Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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SERMONS



SERMON XI
LE CHEMIN DE SION.

Et il y aura là un sentier et un chemin, qui sera appelé le chemin de la sainteté ; celui qui est souillé n’y passera point, mais il sera pour ceux-là ; celui qui va son chemin, et les fous ne s’y égareront point. Il n’y aura point là de lion, et aucune bête farouche n’y montera, ni ne s’y trouvera ; mais les rachetés y marcheront. Et ceux dont l’Éternel aura payé la rançon, retourneront, et viendront en Sion, avec chant de triomphe, et une allégresse éternelle sera sur leur tête ; ils seront dans la joie et dans l’allégresse ; la douleur et le gémissement s’enfuiront.
Esaïe XXXV. 8. 9. 10.

Tandis que les Israélites assis auprès des fleuves de Babylone, pleuraient en se souvenant de Sion, et que les harpes suspendues aux saules du rivage, ils refusaient de chanter leurs saints cantiques dans une terre étrangère ; (Ps. CXXXVII. 1. 2. 4.) le Seigneur leur avait ménagé une grande consolation, en mettant entre leurs mains diverses prophéties qui annonçaient la délivrance de cette cruelle captivité. Avec quelle joie, par exemple, ne devaient-ils pas lire le chapitre d’où notre texte est tiré ! Avec quelle magnificence le Prophète décrit l’heureux changement qui allait être produit dans leur sort ! Quel abondant retour de bénédictions il annonce !

Le désert et le lieu aride se réjouiront, la solitude sera dans l’allégresse, et fleurira comme une rose. Elle fleurira et sera dans l’allégresse, elle poussera des cris de joie et des chants de triomphe ; la gloire du Liban et la magnificence du Carmel et de Saron lui seront données ; ils verront la gloire de l’Éternel et la magnificence de notre Dieu. Fortifiez les mains languissantes et affermissez les genoux tremblants ; dites à ceux qui ont le coeur troublé : Prenez courage et ne craignez plus ; voici votre Dieu ; il viendra lui-même, et il vous délivrera. (Esaïe XXXV. 1-4.) - Mais, ces passages, si consolants pour les Israélites, ne le sont pas moins pour nous, mes bien-aimés frères, puisque le prophète, en annonçant la délivrance de l’esclavage d’Assyrie, annonce aussi celle d’un esclavage plus dur et plus honteux encore ; celui auquel Christ est venu mettre un terme. C’est surtout ce puissant Rédempteur qu’Esaïe avait en vue, quand il disait immédiatement après les paroles que nous venons de citer : Alors les yeux des aveugles seront ouverts, et les oreilles des sourds seront débouchées ; alors le boiteux sautera comme un cerf, et la langue du muet chantera avec triomphe ; car des eaux sortiront au désert et des torrents au lieu solitaire. (Esaïe XXXV. 5. 6.)
À ces traits, qui ne reconnaîtrait le Sauveur et les merveilles qu’il a opérées en faveur des siens ? - Oui, c’est lui qui a pris nos langueurs, (Matth. VIII. 17.) et qui les a guéries. C’est lui qui a fait jaillir les eaux au désert par les grâces et les bénédictions précieuses qu’il a répandues sur son peuple ; et c’est à la marche glorieuse de ses rachetés vers la Jérusalem éternelle, que doit essentiellement s’appliquer le texte que nous avons choisi pour notre instruction dans ce jour. Et il y aura là un sentier et un chemin, qui sera appelé le chemin de la sainteté, celui qui est souillé n’y passera point, mais il sera pour ceux-là ; celui qui va son chemin, et les fous, ne s’y égareront point. Il n’y aura point là de lion, et aucune bête farouche n’y montera, ni ne s’y trouvera ; mais les rachetés y marcheront. Et ceux dont l’Éternel aura payé la rançon, retourneront, et viendront en Sion, avec chant de triomphe, et une allégresse éternelle sera sur leur tête ; ils seront dans la joie et dans l’allégresse ; la douleur et le gémissement s’enfuiront.
Voyons:

- 1°. qui sont les voyageurs dont il est ici parlé,
- 2°. dans quel chemin ils marchent,
- 3°. où ce chemin aboutit.

O Seigneur ! tandis que ta Parole ne cesse de nous rappeler tes bienfaits, donne-nous à tous des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. Amen !

I. Ceux que nous contemplons avec le prophète, avaient été esclaves à Babylone. Tous ceux qui marchent dans le chemin de l’Évangile, ont aussi commencé par l’esclavage. En vérité, en vérité je vous dis, que quiconque s’adonne au péché, est esclave du péché ; (Jean VIII. 34.) ce sont les paroles du Seigneur lui-même, et St. Pierre nous dit, que l’on devient esclave de celui par qui on est vaincu. (2. Pierre II. 19.) Telle est notre condition naturelle à tous.

Au lieu d’entrer dans la vie avec des dispositions d’obéissance à notre Créateur, nous naissons esclaves du prince des ténèbres et de la révolte. Notre âme, au lieu de gouverner le corps auquel elle est unie, se laisse gouverner par lui. Les sens nous séduisent, les voluptés nous entraînent ; au lieu de nous attacher à ce qui est solide, nous courons après ce qui n’a que l’apparence ; pleins de l’idée que nous pouvons trouver ici-bas un bonheur réel, nous nous tourmentons pour acquérir des biens, qu’un souffle de colère va bientôt anéantir. Diverses passions nous dominent tour à tour et nous conduisent aux plus tristes excès. Tout ce qui est bien nous est difficile, tout ce qui est mal a des attraits pour nous. Quelle servitude pour celui qui avait été créé un peu moindre que les Anges ! Quelle dégradation pour des êtres en qui Dieu avait mis son image. - Ce qu’il y a de plus déplorable encore, c’est que l’homme se complaît dans cette servitude ; il ferme les yeux sur sa honte, il ne veut pas la reconnaître, il cherche même à ennoblir ses liens ; plus il s’abaisse, plus son orgueil augmente ; il se fait un mérite de ses biens, de son esprit, de tous les avantages frivoles qu’il peut avoir, et il oublie que son âme est dans les ténèbres, séparée de son Dieu, et menacée de la mort éternelle. Tous ne sont pas corrompus au même degré, je le sais ; mais tous sont par leur nature éloignés de la vie de Dieu, aveuglés sur leurs propres misères et soumis au joug humiliant des passions. Dans cet état, ils appartiennent au royaume de Satan, et non pas au royaume du Seigneur.

Ils sont esclaves à Babylone, comme l’avaient été les voyageurs dont nous parle Esaïe. Mais le moment de la délivrance était arrivé pour les Israélites captifs. L’Éternel avait fait publier un édit de liberté, et ceux qui avaient eu le coeur touché par le souvenir de la patrie, reprenaient le chemin de Jérusalem. Le moment de la liberté est aussi venu pour les disciples du Sauveur ; l’Évangile a été proclamé, ils l’ont écouté avec joie, ils l’ont cru ; et délivrés des liens de ténèbres, ils ont été mis dans la liberté glorieuse des enfants de Dieu. Ils ne sont pas encore, il est vrai, arrivés au repos ; ils sont loin encore de la patrie ; mais ils sont sur le chemin qui y conduit ; ils marchent. - Oui, le vrai Chrétien est déjà libre ici-bas ; il n’appartient plus au maître dur et impitoyable qui le retenait dans ces chaînes ; le Fils l’a affranchi ; (Jean VIII. 36.) c’est à lui qu’il appartient ; il n’a plus sur son front la marque ignominieuse de la malédiction, il est devenu enfant de Dieu et citoyen de la céleste Jérusalem. O heureuse délivrance ! O vrai liberté ! Liberté de l’âme, qui a recouvré les droits de sa première origine et la force de faire la volonté de Dieu ! - Heureux Chrétiens ! comment avez-vous reconquis votre indépendance et votre couronne ? Est-ce vous-mêmes qui avez brisé vos fers ? Est-ce par votre propre énergie que vous êtes sortis de l’esclavage ? - Non, non, vous n’aviez ni les lumières, ni les ressources nécessaire pour cela, vous devez tout à la miséricorde de notre Dieu.

Il y a trois moyens de délivrer un captif ; la force, l’échange et le rachat. C’est ce dernier moyen que Dieu a choisi pour les fidèles. Ils sont appelés dans le texte, les rachetés. Qui a payé leur rançon ? - L’Éternel. - Quelle rançon ? - Son propre Fils. Écoutez St. Pierre : Vous avez été rachetés, non par des choses périssables comme l’argent ou l’or, mais par le précieux sang de Christ, comme de l’Agneau sans défaut et sans tache. (1. Pierre I. 18. 19.) O cieux ! soyez attentifs ! Terre ! Tressaille de joie à ce prodige de l’amour de Dieu notre Père! Il a donné son fils unique, il l’a donné pour le rachat des pécheurs. - Nous avions tous transgressé les lois souveraines, et selon la justice divine nous devions périr pour nos violations. Ces lois éternelles ne pouvaient pas être révoquées ; il fallait que le pécheur portât la peine prononcée, ou que quelqu’un la portât à sa place. - Dieu s’est fait notre frère, et a pris sur lui le châtiment. Nous étions esclaves et prisonniers du péché. - Ce péché, le plus puissant, le plus pernicieux, le plus cruel de tous les tyrans, et qui appesantissait son joug sur tous les hommes de l’univers, ne pouvait être vaincu, quand bien même toutes les créatures, les hommes et les Anges se seraient réunis pour cela ; mais il l’a été par la force irrésistible, et par la puissance au-dessus de toute puissance de Jésus-Christ, qui s’est donné lui-même pour vaincre. (1)

Ainsi, par son sacrifice, notre rançon est payée toute entière, et les secours les plus efficaces nous sont acquis pour sortir de notre dégradation. Il ne faut que se confier aux promesses du Rédempteur, et aller chercher un abri sous sa croix protectrice. - D’où vient donc qu’il en est tant parmi nous qui demeurent dans leurs vieux liens, et qui continuent à être esclaves du monde et du prince qui y règne ? D’où vient, que les jours, les mois, les années s’accumulent sur leurs têtes, sans qu’on aperçoive en eux un généreux élan, pour commencer une nouvelle vie et pour marcher dans le droit sentier ? - Ah ! ce ne sont pas les secours qui leur manquent, mais la foi au Sauveur. Ils ont mis leur confiance en eux-mêmes, en leur prudence, en leurs ressources ; ils veulent se passer d’appui, et ils ne font que se traîner dans leurs souillures ; ou bien, pour croire au salut qui leur est annoncé, ils veulent attendre de voir en eux des dispositions plus saintes, et ils ne comprennent pas, que c’est seulement lorsqu’ils se confieront pleinement au Rédempteur, qu’ils recevront de lui ces dispositions. Ainsi ils se tourmentent sous leur joug, sans pouvoir le briser.
O hommes, si lents à croire et si pleins d’illusions ! contemplez ces voyageurs que nous montre le texte. Pourquoi ont-ils quitté Babylone ? - N’est-ce pas, parce qu’ils ont cru à l’édit de délivrance publié par ordre du Seigneur ?

N’est-ce pas, parce que, fondés sur la promesse du Dieu qui ne peut mentir, ils ont tenu pour certain, que ce Dieu les ferait rentrer dans leur héritage ? C’est pour cela qu’il sont partis et qu’ils se sont mis en marche au travers du désert : sans cela ils auraient vieilli à Babylone, et ils auraient trouvé leur sépulcre dans cette terre infidèle. Et si vous aussi, M. C. F., vous ajoutiez une foi entière au message de réconciliation que nous publions de la part de Christ, si vous teniez pour certain que votre salut a été opéré par lui, que votre rançon a été payée, vous vous lèveriez tous ensemble du sein de vos tombeaux, pour prendre le chemin de la patrie céleste, avec tous les fidèles qui s’y dirigent. Mais quel est ce chemin dans lequel marchent les rachetés ? nous allons le voir dans notre second point.

II. La voie dans laquelle marchent les rachetés est d’abord appelée un sentier, ce qui suppose un chemin facile. Pour qui est-il facile ? - Pour les simples qui se confient entièrement au Seigneur. Mais le texte dit, que celui qui va son chemin et les fous ne s’y égareront point ou ne le parcourront point. (2)

Oui, les insensés qui veulent suivre leurs propres idées et l’impulsion de leur propre coeur, n’entreront point dans ce chemin ; ils n’y verront rien qui les y attire. La porte par laquelle on entre est étroite ; c’est l’humilité. Il ne faut pas présumer de soi-même, s’imaginer être quelque chose, tandis que l’on n’est rien ; il faut reconnaître sa misère, son dénuement, et recevoir le salut comme un don de Dieu, comme un pur don de sa miséricorde. Un tel abaissement ne convient pas aux esprits indépendants et orgueilleux ; ils souffriraient de se mettre à leur place, et de s’avouer criminels et perdus sans ressource. Ils veulent se sanctifier eux-mêmes, se tirer d’affaire eux-mêmes, et ils repoussent le joug du Seigneur.
Mais l’âme simple s’y soumet sans hésitation et sans murmure ; le pauvre d’esprit, qui sent qu’il n’a rien de son propre fonds, qu’il ne peut rien, profite avec empressement de cette voie de salut qui lui est ouverte. il entre donc, il entre avec confiance, parce que c’est le chemin que Dieu lui a tracé ; et une fois qu’il y est engagé, cette même confiance devient sa sauvegarde. Il ne s’appuie point sur ses propres forces ou sur sa sagesse ; il regarde à Dieu et lui dit : “Seigneur ! vois mes incertitudes, ma faiblesse ; guide toi-même ton enfant au milieu des tentations qui l’environnent. ”

Tout est facile, M. F., pour celui qui a une foi semblable ; les obstacles ne l’effraient plus ; il marche avec courage, avec joie, sachant qu’il est sous l’oeil d’un bon Père et sous sa garde. - Ce n’est donc pas de grande instruction ou de profonds raisonnements que nous avons besoin, pour marcher facilement dans le chemin de l’Évangile ; mais de foi, de simplicité, de la simplicité des petits enfants qui sentent leur faiblesse et qui s’attachent à une main plus forte. Si nous étions assez sages, pour nous abandonner tout-à-fait au Seigneur, et pour le suivre avec docilité partout où il voudrait nous mener, nous aurions bien moins de peines et de troubles ; mais nous revenons constamment par quelque détour à notre propre volonté et à nos propres vues ; c’est là ce qui gâte notre chemin, et ce qui le rend difficile. Heureuses les âmes qui, dépouillées d’elles-mêmes, écoutent Dieu avec simplicité dans sa parole, et obéissent à la voix de son Esprit, sans résistance et sans murmure ! Elles possèdent le vrai bien ; dans toutes leurs détresses l’Ange de sa face marche devant elles ; lui-même les conduit par son amour et par son support ; elles avancent par un sentier doux et uni comme l’agneau qui descend le long d’un frais pâturage, jusqu’à ce qu’il atteigne son bercail.

Le texte, en nous représentant le chemin des rachetés comme facile, nous le représente aussi comme sûr. Il n’y aura point là de lion, et aucune bête farouche n’y montera, est-il dit. L’assurance de n’être pas exposés aux attaques des bêtes féroces, était bien précieuse pour des voyageurs appelés à traverser de vastes contrées de l’Orient. Les lions y infestent fréquemment les déserts, surtout dans le voisinage des fleuves, et du milieu des roseaux ils s’élancent sur les caravanes imprudentes. Le lion, qui est l’ennemi le plus redoutable du voyageur, représente ici l’ennemi des âmes, l’adversaire qui rôde sans cesse autour de nous, cherchant qui il pourra dévorer. (1. Pierre V. 8.) Mais les fidèles sont à l’abri de ses fureurs ; ils sont gardés par la puissance de Dieu, par la foi, pour le salut qui doit être révélé dans les derniers temps. (1. Pierre I. 5.) Ils sont sans doute fréquemment exposés à de violents combats, à des tentations pleines d’artifice ; ils peuvent faire momentanément des chutes déplorables ; mais ils ne périront jamais sous les attaques de l’adversaire, car Christ qui les a appelés est fidèle, et nul ne les ravira de sa main. (Jean X. 28. / 1. Thess. V. 24.) Au milieu des plus terribles assauts, il se tiendra près d’eux et les couvrira de son bouclier invisible ; il leur dira, comme autrefois à ses disciples effrayés, c’est moi, n’ayez point de peur ; (Matth. XIV. 27.) il les soutiendra par sa force, et ainsi en toutes choses, ils seront plus que vainqueurs par celui qui les a aimés. (Rom. VIII. 37.)
Considérez maintenant, M. F., un nouveau caractère très important que le prophète attribue au chemin des rachetés ; il l’appelle un chemin de sainteté, et il ajoute, que celui qui est souillé n’y passera point. Si en effet, Dieu adresse des promesses si magnifiques aux fidèles, ce n’est pas afin qu’ils se relâchent et qu’ils oublient leur sanctification. L’Esprit qui leur est donné d’en haut purifie graduellement leurs coeurs, donne à leurs affections une direction sainte et élevée ; et le Seigneur ne reconnaît pas pour siens, ceux qui prennent son nom dans leurs bouches, pour marcher ensuite après leurs cupidités. (Ezéch. XXXIII. 31.) Il se trouve quelquefois des gens qui voyant l’Évangile promettre le pardon au pécheur qui s’humilie et qui a la foi en Jésus, pensent pouvoir saisir ce pardon précieux, sans abandonner leurs égarements.

De tel hommes font donc une profession stérile de leurs lèvres, et disent : “Oui, je reconnais ma grande misère, et j’attends tout de mon Sauveur. ” Mais après s’être appliqué la première partie du message céleste, il ne tardent pas à voir l’autre qui nous prescrit de marcher en nouveauté de vie, (Rom. VI. 4.) d’entrer dans la route étroite, (Matth. VII. 14.) de ne pas suivre la multitude pour mal faire, (Exode XXIII. 2.) mais de nous joindre à la troupe des fidèles disciples qui, séparés des vanités du siècle, travaillent à se purifier eux-mêmes, comme celui qui les a appelé est pur. (1. Jean III. 3.) Ces paroles inquiètent le faux chrétien ; il essaie peut-être d’obéir et d’entrer dans la voie. Mais, que ce chemin lui paraît pénible et dépourvu de douceurs ! Point de plaisir bruyant pour étourdir ; point de flatterie pour tromper le coeur ; point de voluptés pour les sens ! et quoi en leur place ? - La simplicité, l’humilité, la prière, le renoncement à soi-même et au monde, la vie cachée avec Christ en Dieu ; (Col. III. 3.) quelle carrière, pour un homme qui n’a pas été touché d’une manière vive et profonde ! À cette vue, il hésite, il s’effraie, il sent que s’il recule, les promesses lui échappent ; que s’il avance, il aura des sacrifices pénibles à accomplir : une telle lutte n’est pas faite pour son âme, et bientôt jetant ce manteau de christianisme dont il s’était revêtu un moment, il retourne au monde qu’il n’a jamais cessé d’aimer.

Cependant, M. F., de ce que la vie chrétienne n’est pas agréable à l’homme charnel, n’en concluez pas qu’elle soit dépourvue de douceurs. Non, non ; Dieu en donne abondamment au coeur qui le cherche. Écoutez le texte : Ceux dont l’Éternel aura payé la rançon, retourneront et viendront en Sion avec chant de triomphe, et une allégresse éternelle sera sur leurs têtes. L’allégresse nous est représentée ici comme étant sur la tête de ces voyageurs, parce que les Israélites avaient la coutume d’oindre leur tête d’huile parfumée, et de se couronner de fleurs dans les fêtes solennelles. C’est l’image des joies, qui sont réservées au véritable Chrétien. - O vous ! qui ne les connaissez que de nom, et qui pensez peut-être qu’elles sont peu de chose en comparaison de celles que le monde vous donne, essayez de demander au plus humble et au plus chétif de tous les fidèles, s’il voudrait échanger ses privilèges et son bonheur contre le vôtre ? - Il vous répondra, que même ses heures les moins heureuses, valent mieux que vos plus vifs plaisirs. - Que possède-t-il en effet le croyant ? - La paix, la paix du coeur, ce calme intime et céleste qui résulte de la pensée que Dieu est notre Père et que nous sommes ses enfants ; la certitude que nous sommes à lui, qu’il ne nous abandonnera jamais, et qu’il accomplira en nous, pour la journée de Jésus-Christ, la bonne oeuvre qu’il a commencé. (Philipp. I. 6.)

Voilà le sujet du chant de triomphe des fidèles, voilà l’allégresse qui leur est donnée par le Saint-Esprit. Ah ! joies du monde ! pâlissez devant un bonheur si doux et si pur. Et vous, qui courez encore après ces joies grossières ! souvenez-vous que quand vos plaisirs seraient mille fois plus vifs et plus enivrants, une seule pensée suffirait pour les empoisonner ; c’est que leur fin approche, que la mort va les anéantir à jamais, et qu’il n’en restera plus aucune trace, si ce n’est dans les effroyables conséquences qui en résulteront pour vos âmes. - Mais la joie du Chrétien ne se termine pas à la mort ; son allégresse ne dépend pas de l’existence des choses visibles ; elle est éternelle, dit le Prophète. Oui quand le pèlerinage du fidèle s’achève, il entrevoit au travers des ombres du tombeau, une nouvelle aurore et une patrie plus heureuse, et il va achever au pied du trône avec les Anges, le cantique de délivrance que ses lèvres glacées murmuraient encore.

III. Il nous reste à examiner, M. F., où vont les voyageurs dont il est parlé dans notre texte. - Ils se dirigent vers Sion. Sion était la montagne sur laquelle était bâti le temple de Jérusalem. Or pour les Israélites exilés, c’était la patrie, le lieu de la présence particulière du Seigneur, et le séjour du peuple fidèle.
C’était d’abord pour eux, la patrie. Ils sortaient de Babylone, où ils avaient été esclaves, ils traversaient des pays où ils ne devaient pas se fixer ; toutes leurs pensées, tous leurs désirs, toutes leurs espérances étaient tournés vers Jérusalem.
Les Chrétiens traversent aussi une contrée où ils ne doivent pas faire un long séjour ; le monde est pour eux un désert, une terre étrangère ; ils se dirigent vers la Jérusalem céleste dont Dieu lui-même est l’architecte et le fondateur. (Héb. XI. 10.) Nous n’avons point ici-bas de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir. (Héb. XIII. 14.) Nous la cherchons ! oui ; au milieu de ce combat de la foi, que nous sommes appelés à soutenir, au milieu des soupirs, que nous arrachent les contradictions du monde et les misères de nos propres coeurs ; qu’est-ce qui nous soutient et qui nous console ? - C’est que les choses visibles vont passer, que les invisibles vont prendre leur place, que notre course pénible s’achève, et que nous ne tarderons pas à arriver à la cité céleste que le Seigneur nous a promise et dont le sacrifice de Jésus nous a ouvert l’entrée. Ce qui nous console, c’est que nous ne sommes pas citoyens de la terre, mais citoyens du ciel, et que chaque heure qui s’écoule nous rapproche de cette patrie éternelle. - Là, seront enfin terminées, nos inquiétudes et nos agitations constantes ; là, nous trouverons un asile que ni la méchanceté des hommes, ni les révolutions des temps, ni les puissances de l’enfer, ne pourront nous ôter.

Là, nous trouverons enfin ce tabernacle qui ne sera point transporté, duquel les pieux ne seront jamais ôtés et dont pas un des cordeaux ne sera rompu. C’est là véritablement que l’Éternel sera magnifique pour son peuple. (Esaïe XXXIII. 20. 21.)
Sion, vers laquelle marchaient les Israélites sortis de Babylone, était encore pour eux l’habitation particulière du Seigneur. Il y manifestait sa présence par la nuée, qui reposait sur l’arche sainte. Aussi le Psalmiste disait : Dieu est connu dans la Judée, sa renommée est grande en Israël. Son tabernacle est en Salem, et son domicile en Sion. (Ps. LXXVI. 2. 3.)
La Sion d’en haut, vers laquelle marchent les fidèles, est aussi d’une manière bien particulière la demeure de l’Éternel. Là, il manifeste sa présence d’une manière ineffable ; là il est vu face à face par les âmes bienheureuses. - Oui, dans ce ciel caché aux yeux des hommes, mais qui sera bientôt révélé, est l’habitation de ta gloire ô Dieu Souverain ! Du haut de ton trône, tu abaisses tes regards sur les mondes, et tes yeux sondent toutes les créatures jusqu’au fond. Les milliers d’Anges t’environnent, les Séraphins volent à ta voix, les la multitude des Intelligences fait retentir le cantique : Saint, saint, saint est l’Éternel des armées, tout ce qui est dans toute la terre est sa gloire. (Esaïe VI. 3.) - Et c’est là aussi que tu veux nous introduire un jour, si nous nous attachons par une vraie foi au Sauveur que tu nous as donné ; c’est là que nous nous reposerons éternellement dans ton sein, et que nous nous rassasierons des joies qui sont à ta droite ; c’est là que le gémissement s'enfuira à jamais, que la mort ne sera plus, qu’il n’y aura plus, ni deuil, ni cri, ni travail, parce que les premières choses seront passées, (Apoc. XXI. 4.) et que tu seras tout en tous. (1. Cor. XV. 28.)

- Ah ! qui sommes-nous ? M. F., qui sommes-nous chétifs vermisseaux de terre pour oser élever jusque-là nos espérances ? - Mais la miséricorde de notre Dieu a comblé l’abîme qui nous séparait de lui. En nous appuyant sur Jésus, nous ne sommes plus des étrangers, ni des gens de dehors ; mais nous sommes concitoyens des saints et membres de la famille de Dieu; (Eph. II. 19.) au nom de Christ, nous entrerons dans le Sanctuaire.
Dans cette patrie céleste, nous trouverons aussi ce Sauveur en qui nous croyons, que nous aimons et en qui nous nous réjouissons d’une joie ineffable et glorieuse. (1. Pierre I. 8.) Oh ! qui pourrait se représenter le bonheur d’être ainsi réunis à lui ? - Lorsque nous lisons l’Évangile, et que nous suivons par la pensée ce Maître adorable allant de lieu en lieu pour faire du bien, nous envions souvent le privilège de ceux qui pouvaient l’accompagner, s’entretenir avec lui, contempler journellement les témoignages de sa bonté et de son inépuisable miséricorde. Nous disons souvent : “Oh ! si j’eusse été là ! si j’avais pu aller au-devant de lui, me mettre à ses pieds, lui dire les misérables faiblesses de mon coeur, me rassasier des discours qui sortaient de sa bouche divine, c’eût été pour moi la suprême félicité. ”

Eh bien ! M. F., ce voeu des âmes chrétiennes sera pleinement réalisé dans le ciel. Christ sera avec nous, il sera notre Berger, il nous paîtra, il nous conduira aux sources d’eaux vives, (Apoc. VII. 17.) il ne nous quittera plus.
Enfin, M. F., Sion était aussi l’habitation du peuple saint ; c’est là que montaient les tribus de l’Éternel, pour célébrer son nom ; et les Chrétiens marchent aussi vers une Sion, dans laquelle ils habiteront ensemble, étant faits participants du même amour et de la même félicité. Vous êtes venus, dit St. Paul aux Hébreux, à la montagne de Sion, à la cité du Dieu vivant, à la Jérusalem céleste, aux milliers d’Anges ; à l’assemblée et à l’Église des premiers-nés, dont les noms sont écrits dans les cieux. (Héb. XII. 22. 23.) Rappelez-vous, M. F., ces Patriarches vénérables, que nous apprenons à connaître par l’histoire des premiers âges du monde ; rappelez-vous ces Prophètes, dont les écrits étincellent d’un feu divin, et raniment si souvent nos coeurs abattus ; rappelez-vous ces Apôtres, ces confesseurs, ces martyrs, qui ont scellé de leur sang la vérité de l’Évangile ; tous ces hommes pieux, qui depuis l’origine de l’Église, en ont été l’édification et les flambeaux ; ils sont maintenant dans le ciel, et nous irons les joindre, si comme eux, nous nous tenons fortement attachés à l’ancre du salut.

- Pensez aussi à ces amis, à ces parents qui vous ont quittés, et qui sur la frontière du temps et de l’éternité, invoquaient avec foi le nom du Seigneur ; leur souvenir remplit encore vos coeurs d’une vénération mêlée de douceur et de tristesse ; eh bien ! si vous partagez leur foi, vous les retrouverez dans la patrie vers laquelle nous marchons. - Le père, dont la piété couronnait les cheveux blancs, et l’heureuse famille qui profita de ses leçons et de ses exemples ; la mère et l’enfant à qui elle apprit à répéter le nom de Jésus ; les époux, dont l’union fut cimentée par des dispositions vraiment chrétiennes ; les frères, les amis qui craignaient l’Éternel et qui pensaient à son nom ; (Mal. III. 16.) tous ces disciples pieux et fidèles se réuniront au pied du trône, et recevront ensemble les mêmes bénédictions. O heureuse union! O sainte société ! doux rapprochement des affections de la terre et de la pure félicité du ciel! O ravissant espoir pour les coeurs chrétiens !
Mais aussi, quel avertissement solennel ! pour ceux que la Providence a rapprochés les uns des autres, de ne pas s’aimer pour le monde, pour une vie qui s’enfuit si vite, pour des joies que la mort doit anéantir à jamais ; mais d’aller à Christ et de vivre avec Christ, pour que leur union soit sainte et éternelle ! - Oui, M. F., si le spectacle des voyageurs que nous avons contemplés aujourd’hui, a touché quelquefois vos coeurs, prenez garde de ne pas vous arrêter à un mouvement de sensibilité stérile ; mais demandez-vous : “Suis-je du nombre de ces voyageurs, qui marchent vers la cité céleste ?

Ceux qui m’entourent, mes amis, mes parents, mes enfants, font-ils partie de cette caravane glorieuse ? Moi et les miens sommes-nous assurés devant Dieu en justice, sommes-nous appuyés sur Christ et sur ses promesses ? Ou, sommes-nous encore du nombre de ceux qui descendent vers la région des ténèbres et de la mort avec la sécurité que le monde donne ?” - Voilà la question que notre texte provoque avant toutes les autres ; et nous prions Dieu qu’un grand nombre de ceux qui sont ici présents, se la fassent pour leur salut, et pour le salut de tous ceux qui leur appartiennent ! Amen !


Table des matières


(1) Luther. Comm. sur l’Épître aux Galates.

(2) Version de Lausanne, 1822

 

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