de moi, et je vais mourir, et je ne sais où j'irai. Oh ! que deviendra la pauvre Marie B., la femme du braconnier ? »

Et dans l'angoisse de son âme, des larmes longtemps retenues coulaient sur ses joues flétries.
Je pleurais avec elle ; je voyais qu'elle se reconnaissait pécheresse et que le moment était venu où le Seigneur allait la bénir.
J'ouvris ma Bible et je lus dans le livre des Nombres, chapitre XXI, versets 5-9 : « Le peuple donc parla contre Dieu et contre Moïse, en disant : Pourquoi nous as-tu fait monter hors de l'Égypte pour mourir dans ce désert ? car il n'y a point de pain, ni d'eau, et notre âme estennuyée de ce pain si léger. Et l'Éternel envoya sur le peuple des serpents brûlants qui mordaient le peuple, tellement qu'il en mourut un grand nombre de ceux d'Israël. Alors le peuple vint vers Moïse, et dit : Nous avons péché, car nous avons parlé contre l'Éternel et contre toi. Invoque l'Éternel et qu'il retire de dessus nous les serpents. Et Moïse pria pour le peuple. Et l'Éternel dit à Moïse : Fais-toi un serpent brûlant et mets-le sur une perche ; et il arrivera que quiconque sera mordu et le regardera sera guéri. Moïse donc fit un serpent d'airain et le mit sur une perche ; et il arriva que, quand quelque serpent avait mordu un homme, il regardait le serpent d'airain, et il était guéri. »

Après avoir lu, je gardai le silence, attendant que Dieu Lui-même appliquât sa parole à cette âme convaincue de péché et si proche du terme de son pèlerinage. Elle sourit faiblement et murmura : « Je suis justement comme l'un d'eux. J'ai parlé contre Dieu ; bien des fois je l'ai accusé de dureté quand je souffrais de la faim et quand mon pauvre petit enfant est mort. Mais il n'y a pas de serpent d'airain maintenant vers lequel je puisse regarder ; il n'y a pour moi rien que l'enfer. » Et elle se remit à pleurer.

Je rouvris ma Bible et je lus : « Et comme Moïse éleva le serpent au désert, ainsi il faut que le Fils de l'homme soit élevé, afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle. Car Dieu a tant aimé le monde, qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croiten Lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle. Car Dieu n'a pas envoyé son Fils dans le monde afin qu'il jugeât le monde, mais afin que le monde fût sauvé far Lui. Celui qui croit en Lui n'est pas jugé, mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu » (Jean III, 14-18).
« Oh ! dit-elle en joignant les mains et avec un accent de soulagement indicible, est-ce vrai ? est-ce bien vrai ? Alors je puis mourir heureuse. Il a donné son Fils pour moi et je ne périrai jamais. Je sais que je suis une pécheresse, mais c'est précisément pour des pécheurs comme moi que Jésus est mort ! Oh ! merci, merci d'être venue m'apporter un tel message » ! Et elle saisit ma main qu'elle baisa à plusieurs reprises.
« Voulez-vous que nous rendions grâces à Dieu ensemble ? lui dis-je.
- Oui, oui », répondit-elle, et, nous agenouillant sur le sol humide, nous bénîmes Celui qui avait tant aimé Marie B., la femme du braconnier, qu'il avait donné pour elle son Fils unique, afin qu'elle eût la vie par Lui.

Il se faisait tard. J'aidai Marie à se coucher sur son misérable grabat, je plaçai auprès d'elle son enfant endormi, j'allumai du feu et préparai du thé. En voyant ce visage si calme maintenant, je me reprochais d'avoir douté un moment de la réalité de ce qui avait eu lieu en elle. Son âme avait passé si tranquillement de la mort à la vie, elle avait reçu Christ avec une simplicité si grande, que je pouvais à peine le croire. Mais unregard jeté sur elle dissipait tous les doutes : on voyait qu'elle reposait sur le sein du Seigneur.
- Bonne nuit, Marie, lui dis-je, je vous verrai demain, s'il plaît au Seigneur.
Je n'oublierai jamais son regard lorsqu'elle dit : « Ah ! c'est bien là le repos ! Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et je vous donnerai du repos ! »

Je la laissai pleine de joie et de reconnaissance, et je retournai chez moi. Le lendemain, je me rendis chez elle de bonne heure ; je la trouvai faible, mais joyeuse. Une amie chrétienne lui procura un bon lit ; on nettoya la chambre ; la fenêtre, si longtemps hermétiquement fermée, fut ouverte, et un peu d'air frais pénétra dans cette demeure. Marie témoigna sa gratitude pour tous ces soins, mais son coeur était occupé du Seigneur, et tout son désir était d'être avec Lui.

Elle vécut encore environ trois semaines ici-bas. Je la vis chaque jour ; nous lisions ensemble la Parole de Dieu et nous priions. Plusieurs amis chrétiens vinrent aussi la visiter et remportèrent l'assurance qu'elle se reposait dans une paix parfaite sur l'oeuvre accomplie par Celui qui est venu chercher et sauver ce qui était perdu.

J'étais chez elle peu de temps avant qu'elle ne s'endormît en Jésus. Elle me fit signe de venir tout près de son lit. « Je ne vous verrai peut-être plus, dit-elle, mais nous nous retrouverons là-haut » ; puis, me prenant la main et la baisant, elle ajouta : « Je vous aime bien, car vous m'avez apporté le message de Dieu ». Nous nous séparâmes ainsi pour ne nous revoir qu'en la présence de Celui qui donna sa vie pour des pécheurs.

Lecteur ! je ne sais pas ce que TOUS êtes, vieux ou jeune, riche ou pauvre ; mais ce que je sais, c'est que si vous n'avez pas reçu Christ, vous êtes un pécheur perdu qui marchez vers l'enfer.
Mais vous pouvez être sauvé maintenant si, comme la pauvre Marie, vous croyez au témoignage que Dieu a rendu touchant son Fils, et si vous vous reposez sur l'oeuvre parfaite accomplie par Celui qui, par amour, donna sa vie pour vous.
« Crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé ».


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FRAGMENT: « Serviteur de Dieu » est la seule vraie dignité humaine.
CONVERSION ET ACCEPTATION
« SANS PÉCHÉ, À SALUT »
« MAINTENANT DONC FAITES-LE »
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