Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



L'HOMME BANNI D'EDEN



MÉDITATION V.

L'INTERROGATOIRE. - LES EXCUSES.

Et Dieu dit : Qui t'a montré que tu étais nu ? N'as-tu pas mangé du fruit de l'arbre dont je t'avais défendu de manger ? Et Adam répondit : La femme que tu m'as donnée pour être avec moi m'a donné du fruit de l'arbre, et j'en ai mangé. Et l'Éternel Dieu dit à la femme : Pourquoi as-tu fait cela ? Et la femme répondit : Le serpent m'a séduite, et j'en ai mangé. » Gen. III, 11-13.

À peine le péché est-il entré en Éden, et la voix de l'Éternel s'est fait entendre contre cette violation de l'ordre établi dans le monde moral. L'homme coupable a fui tremblant.
Fuir devant Dieu ! - En vain Adam pense-t-il cacher son crime et sa honte en prétextant sa nudité. Il faut comparaître devant Celui qui sonde les coeurs ; il faut rendre compte de cette honte même ; il faut se placer en présence de la loi violée. Un tribunal solennel s'élève ; le juste Juge interroge sa créature sur l'usage qu'elle a fait de sa liberté, de son innocence,
de sa responsabilité. - II faut répondre ; il faut que ce qui est caché vienne à la lumière.

Écoutons, mes frères, en nous plaçant nous-mêmes en la présence de Dieu, écoutons cet interrogatoire. Il nous a été conservé pour notre instruction ; il nous concerne tous, car il renferme la base du jugement auquel nous allons tous être soumis, et les chefs d'accusation qui seront bientôt produits contre chacun de nous.

Les questions du juge suprême, les réponses des accusés vont successivement occuper notre attention.

J'ai entendu ta voix et j'ai craint parce que j'étais nu, et je me suis caché. Telle avait été la parole d'Adam troublé dans sa conscience à l'approche de son Dieu, parole qui trahissait à la fois son crime et sa confusion. Déjà il sent la misère du péché, déjà il tremble malheureux à la voix du Dieu dont naguère la communion faisait son bonheur. Il a la conscience du péché qu'il a commis ; il en souffre déjà les premières conséquences ; mais il ne s'avoue pas encore la portée morale de son action ; il ne s'avoue pas coupable ; il ne parle que de sa crainte, de sa nudité.
Détournant les yeux de son propre coeur, il cherche follement au dehors les raisons de son état présent. Il faut donc le traduire au tribunal de sa propre conscience ; lui rappeler sa responsabilité, l'ordre divin violé, la sainteté de la loi qu'il a foulée aux pieds, le mal moral qui vient de souiller son coeur, en un mot la véritable cause de ce qu'il éprouve en la présence de son Dieu. - Tel est en effet le but des deux questions que lui adresse son Juge :
Qui t'a montré que tu étais nu ? - « ou comment cette nudité est-elle maintenant devenue pour toi un sujet de honte (Voir chap. II, v. 25) ?
N'étais-tu pas revêtu d'innocence, de lumière et de gloire ? Ne portais-tu pas l'image de Dieu, dont tu te glorifiais ? Ne jouissais-tu pas avec bonheur de toutes les facultés qu'il t'avait conférées ? - Pourquoi donc es-tu dépouillé, honteux, misérable ? - N'as-tu pas souillé ce vêtement de pureté et d'innocence que je t'avais donné ? - N'as-tu pas perdu cette couronne de gloire et d'immortalité qui ornait ton front ? Qui donc t'a réduit à cet état ? Qui t'a montré que tu étais nu ?

Adam confus se tait devant son juge. Il faut donc enfoncer plus avant le trait qu'il porte en sa conscience troublée. - II faut lui montrer le mal de plus près, par une question plus précise encore. Il faut mettre devant ses yeux le miroir lumineux de la loi divine :
N'as-tu pas mangé du fruit de l'arbre dont je l'avais défendu de manger ? - ou, comme il y a dans l'hébreu : dont je t'avais donne l'ordre de ne pas manger ?
Que de leçons, mes frères, dans cette seule question ! Arrêtons-y un moment nos pensées.

Et d'abord, remarquez que Dieu, par une condescendance qui doit enfin tourner à sa gloire, ne prononce point sur l'homme pécheur de malédiction ni de sentence de mort, avant de l'avoir convaincu en sa conscience, afin que l'Éternel soit reconnu juste quand il condamne. Il n'y aura pas, au dernier jour, un seul des réprouvés qui ne doive proclamer, à la face de l'univers, la justice et la sainteté de son Juge ; il n'y aura pas un seul de leurs cris de désespoir qui ne doive tourner à la gloire des perfections divines.
Mes frères, pécheurs qui m'écoutez, fussiez-vous à l'heure qu'il est au nombre des hommes les plus impies et les plus égarés dans l'orgueil et le mépris de Dieu, vous servirez pourtant éternellement à sa gloire, malgré vous, et en proclamant vous-mêmes la justice de votre condamnation, si vous avez le malheur de persister dans l'endurcissement de votre coeur, - ou par votre éternelle félicité, si vous vous convertissez à Dieu pendant qu'il en est temps.

Mais cette condescendance de Dieu envers l'homme devait servir aussi au bonheur de ce dernier en l'amenant à la repentance, et par la repentance, au salut.
Que les foudres de la justice divine ne soient pas tombées sur la créature déchue, pour l'anéantir au moment du péché ; que la terre n'ait point ouvert sa bouche pour l'engloutir, que son juge lui laisse du temps et lui parle de manière à exciter en lui la repentance, c'est un miracle de la grâce de Dieu, c'est une preuve certaine que déjà il avait envers sa créature des desseins de miséricorde et des vues de rédemption. Ah ! grâces à Dieu de ce que « l'Agneau était immolé dès avant la fondation du monde ».

L'Éternel, par sa question, place Adam en face de sa loi. L'homme pécheur ne pourra donc pas, afin de retenir encore l'aveu de sa culpabilité, prétexter son ignorance.
Je t'avais ordonné, lui dit son juge, tu connaissais tout ton devoir, toute ta responsabilité, et même la sanction terrible de la loi et la peine de sa violation. Si Adam périt ce sera donc par sa faute. Si déjà il entend gronder au loin les foudres de la malédiction de son Dieu, c'est lui qui les a appelées sur sa tête coupable.
Y a-t-il parmi nous un seul pécheur dont nous ne puissions dire la même chose ? Y a-t-il dans notre vie un seul péché, une seule action condamnée par la loi de Dieu que nous ayons commise par ignorance ; nous aux yeux de qui resplendit toute la clarté des révélations divines, nous qui sommes privilégiés plus qu'aucune nation qui soit sous le soleil, par la connaissance claire et certaine de nos devoirs, de notre responsabilité, de la volonté de Dieu, de sa Parole ?

Si l'Éternel rappelle à l'homme pécheur d'une manière si solennelle l'ordre qu'il lui avait donné, ce n'est pas seulement pour l'amener à l'aveu qu'il avait péché le sachant et le voulant, qu'il n'avait tenu compte de sa redoutable responsabilité, mais encore pour lui faire comprendre la vraie nature du péché.
Dans une précédente méditation, nous nous sommes arrêtés à vous démontrer en quoi avait consisté le péché d'Adam. - Nous aurions pu établir sans réplique cette démonstration en vous citant simplement l'interrogatoire dont nous nous occupons. N'as-tu pas mangé du fruit de l'arbre dont je t'avais ordonné de ne pas manger ? Je t'avais donné un ordre, tu l'as violé. - Voilà le péché ; la violation de la loi de Dieu, la désobéissance, la révolte. - Ce péché serait de sa nature le même quel qu'en eût d'ailleurs été l'objet.
Pour nous, comme pour Adam, comme pour toute créature responsable, le péché est simplement ce qui est en opposition avec la loi divine. C'est ainsi que Dieu lui-même le définit par la bouche de saint Jean : « Quiconque fait un péché agit contre la loi, car le péché est ce qui est contre la loi. » - Ainsi le pécheur en violant la loi divine, en méprisant la Parole de son Dieu, brise l'harmonie du monde moral et introduit le désordre dans les oeuvres du Dieu éternel.
Qu'y avait-il donc de plus propre à faire sentir à Adam la nature et l'énormité de son péché que la question solennelle que lui adresse son juge ?

Pour Adam innocent la loi était destinée à le placer sous la responsabilité et à prévenir le mal ; pour Adam coupable la loi sert à lui montrer son péché comme dans un miroir où il en peut considérer toute la difformité.

Mes frères, nous aussi nous avons une loi, et elle a le même but. Réveiller notre conscience, nous apprendre ce que nous devons à Dieu, faire peser sur notre âme le sentiment de notre responsabilité, puis nous montrer le péché dans toute sa hideuse laideur et prononcer sur le pécheur une peine que rien ne saurait détourner de sa tête, excepté l'oeuvre de Christ en Golgotha, - telle est la fin de la loi. « Par la loi, nous dit Paul, est donnée la connaissance du péché. Je n'eusse pas connu la convoitise si la loi n'eût dit : Tu ne convoiteras point. Or nous savons que ce que la loi dit, elle le dit à tous ceux qui sont sous la loi, afin que toute bouche soit fermée et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu ».

Quelle conviction foudroyante ne dut pas pénétrer l'âme d'Adam coupable en entendant l'Éternel Dieu lui rappeler sa loi violée ! Et qu'éprouverons-nous nous-mêmes en présence de cette loi et en l'entendant proclamer dans ces temples de Dimanche en Dimanche, s'il y avait dans notre coeur moins d'aveuglement et moins d'orgueil ?

Cependant, comme que nous envisagions la loi de notre Dieu apprenons enfin de l'interrogatoire solennel que subit Adam que c'est d'après cette loi que nous serons jugés ; que c'est cette loi sainte qui nous sera présentée à la barre du tribunal de Dieu, comme elle le fut à Adam en Éden ; que c'est d'après cette loi que sera jugée chaque action de notre vie, depuis le moment où nous avons su penser jusqu'à celui où nous descendrons au tombeau ; que c'est à la balance de cette loi, enfin, que seront jugés tous les motifs les plus secrets de nos actions et les plus légers mouvements de notre coeur.
Mes frères, voulez-vous donc apprécier votre véritable valeur morale, voulez-vous être à même d'instruire dès maintenant ce jugement d'où va dépendre votre éternité ; ne prenez pas pour votre mesure les principes relâchés d'une morale mondaine, ni l'exemple corrompu d'un monde plongé dans le mal. - Mais prenez la loi de Dieu, cette loi qui veut régler non-seulement toutes nos actions, mais nos pensées, nos affections, nos motifs et les mouvements de votre coeur. Prenez cette loi, dis-je, mesurez-vous avec elle, essayez-en chaque point à votre taille morale, jugez-vous, prononcez !

La question adressée à la femme sur son péché est plus simple ; cette question la suppose déjà convaincue ; elle n'est qu'un reproche qui précède la condamnation.
Pourquoi as-tu fait cela ? ou : Comment as-tu commis une telle action ? N'en connaissais-tu pas tout le danger et le crime ? Avais-tu oublié l'ordre de ton Dieu ? Ton devoir d'obéissance et de fidélité n'était-il pas clairement prescrit ? N'avais-tu donc point de crainte de ton Créateur ? La sanction terrible qu'il avait donnée à sa loi n'avait-elle produit aucune impression sur ton âme ? - Ou, à défaut de la crainte, ne connaissais-tu point la puissance de l'amour ? Tous les bienfaits dont j'avais enrichi ton existence n'avaient-ils pu gagner ton coeur ? N'étais-tu pas parfaitement heureuse ? Et devais-tu préférer les attraits de la tentation aux douceurs de ma communion ? Cependant tu l'es livrée à la désobéissance ; tu as commis le péché. - Pourquoi as-tu fait cela ?

Qui ne s'attendrait à voir Adam plongé dans la plus profonde humiliation ? Qui ne croirait que son coeur brisé ne doive à cette heure frémir sous les traits poignants du plus douloureux repentir ? La présence d'un Dieu saint et juste toujours redoutable au pécheur, la pensée de sa faveur perdue et avec elle la paix et le bonheur, les reproches accablants que Dieu adresse à sa créature coupable, le souvenir de la loi violée, la peine terrible prononcée par cette loi, prête à tomber sur le pécheur, les questions du Juge Suprême, si propres à réveiller dans la conscience d'Adam la connaissance claire et le sentiment douloureux de son péché, les premiers fruits amers de son crime que déjà il savoure au fond de son coeur, la honte, le remords, la misère ; par-dessus tout la pensée d'avoir offensé un Dieu qui avait répandu sur lui tant de preuves de son amour et de sa bonté infinie, d'avoir foulé aux pieds sa loi, méprisé sa Parole.... tout, tout est propre à arracher du fond de son coeur ce cri de repentance : « O Dieu ! aie pitié de moi Selon ta gratuité, selon la grandeur de tes compassions efface mes forfaits ! J'ai péché contre toi, contre toi seul ; j'ai fait ce qui déplaît à tes yeux. Détourne ta face de mes péchés ! O Dieu, crée en moi un coeur pur ! »
Sans doute ce cri de douleur et cette ardente supplication s'échapperont du coeur d'Adam coupable, et iront sonder les profondeurs des miséricordes divines pour en tirer, s'il est possible, la grâce et le pardon....

Non, mes frères, non L'orgueil est né ! l'aveugle orgueil a étendu un voile funeste sur les yeux de celui qui a voulu connaître le bien et le mal ; l'odieux orgueil a enflé et endurci son coeur. Le vermisseau de la poudre résiste à son Créateur, le coupable résiste à son Juge. Déjà il éprouve tous les premiers effets de son péché, la nudité, la honte, la crainte, la misère ; il ne nie point son crime, il l'avoue ; et cependant il ne se reconnaît point coupable, il ne cherche pas en lui, au fond de son propre coeur la cause du péché, il n'accepte pas la faute de sa chute. - il va chercher au dehors, autour de lui, un être sur lequel il puisse déverser le blâme. Quel sera donc cet être ? La femme que tu m'as donnée...

Eve !... Ai-je bien entendu ? Quoi ! sa compagne chérie, celle que naguère il aimait, celle que Dieu lui a donnée, celle qui augmentait son bonheur en le partageant, celle qui embellissait pour lui le séjour d'Eden, qui doublait toutes les joies de son heureuse existence, celle qu'il aurait protégée et défendue au péril de sa vie, contre tous les dangers, c'est sur elle qu'il rejette le blâme, toute la faute de son crime !
Oui, et si la sentence de mort prononcée d'avance contre le péché est exécutée, qu'elle frappe Eve, Adam l'accuse !
Si les malédictions et les foudres de la justice divine atteignent l'auteur du péché, qu'elles tombent sur Eve, Adam l'accuse !
Si une misère sans fin est le déplorable héritage de la chute, qu'Eve en boive jusqu'à la lie la coupe amère, Adam l'accuse !

Mes frères, voilà le péché corrompant les affections les plus intimes et les plus pures. Le voilà né ce hideux égoïsme qui étouffe dans leurs racines les sentiments les plus généreux, le voilà devenu l'âme, le mobile de la vie humaine !
Que tout ce qui m'entoure soit humilié et confus, pourvu que mon orgueil soit satisfait ! Que même ce que j'aime le plus soit frappé sous mes yeux, pourvu que j'échappe ! Que tout périsse, pourvu que je vive !

Il y a plus ; avançons encore dans ce mystère de folie et d'orgueil. Ce n'est pas seulement sur Eve qu'Adam rejette la faute de son crime ; il en veut faire remonter le blâme jusqu'à Dieu lui-même.
« La femme que tu m'as donnée pour être avec moi, dit-il....
Quoi ! cette compagne que Dieu avait fait naître pour compléter son bonheur en disant : « Il n'est pas bon que l'homme soit seul », cet être qui devait servir avec lui, adorer avec lui, aimer avec lui ce même Dieu de bonté qui avait répandu sur lui tant de félicité, Eve est maintenant dans la bouche de l'homme coupable l'objet d'un reproche qui s'adresse à Dieu ! Monstrueuse ingratitude ! Si nous avons vu que de l'égoïsme à la haine il n'y a qu'un pas, la haine à son tour, poussée par l'orgueil ne tarde jamais à vomir le blasphème ! Quelle chute profonde ! Quels déplorables fruits du péché !

Eve, interrogée à son tour, ne tarde pas à manifester les mêmes dispositions et à prouver que son coeur aussi est souillé par le péché. C'est l'instrument de la tentation qu'elle accuse, comme si la tentation devait nécessairement être suivie de la chute, comme si elle n'eût pas été libre, et comme si ce n'eût pas été son devoir de repousser avec indignation le premier doute qui lui fut suggéré sur la vérité de la Parole de son Dieu, et la première pensée de lui désobéir !

Mes frères, cessons de nous étonner et de nous indigner de la conduite de nos premiers parents ; portons nos regards sur nous-mêmes et voyons si nous n'y retrouverons pas constamment les mêmes misères.

Lorsque l'Éternel Dieu, par sa Parole ou par le cri de notre conscience, nous conduit à son tribunal et nous interroge sur nos péchés ou sur quelque chute particulière dont nous éprouvons les suites amères, quel est notre premier mouvement ? Est-ce de nous accuser nous-mêmes, de mettre la main sur notre conscience, de fermer la bouche, de nous prosterner dans la poussière, de nous écrier avec un coeur brisé de douleur et de regret : J'ai péché ?
Vous le savez, ô vous qui avez tant soit peu étudié votre coeur, répondez ! Ah ! n'êtes-vous pas forcés d'avouer que votre premier mouvement est de jeter autour de vous un regard avide de trouver quelque objet sur lequel vous puissiez rejeter le blâme de votre péché ?
Tantôt la faute doit retomber sur quelque être dont l'exemple, ou les paroles, ou l'influence vous a entraînés dans sa chute.
Tantôt vous vous rejetez sur votre faiblesse, sur la puissance de vos passions, sur la force des tentations, sur le manque de vos lumières ou de l'éducation que vous avez reçue, sur l'état de la société, sur ce que vous appelez l'impossibilité de vivre selon l'Évangile, que sais-je ?
Quand vous aurez accusé tout ce qui vous entoure, peut-être votre accusation, devenant blasphématoire, remontera-t-elle, comme celle d'Adam, jusqu'au Dieu qui vous a créé ; peut-être direz-vous que c'est lui qui vous a faits ce que vous êtes, c'est-à-dire faibles, enclins au mal, pécheurs, esclaves des sens et des passions ; peut-être même tournerez-vous contre Dieu ses dons mêmes, ses bienfaits, ses grâces les plus précieuses.

Vous semble-t-il que j'exagère ? Jetez un regard sur vous et sur toute la vie humaine, et vous serez détrompés, et vous vous convaincrez qu'il n'est aucune des misères que nous apercevons en Éden, dès après la chute, qui ne se reproduise de mille manières dans la vie de tous les enfants d'Adam.
Ai-je exagéré pour vous qui, au lieu de bénir Dieu des dons de sa Providence, de la prospérité et du bien-être qu'il a répandus sur vous, de l'influence sociale qu'il vous a accordée, en prenez occasion de vivre dans l'oubli du bien, dans une orgueilleuse opulence, dans la mondanité, et qui, interrogés sur le compte que vous aurez à rendre sur votre responsabilité, sur votre vie inutile et souillée, vous écriez aussitôt que tel est l'état de la société, que Dieu a ainsi institué la vie humaine et établi la diversité des conditions, que vous devez garder votre rang et vivre comme la Providence vous a placés ?
Non, je n'ai pas exagéré ; vous calomniez cette Providence ; comme Adam vous blasphémez contre Dieu.
Ai-je exagéré pour vous que Dieu a entourés d'êtres chers à votre coeur, de parents, d'amis, d'enfants que vous deviez aimer en Dieu, en faisant servir à sa gloire ces dons de sa bonté, et qui, au lieu de cela, en prenez occasion de mettre la créature sur le trône du Créateur, et de faire de tous ces autant d'idoles, en prétextant que vos devoirsde parents, d'enfants, d'époux, d'amis, sont les devoirs les plus sacrés, que la religion commande ces devoirs, que la Providence en a ainsi ordonné....
Sans doute si vous étiez dans l'ordre, si l'Éternel avait son trône dans votre coeur, si vous viviez pour sa gloire et non pour jouir de ses dons avec ingratitude. Autrement vous aussi vous accusez la Providence, vous blasphémez contre Dieu.
Ai-je exagéré pour vous qui n'avez point encore tourné voire coeur vers Dieu, qui vivez dans une coupable indifférence ou plutôt dans une véritable inimitié contre lui, sans égard aux invitations de sa grâce, ni aux menaces de sa justice, ni à ses bienfaits qui devraient fondre les glaces de votre coeur, ni à sa loi violée dont la voix devrait ébranler votre conscience jusque dans ses dernières profondeurs, et qui, pressés par toutes ces considérations de vous convertir au Seigneur, de craindre ses jugements, d'ouvrir votre coeur à son amour, fermez les oreilles à tous ces appels, en vous appuyant sur un sentiment vague et mensonger de la bonté de Dieu, en vous persuadant que sa justice n'aura pas son cours, que, puisqu'il vous a épargnés jusqu'à présent, il ne saurait vous punir ? -
Ai-je exagéré en vous accusant de tourner contre Dieu ses bienfaits, ses grâces mêmes, puisque vous en faites un motif de continuer à l'offenser en méprisant les richesses de sa douceur, de sa patience, de sa longue attente, ne reconnaissant pas que sa bonté vous invite à la repentance ? » - Non ! vous calomniez sa patience divine, vous blasphémez contre Dieu.

- Tu le sais, ô mon Dieu ! combien même les plus fidèles d'entre nous, sans abuser autant de tes dons, sans dire aussi ouvertement : « Péchons afin que la grâce abonde », restent cependant, malgré ton amour, malgré tes tendres miséricordes, et peut-être à cause de ces miséricordes mêmes, au-dessous de ce qu'ils devraient être ! En serait-il ainsi si nous ne prenions pas, de ta longue patience, occasion de nous montrer ingrats envers le meilleur des pères, lâches à ton service, peu soucieux de ta gloire. Ah ! du moins, Seigneur, nous désirons accepter pour nous-mêmes la faute de cette criminelle ingratitude. Humilie-nous toi-même, humilie-nous et nous relève ensuite par ta bonté !

Mes frères, nous avons tous mille raisons de nous humilier jusque dans la poussière. Comme Adam nous connaissons la loi sainte de notre Dieu, comme Adam nous l'avons violée le sachant et le voulant. Seriez-vous assez malheureux pour ne pas écouter le jugement que Dieu prononce dans votre conscience ? Seriez-vous assez insensés pour chercher encore à échapper, par de misérables excuses, à l'interrogatoire solennel auquel vous êtes soumis ?
Mes frères, qui de vous se condamne ? qui de vous s'humilie ? Écoutez la Parole de l'Éternel : « Celui qui cache ses transgressions ne prospérera point ; mais celui qui les confesse et qui les délaisse obtiendra miséricorde. Si nous nous jugeons nous-mêmes nous ne serons pas jugés par le Seigneur ».

Quoi qu'il en soit, sachez-le, emportez dans vos demeures cette pensée que je voudrais pouvoir graver au fond de votre coeur ; dans bien peu de jours un jugement plus solennel encore, plus terrible encore que celui où comparurent nos premiers parents en Eden, va s'instruire à la face du ciel et de la terre, des hommes et des anges.
Pécheurs orgueilleux ou pécheurs repentants, hommes du monde ou hommes de Dieu, nous allons tous comparaître devant le tribunal de Christ, où seront fixées nos destinées pour l'éternité.
Oh ! qui de vous à ce jugement sans appel, sans excuses à ce jugement, où « toute bouche sera fermée », qui de vous aura un Sauveur, un Répondant, un Avocat auprès du Père ? Quelle conviction foudroyante pour quiconque restera chargé de ses péchés ! quelle honte éternelle ! quel désespoir ! Oh ! si alors il y avait encore une heure, une seule heure de repentance et d humiliation, de recours à la grâce !...
Mes frères bien-aimés, vous avez cette heure, c'est celle où je vous parle ; maintenant, maintenant, si vous n'êtes pas déterminés à vous perdre, hâtez-vous de fuir en Golgotha ; dans un jour, dans une heure ce peut être trop tard...
Mon Dieu ! sauve-les, sauve-nous !


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