Commentaire sur
l'épître aux Romains
CHAPITRE III.
(suite)
24-26. Lequel Dieu, a établi de
tout temps pour être une victime de
propitiation, par la foi, en son sang, afin de
montrer sa justice par la rémission des
péchés
précédents, selon la patience de
Dieu ; Pour montrer, aussi, sa justice dans le
temps présent, afin qu'il soit
trouvé juste, et justifiant
celui qui est de la foi de
Jésus.
(1)
La doctrine de l'expiation, est ici clairement
établie ; la tolérance de Dieu
dans la rémission des péchés
précédents, est mise en opposition
avec sa justice, qui est déclarée,
dans le temps présent, par le pardon qu'elle
accorde dans le sang de Christ.
Le mot traduit par propitiation, signifie proprement le propitiatoire.
(2) L'Apôtre
l'applique ici au Christ et montre ainsi qu'il est
le vrai propitiatoire, qu'il est la
réalité de ce qui était
représenté dans l'ancienne alliance,
lorsque le grand prêtre d'Israël,
arrosait du sang des sacrifices, dans le jour des
expiations, le propitiatoire
où Jéhovah avait promis de se trouver
avec son peuple. Le pardon miséricordieux de
Dieu, accordé à Israël, lui
était donné du propitiatoire,
lorsqu'il était arrosé de sang sept
fois, ce qui signifiait la plénitude et la
suffisance du sacrifice qui était
demandé pour l'expiation des
péchés : C'est ainsi que dans la
nouvelle alliance, Dieu a établi Christ pour
être le propitiatoire, par la foi, en son
sang, ce qui fait voir clairement que si Dieu
n'avait point eu égard au sang de Christ,
versé pour les péchés des
hommes, il ne leur eût point pardonné
leurs fautes ; ainsi ceux qui vont à
Dieu pour chercher la miséricorde, par le
sang de Jésus-Christ, ceux-là
seulement trouveront la miséricorde et la
rémission des péchés pour la
vie éternelle, que nul n'atteint par un
autre moyen.
Comme il n'aurait pas été
nécessaire d'arroser le propitiatoire de
sang, si Dieu avait voulu seulement déclarer
sa miséricorde et non sa justice en
même temps, il est clair que ce
n'était ni la miséricorde ni la
repentance, mais le sang, et le sang même de
Christ qui était nécessaire pour
l'expiation du péché de
l'âme.
La sagesse divine avait réglé,
d'après cela, que Christ, le vrai
propitiatoire, serait arrosé de sang, et de
son propre sang, et que Dieu le demandait ainsi
pour montrer, non sa miséricorde mais sa
justice, dans la rémission des
péchés. L'Apôtre, en effet, ne
dit point, qu'en pardonnant les
péchés, Dieu a été
miséricordieux, mais qu'il a
été juste ; ce n'était
point la miséricorde, mais seulement la
justice de Dieu qui était un obstacle
à ce que les pécheurs fussent
justifiés à ses yeux ; car sans
doute, Dieu est aussi essentiellement juste et
saint, qu'il est bon et miséricordieux, et
c'est pour cela que les droits, non de sa
miséricorde, mais de sa justice, devaient
nécessairement être satisfaits, avant
que les hommes pécheurs fussent
délivrés de la malédiction de
la loi divine ; et comme ils étaient
incapables d'opérer cette satisfaction par
eux-mêmes, Dieu qui est riche en
miséricorde, a donné son propre Fils
pour la faire à leur place. Car Dieu a tant aimé le
monde,
qu'il a donné,
son Fils unique,
afin que, quiconque
croit en lui ne périsse
point,
mais qu'il ait la vie
éternelle. (Jean III. 16)
La vérité contenue dans les versets
dont nous nous occupons, c'est que Dieu a
donné la démonstration la plus claire
de sa justice, en établissant son Fils pour
être le vrai propitiatoire, par qui les
pécheurs ont accès auprès de
lui, par la foi en son sang. Cette justice aurait
pu paraître obscurcie, s'il avait avec tant
de longue attente souffert les péchés
des hommes, sans leur montrer
une preuve suffisante de sa haine pour le
péché. Le sacrifice de Christ,
affranchit la justice de Dieu du reproche qu'on
aurait pu lui faire, non-seulement de n'avoir pas
infligé sur-le-champ, la peine aux
pécheurs, (Eccl. VIII. 11) mais, au contraire, d'en avoir
reçu plusieurs dans sa faveur. (Act. XVII. 3. Héb. IX. 15) Si Dieu n'avait eu égard
à cette expiation future, ils auraient du
être tous punis immédiatement
d'après sa justice ; mais à
cause de cette propitiation, il différait
l'exécution de sa sentence, tous les hommes
étaient placés sous une dispensation
de miséricorde, et plusieurs la recevaient.
La tolérance de Dieu dans la
rémission des péchés
passés, est donc mise en opposition avec sa
justice, qui était alors manifestée,
par le mode même de pardonner ; de sorte
que Dieu montrait qu'il agissait avec la justice la
plus rigoureuse, en même temps que les
pécheurs étaient justifiés par
leur croyance en Jésus.
Ainsi en remettant la punition justement
méritée par les péchés
passés, Dieu n'a eu égard, ni
à la repentance, ni aux bonnes œuvres
de ses serviteurs qui ne pouvaient satisfaire sa
justice, ni aux sacrifices légaux, qui ne
pouvaient ôter
le péché ; il n'a considéré que le
divin Garant de la nouvelle alliance et l'expiation
qu'il a consommée. C'est pour cela que dans
la plénitude des temps, ce sacrifice fut
offert, cette justice introduite, ce mode de
justification publié dans le monde, afin que
Dieu fit connaître qu'il était un
gouverneur juste et droit, quoique cependant il
justifiât ceux : qui croyaient en
Jésus.
27.
Où, est donc le sujet de se
glorifier ? Il est exclus. Par quelle
loi ? Est-ce par la loi des œuvres ?
Non. Mais par la loi de la foi.
Paul a démontré quelle est la seule
voie par laquelle l'homme puisse être Juste devant Dieu.
(Job IX. 2)
Il a prouvé que ce n'était pas par sa
propre justice par la loi, mais par celle qui est
de la foi en Christ, la justice qui est de Dieu par la foi.
(Phil. III. 9) II peut bien dire à
présent : où est donc le sujet de se
glorifier ? Il est exclus. Par quelle loi, d'après quelle
doctrine, quelle règle de jugement, est-il
exclus ? Est-ce par celle des œuvres.
Non, car si les œuvres étaient admises,
fut-ce dans le plus faible degré, pour
opérer, pour avancer ou pour aider la
justification de l'homme, il pourrait avoir en
quelque proportion, sujet de se glorifier ; il
lui ferait permis de le faire pour avoir accompli
une loi qui exigerait des œuvres comme
condition de la justification, parce que si l'homme
est justifié par une loi, il doit lui avoir
obéi parfaitement, et il aurait le droit de
s'en glorifier. Mais non ; ce droit est exclus
parce que la justification est reçue par la
foi, et qu'il est clair, qu'avoir cru un
témoignage, n'est pas un sujet de se
glorifier.
28-29.
Nous
concluons donc que l'homme est justifié par
la foi, sans les œuvres de la loi
Dieu
est-il
seulement le Dieu des Juifs, ne l'est-il pas des
Gentils ? Certes, il l'est aussi des
Gentils, car il y a un seul Dieu qui
justifiera par la foi la
circoncision, et l'incirconcision aussi au moyen
de la foi.
L'Apôtre tire
de tout ce qu'il dit jusqu'ici, cette conclusion
claire et incontestable, que l'homme est justifié par la foi
sans les œuvres de la loi, et que, comme Dieu est
également le Dieu des Juifs et des Gentils,
(3) les uns et les
autres sont justifiés d'une même
manière.
Les uns et les autres le seront par la foi, ou au
moyen de la foi, ce qui veut dire la même
chose : c'est par la foi, au moyen de la foi,
et non pour la foi ni à cause de la foi, que
l'homme reçoit la justice de Christ, pour
lui être comptée comme la cause
mémoire pour laquelle il est
justifié.
Dans différentes parties de
l'écriture, il est dit que les hommes sont
justifiés , ,, en latin fide, ex fide, per fidem,
mais on ne trouve
nulle part, propter
fidem, c'est-à-dire, que l'on est
justifié par
la foi, au
moyen de la foi, dans la
foi, mais non à cause de
la foi.
En matière de justification, la foi n'est
considérée ni comme un acte
d'obéissance, ni comme un principe de
l'obéissance future, mais comme
établissant entre Christ et le
pécheur, une relation qui rend convenable
que le fidèle obtienne son pardon et qu'il
soit justifié pour l'amour de la justice et
de la rançon du Sauveur, au lieu que celui
qui ne lui est point uni, reste sous la
condamnation.
C'est la loi de la
foi, c'est la
règle de la conduite de Dieu envers les
croyants, dans la justification, car tout le plan
du salut procède sur ce principe,
qu'aucune chair ne se
glorifie devant lui. (I. Cor, I. 27-31)
Ainsi la justification devant Dieu ne vient
d'aucune chose que l'homme fasse ou puisse faire.
Elle est de tout point séparée de la
loi, on ne peut l'obtenir par cette dernière
ni par aucune de ses œuvres. Tout sujet de se
glorifier est entièrement exclus, ce qui ne
serait point, si quelque chose de ce que fait
l'homme afin de l'obtenir, pouvait lui être
de quelque utilité pour cela. « Je
suis persuadé, dit un auteur ( après
avoir cité le verset 28
dont nous nous occupons, Rom. IV. 5. et XI. 6.
Gal. II. 16. Eph. II. 8-9. et Tite III. 5.) que tout homme sans
préjugés, dont
l'imagination ne ferait
point préoccupée par des idées
et des distinctions, dont on ne peut trouver la
moindre trace ni dans les textes ci-dessus, ni
ailleurs, déciderait que la loi,
dans tous les sens de ce mot, que les
œuvres
de quelque
espèce qu'elles soient, en quelque temps et
par quelques moyens qu'elles soient accomplies,
qu'elles soient faites par des croyants ou des
pécheurs, ne peuvent, dans aucun sens,
servir à la justification devant Dieu, mais
au contraire, en sont exclues de toutes les
manières et dans tous les sens. S'il en est
ainsi c'est la seule justice de Christ, à
laquelle nous puissions avoir recours, et sans elle
nous ne pouvons jamais parvenir à la
justification. »
31.
Anéantissons-nous donc la
loi par la foi, non sans doute, mais au contraire nous
affermissons la loi.
L'Apôtre ayant clairement
énoncé la doctrine de la
justification par la foi seule, prévient une
objection qu'on pourrait lui faire. Cette
objection, qu'il réfute encore pleinement
dans les chap. VI,
VII,
VIII a
été constamment
répétée jusqu'à nos
jours par ceux qui ne veulent pas se soumettre à la justice
de Dieu :
(Rom. X. 3)
Si vous enseignez que les hommes sont
justifiés dans une voie dont les œuvres
sont exclues comme ayant une part quelconque
à la justification, vous anéantissez
la loi.
L'Apôtre rejette avec horreur cette
conclusion, et affirme au contraire, que par cette
doctrine il affermit
la loi.
La doctrine de la
justification par la foi seule, établit la
loi, en ce qu'elle la maintient dans tous ses
commandements, et dans toute sa fonction. Il est
clair que toute loi humaine et divine demande une
obéissance parfaite. « Maudit soit celui qui ne
persévère point dans toutes les
choses qui sont au livre de la loi pour les faire.
(Gal. III.10) Or quiconque aura gardé toute
la loi, s'il vient à pécher en
un seul point,
il est coupable de
tous. » (Jacq. III. 10) Ces déclarations s'appliquent
à toute espèce de loi.
La loi de Dieu a
été violée par tous les
hommes, il faut savoir comment ils peuvent
être justifiés. Il est clair qu'ils ne
peuvent l'être par elle, puisqu'elle ne peut
en même temps justifier et condamner. Il est
évident aussi qu'ils ne peuvent être
justifiés sans un équivalent,
autrement la justice de Dieu serait compromise et
sa loi ferait anéantie.
C'est ainsi que les Sociniens anéantissent
la loi en disant que Jésus-Christ
n'était qu'un homme, et en niant par
conséquence l'imputation de sa justice et
l'expiation de son sacrifice.
Les Ariens qui disent que Jésus est la plus
haute et la plus excellente des créatures,
anéantissent aussi la loi.
Plus inconséquents que
les Sociniens, ils parlent d'une obéissance
et d'une expiation vicariale. Mais, si le Messie
était une créature, dès-lors
il est clair qu'il ne pouvait avoir dans son
obéissance ni dans ses souffrances, aucune
surabondance de mérite qu'il pût
transporter à l'avantage d'autres
êtres créés.
Tu aimeras le Seigneur
ton Dieu de tout ton cœur et de toute ta
puissance, doit
être le commandement donné à
tous les êtres intelligents. Aucune
créature, de quelque nature qu'elle soit, ne
peut faire davantage, et un amour qui serait
moindre que celui auquel sa force peut suffire, ne
peut être demandé ni accepté
par la justice divine.
Une créature ne peut jamais être, tout
au plus, qu'un « serviteur
inutile », qui ne fait que ce qu'il est
de son devoir de faire, et s'il lui avait
été permis de se mettre à la
place de ceux qui avaient transgressé la
loi, elle devait souffrir, pour elle-même,
toute la punition que la violation de la loi
exigeait pour satisfaction, et alors sa vie aurait
été perdue pour toujours.
Aucune, par son obéissance ou ses
souffrances, ne peut mériter l'acquittement
d'une autre.
Quand elles seraient acceptées pour elle,
leur insuffisance relativement aux autres,
resterait la même et la loi serait
anéantie, parce que la totalité de
cette obéissance, autant que ses forces
peuvent y suffire, est due par cette
créature pour elle-même, et dans la
situation où elle se trouve. Il est
évident par l'ancien Testament, qu'une
simple créature ne peut offrir à
Dieu, le vrai sacrifice ou cette expiation
réelle, dont les sacrifices ordonnés
autrefois n'étaient que la figure et
l'ombre. Nous y voyons que ces choses-là
n'étaient point regardées comme un
vrai sacrifice à Dieu, comme une vraie
satisfaction, qui, avant d'être offertes
à Dieu, lui appartenaient
déjà. D'où il suit qu'une
simple créature n'a rien à offrir
à Dieu qui puisse être
agréé par lui ; puisque tout lui
appartient déjà, et qu'elle n'a rien
qu'elle ne tienne de sa
libéralité.
Un autre classe d'hommes en reconnaissant la
divinité et la satisfaction du propre fils
de Dieu, soutient que l'homme est justifié
en partie par ses œuvres, et en partie par
l'œuvre de Christ, et voudrait ainsi partager
avec le Rédempteur, la gloire du salut.
Alors tout sujet de se glorifier ne serait plus
interdit à la créature qui a
violé la loi de Dieu et encouru sa
malédiction, son obéissance
souillée et imparfaite pourrait entrer pour
quelque partie dans sa justification, comme
l'imaginent les Ariens, et encore une fois, la
justice de Dieu serait compromise et sa loi
demeurerait anéantie.
Quelques personnes qui rejettent la doctrine de la
justification par la foi sans les œuvres,
insistent en alléguant que dans ce
chapitre, et en
général dans toute cette
épître , l'Apôtre ne parle pas
de la loi de Dieu en général, mais
seulement de cette alliance particulière qui
avait été faite avec Israël, et
surtout de la loi cérémonielle qui
était abolie avec toutes ses pratiques. On
verra par les remarques suivantes que cette opinion
n'est nullement fondée.
La première occasion, où la loi, sous
l'empire de laquelle le genre humain se trouve
placé, ait été
proclamée solennellement et confiée
à l'écriture, a été
lorsque le peuple Hébreu la reçut au
Mont Sinaï. Cette loi déclara alors,
quelle était la volonté de Dieu,
quels étaient les devoirs exigés de
l'homme ; cependant, comme elle était
mise sous la forme d'une alliance, certaines
parties en étaient adaptées aux
circonstances particulières dans lesquelles
se trouvait le peuple auquel elle avait
été délivrée et, eu
égard à ces circonstances,
n'étaient obligatoires que d'une
manière locale et temporaire.
Prise dans son ensemble, l'alliance avec
Israël devait s'évanouir dès que
son but serait rempli ; mais quoique cette
alliance, considérée comme un seul
tout, et même quelques-unes de ses parties ne
fussent que transitoires, une autre partie, et
cette partie était la principale, celle sur
laquelle tout le reste était fondé,
avait été établie pour avoir
une force perpétuelle. La loi donnée
à Moïse était divisée en
trois parties, morale, cérémonielle
et civile ou politique. Cette dernière,
particulière à Israël,
était l'application de la loi morale aux
circonstances spéciales dans lesquelles se
trouvait cette nation. Les statuts ou la loi
cérémonielle, quoiqu'ils eussent une
liaison avec la loi morale, n'étaient que
l'ombre de l'évangile, et cette ombre dut
passer quand la réalité parut,
(4) Mais
indépendamment de ces modifications de la
loi de Dieu, particulières à
l'occasion dans laquelle elle fut donnée, la
loi morale contenue dans les
Dix Commandements, formait une partie constituante
et la base de cette alliance. Les Dix Commandements
seuls émanés de la propre voix de
Dieu, et écrits avec son doigt sur les
tables de pierre, étaient
déposés dans l'intérieur de
l'arche, tandis que les autres parties de
l'alliance écrites par Moïse
étaient placées à
côté, comme prêtes à
être écartées.
La loi morale, étant ainsi consignée
dans l'alliance avec les Israélites, et
à laquelle étaient unies certaines
dispositions spéciales relatives aux
circonstances dans lesquelles ils se trouvaient,
n'était point particulière à
cette dispensation. Elle existait avant cette
alliance et devait, dans son essence, lui survivre
à jamais. Elle était écrite
originairement dans le cœur des hommes, et
avait été transmise par la tradition
orale depuis le commencement du monde. C'est pour
avoir violé cette loi que Caïn fut
banni de la présence de Dieu, (Gen. IV. 10. 12. 16) que le genre humain fut
détruit par le déluge, (Gen. VI. 5. 11) et que le feu du ciel avait
détruit les cités de la plaine.
(Gen. XVIII. et Ps. XI. 5. 6)
C'est la violation de cette loi, obligatoire pour
tous, que Paul reprochait aux Gentils et aux Juifs
séparément, et à tous les
hommes sans distinction, lorsqu'il leur fait voir
ensuite qu'ils sont tous également coupables
sous différentes formes. (Rom. I. 19-32. II. 17-20.
III. 9-19)
C'est de cette loi que Paul, parlant des
païens, disait : « ils montrent
que l'œuvre de la loi est écrite dans
leurs cœurs. » (Rom. II. 15) C'est par la violation de cette loi
morale qu'il montre d'après les anciennes
écritures, que personne n'est juste, que
toute bouche sera fermée, et que tout le
monde est coupable devant Dieu. (Rom. III. 3-20)
C'est cette même loi qui l'avait convaincu
qu'il était lui-même pécheur,
parce qu'elle a dit, tu ne convoiteras
point, commandement
qu'il reconnaît être saint, juste, bon
et peu après
spirituel.
(Rom. VII. 7. 12. 14)
C'est cette loi qu'il
recommande avec tant de force aux croyants comme
règle de leur conduite, dans les cinq
derniers chapitres de cette épître,
aussi bien que dans le 6. e lorsqu'il leur dit
qu'étant unis à Jésus qui a
porté la malédiction que la loi avait
prononcée, ils sont affranchis de sa
condamnation. Il fait même, chap. XIII, une énumération
particulière de quelques-uns de ces
commandements. (Rom. XIII. 8. 9) C'est le développement de
cette loi que Jésus-Christ explique dans son
sermon sur la montagne, où il déclare
que quiconque violera le moindre de ses
commandements, sera le moindre dans le royaume des
cieux, et que celui qui les pratique et celui qui
les garde sera appelé grand, non pas sous
l'économie de la loi Mosaïque, mais
dans le royaume des
cieux, c'est-à-dire, dans
celui du Messie : et le
sommaire de toute cette loi, tel qu'il est
écrit, c'est : tu aimeras le Seigneur ton Dieu de
tout ton cœur, de toute ton âme et de
toute ta pensée, et ton prochain comme
toi-même. (Matt. XXII. 39)
Ainsi ce que l'Apôtre entend par le mot de
Loi ;
cette loi dont les
œuvres, qualifiées ici et ailleurs
d'oeuvres de
justice, sont exclues
de tout effet pour la justification ; cette loi est la règle
universelle des devoirs, qui entrait dans la
dispensation Mosaïque et qui est contenue dans
les livres de l'ancien Testament. Ce que nous
venons de dire établit suffisamment que les
paroles de l'Apôtre ne se rapportent ni
à la loi cérémonielle des
Juifs, ni à aucune autre chose qui fût
d'une obligation temporaire ou particulière
à cette économie. Nous allons encore
le rendre plus évident par les remarques
suivantes.
I. Paul se sert du mot de Loi dans
divers sens à cause de l'insuffisance du
langage humain, cela est vrai ; mais la
liaison de la phrase avec celles qui
précèdent et qui la suivent doit
montrer en général, dans quel sens il
doit être entendu.
Quand il s'exprime ainsi, tout ce que dit la loi,
v. 19, il
est évident qu'il entend les Saines
Écritures en général, puisque
les citations qu'il fait ne sont pas prises dans la
loi de Moïse, et la même expression est
employée souvent ailleurs pour
désigner le corps entier de l'ancien
Testament.
Lorsqu'il dit en parlant des Juifs, qu'ils
sont sous la
loi, il est clair
qu'il entend la dispensation légale qui les
distinguait des Gentils ; mais lorsqu'il dit,
par loi est la
connaissance du péché,
il ne peut entendre
que la loi morale dont l'extension, la
spiritualité et l'excellence montrent
quelles sont les choses criminelles, et combien est
horrible le péché, tandis que la loi
cérémonielle, quoiqu'elle eut un
rapport emblématique au péché,
donnait plutôt la connaissance du salut en
préfigurant d'avance par les types,
l'effusion du sang de l'expiation et la
communication de la grâce sanctifiante par
laquelle le
péché est détruit.
II. La difficulté d'obtenir la
justification par la loi de Moïse, ne pouvait
être plus grande que celle de l'obtenir par
cette loi universelle sous laquelle tous les hommes
sont placés : ce n'était pas
à cause de ce qu'ordonnait la loi
cérémonielle que les
Israélites ne pouvaient être
justifiés par la loi. L'observer dans toutes
ses parties, n'offrait point à la nature
humaine cette difficulté qu'elle trouvait
dans l'observation de la loi morale.
À plusieurs époques de leur histoire,
on voit que les Israélites étaient
scrupuleusement exacts à accomplir
quelques-unes des observances
cérémonielles. Dans les messages qui
leur furent adressés par les
prophètes, le poids des accusations tombait
surtout sur les violations qu'ils faisaient de la
loi morale ; tandis que l'on
convenait que comparativement,
les rites cérémoniels
n'étaient point négligés.
(Esa. I. 10-17).
III. Dans ce chapitre, depuis le
v. 22,
Paul fait contraster la justification par la foi,
avec la justification par les œuvres, de telle
manière que toute occasion de se glorifier
est détruite ; or, certainement,
l'occasion de se glorifier serait aussi peu
détruite ; si les hommes pouvaient
être justifiés par la pratique des
œuvres de toute autre loi, que s'ils pouvaient
l'être par leur obéissance à
telle loi particulière du code de
Moïse.
IV. La raison que l'Apôtre donne
pour attester que les hommes ne sont pas
justifiés par la loi est celle-ci :
par la loi est la
connaissance du péché.
Mais cela
n'était pas particulier à l'alliance
avec Israël : car il prouve, comme nous
l'avons vu, que tous les hommes sont
pécheurs, non-seulement en citant la loi
écrite et en se rapportant à ses
préceptes d'éternelle obligation,
mais encore il en appelle à leur conscience,
de sorte que lorsqu'il parle dans ce chapitre de
l'impossibilité où se trouvent les
hommes d'être justifiés par la loi, il
entend la loi en général,
c'est-à-dire la loi universelle de Dieu,
sous quelque forme qu'elle soit, écrite dans
le cœur des hommes, ou délivrée
par la voix de Dieu sur le Mont Sinaï. Aussi
on ne voit jamais dans ce discours de Paul,
d'opposition entre les œuvres morales et
cérémonielles, mais seulement entre
les œuvres de la loi (5) et la foi.
V. L'exemple de la justification
d'Abraham, par laquelle Paul commence son
quatrième
chapitre, et qu'il
amène pour démontrer
complètement sa proposition, réfute
absolument l'opinion qu'en parlant de la loi et des
œuvres, il n'ait voulu parler que de ce qui
appartenait à la loi Mosaïque, puisque
Abraham était justifié par la foi et
non par les œuvres, plusieurs siècles
avant la naissance de
Moïse.
VI. Enfin, l'Apôtre dit, dans le
verset dont nous nous occupons, que par sa doctrine
de la justification par la foi et non par les
œuvres de la loi, celle-ci n'est pas
anéantie, mais qu'elle est au contraire
établie. Il montre par-là qu'il ne
s'agit nullement de la loi
cérémonielle ou de la dispensation
légale qui était anéantie
parce qu'elle avait rempli son but. C'est ce qu'il
affirme expressément dans plusieurs lieux de
ses écrits.
Lorsqu'il avertit les églises de la Galatie,
de l'erreur où elles étaient de
chercher, la justification, dans l'observation de
la loi de Moïse, il montre que le dessein dans
lequel elle avait été
instituée est accompli et parle de ses
observances cérémonielles comme
d'éléments faibles et
misérables, (Gal. IV. 9) qui étaient alors inutiles et
abrogés. Il écrit dans le même
sens aux églises de Corinthe et de Colosses,
(II. Cor. III. 7-13. Col. II. 14) et il prouve que l'alliance avec
Israël était surannée et abolie,
parce qu'elle n'avait d'autre but que de conduire
à la perfection, (Héb. VI. 1) introduite par le Messie :
c'est l'objet de l'épître aux
Hébreux. II répète trois fois
dans le passage de l'épître aux
Corinthiens, que nous venons de citer, que la loi
de Moïse est anéantie, se servant du même mot qu'il
emploie ici, pour dire que sa doctrine
n'anéantit pas la loi, mais qu'elle
l'affirme.
Dans le fait, la doctrine de la foi honora et
accomplit la loi cérémonielle et
montra son véritable but et celui de toute
la dispensation Mosaïque, mais ce
n'était que pour mener à son
abrogation. Au contraire la loi morale fut
pleinement établie, environnée
d'honneur et d'autorité, tant relativement
à ses préceptes qu'à sa
sanction, par la parfaite obéissance et les
souffrances propitiatoires du Fils de Dieu ;
de cette sorte que son autorité immuable,
son excellence et son équité eussent
été moins pleinement
confirmées, quand tout le genre humain
aurait eu pour elle la plus parfaite
obéissance, ou par la destruction
entière de tous les transgresseurs.
D'autres personnes en admettant que c'est de la loi
morale et
universelle que parle
l'Apôtre dans le 27e verset, lorsqu'il conclut que l'homme est
justifié sans les œuvres,
prétendent qu'au lieu de celle-là,
une autre loi mitigée a été introduite par
l'évangile, que celle-ci. est adaptée
à l'imperfection et à la faiblesse de
l'homme, et que suivant que l'homme observerait ou
transgresserait ses préceptes, il serait
justifié ou condamné. Ces
personnes n'insistent point sur
l'abrogation totale de la loi,
ce qui serait le moyen le plus prompt de
résoudre leurs difficultés. Elles
supposent que ce qui est abrogé, c'est
l'obligation qui résultait de la loi de
l'accomplir toute entière.
Elles pensent, en conséquence, qu'elle
oblige à l'obéissance, mais non pas
à une obéissance absolument exempte
de péché, et elles attribuent aux
mérites et à l'obéissance de
Christ, cet adoucissement dans la rigueur de
l'observation de la loi. Sur ce fondement, une
obéissance imparfaite est acceptée
comme si elle était complète, la
puissance de la loi pour demander une soumission
entière et absolue est détruite et
cette mitigation étant un effet de la
justice de Christ, on peut dire dans ce sens
qu'elle nous sera imputée.
Ce sont des fictions de l'imagination des hommes.
Elles n'ont aucun fondement dans
l'expérience des fidèles, qui sont
convaincus par leur conscience, qu'ils
pèchent toutes les fois qu'ils manquent en
quelque chose que ce soit à
l'accomplissement de la sainte loi de Dieu, et qui
ne cherchent de secours que dans la
médiation de Christ, qui est, fait de la
part de Dieu, justice pour eux. On ne trouve point
non plus dans les Saints livres la plus petite
indication de ce relâchement de la loi ;
il y est beaucoup parlé de la
délivrance de la malédiction de la
loi, encourue par les hommes, mais il n'y a pas un
mot qui indique que son pouvoir obligatoire ait
été affaibli. Cette doctrine est
contraire à l'écriture, où il
est dit, non que la loi doit être abolie,
mais qu'elle sera confirmée, non qu'elle est
anéantie, mais qu'elle est affermie, et
où l'on nous enseigne que sa justice doit
être accomplie en nous.
La loi de Dieu est sous tous les rapports
adaptée aux créatures qui vivent sous
son autorité ; cette loi est sainte,
juste et bonne et ne demande rien aux hommes
au-delà de ce qu'il est de leur devoir
d'accomplir. Ses commandements sont d'aimer Dieu de
tout notre cœur, de toute notre âme et
de tout notre pouvoir, et notre prochain comme
nous-mêmes : ils sont exactement
mesurés et établis d'après nos
facultés.
Une, Loi juste ne peut
demander davantage, et ne peut demander moins.
Mais ce que les
personnes, dont nous parlons, entendent par
l'imperfection et la faiblesse des hommes, est une
incapacité réelle et naturelle
d'obéir à la loi de Dieu, tandis que
ce que les écritures désignent par
ces expressions, n'est autre chose que leur
dépravation et leur inclination naturelle au
péché. La faiblesse de l'homme
relativement à la loi, consiste dans la
haine de Dieu et l'amour du péché.
Tel est le point de vue sous lequel les
écritures le représentent toujours,
et en même temps qu'elles pourvoient à
remédier
complètement à cet
état, elles n'atténuent ni
n'affaiblissent nulle part l'idée de sa
dépravation, à quelque faible
degré que ce puisse être.
Paul déclare dans le chap. V,
que lorsque les personnes dont il parle,
étaient sans
force, Christ
était mort pour elles. Mais en examinant la
liaison de ce terme, sans force, avec le reste de son discours, il nous
sera aisé de découvrir la nature et
la cause de cette faiblesse. Or, au même
instant, il caractérise les personnes
auxquelles il applique ces paroles par les noms
d'impies, de
pécheurs, d'ennemis de Dieu. (Rom. V. 6-10) C'est toujours dans ces termes que
les écrivains sacrés parlent de ceux
que certains nomment dans un but différent
et pour les excuser, faibles et imparfaits.
Puis donc que ce
défaut de force est un obstacle réel
à l'accomplissement des actions saintes,
c'est manifestement une faiblesse qui est
entièrement morale, et qui est
tout-à-fait distincte des défauts de
nos facultés naturelles. Mais si cette
incapacité morale devient la mesure des
obligations des hommes, ils ne doivent
dès-lors remplir leur devoir qu'autant
qu'ils y ont de l'inclination : doctrine qui
conduirait à un système d'antinomies
les plus grossières.
Nous observerons en second lieu, que l'introduction
d'une loi mitigée est absolument une
fiction. Que ceux qui soutiennent cette idée
en fournissent des preuves. Où
trouveraient-ils cette loi imparfaite,
coordonnée à l'imperfection
humaine ? Sera-ce dans le sermon du Sauveur
sur la montagne où, après avoir dit
qu'il ne venait pas détruire la loi, mais
l'accomplir, il menace celui qui viole le moindre
de ses commandements, et dit à ses
disciples, soyez
parfaits, comme votre Père qui est dans les
cieux est parfait ? (Matt. V. 48) En trouveront-ils la moindre trace
dans les écrits des apôtres qui ont
été envoyés et commis par le
Seigneur, pour enseigner à ses disciples
à observer tout
ce qu'il leur avait
commandé ? (Matt. XXVIII. 20)
En faisant une alliance particulière avec la
nation d'Israël, qui était en
général un peuple charnel, plusieurs
choses qui n'avaient pas été permises
dès le commencement, le furent aux Juifs
à cause de la dureté de leur
cœur. (Matt. XIX. 8. 9) Mais Jésus-Christ en
établissant le nouveau royaume, et en
confirmant la nouvelle alliance dont il était le sacrificateur,
non selon la loi du commandement charnel, mais
selon la puissance de la vie
impérissable,
(Heb. VII)
a magnifié la loi de Dieu, l'a rendu
honorable, (Esa. XLII. 21) et a exposé ses commandements
de la manière la plus étendue.
Si les partisans de cette loi que l'on suppose
mitigée, et par laquelle ils espèrent
qu'ils seront justifiés, attendu que
leur obéissance sera, ce
qu'ils appellent sincère quoique
imparfaite ; si ces personnes ne peuvent
trouver sur quoi cette doctrine est fondée,
il est inutile de les presser d'établir ce
qu'est cette loi, quels sont les commandements
qu'elle prescrit, et les dispenses qu'elle accorde,
d'en donner enfin un abrégé qui
indique qu'elle est la quantité totale
d'obéissance qu'une demande pour être
satisfaite. Il est certain que quoique ceux qui se
servent de leur raison pour juger et non pour
interpréter les écritures, puissent
avoir été assez égarés
par leurs raisonnements pour adopter une pareille
fiction, il faut que leurs consciences soient
cautérisées ( I Tim. IV. 2) comme par le feu, si elles sont
satisfaites par une telle obéissance. La
conscience vengera les droits de la parfaite loi de
Dieu, et les accusera en dépit de leurs
vaines tromperies. « Si la loi eût
été donnée pour pouvoir
vivifier, véritablement la justice serait de
la loi. Mais l'écriture a montré que
tous les hommes étaient pécheurs,
afin que la promesse par la foi en
Jésus-Christ fut donnée à ceux
qui croient. » (Gal. III. 21, 22)
On voit par là que cette nouvelle loi qui ne
demande qu'une obéissance sincère
quoique imparfaite, comme condition de la
justification, suivant le système de
plusieurs personnes, anéantit ensemble la
loi et l'évangile, et nous conduit à
une règle de conduite, incertaine, nouvelle
et inintelligible, que chacun interpréterait
suivant ses propres inclinations. Elle introduit
à la fois et l'orgueil Pharisaïque et
la licence la plus opposée à la loi.
Cependant cette notion vague et contraire aux
écritures, est si commode pour assoupir la
conscience et la réconcilier avec une vie
mondaine, elle est tellement d'accord avec
l'aversion naturelle au cœur humain, tant pour
la sainteté de la loi, que pour la doctrine
humiliante de l'évangile, que
peut-être elle égare plus d'esprits
que tout autre faux système. C'est un fait
constant, que plus les hommes cherchent dans leurs
connaissances, des moyens de pallier leurs fautes,
plus ils s'égarent relativement à la
grâce de notre Seigneur.
Il est vrai, d'un autre côté, que
parce que l'incrédulité produit dans
les hommes le mépris de la personne et de la
justice de Christ, ils sont conduits
inévitablement à chercher
l'approbation de leur conscience, dans
l'exténuation de leurs péchés,
et c'est ainsi que leurs esprits sont
insensiblement détournés de
Jésus et engagés à placer leur
espérance en eux-mêmes.
C'est ainsi que les Scribes et les Pharisiens,
mettaient leur confiance dans les œuvres de la
loi, et enseignaient au peuple, à se justifier eux-mêmes
devant les hommes. (Luc XVI. 15)
Ils étaient
bien convaincus dans leurs
consciences qu'ils n'étaient point parvenus
à la perfection que demande la loi de la
justice : mais comme ils ne voulaient pas
chasser cette orgueilleuse idée de leur
propre justice, ils étaient forcés,
pour apaiser leurs consciences, d'avoir recours
à la corruption et l'affaiblissement de la
loi, ainsi qu'à l'exaltation de leurs
propres œuvres. Nous en trouvons un exemple
dans le jeune homme qui, a son sens, l'avait
accomplie toute entière. Pour
déraciner leur erreur, le Seigneur indiqua
dans le sermon sur la Montagne, quels
étaient le sens spirituel et la vraie
intention de la loi, et montra que les
règles qu'elle donne doivent diriger les
dispositions du cœur ; il en donna un
exemple, par le septième commandement, et
dans l'exposition du sixième, il
déclara que la plus légère
transgression était punissable par le feu de
l'enfer.
Mais après tout, qu'est-ce qu'une loi
mitigée et adoucie, sinon une loi qui a
moins de perfection et une loi imparfaite, est une
loi qui autorise le péché.
Si le Créateur a donné une
loi sainte, juste et
bonne, que doit-on
conclure de l'assertion que le Rédempteur en
a introduit une autre plus douce, sinon que la
nature du bien et du mal moral est changée,
ou que la nouvelle loi, n'est ni sainte, ni juste,
ni bonne. Dès-lors ce système de
relâchement de la loi et de sa coordination
avec les imperfections humaines, proclame
ouvertement l'anéantissement de la loi.
Cette erreur relativement à l'introduction,
sous la nouvelle économie, d'une loi adoucie
et mitigée, est si commune et si
pernicieuse, qu'il ne fera point inutile d'ajouter
à ce que nous avons déjà dit,
les remarques suivantes du célèbre
Edwards. « Les Arminiens soutiennent
opiniâtrement qu'il serait injuste à
Dieu de nous demander quelque chose au-delà
de ce que notre pouvoir actuel et notre
capacité peuvent accomplir. Ils soutiennent
en même temps que nous sommes incapables de
rendre une obéissance parfaite, que Christ
est mort pour satisfaire aux imperfections de notre
obéissance, et qu'il a ouvert la voie pour
que notre obéissance imparfaite fut
acceptée au lieu d'une obéissance
parfaite. Ces propositions doivent les conduire
insensiblement à la plus grossière
contradiction. Car ils disent que Dieu, dans sa miséricorde pour
les hommes,
a aboli la loi
rigoureuse sous laquelle ils étaient
originairement et qu'au lieu de celle-là il
a établi une constitution plus douce et nous
a mis sous une nouvelle loi qui demande seulement
une obéissance sincère, quoique
imparfaite, à cause des circonstances de
pauvreté, d'infirmité, et de
faiblesse où nous nous trouvons depuis la
chute. »
« Maintenant, comment pourra-t-on
concilier ces choses ? Je
demanderai qu'elle est la loi que violent ces
imperfections de l'obéissance ? Si
elles ne violent aucune des lois sous lesquelles
nous ayons jamais été, elles ne sont
point des péchés, et si elles ne sont
point des péchés, en quoi
était-il nécessaire que Christ mourut
pour y satisfaire ? Mais si ce sont des
péchés et des violations d'une loi,
quelle est cette loi ? Ce ne peut point
être la nouvelle, car suivant ces principes, elle ne
demande qu'une obéissance imparfaite, ou une
obéissance avec des imperfections, et par
conséquent, si on a pour elle une
obéissances accompagnée
d'imperfections, ce n'est point la violer, puisque
c'est tout ce qu'elle demande. Ce ne peut point non
plus être une violation de la loi
ancienne,
puisque, suivant eux,
elle a été entièrement abolie
et que nous n'avons jamais été sous
son autorité. »
« Ils disent qu'il ne serait point juste,
de nous demander une obéissance parfaite,
parce qu'il serait point juste de nous demander
plus que nous ne pouvons faire ou de nous punir
pour y avoir manqué, et c'est
précisément pour cela que
d'après leur propre système, les
imperfections de notre obéissance ne
méritent pas d'être punies.
Pourquoi était-il donc nécessaire que
Christ mourut pour satisfaire à ces
imperfections ?
Pourquoi fallait-il qu'il souffrit en expiation,
pour des choses qui n'étaient point des
fautes et qui en elles-mêmes ne
méritaient point de souffrance ?
Pourquoi la mort de Christ était-elle
nécessaire pour obtenir que notre
obéissance imparfaite fut acceptée, lorsque,
d'après ce système, il aurait
été injuste de demander plus qu'une
obéissance imparfaite ?
Pourquoi fallait-il
que Christ mourut, pour rendre acceptable par Dieu,
une obéissance qu'il ferait injuste que Dieu
n'acceptât pas ? Fallait-il donc que
Christ mourut pour que Dieu ne fit pas une
injustice ? Si l'on dit que Christ est mort pour satisfaire
pour nous
à l'ancienne
loi, qu'ainsi nous pouvons n'être pas
sous son autorité, et qu'il nous a
donné le moyen de pouvoir être sous
une loi plus douce ; je demanderai encore alors, quelle
nécessité il y avait que Christ
mourut pour que nous ne fussions plus sous une loi,
telle que d'après leurs principes, soit que
Jésus-Christ fut mort ou non, il eût
été injuste que nous fussions sous
son autorité, puisque nous ne sommes point
capables de l'accomplir. »
« Ainsi les Arminiens sont en
contradiction avec eux-mêmes, non-seulement
dans ce qu'ils disent de la nécessité
de la satisfaction
de Christ, pour
expier ces imperfections que nous ne pouvons
éviter, mais encore dans ce qu'ils disent de
la grâce
de Dieu,
accordée pour que l'homme fut capable de
rendre une obéissance sincère
à la nouvelle
loi.
Ils avouent qu'à cause du
péché originel, nous avons
été rendus entièrement
incapable de remplir
la condition de pardon sans une nouvelle
grâce de Dieu,
mais ils affirment qu'il donne à tous cette
grâce par laquelle l'accomplissement de la
condition, est vraiment possible à tous les
hommes,
et que sur ce
fondement,
il peut justement leur
être demandé comme il l'est en effet.
S'ils veulent parler
avec exactitude, ils doivent entendre par la
grâce, cette assistance qui est de la grâce, ou qui
émane d'une faveur ou d'une affection
libres. Mais cependant ils en parlent, comme s'il
était déraisonnable, injuste
et cruel à
Dieu de demander, comme condition de pardon ce qui
est devenu impossible par le péché
originel. S'il en est ainsi, comment est-ce une
grâce de donner de l'assistance et de la
capacité pour accomplir cette
condition ? Ou plutôt, pourquoi
appellent-ils du nom de grâce, ce qui est
rigoureusement une dette que Dieu est obligé
d'acquitter, et qu'il lui ferait injuste et cruel
de retenir, puisque nous ne pouvons accomplir sans
elle, ce qu'il demande comme condition de
pardon. »
Indépendamment de tout ce que nous avons
déjà dit, pour prouver l'erreur de
ceux qui pensent que malgré cette conclusion
de l'Apôtre, l'homme est justifié sans les
oeuvres de la loi, il
est cependant encore quelque moyen pour qu'une
espèce d'obéissance morale,
cérémonielle, mitigée ou
autre, entre pour quelque chose dans l'oeuvre de la
justification, indépendamment, disons-nous,
de tous ces raisonnements il suffirait pour
démontrer la fausseté de cette
opinion de remarquer ce fait ; c'est que la
déclaration de l'Apôtre
est : nous
concluons que l'homme est justifié par la
foi. C'est là
le point établi, c'est le moyen par lequel
l'homme est justifié, et tout
l'enchaînement des raisons de l'Apôtre
est d'accord avec cette conclusion. Car
après avoir prouvé que tant les Juifs
que les Gentils étaient tous sous le péché, et
démontré par plusieurs citations de
l'écriture qu'aucun n'était juste, non pas
même un seul, il affirme que la justice de Dieu est
à tous et pour tous ceux qui croient et qui sont justifiés gratuitement
par la grâce, de sorte que tout motif de se
glorifier est exclus. (Rom. III.23. 26)
Il observe au commencement du chapitre suivant,
« qu'à celui qui fait les oeuvres
le salaire ne lui est pas imputé comme une
grâce, mais comme une chose due, »
et il ajoute immédiatement après,
« conformément à sa
doctrine, » à celui qui ne fait
pas les oeuvres, mais qui croit en celui qui
justifie l'impie, sa foi lui est imputée
à justice. (Rom. IV. 4-5)
On voit qu'il éloigne toute idée
d'une justification qu'il fut possible à
l'homme d'obtenir par une obéissance plus ou
moins grande, complète ou incomplète,
de quelque loi ou de quelque règle que ce
soit, réelle ou imaginaire, puisqu'il est
dit expressément que Dieu justifie
non-seulement celui qui ne fait pas les oeuvres,
mais encore celui qui
est impie. Ce
n'est pas seulement
le mérite
des oeuvres, des
oeuvres soit de la loi de la conscience ou de celle
de la révélation, soit de la loi
cérémonielle, soit de la loi morale,
que l'Apôtre rejette, dans ses
raisonnements ; mais encore l'accomplissement
de ces oeuvres en tant qu'elles seraient requises
pour la justification. Une réception
cordiale de Jésus-Christ comme
« la consommation de la loi en justice
à tout croyant, » donne seule au
pécheur qui retourne à lui un titre
à obtenir la justification de la vie par une
dispensation
miséricordieuse.
Par cette doctrine la loi de Dieu est
établie dans toute son
étendue :
1.° Dans sa
fonction ; elle avait été
violée, et la punition entière a
été infligée au
Rédempteur, seul capable de la supporter et
de lui survivre.
2.° Dans ses commandements ; elle
ordonnait une obéissance parfaite qui a
été accomplie par lui ; ainsi
aucun trait de lettre, pas un seul iota de la loi
n'a passé, mais toutes choses ont
été faites. (Matt. V. 18)
3.° La dignité du Rédempteur
étant infinie, ses souffrances et son
obéissance sont infiniment
méritoires, et sont ainsi imputées
à tous ceux qui sont en union avec lui par
la foi.
En conséquence, tous
ceux qui, par cette foi, ont part à son
expiation, sont mis en possession de la vie
éternelle, comme de la récompense
méritée par une obéissance
parfaite, en même temps que leurs
péchés ont été punis en
lui autant que la justice peut le demander.
« Il jouira du travail de son âme
et en sera rassasié. Mon serviteur juste en
justifiera plusieurs par la connaissance qu'ils
auront de lui, et lui-même portera leurs
iniquités. (Esa. LIII. 11) Car, il a fait celui qui n'a point
connu de péché, être
péché pour nous afin que nous
fussions justice de Dieu en lui. (II. Cor. V. 21) L'Éternel prenait plaisir en
lui à cause de sa justice, il magnifiait sa
loi et le rendait honorable. »
(Esa. XLII. 21)
Ainsi tous les faux systèmes sans exception,
anéantissent la loi de Dieu. Le dernier verset de ce chap. III, suffit seul pour les
faire rejeter tous ; tandis que par la
doctrine de la justification par la foi, la loi au
lieu d'être anéantie est affermie et
fortifiée.
Elle est encore affermie par ce que, pendant que
les croyants en Christ sont affranchis de la
condamnation, ils ne sont point dispensés de
suivre la loi, comme règle de leur conduite,
et dans toute son étendue, mais au contraire
ils sont engagés à obéir,
(I. Cor. VI. 19. 20) par des motifs nouveaux et
puissants ; la doctrine de l'évangile
ne tend qu'à la sainteté, et la
vocation est une sainte vocation. (II. Tim. I. 6) Cette
doctrine au moyen de laquelle la grâce
règne par la justice, est la seule voie
suivant laquelle les hommes puissent être
sauvés ; elle est la seule par laquelle
cependant la loi ne
soit point anéantie, mais
affermie.
En un mot, la doctrine de la foi, magnifie de
toutes les manières, la loi de Dieu, sainte,
juste, bonne et spirituelle ; elle l'affermit
dans son autorité et dans l'honneur qui lui
est dû, tandis que tous les autres
systèmes de justification,
déshonorent la loi ou affaiblissent son
autorité et son pouvoir obligatoire, comme
si ses préceptes étaient d'une
rigidité déraisonnable, que les
peines qu'elle impose fussent d'une
sévérité injuste, et que Dieu
ne pût par conséquent être
équitable en traitant les hommes
d'après elle. Nous connaissons donc quelle
est la doctrine de l'Apôtre, parce que nous
savons quelle est celle que les hommes attaquent
comme anéantissant la
loi, qu'ils
représentent sans cesse comme affaiblissant
l'obligation des saintes pratiques, celle enfin qui
bien entendue et crue véritablement,
établit la loi de la manière la plus
complète et donne les motifs les plus
efficaces pour une sainte obéissance.
|