Commentaire sur
l'épître aux Romains
CHAPITRE
III.
1-2.
Quel
est donc l'avantage du Juif, ou quel est le profit
de la Circoncision ? il est grand en toute
manière, surtout en ce que les oracles de
Dieu lui ont été
confiés.
Après ce qui a été dit dans le
chapitre précédent, relativement aux
Juifs, on peut demander ici, quels étaient
donc leurs avantages, et quel profit leur revenait
de la Circoncision ; l'Apôtre
répond qu'ils étaient grands sous
tous les rapports, mais que le premier d'entr'eux
était que les écritures,
nommées les oracles (1) de Dieu ou les
oracles vivants,
(Act. VII. 39) avaient été
confiées à Israël. Dieu n'avait
traité aussi favorablement aucun autre
peuple. La lumière de la
révélation divine n'avait
été transmise aux autres nations que
par une tradition orale, et attendu la
perversité et la corruption de l'homme, elle
avait été bientôt corrompue et
presque totalement perdue. Mais l'histoire de
l'état originel de l'homme, de
l'entrée du péché, la
déclaration de la miséricorde promise
à Adam, et tout ce qui est relatif à
l'histoire de la rédemption, jusqu'à
l'époque où par la vocation
d'Abraham, une lumière
nouvelle fut ajoutée à la
première ; les œuvres de Dieu en
faveur de leurs pères, la loi qui leur fut
donnée lorsqu'ils furent établis en
corps de nation, les révélations
subséquentes faites aux prophètes
relativement au Messie, toutes ces choses avaient
été confiées aux
Israélites. Ainsi les écritures, dans
lesquelles ils espéraient avoir la vie
éternelle, puisque les témoignages du
Messie y étaient contenus, non-seulement
étaient remises à la garde des Juifs,
pour leur propre instruction, mais ils en
étaient encore les dépositaires pour
tout le reste du monde.
3-4.
Car
qu'est-ce, si quelques-uns n'ont point cru ?
Leur incrédulité
anéantira-t-elle la fidélité
de Dieu ? Non sans doute ; mais que Dieu
soit véritable et tout homme menteur selon
ce qui est écrit ; afin que tu sois
trouvé juste en tes paroles, et que tu aies gain de
cause quand tu es jugé. (2)
On pouvait objecter à l'assertion
précédente, que ces avantages
étaient inutiles, d'après ce que
l'Apôtre avait dit plus haut, que les Juifs
n'avaient cru en Dieu. Il réplique ici que
cette accusation ne portait pas sur tous, et
demande que devait-il arriver si quelques-uns, quel
que fût leur nombre, petit ou grand,
n'avaient point cru ? Leur
incrédulité devait-elle rendre vaine
la fidélité de Dieu à ses
promesses et à ses menaces, de telle sorte
que ce qui avait été fait pour cette
nation ne lui fût pas avantageux, parce que
tous n'auraient point cru ?
Bien au contraire, la fidélité de
Dieu était justifiée, quoique la plus
grande partie d'Israël eût avec
obstination et méchanceté
rejeté le divin Sauveur ; il avait
accompli les promesses qu'il avait faites à
leurs pères, et puisqu'ils n'avaient pas
voulu se soumettre à lui qui était
« la semence d'Abraham », ils
ne pouvaient accuser Dieu d'avoir manqué
à sa parole, parce que malgré leur
désobéissance et leur
perversité, il ne leur avait continué
sa faveur spéciale. Non sans doute !
que chacun plutôt reconnaisse la
véracité et la fidélité
de Dieu, quoiqu'il soit obligé de convenir
que tous les hommes sont menteurs, et que le
blâme de la réjection du Messie, reste
sur les Juifs et sur leur hypocrisie, sans
même que l'on suppose qu'il puisse
atteindre à la
fidélité de Dieu. Ainsi
l'Éternel était pleinement
justifié de toutes les accusations que la
présomption et l'aveuglement des hommes
dirigent contre son juste gouvernement, ainsi le
blâme qui pouvait résulter de ce que
les avantages de l'ancienne alliance ne leur
avaient pas été aussi utiles qu'ils
devaient l'être, ne pouvait être
encouru que par les Juifs eux-mêmes.
5-8.
Or si
notre injustice recommande la justice de Dieu, que
dirons-nous ? Dieu n'est-il pas injuste quand
il punit ? (Je parle en homme) Non sans doute.
Autrement comment Dieu jugera-t-il le monde ?
Et si
la vérité de Dieu par mon mensonge
est plus abondante pour sa gloire, pourquoi suis-je
encore condamné comme pécheur ?
Mais plutôt, (selon que nous sommes
blâmés et que quelques-uns disent que
nous disons) pourquoi ne faisons-nous du mal
afin qu'il en, arrive du bien ? desquels la
condamnation est juste.
(3)
L'Apôtre prévient ici une autre
objection qu'on pourrait lui faire. Je parle comme un
homme, dit-il ;
c'est-à-dire, que l'impiété
naturelle aux hommes et leur défaut de
respect pour la Divinité, doivent les
conduire ordinairement à faire des
objections contre elle.
Cette objection est la suivante. Si notre injustice
montre évidemment la nécessité
et l'excellence de la justice de Dieu, pour la justification de l'homme, ne
ferait-il pas injuste, (4) s'il prenait
vengeance sur nous d'actions qui ont
été l'occasion éventuelle de
la manifestation de sa gloire ? Telle est la
conclusion que Paul rejette avec horreur. S'il
était ainsi, comment Dieu jugerait-il le
monde ? (5) Comment pourrait-il
punir aucun criminel ?
Malgré cette réponse faite dans le
verset 6,
l'Apôtre suppose encore que l'on insiste en
disant que Dieu serait injuste s'il se vengeait des
incrédules, parce que si sa
fidélité est manifestée par
leur incrédulité, pourquoi
seraient-ils cependant jugés comme des
pécheurs, et pourquoi ne pourraient-ils pas,
d'après cette idée, faire du mal pour
qu'il en arrivât du bien ?
Le développement de
cette objection, en fait connaître l'affreuse
nature qui ne va pas à moins qu'à
légitimer la délibération
formelle de commettre le péché, ce
qui étant une rébellion directe
contre Dieu, ne peut être justifié par
aucun bien qui puisse en résulter ;
aussi l'Apôtre croit qu'il est suffisant de
déclarer que c'est calomnieusement qu'on lui
impute la doctrine qu'on peut faire le mal pour
qu'il en arrive du bien, et quant à ceux qui
soutiennent ce principe, si choquant en
lui-même, et dont les conséquences
sont si destructives, il prononce sans argumenter
plus longuement, que leur condamnation est juste.
(6)
Dieu peut justement punir, et il punira
assurément les pécheurs qui cependant
lui ont fourni des occasions de manifester sa
gloire, d'une manière plus remarquable, et
ainsi il prendra occasion de la rébellion
des hommes pour déployer ses propres
perfections de la manière la plus
avantageuse, encore que l'intention des
transgresseurs et le but de leur conduite y soient
directement opposés.
9.
Quoi donc, sommes-nous plus
excellents ? Nullement, car nous avons
ci-devant convaincu que tous, tant Juifs que
Grecs, sont assujettis au
péché.
L'Apôtre a
répondu à la question qu'on lui a
faite relativement aux avantages supérieurs
des Juifs ; il demande s'ils sont meilleurs
que les Gentils ; il répond que sous
aucun rapport, ils n'étaient meilleurs,
parce qu'il avait déjà prouvé
que tous, tant Juifs que Gentils, sont sous le
péché, c'est-à-dire, sous la
condamnation du péché.
Dans le premier et le second chapitres,
L'Apôtre a établi par le fait, que
tous les hommes excepté ceux qui
obéissent à la vérité
sont sous le péché, il va le
confirmer, en rappelant divers passages de l'ancien
Testament pour fixer plus pleinement cette
imputation et spécialement pour en
convaincre les Juifs.
10.
Selon
qu'il est écrit, (7) il n'y a point de
juste, non pas même un
seul.
Cette citation tirée des Ps. XIV et LII,
(Ps. XIV. 1. 3. Ps. LIII. 1.4) prouve qu'il n'y a aucune exception
à cette décision, et qu'aucun homme
n'est juste.
11-12.
Il n'y a personne qui
ait de l'intelligence, personne qui recherche Dieu, Ils se
sont égarés, ils se sont tous
ensemble rendus inutiles il n'y en a aucun qui
fasse le bien, non pas même un seul.
(8)
Ce que Paul a appliqué aux Gentils,
(Ephés. IV. 18.) il l'applique
ici également aux Juifs et aux Gentils. Leur
entendement était obscurci, ils
étaient éloignés de la vie de
Dieu, à cause de leur ignorance, qui
était en eux par l'endurcissement de leur
cœur, (9) Tout mal vient de
la dépravation des hommes, de leur
endurcissement naturel. (Esa. VI. 10. II. Cor. IV. 4. II. Cor. III. 15) C'est pour cela qu'ils appellent le
mal, bien, et le bien, mal ; qu'ils font les
ténèbres, lumière, et la
lumière, ténèbres ;
qu'ils font l'amer, doux, et le doux, amer ;
(Esa. V. 20) que les choses de l'esprit de Dieu
sont une folie pour eux, (I. Cor. I. 18 et II. 14)
pendant que la sagesse du monde est une folie
devant Dieu. (I. Cor. III. 19)
La conséquence de ce défaut total
d'intelligence, qui vient de la dureté du
cœur, est que personne dans l'état
naturel ne cherche Dieu ; que tous les hommes
ignorent leur perversité, leurs
défauts et leur misère, et que ce qui
est bon, ne peut jamais être trouvé
qu'en Dieu ; c'est ainsi que tous sont sortis
de la voie du devoir et du bonheur, que tous sont
indignes et corrompus et qu'ainsi nul homme ne fait le bien, non pas
même, un seul.
13-14.
C'est
un sépulcre ouvert que leur gosier ;
ils ont frauduleusement usé de leurs
langues ; il y a du venin d'aspic sous leurs
lèvres. Leur bouche est pleins de
malédiction et d'amertume.
L'éloignement
où les hommes sont de Dieu et l'état
dépravé de leurs cœurs est
manifesté par leurs paroles et leurs
actions : les organes de la parole sont tous
pervertis pour servir le péché. Leur
gosier est comme un sépulcre ouvert
d'où sortent des vapeurs pernicieuses, des
discours impurs. Ils se servent de leurs langues
pour flatter et pour tromper. Le poison mortel des
reptiles venimeux est caché sous leurs
lèvres et en sort pour ternir, pour
déchirer, pour détruire la
réputation de leur prochain d'une
manière couverte et insidieuse. Leur bouche,
lorsqu'ils parlent franchement, est pleine de
malédictions et d'amertume. (Ps. V. 10.
Ps. X. 7.
Ps. CXL. 4)
15-17.
Leurs
pieds sont légers pour répandre le
sang. La destruction et la misère sont dans
leurs voies. Ils n'ont point connu la voie de la
paix.
L'Apôtre parle
ici de la férocité des hommes qui
remplit tout le monde d'animosité, de
querelles, de haines, dans les relations
particulières de famille et de
voisinage ; de violences, de guerre et de
meurtres, dans les rapports des
sociétés. Les animaux les plus
féroces ne détruisent pas autant
d'êtres de leurs espèces, pour apaiser
leur faim, que l'homme ne tue de ses semblables,
pour rassasier ses passions, son ambition ou sa
vengeance. (Prov. I. 16. Esa. LIX. 3. 7. 8)
18.
La
crainte de Dieu n'est point devant leurs yeux.
Après avoir énuméré les
vices de l'humanité, en commençant
par son peu d'intelligence et sa négligence
à chercher Dieu, l'Apôtre les
réduit ici à leur cause
première. C'est que l'homme n'a point la
crainte de Dieu devant les yeux : qu'il ne
l'aime pas, ne rend pas à son
caractère la vénération qu'il
lui doit, et ne respecte pas son autorité.
(Ps. XXXVI. 2)
On ne peut faire une description plus frappante de
la profondeur de la dépravation humaine, et
de ses funestes conséquences, que celle que
l'Apôtre présente dans cet assemblage
de passages des saintes écritures de
l'ancien Testament. Tous les hommes dans leur
état naturel, sont représentés
comme rebelles à Dieu, et faisant de leurs
membres des instruments d'iniquité.
(Rom. VI. 13. 17)
Il montre d'abord, comme l'origine de tout mal,
leur perversité intérieure et en
général l'absence de tout bien, dans
l'homme naturel. Il montre ensuite les maux
causés par l'abus de la parole, sous quatre
chefs particuliers, les discours obscènes,
(Eph. IV 29) le mensonge, (Ps. LVIII. 4. 5. Jér. IX.2. 3) la calomnie, (Ps. L. 19. 20) les malédictions ;
(Ps. LIX. 13. Jer. XXIII. 10. Osée IV. 2. Ps. CIX. 17) parce que, comme le dit
l'Apôtre Jacques, en parlant de la langue qui
produit au dehors tout le mauvais trésor du
cœur, « la langue aussi est un feu
et un monde d'iniquité. Car la langue est
telle entre nos membres, qu'elle souille tout le
corps, et enflamme tout le monde qui a
été créé, étant
elle-même enflammée du feu de la
Géhenne. (Jacq. III. 6)
Paul décrit encore la
méchanceté des hommes dans leurs
actions, leurs querelles, leurs violences, leurs
homicides, et déclare enfin le mépris
qu'ils font ouvertement de la loi de Dieu. Tout
cela est conforme à la déclaration de
celui dont les yeux sont comme « une
flamme de feu, qui sonde les cœurs et les
reins, et qui connaît les ouvrages des
enfants des hommes. » Car du dedans,
c'est-à-dire, du cœur des hommes,
sortent les mauvaises pensées, les
adultères, les fornications, les meurtres,
les larcins, les mauvaises pratiques pour avoir le
bien d'autrui, les méchancetés, la
fraude, l'impudicité, le
regard malin, les discours outrageux, la
fierté, la folie ; tous ces maux
sortent du dedans et souillent l'homme.
(Marc. VII. 20. 23)
Tel est l'état de la nature humaine, tant
que le cœur n'eu point changé, tant que
l'homme n'est pas lavé par Dieu de ses
impuretés, et que Dieu ne lui a pas
ôté son cœur de pierre pour lui
donner un cœur de chair et un nouvel esprit.
(Ezech. XXXVI. 26. 27)
D'après tout cela, on peut se faire une
faible idée de ce que sera dans le monde
à venir, la condition de ceux qui
périssent, à qui l'évangile
est voilé, « desquels le Dieu de
ce siècle a aveuglé les entendements,
c'est-à-dire, des incrédules, afin
que la lumière de l'évangile de la
gloire de Christ, lequel est l'image de Dieu, ne
leur resplendît point. »
(II. Cor. IV. 3. 4) Alors les différents
obstacles qui opèrent d'une manière
si étendue dans cette vie, seront
éloignés, et la dépravation
naturelle de l'homme tombé, éclatera
dans toute son horrible
méchanceté.
19.
Or
nous savons que tout ce que la Loi dit, elle le dit
à ceux qui sont sous la Loi, afin que toute
bouche soit fermée et que tout le monde soit
coupable devant Dieu.
Ce que la loi écrite disait de tous les
hommes devait nécessairement être
appliqué aux Juifs qui étaient sous
la loi, mais il n'était point dit que ce ne
fût applicable qu'à eux.
La révélation de Dieu qui contient sa
loi, est relative, sous la qualification
générale d'homme, à toute la
race d'Adam, et elle commence par l'histoire des
ancêtres communs aux Juifs et aux
Gentils.
Le but de l'Apôtre, dans ce passage, n'a donc
pas été de donner aux Juifs
l'application de ce que les saints livres
contenaient, mais de leur montrer qu'ils y
étaient compris, parce qu'ils pouvaient
être disposés à le nier. Cela
est clair par la dernière partie de ce
verset, qui est exprimé dans les termes de
l'universalité la plus
complète : Que toute bouche soit fermée et
que tout le monde soit coupable devant Dieu,
et cela
prévient encore l'objection qu'ils pouvaient
présenter en prétendant que la loi,
même en parlant d'eux, ne les comprenait pas
tous, mais seulement des individus particuliers de
leur nation.
C'est de la même manière que quelques
personnes cherchent de nos jours, à
éluder la force de ces passages, en disant
qu'ils ne sont point applicables à tous les
hommes, mais seulement aux Juifs. Mais pour
réfuter cette opinion, qui ne naît que
de ce que ceux qui la font s'entretiennent dans une
ignorance complète de l'état de leurs
cœurs, il suffit de leur faire observer que
les expressions qu'emploie l'Apôtre,
renferment tous les individus de la race humaine,
autant qu'il est possible à des mots
d'exprimer une idée. Il est dit au
verset 10. Il n'y a point, non pas même
un seul ; au
verset 11.
Personne,
Personne ; au
verset 12.
Tous,
Tous ensemble, Aucun, Pas un
seul, et dans sa
conclusion, Toute
bouche ; Tout le monde, Nulle chair.
Ainsi par la loi, le
péché est découvert et
condamné. Cette règle parfaite fait
connaître le mal dans les dispositions et
dans les actions des hommes, et par
conséquent, elle condamne le pécheur
comme coupable au lieu de prononcer qu'il est
juste, et tout le
monde est trouvé coupable devant
Dieu.
20.
C'est
pourquoi nulle chair ne sera justifiée
devant lui, par les œuvres de la loi, car par
la loi, est donnée la connaissance du
péché.
Comme Paul vient de prouver, non-seulement en
rappelant le fait, mais encore par les
écritures de vérité, que tout
le monde est coupable devant Dieu, il arrive
à sa conclusion
générale : c'est que les
œuvres de la loi, soit qu'elle ait
été donnée à l'homme
dans les livres saints, ou qu'elle soit
écrite dans son cœur, ne pourront le
justifier devant Dieu. Cela est évident,
puisque c'est la loi qui donne la connaissance du
péché.
Où il n'y a point de loi, il n'y a point
aussi de transgression, (Rom. IV. 15) mais la loi de Dieu étant la
règle des devoirs de l'homme et aucun homme
ne se conformant exactement à ce
modèle, il est prouvé que tout homme
est un violateur de la loi, il est donc impossible
qu'aucun soit justifié par les œuvres
de cette loi.
L'Apôtre rappelle ici ces paroles du
Psalmiste. « N'entre point en jugement avec ton
Serviteur, car nul homme vivant ne sera
justifié devant toi. (Ps. CXLIII. 2) »
Le Roi Prophète parle ici de lui-même
et quoiqu'il fut serviteur de Dieu, il le prie de
ne point le juger par la loi, de ne point l'appeler
en jugement pour décider de son sort
d'après son obéissance.
« Comment
l'homme
mortel
se justifierait-il
devant le Dieu fort ? Si Dieu veut
plaider avec lui,
de mille articles il
ne saurait répondre sur un seul.
(Job. IX 2. 3)
Certainement il n'y a point d'homme juste sur la
terre qui agisse toujours bien et qui ne
pèche point. (Eccl. VII. 20) »
Notre Apôtre déclare aux Galates la
même vérité :
« mais tous ceux qui font des œuvres
de la loi, sont sous la malédiction, car il
est écrit, maudit soit quiconque ne
persévère dans toutes les choses qui
sont au livre de la loi pour les faire, or que par
la loi,
personne ne soit
justifié devant Dieu, cela paraît par
ce qui est dit que le juste vivra de la foi.
(Gal. III. 10. 11) »
21.
Mais maintenant la justice de Dieu
est manifestée sans la Loi, lui étant
rendu témoignage par la loi et par les
prophètes.
En suivant les traces
indiquées par la loi, nul homme ne pourrait
être relevé des effets de la
colère de Dieu qui est
révélée des cieux, contre
toute espèce d'impiété et
d'injustice. (Rom. I. 18) Cela étant
prouvé, l'Apôtre commence à
éclaircir sa première proposition que
l'évangile est
la puissance de Dieu en salut à tout
croyant.
Cette justice,
à laquelle Dieu a pourvu pour les coupables
est maintenant
enfin
manifestée, par la résurrection de
Notre Seigneur Jésus-Christ d'entre les
morts ; cette justice est sans la loi, elle n'a rien de commun avec
l'obéissance personnelle des hommes envers
la loi, et ne peut être obtenue par les
œuvres de la loi. Elle parvient à
l'homme par une voie tout-à-fait
différente. Quoiqu'elle ne vienne point de
la loi, puisqu'alors Christ serait mort
inutilement, (Gal. II. 21) la loi et les prophètes lui
rendent partout témoignage. C'est toujours
leur but et leur dessein. Ils montrent la
nécessité de cette justice, en
prouvant par l'histoire de l'homme que depuis sa
chute, il est pécheur et qu'il ne peut
être justifié par l'obéissance
à cette loi qu'il a transgressée. Ils
lui rendent encore témoignage, par les
promesses, les types, les prophéties, qu'ils
rapportent et qui sont tous relatifs au Messie et
à cette justice de Dieu.
22-23.
La
justice, dis-je, de Dieu par la foi en
Jésus-Christ, s'étend à tous
et sur tous ceux qui croient, (car il n'y a nulle
différence vu que tous ont
péché, et qu'ils sont
entièrement privés de la gloire de
Dieu) étant justifiés gratuitement
par sa grâce, par la rédemption qui est en
Jésus-Christ.
Cette justice de Dieu à laquelle la loi et
les prophètes rendent témoignage, par
laquelle l'homme est justifié, ne lui est
point attribuée à cause de quelque
œuvre de justice qu'il ait pu faire par
obéissance à la loi. (Tit. III. 5) Mais elle est reçue par la
foi seule. Elle est étendue, imputée
ou allouée à tous ceux qui croient le
témoignage de Dieu, lequel il a rendu de son
Fils, (I. Jean V. 9) et est placée sur eux
pour les couvrir comme un vêtement.
(Esa. LXI. 10) Ceux qui reçoivent de cette
manière cette justice, sont justifiés librement par la
grâce ou la
faveur de Dieu. On ne peut exprimer plus fortement
que cette justification est accordée sans le
moindre rapport à aucune chose faite par
l'homme, à aucun mérite de sa
part.
Il ne possède rien qui lui donne aucun droit
à l'obtenir ; il ne peut y avoir aucune
prétention qui vienne de la repentance, ou
de rien qui lui appartienne ; elle vient par
la grâce, c'est la seule source d'où
dérive la justification, et si c'est par la grâce, ce n'est
plus par les œuvres, autrement la grâce
n'est plus la grâce. (Rom. XI. 6) Et de peur que l'on n'imaginât
que la grâce n'agit pas dans ses
opérations, aussi bien que dans le choix de
ses objets, conformément à son
caractère d'une bonté souveraine et
imméritée, l'Apôtre ajoute le
mot gratuitement.
Ce mot exclut toute
considération d'aucune
chose qui puisse être dans l'homme la cause
ou la condition de la justification. Le moyen de la
recevoir est la foi, et nous verrons dès le
commencement du chapitre suivant, (Rom. IV. 4. 5) que la foi est mise en opposition
avec toute espèce d'œuvres, et au
verset 16,
que c'est donc par la
foi, afin que ce soit par la grâce.
(Rom. IV. 16)
Pour fortifier encore plus cette proposition, de
crainte que l'on ne pensât que cette voie de
justification ne fut pas la seule, et que les
hommes pussent être justifiés de
quelque autre manière, l'Apôtre met
une parenthèse à la fin du
verset 22.
Car il n'y a point de
différence,
vu que tous ont
péché et qu'ils sont
entièrement privés (10) de la gloire de Dieu. Quelque distinction qu'il y ait entre
les hommes, soit Juifs, soit Gentils, soit qu'ils
conservent de la décence dans leurs actions
extérieures, soit qu'ils s'abandonnent
entièrement au vice, il n'y a point de
différence entr'eux, en ceci : c'est
qu'ils sont tous coupables, et tous
condamnés par la loi de Dieu.
Ils ont le même besoin de ce mode de
justification, par la raison évidente qu'ils
ont tous transgressé la loi de Dieu et
qu'ils ne parviennent pas à lui rendre la
gloire qui lui est due.
Dans chaque moment de la vie de l'homme, il reste
éloigné de l'amour de Dieu, que la
loi lui commande d'aimer de tout son cœur, de
toute son âme et de toute sa
pensée ; chaque instant il
s'écarte de cette obéissance
complète
que cette loi demande
nécessairement. Ceux qui croient sont donc
justifiés gratuitement par la grâce de
Dieu, par la rédemption en
Jésus-Christ.
Le mot rédemption signifie en général, une
délivrance et quelquefois une
délivrance opérée par le
pouvoir.
Ainsi Dieu racheta
Israël d'Egypte
par sa grande puissance, (Néh, I. 10) et la résurrection du corps,
par un acte de la puissance divine, est
appelée une rédemption ;
(Rom. VIII. 22) mais il signifie plus
particulièrement une délivrance
procurée par un prix, comme celle des esclaves, des
prisonniers, des condamnés, lorsqu'ils sont
délivrés du servage, de la
captivité, ou de la mort, au moyen d'une
rançon. C'est ici le sens de ce mot.
L'homme s'est révolté contre Dieu et
a encouru la condamnation de sa juste loi ;
mais Dieu par sa grâce libre et son infinie
miséricorde, a substitué à la
place des coupables, son propre Fils, a
transféré d'eux à lui,
l'obligation de satisfaire à la peine, a
fait que le seul
juste, souffrit pour
les injustes, et qu'il portât la punition de
leurs péchés, en son corps, sur le
bois. (I. Pier. III. 18) Les écritures
représentent souvent la mort ou le sang de
Christ, comme un prix de rachat :
les croyants
ont été rachetés à un
haut prix : ils sont rachetés par le
sang ; ils obtiennent la rédemption par
son sang. (Matth. XX. 28. I. Cor. VI. 20. Gal. III. 13. Ephes. I. 7. I. Pier. I. 18. 19. Apoc. V. 9) Ainsi son peuple est justifié
par la médiation du Fils de Dieu, par son
obéissance, et son intercession au prix de
son sang et de sa mort. Car Christ est la fin de la loi en justice
à tout croyant.
Il est dit ici que les croyants sont
justifiés par la grâce. Il est dit
aussi qu'ils sont justifiés par le sang de
Christ, (Rom. V. 9)
et qu'ils sont justifiés par la foi ;
(Rom. V. 1)
ces trois expressions différentes,
n'indiquent que la manière dont un
même bienfait est accordé. La
grâce est la source de la
justification : le sang de Christ en est la
cause méritoire, et la foi, le moyen de
recevoir cette bénédiction.
|