Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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L'HOMME BANNI D'EDEN



MÉDITATION VIII.

LE NOM D'EVE. - LES ROBES DE PEAU.

« Et Adam appela sa femme Eve, parce qu'elle devait être la mère de tous les vivants. Et l'Éternel Dieu fit à Adam et à sa femme des robes de peau et les en revêtit. » Gen. III, 20-21.

Parmi les traits d'histoire qui nous sont conservés dans les pages des livres saints, il en est peu de plus touchants que la maladie et la guérison miraculeuse du pieux Ézéchias, roi de Judas. Il venait d'être délivré par la puissance de l'Éternel de la main du fier et belliqueux Sanchérib, dont le discours orgueilleux de Rabsaké lui avait fait craindre toute la fureur. Heureux et reconnaissant de voir que le Dieu d'Israël avait exaucé son ardente prière, il s'était rassis sur le trône de ses pères un instant ébranlé. Mais une autre épreuve l'attendait : « En ce temps-là Ézéchias fut malade à la mort, et Ésaïe le prophète, fils d'Amots, vint vers lui et lui dit : Dispose de ta maison, car tu t'en vas mourir et tu ne vivras plus. Alors Ézéchias tourna son visage contre la muraille et fit sa prière à l'Éternel et dit : Souviens-toi maintenant, je te prie, ô Éternel ! comment j'ai marché devant toi en vérité et en intégrité, et comment j'ai fait ce qui t'était agréable. Et Ézéchias pleura abondamment ».
Il pleure, incertain si sa prière sera entendue ; son coeur se fond de tristesse et d'angoisse ; car le salut de tout le peuple de Dieu, qu'il a arraché à l'idolâtrie et qui est menacé d'une guerre d'extermination, semble dépendre de sa vie, et il se voit enlever à la fleur de ses jours.

Que ne puis-je vous rendre l'esprit de cette touchante et pieuse élégie par laquelle il exhale sa douleur !
« Je disais : au midi de mes jours mes jours sont tranchés ! Déjà il me faut entrer aux portes de la mort ; le reste de mes années m'est refusé. Je ne contemplerai plus Jéhova, Jéhova sur la terre des vivants. Je ne verrai plus aucun des hommes, aucun des habitants de la terre. Le temps de ma vie est passé ; il a été transporté loin de moi comme une cabane de berger. Mes jours sont tranchés le matin comme le fil du tisserand, et avant le soir tu m'as enlevé. Mes os sont brisés comme par la force du lion. Je soupire comme l'hirondelle. Je gémis comme la colombe. Mon oeil défaillant s'élève encore à toi, Jéhova ! Jéhova ! délivre mon âme ! - Mais que dirai-je encore ? Il l'a dit, il l'a fait ! Je passerai dans l'amertume de mon âme le temps qui me sera laissé ».

Cependant celui qui avait été, de par l'Éternel, un messager de mort, se présente encore à Ézéchias, et, messager de bonnes nouvelles, il annonce la délivrance. La voix d'Ésaïe s'est encore fait entendre :
« Ainsi a dit l'Éternel, le Dieu de David ton père : J'ai exaucé ta prière ; j'ai vu tes larmes, voici, je vais ajouter quinze années à ta vie, et je délivrerai de la main des Assyriens et toi et celle ville ».
À ces mots Ézéchias ressaisit sa lyre ; mais qu'ils sont différents ses accords ! « Seigneur ! ta Parole est la vie même. Tu m'as relevé, tu m'as fait revivre. Tu as changé en paix la grande amertume de mon coeur. Tu as ouvert tes bras, tu as embrassé mon âme, afin qu'elle ne tombât pas dans l'abîme, parce que tu as jeté arrière de toi tous mes péchés. Le sépulcre ne te célèbre pas ; la mort ne proclame point ta louange ; ceux qui descendent dans l'abîme n'éprouvent plus ta fidélité ; mais celui qui vit, celui qui vit te célébrera comme je le fais aujourd'hui. Le père annoncera à ses enfants ta vérité. L'Éternel est ma délivrance ! Que mes cantiques retentissent donc dans la maison de l'Éternel tous les jours de ma vie (Ésaïe, ch. 38.) »
.

Il peut vous sembler, mes frères, que ces douces pensées, que ces actions de grâces pour une délivrance signalée dans laquelle l'Éternel déploya toute sa bonté, ne sont guère en harmonie avec le sujet de nos méditations, puisque nous avons à contempler le premier homme courbé sous le poids de cette condamnation qui a fait le sujet de notre dernier discours.
Cependant c'est la situation même de l'homme déchu qui nous a rappelé le souvenir d'Ézéchias ; non qu'Adam se soit humilié comme lui, ait prié comme lui et ait vu comme lui la délivrance de l'Éternel ; mais c'est que, sous le poids même de la condamnation qui tombe justement sur lui, il est néanmoins encore un monument de la miséricorde et de la longanimité du Seigneur ; comme Ézéchias il voit se prolonger une vie dont il devait s'attendre à voir tarir la source sous les coups de la malédiction du Très-Haut ; comme Ézéchias il devrait entonner une hymne de reconnaissance et d'amour.

Il reste, il est vrai, condamné avec toute sa race. La terre est maudite à cause de lui ; il en mangera les fruits avec douleur et à la sueur de son front tous les jours de sa vie. Il partagera avec sa compagne les souffrances et l'amertume d'une vie que le péché a empoisonnée. Mais est-ce là tout ce à quoi il devait s'attendre lorsque, après son crime, il fuyait honteux et tremblant à la voix de l'Éternel ? Non, sans doute. La sanction de l'ordre qu'il a violé était : du jour que tu en mangeras tu mourras de mort. Or ce jour, ce jour terrible est arrivé. Adam souffre, il est vrai, l'exécution de la sentence dans la séparation de son âme d'avec Dieu, ce qui est la mort spirituelle. Il porte, il est vrai, dans son corps le germe de dissolution qui plus tard produira en lui les maladies et la mort. Mais encore est-ce tout ce qu'Adam avait à redouter de la juste colère de l'Éternel ? Puisqu'il a péché, puisqu'il est déchu, puisqu'il a manqué le but de son être, trompé le dessein que Dieu avait en le créant, ne devait-il pas s'attendre à ce que cette mort, gage terrible du péché, le frapperait aussitôt ; qu'un Dieu offensé le ferait rentrer dans le néant d'où il l'avait tiré, ou que plutôt, le bannissant pour jamais de sa présence, il le dévouerait sans délai aux misères éternelles de ces êtres qui « sont retenus dans des chaînes d'obscurité et réservés pour le jour grand et terrible du juste jugement de Dieu ? »
Au lieu de cela qu'éprouve-t-il ? Il voit d'abord un Dieu lent à la colère qui lui adresse les questions les plus propres à réveiller dans sa conscience le sentiment clair et douloureux de son péché, et à susciter dans son coeur la repentance qui est le chemin de la vie, - un Dieu qui condescend à lui donner les motifs de sa sentence. Et que lui annonce cette sentence ? Une mort immédiate ? la destruction ? le néant ? Non ! « La terre sera maudite à cause de toi... »
Cette terre n'ouvre donc pas sa bouche pour l'engloutir ! « Tu mangeras l'herbe des champs ; tu mangeras ton pain à la sueur de ton visage... » II y a donc encore du temps, un sursis pour le coupable ! Sa compagne doit « enfanter ses fils dans la douleur... » Adam aura donc des fils ! La créature de Dieu qui a mérité la perdition et la ruine est donc encore appelée à communiquer à d'autres, à des milliers de générations futures l'existence que Dieu lui a donnée, et que, dans sa grande miséricorde, il ne lui reprend pas !

Adam qui d'abord était resté muet devant son juge, Adam qui était atterré sous le poids de la colère divine et dont la malédiction du Très-Haut avait atteint l'âme tremblante et déjà dévorée de remords, Adam, à l'ouïe de la sentence que Dieu prononce, voit la miséricorde percer à travers les termes de la condamnation ; derrière le nuage des malédictions divines il aperçoit une pâle lumière ; il y attache sa vue ; un rayon d'espérance pénètre dans son coeur ; il lève sur sa compagne, sur celle qu'il vient d'accuser durement de toute la faute du péché, et qu'il n'osait plus regarder qu'avec la honte du crime, il lève sur elle un regard où se peignent l'affection et un espoir nouveau : Tu es Eve (1), lui dit-il, oui, tu seras la mère de tous les vivants.

Ah ! mes frères ! s'il y avait eu en Éden un Esaïe pour nous conserver les actions de grâces de notre premier père, comme il nous a transmis celles du roi De Juda, n'entendrions-nous pas encore l'hymne d'Adam comme celle d'Ézéchias ? Les accents d'Éden le céderaient-ils à ceux de Sion ? Oui, au lieu de ces mots concis qui suivent immédiatement la sentence de condamnation : Adam appela sa femme Eve parce qu'elle devait être la mère de tous les vivants ; au lieu de ce peu de mots, nous aurions entendu ce pécheur, épargné par la main de la destruction, répandre son coeur, encore brisé à cause de sa chute profonde, en ferventes actions de grâces : « Tu es Eve, tu donneras la vie ; tu seras mère ; tu communiqueras cette existence, que Dieu nous conserve, à des millions d'êtres que Dieu veut encore bénir, qu'il veut encore aimer, qu'il veut sauver. Des générations innombrables connaîtront le bonheur de l'existence, vivront sur cette terre, savoureront les douceurs des relations sociales, se transmettront les unes aux autres les privilèges que nous allons leur laisser ; le but de notre miséricordieux Créateur sera atteint. Ce monde n'est pas détruit ; notre chute est profonde, mais n'est peut-être pas irréparable ; n'avons-nous pas déjà une promesse de salut pour l'avenir ? O profondeur des desseins d'amour de l'Éternel ! O merveilles de sa bonté infinie ! »

Mais il nous semble entendre quelqu'un demander avec tristesse : Comment Adam aurait-il senti et parlé de la sorte ? Quel est donc le sujet de ses actions de grâces ? Quelle joie peut lui faire éprouver la pensée qu'Eve sera la mère de tous les vivants ? Quoi ! était-ce un bonheur pour celui dont l'âme était souillée, dont le coeur était froissé sous la malédiction divine, dévoré de l'amertume du péché, portant déjà le germe de destruction et de mort qui le fera rentrer dans la poudre ; était-ce un bonheur pour un tel être de penser qu'il communiquerait aux générations futures une déplorable existence, une vie souillée, remplie par conséquent de tous les maux, de toutes les souffrances qu'enfante le péché ; une vie sans but, sans point d'appui, détachée de sa source ; une vie remplie de ruines et de misères sans nombre ; une vie dont les passions impures qui fermentent dans le coeur de l'homme, comme un volcan impétueux, devaient faire le théâtre de l'injustice, de la violence, de la haine, des guerres, de la tyrannie, de l'orgueil, de l'impureté de tous les désenchantements les plus amers ; une vie que l'on commence dans les pleurs et que l'on termine dans les maladies, l'agonie, la mort ?
Au lieu de voir dans le triste privilège de léguer à d'autres une telle vie un sujet d'espérance et de joie, Adam ne devait-il pas au contraire y voir le comble de son malheur ? Ne devait-il pas verser des larmes amères sur le sort de sa malheureuse postérité et s'écrier en donnant à sa compagne un nouveau nom : Oh ! pourquoi es-tu Eve ? Pourquoi Dieu t'accorde-t-il le sinistre privilège d'être la mère de tous les vivants ?

Hélas ! vous n'auriez que trop raison de parler de la sorte, mon cher frère, si en effet Adam n'avait aperçu dans l'avenir qu'une suite de générations d'hommes naissant dans la souillure, vivant dans le péché, retournant dans la poussière, rendant compte à un Dieu offensé de tous les crimes de leur vie. - Mais ne vous y trompez pas ; le premier auteur de tant de maux, le séducteur n'a-t-il pas été maudit ? Sa sentence n'a-t-elle pas été prononcée avant celle qui atteignit Adam ? « La prospérité de la femme ne devait-elle pas briser la tête du serpent » et sortir victorieuse de ce combat qui allait s'engager entre l'empire des ténèbres et le royaume de la lumière ?

La promesse d'un Rédempteur faite à Adam fut probablement beaucoup plus explicite qu'elle ne l'est dans les termes obscurs que nous venons de citer. Quoi qu'il en soit, Dieu en avait dit assez pour relever les espérances du pauvre pécheur qui sans cela eût succombé sous les coups de sa justice. Nous avons, dans la première partie de la Genèse, sinon des preuves, du moins des inductions suffisantes pour nous convaincre que, même avant les promesses claires et positives faites à Abraham, aux patriarches, aux prophètes, les hommes craignant Dieu eurent, dès les temps les plus reculés, une espérance qui ne devait point les décevoir, bien qu'ils se trompassent sur le temps de l'accomplissement des promesses. - Ainsi nous voyons Eve s'écrier, en mettant au monde son fils premier-né, en qui elle croyait voir se réaliser ses espérances : J'ai acquis l'homme l'Éternel, l'homme Dieu (2). Ainsi, nous voyons les premiers enfants d'Adam instituer des sacrifices dont la signification ne saurait être douteuse pour quiconque connaît l'esprit de l'Ancien-Testament et ses rapports avec le Nouveau. Ainsi encore nous voyons Lémec, animé de l'espérance de ses ancêtres, donner à son fils Noé ce nom qui signifie repos, et s'écrier, en faisant une allusion évidente à la sentence prononcée en Éden : « Celui-ci nous consolera de la peine et du travail que nous souffrons à cause de la terre que l'Éternel a maudite. »

Voilà, mes frères, l'espérance qu'Adam avait transmise à ses descendants ; voilà l'espérance qui relevait son coeur abattu et qui, au sein de l'amertume dont son âme était remplie, lui faisait trouver quelque bonheur à donner à sa compagne le nom d'Eve et à l'appeler la mère de tous les vivants. - Dans ce sens elle ne devait pas seulement être la mère de ceux qui vivraient dans les misères d'une terre maudite, mais aussi de ceux qui vivraient par l'accomplissement des promesses, qui vivraient par un Rédempteur, qui vivraient en Dieu, qui vivraient pour l'éternité ! -
Oh ! mes frères en Jésus-Christ ! nous qui vivons et qui portons en nos coeurs l'espérance qui ne confond point et les gages de la vie éternelle, ne bénirons-nous pas, avec Adam, ce Dieu de longue patience, qui, depuis six mille années, laisse subsister une terre souillée afin d'y recueillir la moisson de ses rachetés ? - Oui, que tous les enfants d'Adam qui vivent pour le ciel, que les enfants d'Adam, déjà parvenus à la vie éternelle s'unissent pour célébrer, avec ce pécheur d'Éden, les miséricordes de l'Éternel, et pour le bénir de ce que celle par qui le péché fut introduit dans le monde, au lieu d'être anéantie, pût être appelée Eve, la vie, la mère de tous les vivants !

Il est dans notre texte une autre preuve de la bonté de Dieu envers des pécheurs qu'il avait l'intention miséricordieuse de sauver, au moment même où il les condamne. - Dès que l'homme eut péché il eut honte de sa nudité devant Dieu. Il avait perdu son innocence, sa pureté, et la souillure se manifeste par la convoitise qu'accompagne la honte et le remords. En vain il a recours à un misérable expédient pour voiler sa nudité ; les feuilles du figuier ne sauraient cacher sa misère à Celui « qui sonde les coeurs et dont les yeux sont comme des flammes de feu ».
Adam est resté sans excuse devant son Juge ; à l'ouïe de la sentence qui le condamnait il a eu la bouche fermée. Mais, ô bonté incompréhensible de Dieu qui se manifeste jusque dans ses jugements ! Celui qui vient de condamner le pécheur veut lui-même couvrir la honte de sa nudité.

Et l'Éternel Dieu fit à Adam et à sa femme des robes de peau et les en revêtit.
Que si, sans entrer dans un système d'allégories que nous n'approuvons pas, nous avons été forcés de voir, dans la honte que l'homme éprouva de sa nudité après son crime, l'effet immédiat du péché et la preuve que son âme était dépouillée de son innocence et de sa gloire, ne devons-nous pas voir, dans ces vêtements dont l'Éternel couvre la honte de sa créature, plus encore que ne comportent les termes de l'historien sacré, qui rapporte toutes ces scènes d'Eden telles qu'elles devaient paraître à l'âge de l'enfance du monde où elles eurent lieu, et sans jamais en indiquer le sens plus profond ?
Sans doute nous verrons d'abord, dans les paroles qui nous occupent, la tendre sollicitude et la condescendance d'un Père qui revêt sa créature déchue comme il revêt les lys des champs. Il ne l'abandonne pas ; il s'intéresse encore à elle ; il en prend soin ; il lui donne sa nourriture et lui indique le moyen de se faire des vêtements. Mais ne nous arrêtons pas à la lettre qui tue et à la matière qui ne profite de rien. Souvenons-nous que c'est le péché qui a rendu nécessaires ces vêtements dont Dieu couvre la nudité du pécheur ; sachons y voir un premier remède contre le péché, la première marque des grâces spirituelles du Seigneur.

Voici les raisons qui paraissent devoir conduire à cette conclusion. On s'est naturellement demandé d'où pouvaient provenir ces robes de peau dont Dieu revêt Adam et sa compagne. Dès la création les fruits sont assignés à l'homme pour sa nourriture ; après la chute il lui est dit : « Tu mangeras l'herbe des champs... », et ce n'est qu'après le déluge qu'il est permis à l'homme de se nourrir de la chair des êtres vivants, ce à quoi il n'était certainement pas destiné. Ces robes de peau ne pouvaient donc pas provenir d'animaux tués pour la nourriture de l'homme. Il est, d'un autre côté, peu probable qu'il en ait tué dans le but unique de se revêtir de leur dépouille. Ces considérations ont conduit la plupart des théologiens à conclure qu'un sacrifice solennel avait eu lieu en Éden, que le sang des victimes avait été répandu pour ratifier la promesse miséricordieuse d'un Réparateur du mal, et que de là provenaient ces vêtements de peau.
J'avoue que cette opinion ne saurait être prouvée. Mais n'est-elle pas rendue très probable par le fait que nous ne voyons nulle part la première institution des sacrifices, et que cependant les premiers enfants d'Adam, Abel et Caïn, offrent des sacrifices à l'Éternel, l'un les prémices de la terre, l'autre les prémices de ses troupeaux ?

D'où leur était venue l'idée d'adorer ainsi, à la manière de pécheurs troublés dans leur conscience, un Dieu offensé ? Ne fallait-il pas que leur père leur eût appris le sens des sacrifices ? De plus, ne voyons-nous pas constamment dans l'ancienne alliance toutes les promesses solennelles de Dieu scellées par le sang des victimes qui préfiguraient, jusqu'à l'accomplissement des temps, la grande Victime de propitiation ? Ne nous est-il pas dit dans cette Parole de Dieu, dont nous ne saurions assez sonder les profondeurs que « l'Agneau a été immolé dès la fondation du monde ? » Oui, mes frères, j'aime à voir les grâces de la Rédemption annoncées en figures au premier pécheur d'entre les hommes.
J'aime à voir les bénédictions de l'Évangile s'unir aux malédictions qu'appelle le premier péché qui souille la terre. J'aime à voir cette chaîne non interrompue des promesses de la grâce de Dieu, unissant, à travers tous les siècles, Éden et Golgotha, le premier Adam et le second Adam, la chute et la Rédemption !
J'aime à penser que le nom de Jésus, de « l'Agneau de Dieu qui ôte les péchés du monde », ce nom si cher à toute âme d'homme qui a péché, ce nom qui renferme tout ce qu'il y a dans les cieux d'amour, de miséricorde, de tendres compassions, j'aime à penser que ce nom de Jésus, attendu par l'espérance ou reçu par la foi, préfiguré par les sacrifices ou commémoré par la cène, a été dans tous les siècles l'espoir des pauvres pécheurs, l'attente de la postérité déchue d'Adam.

Ainsi la victime même qui fut immolée en Éden comme le sceau de la promesse de Dieu, la victime même dont le sacrifice monta vers les cieux en oblation de bonne odeur, revêtit de ses dépouilles nos premiers parents, couvrit devant Dieu la honte de leur nudité, et leur représenta admirablement ce manteau de la justice du Sauveur que chante Esaïe, et sans lequel tout pécheur se trouvera éternellement nu et confondu devant son Juge suprême, ce vêtement sans lequel un des conviés du Seigneur, étant entré dans la salle des noces, fut ignominieusement jeté dans les ténèbres du dehors.
Ainsi déjà le premier pécheur en Éden, comme plus tard Esaïe sur les monts de la Judée, quoiqu'il vit moins clairement que le prophète évangélique le grand salut de l'Éternel, pouvait, s'élevant au-dessus de sa honte et de sa misère, échappant au poids accablant des malédictions divines, porter ses regards vers un lointain avenir et répéter ce chant de délivrance : « Je me réjouirai en l'Éternel et mon âme s'égaiera en mon Dieu, car il m'a revêtu des vêtements du salut, il m'a couvert du manteau de la justice ».

Mes frères, tel est le grand salut que nous vous annonçons. Pour vous, comme pour Adam, comme pour tout pécheur, il n'y en a pas d'autre. Ah ! souvenez-vous que vous êtes tous pécheurs comme lui, condamnés comme lui, et que, si vous êtes trouvés « nus et non pas vêtus », rien ne saurait couvrir votre nudité devant les yeux du juste Juge au grand jour des rétributions.
Êtes-vous revêtus ? La justice de Christ couvre-t-elle devant Dieu vos péchés et vos transgressions ? Ou bien seriez-vous encore assez insensés pour avoir recours aux feuilles de figuier, aux lambeaux souillés de votre propre justice ? En vain, en vain, chercheriez-vous en vous-mêmes ou dans le monde entier les moyens de voiler vos iniquités et vos misères ; elles paraîtront, à votre éternelle confusion, à la face de Dieu, des anges et des hommes, si vous ne venez en Golgotha « humiliés et repentants, recevoir de Jésus l'efficace de ce sang qui purifie de tout péché ».

O Jésus ! ô mon Sauveur, unique espoir des pécheurs depuis Adam jusqu'au dernier des mortels sur la terre, nous te bénissons de ce que tu nous as revêtus, de ce que tu as souffert la honte qui était notre partage, de ce que tu as répandu le sang de la nouvelle alliance, de ce que ton nom seul fait tressaillir notre coeur d'espérance et de joie ! Oh ! veuille, par ta grâce, mettre le comble à tes bienfaits en ne permettant pas qu'aucun de nous ait le malheur de « négliger un si grand salut, ni de fouler aux pieds le Fils de Dieu en tenant pour une chose profane le sang de l'Alliance » par lequel seul nous pouvons échapper à la condamnation ! Que tant d'amour ne soit pas inutile ! « Convertis-nous et nous serons convertis, sauve-nous et nous serons sauvés, car tu es notre espérance ! »


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MÉDITATION IX. L'EXIL


(1) Ce nom signifie la vie, vivante, ou qui donne la vie.
(2) Genèse IV. 1. Telle est la traduction littérale de ce verset mal rendu dans nos versions.

 

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