Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



L'HOMME BANNI D'EDEN



MÉDITATION III.

LES ATTRAITS DE LA TENTATION. - LA NATURE DU PÉCHÉ.

« Et la femme voyant que le fruit de l'arbre était bon à manger, et qu'il était agréable à la vue, et que cet arbre était désirable pour donner de la science, en prit du fruit et en mangea, et elle en donna aussi à son mari avec elle, et il en mangea. » Gen. III, 6.


Nous sommes entrés, par une méditation précédente, dans cette scène de séduction qui se passe en Éden. Nous avons vu, par les nombreux témoignages de l'Écriture, que Satan fut l'auteur de la tentation, qu'il s'efforça de faire pénétrer dans l'âme innocente d'Eve le doute et l'erreur, tantôt par une question captieuse, tantôt par une dénégation téméraire et blasphématoire de la vérité de Dieu. Nous avons cru entrevoir aussi dans les réponses de la femme ce premier trouble qui précède le mal, cet ébranlement d'une âme qui chancelle sur le bord de l'abîme, retenue par la crainte, poussée par la puissance de la tentation.

Continuons. Entrons de nouveau en Éden ; nos premiers parents n'en sont pas encore bannis. Mais, hélas ! pourquoi faut-il qu'en arrêtant nos regards sur eux et sur les derniers efforts de la tentation, ce soit pour être témoins des triomphes du prince des ténèbres et de la cause des malheurs et de la ruine de l'homme !

Nous avons déjà eu lieu de vous faire observer que la nature de la tentation présentée à Eve, en Éden, était la seule qui pût avoir de dangereux attraits pour des êtres spirituels et purs. Les degrés par lesquels la femme descend dans l'abîme du péché et la force qui l'y pousse sont en parfaite harmonie avec une triste expérience que nous avons tous faite maintes fois. Donnons une sérieuse attention au récit de l'historien sacré ; il nous concerne tous ; il semble qu'il dépeigne à l'avance une scène qui se passe trop souvent dans notre pauvre vie.
Et la femme vit que le fruit de l'arbre était bon à manger et qu'il était agréable à la vue et désirable pour donner de la science ; ou, selon les expressions simples et naïves de l'original, « la femme vit que l'arbre était pour la nourriture, et un désir aux yeux, et aimable pour donner la science (ou plutôt la sagesse, l'intelligence (1)) ».

Si nous voulions traduire ces idées dans un langage plus métaphysique, nous trouverions qu'elles renferment ce que l'on considère comme les trois éléments qui constituent la perfection : la bonté, la beauté et la vérité. La bonté, dans ce qui flatte le goût ; la beauté, dans ce qui délecte la vue ; la vérité, dans ce qui donne la science ou la sagesse. - Et remarquez qu'en recherchant cette perfection, la femme obéissait à un mouvement que Dieu lui-même avait imprimé à sa nature. Oui, c'était la destination éternelle de l'homme d'aimer, d'admirer, de s'approprier tout ce qui est bon, tout ce qui est beau, tout ce qui est vrai. C'était sa destination de grandir dans cette perfection qu'il possédait déjà par sa nature, mais qui pouvait se développer à l'infini par son union avec celui qui est la Bonté, la Beauté, la Vérité, la Perfection souveraine.
C'était donc en lui seul et dans l'harmonie de leur volonté avec sa volonté que nos premiers parents devaient chercher la perfection. Le commandement que Dieu leur avait donné avait pour but, en les plaçant sous la dépendance et la responsabilité, de les conduire à cette perfection. Il devait les unir à leur Créateur et leur donner la conscience de tout ce qu'il y a de bon, de beau, de vrai dans le monde moral, aussi bien que dans le monde visible qui était leur demeure.

Mais, hélas ! un doute a pénétré dans l'âme d'Eve déjà coupable par cela même ; la Parole de son Dieu n'est plus sa lumière et l'unique objet de sa confiance ; elle va chercher hors de Dieu le bien, le beau, le vrai ; que dis-je ? elle pense le trouver dans l'objet même dont la jouissance lui est défendue sous peine de mort, dans la désobéissance, dans le péché !
Dès lors tout est changé dans les objets des désirs de la femme, parce que tout est changé dans son coeur ; dès lors nous ne voyons plus dans sa recherche, d'une fausse perfection et d'un faux bonheur que ce que l'apôtre Jean appelle « la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la vie. »
Ce n'est pas sans dessein que nous faisons ce rapprochement ; il semble que les paroles de Jean sont une traduction exacte de celles de Moïse : la bonté, que la femme pense follement trouver dans un objet dont Dieu a maudit la jouissance, n'est plus que « la convoitise de la chair ; la beauté (ou, selon l'original, un désir aux yeux) n'est plus que « la convoitise des yeux » ; enfin la vérité (ou la sagesse, la science qui doivent y conduire), n'est plus que « l'orgueil de la vie. »

Mes frères, prenez-y garde ! Vous surtout, âmes nobles et élevées, qui, n'éprouvant que dégoûta la pensée de péchés grossiers et avilissants, recherchez des jouissances dignes de vous dans les choses qui vous paraissent bonnes, belles, vraies ; - souvenez-vous que rien, rien n'est tel hors de Dieu ; souvenez-vous qu'au contraire tout est mauvais, tout est laid, tout est faux, quelles que soient les apparences, dans les choses qui sont en opposition avec la Parole souveraine de l'Éternel. - C'est une des ruses les plus subtiles du démon et de notre propre coeur que de nous persuader, sur de trompeuses apparences, que certaines choses sont bonnes, propres à nourrir notre bonheur, lors même que peut-être elles sont en désharmonie avec la volonté de Dieu et clairement défendues dans sa Parole. Il est tant d'illusions et de prétextes qui trop souvent nous aveuglent et nous portent à vouloir juger, par notre propre expérience, de la valeur de telle action vers laquelle nous sommes entraînés par un penchant naturel, au lieu de nous en tenir uniquement à ce que prononce la règle infaillible !

Nous sommes entourés d'arbres « de la connaissance du bien et du mal », d'objets sur lesquels Dieu a déposé l'anathème de sa loi, et que les ruses du démon et les sophismes de notre coeur servent trop souvent à revêtir à nos yeux d'une bonté apparente. Or, si nous y portons une main téméraire et rassurée par l'erreur, qu'est-ce qui nous retiendra sur le bord de l'abîme ? À l'instant d'une tentation vive et puissante, qu'est-ce qui nous sauvera si l'action vers laquelle déjà nous sommes irrésistiblement entraînés nous apparaît encore appuyée de mille motifs plausibles et louables ? Sans aucun doute nous nous livrerons à cette action, à cette jouissance sur la foi d'un mensonge, et quand nous reviendrons à nous-mêmes nous serons avertis par l'amertume du péché que nous avons mis la main sur un objet maudit de Dieu, et qu'au lieu d'avoir savouré un fruit bon pour la nourriture, nous avons été entraînés vers la ruine par la convoitise de la chair !

Il y a quelque chose de bien admirable, de bien digne de la créature de Dieu dans cet amour du beau que possède l'homme, dans ce goût exquis par lequel il en juge et qui, avant sa chute, lui préparait de si nobles jouissances. Heureux l'homme si jamais il n'avait séparé dans son esprit ce qui est beau de ce qui est bon ! C'est à cet amour du beau que nous devons les sublimes productions du génie ; heureux si elles étaient aussi pures que belles ! C'est à ce don précieux que nous devons même la douce admiration que nous inspirent les oeuvres et les perfections de Dieu ; heureux si cette admiration eût été toujours un culte pur comme le culte d'Éden !

Mais, hélas ! ici encore les hommes n'ont que trop bien imité la première femme ; ils ont cherché le beau hors de Dieu, hors de l'harmonie de leur volonté avec sa volonté. Et dès lors où est la véritable beauté ? Il n'y a de beauté que dans la pureté de l'innocence. Eve avait pu mille fois arrêter ses regards avec une pure admiration sur tous les arbres dont Dieu avait embelli sa demeure, et sur celui-là même auquel il avait attaché son commandement ; mais maintenant chacun de ses regards sur cet objet agréable à la vue n'est plus qu'un impur désir, comme l'appelle Moïse, une convoitise, comme l'appelle saint Jean.
Telle est aussi notre position au milieu des objets dont nous sommes entourés et qui avaient été créés pour notre jouissance. Hélas ! depuis que nous sommes pécheurs, ce qui est à nos yeux revêtu des formes et des couleurs de la beauté n'est souvent qu'une malédiction. Prenons-y garde et veillons sur nous-mêmes ; souvenons-nous que le péché ne s'offre pas toujours à nous sous son hideux aspect, mais le plus souvent sous des formes pleines de beauté, de charme, d'entraînement ; souvenons-nous que sous ces fleurs captivantes sont cachés le crime et l'enfer ; souvenons-nous que dès que ce qui plaît aux regards alimente la convoitise, il y a péché.
Eve était tombée avant d'avoir porté une main coupable sur l'objet de la défense de son Dieu ; elle était tombée, car elle avait ouvert son coeur à la convoitise. La tentation n'est pas le péché ; mais, dès que l'objet de la tentation est, comme pour Eve, « un désir aux yeux », ce désir est, devant Celui qui sonde les coeurs, le péché même. « Celui qui regarde une femme d'un oeil de convoitise a déjà commis adultère avec elle en son coeur », et il en est de même de tous les autres péchés. - Ainsi le mal qui est en l'homme, et qui a corrompu toutes ses facultés, fait de sa vue même, du plus utile et du plus admirable des organes dont Dieu ait orné son corps, de celui par lequel il pouvait se livrer avec enthousiasme à son amour du beau, - le mal qui est en nous en a fait le plus dangereux instrument de séduction ; ainsi le péché souille les dons de Dieu, les détourne de leur destination, flétrit tout ce qui est beau, et transforme nos plus nobles jouissances en impure convoitise des yeux !

Enfin, c'était aussi un élément de la perfection vers laquelle l'homme devait tendre que cet amour du vrai, ce besoin de connaître, cet élan vers le développement infini des facultés de son intelligence. Ce don l'eût conduit à de nobles résultats, à de pures jouissances, à un bonheur sans mesure, s'il l'avait exercé en Dieu, s'il l'avait employé à avancer dans la connaissance de ses oeuvres, de ses perfections adorables. Mais hélas ! ce beau don devint sous l'influence du tentateur un élément d'orgueil ; il y attacha sa promesse fatale et trop bien accomplie : Vos yeux seront ouverts, vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal.
Et avec cette parole s'insinue dans le coeur de la femme le doute, l'erreur, l'orgueil, une coupable ambition qu'elle va satisfaire en foulant aux pieds la défense expresse de son Dieu. Oui, c'est encore hors de Dieu, c'est au prix de sa ruine et de celle de sa postérité qu'elle veut apprendre à connaître la nature du bien et du mal ! - Que ses enfants ont bien marché sur ses traces ! Quel usage l'homme fait-il de sa noble intelligence ? Quel est le but vers lequel le savant dirige les résultats de ses recherches, de ses travaux, de ses veilles ? vers Dieu, ou vers le monde ? vers la gloire de Dieu, ou vers la gloire qui vient des hommes ? à son avancement dans la connaissance et l'amour de Dieu, ou à la satisfaction de son orgueil et de sa vanité ?
La Parole divine a prononcé : « II n'y en a point qui cherche Dieu, ils se sont tous égarés. »
Voyez le jeune homme, voyez la jeune personne, chez qui les dons de l'intelligence viennent de naître, mais pour qui tout dans le monde et dans la nature est encore nouveau ; - quel est l'aliment dont ils nourrissent cette intelligence ? Dieu, ses oeuvres, ses perfections, son amour ? non, mais le monde et ses charmes, et ses séductions, et ses fausses joies, et les déceptions du coeur, et cette trame impure de la vie humaine où ils entrent bouillant de désirs, de curiosité d'espérance, brûlant de tout connaître, ambitionnant tout excepté Dieu et sa vérité, et n'arrivant jamais qu'à un sentiment de vide et d'amertume, misérable fruit de l'orgueil de la vie !

Telle est, mes frères, l'histoire du premier péché, et l'histoire de tous les péchés de l'homme. - Tels sont les attraits qui séduisirent Eve, et les degrés par lesquels elle se précipita dans la ruine. Persuadée par « le père du mensonge » que le fruit de l'arbre « est bon, » elle y attache un regard de convoitise, puis elle désire connaître le mal. - Dès lors le mal est consommé ; - les barrières de la crainte, de l'amour, de la reconnaissance, de la soumission sont tombées avec sa foi.....
Elle prit du fruit et en mangea ! Ce n'est plus là que la manifestation matérielle du péché qui déjà existait dans son coeur. Un apôtre a tracé pour notre instruction le chemin que parcourut Eve, et que parcourent tous les pécheurs : « Chacun est tenté quand il est attiré et amorcé par sa propre convoitise (ses désirs) ; puis quand la convoitise a conçu elle enfante..... le péché ; et le péché, étant consommé, produit ..... la mort ! »

Mais hélas ! ce n'est pas tout. Il est de la nature du péché de se communiquer de proche en proche et de propager ses ravages comme la gangrène. Eve est tombée, mais non pas seule ; elle entraîne dans sa ruine le compagnon de sa vie qui partage ainsi sa désobéissance et son péché. - Dès qu'elle eut manqué le but de son être envers Dieu, elle ne tarda pas à devenir infidèle à sa destination à l'égard de son mari.
Dès que l'âme se détourne de Dieu, dès que le coeur n'est plus droit devant lui et sanctifié par sa communion, tous les rapports entre les hommes participent à cette corruption. Les affections les plus intimes, les rapports les plus doux et les plus légitimes se tournent en pièges. Souvent alors nous sommes assez malheureux pour communiquer à ceux que nous aimons le plus le poison qui est dans notre coeur ; premier et amer châtiment de notre infidélité ! - Ainsi Eve devait être pour Adam une compagne, une aide ; elle devait embellir pour lui le séjour d'Éden ; ajouter le charme de sa présence au bonheur dont il jouissait, et partager l'amour pur qui les unissait l'un à l'autre et tous deux à leur Créateur. Ils devaient, en un mot, trouver l'un dans l'autre un doux encouragement à la fidélité, à l'obéissance envers leur Dieu. Telle avait été leur union jusqu'au moment fatal où le péché entra dans le coeur de la femme.
Mais dès lors, - ô amertume et malédiction du péché ! - dès lors Eve devient la séductrice de son mari, qui, à son tour, fut le complice du crime de sa femme.
Je ne sais si elle est vraie l'idée ingénieuse et douce du chantre d'Eden, qu'Adam ne se dévoua au crime et à la misère que pour partager le sort de sa compagne bien aimée, quel qu'il dût être ; mais, quoi qu'il en soit, son péché n'en est pas moins grand. Le mal n'en est pas moins maudit et la tentation n'entraîne pas moins la ruine, pour nous être présentée par une main qui nous est chère.

Hélas ! pourquoi faut-il que la vie humaine reproduise si souvent, jusque dans ses moindres détails, la scène de séduction et de péché qui se passa en Éden ! Combien d'êtres unis par les plus doux liens, d'êtres qui devaient trouver les uns chez les autres un appui, un encouragement à la fidélité et a l'amour de Dieu, une consolation dans les peines et les épreuves de la vie, un instrument de bénédiction entre les mains de leur Père, n'ont trouvé les uns dans les autres, au lieu de tout cela, qu'une occasion de péché, qu'une séduction, et se sont entraînés mutuellement dans l'abîme de désobéissance et de malheur qu'ils devaient se faire éviter !
Ah ! qu'il est infortuné et coupable celui qui devient ainsi l'artisan des maux de son compagnon de voyage ! Est-il moins malheureux celui qui, ou par amour du péché, ou par une criminelle déférence pour un être aimé, devient infidèle à son Dieu, « aime et sert la créature au lieu du Créateur qui est béni éternellement ».

Mes frères, vous que Dieu a unis sur la terre par les liens du sang ou de l'amitié ; vous surtout, époux chrétiens, évitez l'un et l'autre de ces malheurs et l'un et l'autre de ces crimes. Que le souvenir des péchés d'Éden soit gravé dans votre âme ! Vivez pour vous aimer ; mais soyez, avant tout, fidèles à votre Dieu ; que son amour sanctifie votre amour ; que l'obéissance à ses lois soit le fondement de votre affection, bien convaincus que tout attachement dont Dieu n'est pas le lien n'est qu'une source de souillure et d'amertume.

Il est donc tombé le roi de la création, celui qui était l'image de Dieu ? Il vient de commettre, de concert avec la compagne que Dieu lui avait donnée, le premier péché qui ait souillé la terre qu'il habitait !

Mais, demandera-t-on, est-ce donc là tout le péché d'Adam, ce péché dont il est tant parlé, qui remplit une si grande place dans la théologie des Juifs et des chrétiens, ce péché sur lequel on a écrit tant de volumes et auquel on attribue tous les malheurs de l'humanité ? Les conséquences d'un péché en lui-même si insignifiant peuvent elles donc avoir été si terribles ?

Cette objection vient uniquement de notre ignorance sur la nature du péché. Nous ne connaissons le bien et le mal dans leur vraie nature que par la Parole de Dieu.
Ce que cette Parole nous ordonne est bien ; ce qu'elle nous défend est mal, d'une manière absolue et indépendamment de l'objet du bien et du mal. Telle est, pour des chrétiens, la seule règle de morale.
En effet, Dieu veut régner en souverain sur le coeur et sur la volonté de toutes ses créatures douées d'intelligence et d'affections, comme il règne par sa puissance sur toute l'étendue de cet univers. Mais par quel moyen Dieu manifeste-t-il à sa créature sa volonté souveraine ? Uniquement par sa Parole. Dès qu il a parlé l'homme connaît son devoir ; sa dépendance et sa responsabilité lui sont clairement révélées. - Or s'il obéit à cette parole, s'il reste dans la dépendance, s'il met sa responsabilité à couvert, il fait le bien, il est dans l'ordre. Mais si, foulant aux pieds cette parole, il tend à une orgueilleuse indépendance, renie sa responsabilité, viole l'ordre établi, il entre alors dans la vie du crime et de la révolte, il devient coupable de lèse-divinité, il brise les liens qui l'unissaient à son Dieu, il se soustrait à la domination de son Créateur pour se livrer à une autre domination, celle d'un monde ennemi de Dieu, ou du démon ennemi de l'homme, ou de son égoïsme et de son orgueil qu'il met sur le trône de son coeur où Dieu devait régner.

Ainsi le péché est dans le coeur, dans la volonté, indépendamment de l'objet du péché. Telle chose pourrait me paraître en elle-même indifférente ou même bonne, que je dois m'en abstenir avec crainte si Dieu y a placé l'anathème de sa Parole.

Tel est, mes frères, le péché d'Adam. Il ne faut pas en chercher la cause dans l'arbre de la connaissance du bien et du mal ; il n'y eut là que l'occasion du crime, parce que Dieu, pour des raisons à nous inconnues, y avait attaché son commandement.
Il faut chercher le péché dans le coeur et dans la volonté de nos premiers parents. Voilà pourquoi je vous faisais observer que, dès qu'Eve avait conçu le désir de violer l'ordre donné, elle avait déjà péché, elle était criminelle.
Apprenez donc à connaître la nature du péché qui est en abomination aux yeux de Dieu. Souvenez-vous que « Dieu n'a point égard à ce à quoi l'homme a égard ; car l'homme regarde ce qui est devant ses yeux, mais l'Éternel regarde au coeur ». Écoutez l'apôtre Paul nous donnant en un seul mot la définition du péché d'Adam. Il consiste dans la DÉSOBÉISSANCE d'un seul homme par lequel plusieurs ont été rendus pécheurs.
La désobéissance, voilà le péché.
Aussi, remarquez que la tentation portait précisément sur ce point, comme nous l'avons vu dans notre précédente méditation. Le mal eut lieu en Eden, au moment où nos premiers parents cessèrent de croire l'ordre de Dieu et la sanction de mort qu'il y avait attachée.
L'incrédulité fut la racine de tout mal moral ; elle conduisit à l'orgueil et au mépris de la loi divine, puis à la violation matérielle de son ordre. Sachez-le donc, ô vous qui vivez dans un éloignement habituel de Dieu, vous dont le coeur, et la volonté, et les affections, et les pensées ne sont pas habituellement sous la domination de Dieu et de sa Parole ; sachez-le, fussiez-vous les plus honnêtes gens du monde, ne connussiez-vous jamais aucune violation expresse des lois de Dieu, vous êtes pourtant, par le seul fait que votre coeur s'est détourné de lui et de la soumission à sa Parole, dans un état habituel de péché ; chaque instant de votre vie et chaque battement de votre coeur est un péché !
Loin donc de nous étonner de la rigueur avec laquelle est puni le péché d'Adam, parce qu'il nous paraît peu important en lui-même, tirons de là une conséquence tout opposée ; apprenons, par le terrible châtiment de ce péché, ce que sont aux yeux de Dieu ces actions que dans notre ignorance nous appelons de petits péchés, des fautes légères. des faiblesses. Ah ! c'est parce que nous sommes nés dans la corruption que nom considérons ainsi des péchés commis contre la Majesté du Très-Haut, contre la sainteté de Dieu. Quoi ! faut-il donc que nos infractions de la loi sainte de l'Éternel soient de grands crimes, même aux yeux des hommes, pour mériter son indignation et les coups de sa justice ?

Mais, au reste, assez de raisonnements. Disons avec Calvin que Dieu seul est juge compétent de ce péché commis en Eden, parce que lui seul en a connu la vraie nature et l'énormité. Il l'a puni des plus terribles châtiments. Sa Parole fait remonter a ce péché l'origine du mal qui souille la terre et des misères sous lesquelles elle gémit. Et qui est-ce qui osera élever vers le ciel un front superbe et dire à Dieu « qu'il n'est pas juste quand il parle et trouvé pur quand il juge ( Ps. 51.) ? »
O Éternel ! Éternel notre Dieu ! du sein de la misère et de l'amertume du péché nous nous écrierons plutôt : « Tu es juste, juste quand tu condamnes, juste quand tu maudis ! »
Loin de vous élever contre l'arrêt du Tout-Puissant, jugez de la grandeur du péché par la terrible grandeur de ses suites ! O jour affreux où le péché vint provoquer la justice du Saint des saints, souiller un monde pur, corrompre le coeur de l'homme fait pour aimer son Dieu, obscurcir de ténèbres la lumière céleste d'Éden, répandre par torrents sur une terre en deuil la malédiction et la misère ! - O Adam ! ô roi de la création ! il me semble te voir savourer l'amertume de ton péché, répandre des larmes de sang sur la perte de cette couronne d'innocence et de gloire, qui ornait ton front maintenant souillé et confondu !
Pour la première fois tu arroses de tes larmes cette belle terre d'Eden, que tu vas perdre sans retour avec la faveur de Dieu. Mais quels n'eussent pas été ta douleur et ton désespoir, si tu eusses pu voir toutes les générations futures, s'engouffrer dans l'abîme de souillure et de mort que tu venais de creuser, - si tu eusses pu voir à l'avance ce nuage infect de péché que chaque siècle fait monter vers les cieux, en témoignage de condamnation, - si tu eusses pu entendre les foudres de la justice divine retentir sur une terre jadis brillante d'innocence et de beauté, - si tu eusses pu entendre les sanglots et voir les souffrances et les malheurs de chaque génération d'hommes, - si tu eusses pu entendre « le gémissement de la création entière assujettie à la vanité », - si tu eusses pu voir les ravages et les désordres de ce péché qui ne trouve de remède que dans la mort du Fils éternel de Dieu, - si tu eusses pu voir ce Rédempteur charitable expirant sous les coups de la justice divine et dans les angoisses de la mort seconde, - si tu eusses pu entendre le retentissement de la trompette du jugement redoutable qui mettra fin aux choses présentes, - si tu eusses été témoin des tourments sans fin et sans mesure des réprouvés !....


Mes bien-aimés frères, je m'arrête devant ces abîmes ; nous avons assez parlé du péché d'Adam ; parlons de nos propres péchés.
Ah ! souvenons-nous que, si nous souffrons pour le péché qui souille la terre, c'est pour nos propres péchés que nous sommes condamnés. - Souvenons-nous que, si « par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, la mort a régné sur tous les hommes parce que tous ont péché ».
Tous ont péché ! Voilà ce que nous dit la Parole de l'éternelle vérité ; voilà ce que nous crie notre conscience ; voilà ce que proclame chaque regard que nous jetons sur notre vie. - Oh ! sentons, déplorons nos péchés avec autant de regret, de douleur, d'amertume et de repentance que dût en éprouver Adam lorsqu'il fut banni d'Éden. Pleurons sur nos misères ; - foulons aux pieds cet odieux orgueil qui voudrait nous les voiler, nous éloigner de la repentance, de l'humiliation, du sentiment de notre redoutable responsabilité. - Repoussons avec horreur l'insinuation du perfide ennemi qui voudrait nous dire : Vous ne mourrez nullement, et nous promettre, comme à Eve, la funeste récompense de l'orgueil et du mépris de sa loi. Humilions-nous tous ensemble devant notre Dieu ; puis....

O bonheur ! après vous avoir montré le mal, nous pouvons, de la part de Dieu, vous offrir le remède. - Heureux ministres de la nouvelle alliance, heureux messagers de la bonne nouvelle ; nous pouvons, nous devons diriger vos pensées et vos espérances. non plus vers Eden fermé et maudit, mais vers Golgotha, où meurt pour nous « le second Adam », où s'élève pour nous l'arbre de vie, où « le sang de Christ prononce pour nous de meilleures choses que le sang d'Abel ».
Là, mes frères, vous qui croyez au Fils pour avoir la vie, là succède pour vous la bénédiction à la malédiction, le pardon au châtiment, la vie à la mort. Écoutez cette substitution de la grâce au châtiment proclamée par la Parole de Dieu : « Car, si par l'offense d'un seul plusieurs sont morts, beaucoup plus tôt la grâce, qui est d'un seul homme, savoir Jésus-Christ, a abondé sur plusieurs. Car, comme par la désobéissance d'un seul homme plusieurs ont été rendus pécheurs, ainsi, par l'obéissance d'un seul, plusieurs seront rendus justes. Mais où le péché a abondé, la grâce a abondé par-dessus ; enfin que, comme le péché a régné par la mort, ainsi la grâce régnât par la justice pour conduire à la vie éternelle par Jésus-Christ, Notre Seigneur (Rom. 5, 15, 20.) ».

Aujourd'hui, aujourd'hui encore une autre voix s'élève dans ce temple pour nous proclamer cette douce et précieuse vérité. - Aujourd'hui le grand Réparateur du péché, Jésus-Christ s'offre lui-même à vous avec tous les fruits de son sacrifice et de sa mort, avec son pardon, les richesses de sa grâce, les trésors de la vie éternelle (2). Êtres immortels, hommes pécheurs, hâtez-vous ; tandis que la vie vous est offerte saisissez la vie ! Et pourquoi mourriez-vous, ô maison d'Israël ?

Grâces, grâces à toi, ô mon Dieu, de ce que tu as trouvé un remède si efficace à nos maux ! Grâces à toi de ce qu'au lieu de la condamnation et de la mort tu nous apportes la bénédiction et la vie ? Grâces à toi de ce que tu nous as tirés d'un abîme de misère pour faire de nous les objets de ton amour infini, les enfants de la dilection, les héritiers d'un éternel bonheur !


Table des matières

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MÉDITATION II. LA TENTATION


(1) Voir sur ces mots les notes exégétiques.
 
(2) Ce discours a été prononcé un dimanche de communion.

 

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