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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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(Notre confession de foi: ici)
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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Contes du Dimanche
Récits allégoriques

Le guéridon de Fontainebleau.

e visitais, il y a quelques jours, pour la dixième fois, le palais de Fontainebleau.
Je n'entreprendrai pas de faire ici la description de ce vieux palais, qui dresse, au milieu de la plus romantique des forêts, un fouillis de constructions de tous les styles, mais qui n'est pas sans grandeur. Là, sont renfermés des souvenirs historiques d'un très grand intérêt : on y voit des peintures, des fresques et des sculptures des plus grands artistes de la Renaissance ; des meubles et des tentures de toutes les époques. On y voit le berceau du roi de Rome et le trône de Napoléon. Mais rien de tout cela ne m'a arrêté aussi longtemps qu'un simple guéridon d'acajou, sans ornements ni dorures, pareil, ou à peu près, à ceux qu'on trouve dans le commerce.

La partie supérieure se soulève, et voici l'inscription que présente, sur une plaque de cuivre, la partie inférieure :
« Le 5 avril 1814, Napoléon Bonaparte signa son abdication sur cette table, dans le cabinet de travail du roi, le deuxième après la chambre à coucher, à Fontainebleau. »

Vous comprenez, n'est-ce pas, pourquoi ce simple meuble a tant d'intérêt pour l'observateur philosophe et surtout chrétien : il rappelle un grand drame moral, la chute formidable d'une idole, l'amertume et la misère des gloires et des grandeurs qui ne sont pas fondées sur la loi divine.

Le guéridon porte la trace d'un coup de canif, dont l'empereur, assure-t-on, cloua sur la table, dans un geste de colère, le papier sur lequel il venait de signer son abdication. Avoir donné des coups d'épée à travers tant de contrats, tant de serments, tant de traités, et finir par ce coup de canif impuissant.... Quelle chute et quelle dérision !

J'ai essayé de me représenter l'état d'esprit du grand despote au moment où, pressé par ses anciens ministres, il griffonnait hâtivement ces lignes, dont le fac-similé est conservé dans la bibliothèque du palais.
A-t-il eu, à ce moment-là, un éclair de bon sens ? A-t-il compris la folie et la vanité de cette chevauchée de quinze ans à travers l'Europe, et l'inutilité de tant de massacres, de tant d'incendies et de pillages ? A-t-il vu, dans cette catastrophe finale, la revanche des lois violées ? Et sur ce guéridon d'acajou, a-t-il aperçu la main mystérieuse et puissante qui tenait la sienne, pour l'obliger à écrire son abdication ?

Cela n'est pas probable ; il n'était encore en route que pour l'île d'Elbe ; il lui fallait, pour l'assagir, Waterloo et Sainte-Hélène, la chute irrémédiable et la mortelle captivité. Si les propos rapportés dans le fameux Mémorial sont dignes de foi, il semblerait du moins que là-bas, sur le rocher aride où l'implacable cruauté de ses ennemis le laissa mourir, il fit des réflexions salutaires et reconnut la grandeur supérieure de Jésus-Christ. Mais ici, à Fontainebleau, son coeur bouillonnait encore d'orgueil déçu, de colère et de révolte. Il est vaincu mais non soumis : le coup de canif en fait foi.

Lorsqu'il partit, quelques heures plus tard, il dut traverser la forêt verdoyante qui enserre de toutes parts la ville et le château. Le grand homme qui se plaisait au fracas des batailles, prit-il jamais garde au chant d'un oiseau ?
S'il avait daigné descendre de son cheval ou de sa berline de voyage, et pendant une heure errer à travers bois, les petits oiseaux lui auraient enseigné la sagesse : « Tu pars, lui auraient-ils dit, et nous, que tu effarouchas si souvent par tes chasses impériales, mais dont tu n'as pu détruire le nid fragile et l'invincible sécurité, nous, nous restons !

Et ces vieux arbres, profondément enracinés dans le sol français, ils restent, eux aussi ! Tu pars, toi, grand nomade, fléau de Dieu, tempête ; nous restons dans le calme et la paix du printemps. Vois ! les arbres bourgeonnent ; les petites fleurs naissent dans la mousse, et déjà nos oeufs sont près d'éclore. Va, tu as eu beau piétiner le sol pendant tant d'années, l'herbe repousse après toi ! Sache donc, grand empereur, que tu ne peux rien contre ceux que Dieu aime, et qu'un petit oiseau, libre sur sa terre natale, est plus heureux que tu ne le fus jamais ! »

Le guéridon de Fontainebleau me suggère d'autres pensées, et c'est ici surtout, lecteur, que je réclame votre attention, car il s'agit de vous.
« De moi ? Qu'ai-je donc de commun avec un empereur qui abdique ? je suis un pauvre homme sans ambition insensée, croyez-le bien. Je ne fais de mal à personne, pas même aux petits oiseaux ! »
J'en suis bien aise, et pourtant il y a, pour vous aussi, une abdication nécessaire.

Si humble, si modeste que vous soyez, il y a en vous des aspirations très nobles et très légitimes : vous désirez « la gloire, l'honneur et l'immortalité », et vous avez raison, car Dieu a mis en vous ces désirs. Il vous a fait pour ces choses-là ; rien ne pourra vous satisfaire en dehors d'elles. Et il ne s'agit pas d'une gloire au rabais, d'un honneur de pacotille, d'une immortalité de marbre ou de bronze ; il s'agit pour vous d'être un jour pareil à Dieu même, dans toute sa splendeur, dans toute sa beauté, dans sa justice parfaite, dans l'éclat adorable de sa charité. Vous n'oseriez pas ambitionner le trône impérial ; et moi je vous dis : Osez, osez ambitionner le trône même de Dieu !

Folie ! direz-vous. Mais je vous répondrai : Sagesse ! L'Évangile promet le trône de Dieu à des hommes comme vous et moi ; aux pauvres en esprit, à ceux qui pleurent, à ceux qui ont faim et soif de justice, à ceux qui aiment la paix et la procurent aux autres, aux méprisés, aux calomniés, aux persécutés.
Mais à quelle condition ? À la condition d'abdiquer.

Si humble, si modeste que vous soyez, il y a en vous une volonté tenace, un Moi impérieux qui commande en dernier ressort. Tout au fond de vous-même un trône est dressé, et c'est ce fameux Moi qui est assis dessus. Tout ce que vous faites, bon ou mauvais, est pour lui plaire ; vous le soignez, vous le flattez, vous lui immolez même bien des choses et bien des gens.... Eh bien, si vous voulez régner un jour avec Dieu, comme Dieu, il faut que ce Moi orgueilleux abdique. Il faut qu'il signe sa déchéance, qu'il déloge de votre for intérieur et qu'il laisse la place.... à Jésus-Christ.

Dites-vous bien que Dieu ne vous jugera pas comme le font les hommes. Le bien n'est bien que s'il est fait pour Lui. Le bien devient le mal quand il est fait par égoïsme. C'est pourquoi nos bonnes oeuvres sont mises par l'Écriture sainte à l'égal de nos péchés : tout acte, même de dévouement, d'aumône, de sacrifice, qui n'a pas Dieu pour moteur et pour centre, est un acte d'orgueil, un grain d'encens offert à notre idole, un péché de plus.

Abdiquez donc en faveur de Jésus-Christ, le représentant de Dieu, venu du ciel pour nous rendre Dieu aimable sous les traits d'un homme comme nous, et pour expier notre orgueil, source de toutes nos fautes, par l'humilité de sa vie et l'opprobre de sa mort sur la croix ! Abdiquez pour régner ! C'est ainsi que vont les choses dans l'ordre divin, qui est l'opposé de l'ordre humain : l'abaissement précède la gloire, la chute précède le relèvement, la mort précède la vie.


L'oiseau du Paradis.

I

rois jeunes apprentis, partageant la même chambre, s'étaient, un beau soir de printemps, accoudés à la fenêtre. Tous les trois orphelins, ils s'étaient rencontrés dans les ateliers où leurs tuteurs les avaient placés, et s'étaient associés pour diminuer leurs dépenses et rendre leur vie plus agréable. Mais ce soir-là ils se sentaient d'humeur triste ; la brise leur apportait le vague parfum des champs, des fleurs et des bois ; les hirondelles qui tournoyaient au niveau de leur mansarde leur parlaient des pays lointains d'où elles étaient récemment venues, et l'ennui remplissait leur coeur à la pensée du labeur qu'il faudrait reprendre demain, sans trêve ni repos, jusqu'à la fin de leur vie....
- Ah ! je voudrais être riche ! dit l'un.
- Et m'amuser, dit le second.
- Moi, dit le troisième, je voudrais m'établir dans un pays où le ciel serait toujours pur, où il n'y aurait jamais d'hiver. J'y aurais une jolie maison avec un petit jardin, pas assez grand pour que je ne puisse le cultiver moi-même. Un pays où il n'y aurait point de malheureux, et où la mort même ne m'atteindrait pas.

Les deux autres éclatèrent de rire.
- Voilà bien le rêveur, dirent-ils ; ce pays-là n'existe pas !
- Vous vous trompez, jeunes gens, dit une voix à côté d'eux ; ce pays-là existe, et j'en viens.

Les apprentis se retournèrent, effrayés. Ils entrevirent, dans le demi-jour de la chambre, un étranger qui s'avança et plaça sur la table une cage dans laquelle étaient trois oiseaux au plumage lumineux et brillant. Tout à coup, dans le silence, ces oiseaux se mirent à chanter. Leur voix était plus belle que celle du rossignol, et les jeunes gens écoutèrent, ravis, cette douce harmonie.
Lorsqu'elle fut terminée, l'étranger prit la parole :
- Le pays d'où je viens, dit-il, est peuplé d'oiseaux pareils et plus beaux encore. Les fleurs y ont les parfums les plus doux et les couleurs les plus belles que vous puissiez imaginer. C'est vraiment le pays dont vous parliez tout à l'heure et auquel vous disiez ne pas croire. Eh bien, voulez-vous y venir avec moi ?
- Oui, crièrent-ils tous les trois en même temps.
- Soit ! je vous emmènerai tous, mais à une condition : Chacun de vous aura, pendant un mois, l'un de ces oiseaux sous sa garde ; il devra le nourrir, lui donner de l'eau fraîche, de l'air et du soleil. Je reviendrai bientôt, mais j'emmènerai seulement ceux dont l'oiseau sera vivant encore. Voici, ajouta-t-il, des graines d'une espèce particulière, car mes chanteurs ne peuvent vivre que de ces graines-là ; toute autre nourriture les empoisonnerait.

Et, déposant un sac de graines à côté de la cage, l'étranger disparut sans qu'on pût savoir si la porte s'était ouverte pour lui ou s'il avait passé au travers des murailles.

II

Le mois s'était écoulé. Par un soir de juillet, l'homme se trouva dans la chambre, à la même place que la première fois.
- Eh bien, jeunes gens, dit-il, êtes-vous toujours disposés à partir ?
- Moi, d'abord, dit le plus âgé, je ne vous connais pas ; j'aime mieux rester ici, où l'ai mes amis et mes plaisirs.... et d'ailleurs, ajouta-t-il, l'oiseau est mort.
- Ah ! dit l'étranger, et comment ?
- Oh ! c'est bien simple, j'ai oublié de le nourrir. On ne peut pas être l'esclave d'un oiseau. C'est dommage, il chantait bien, mais il n'aurait probablement pas traversé l'hiver prochain.
- Et vous ? dit le visiteur au second.
- Voilà votre oiseau, répondit celui-ci ; il est mort.... Mais je l'ai fait empailler !
- Et pourquoi est-il mort ?
- Parce que j'ai voulu le nourrir d'autres graines que les vôtres, ayant, par mégarde, jeté par la fenêtre les provisions que vous m'aviez laissées. Mais il n'a pu se contenter de ce que je lui donnais. C'est dommage, il chantait bien, mais du moins, vous le voyez, son plumage est conservé.
- Et vous ? demanda l'étranger au troisième.
- Ah ! s'écria celui-ci, mon oiseau est vivant, comme vous voyez, mais je m'aperçois bien que tous mes soins, toutes mes peines ne lui font pas oublier sa patrie. Notre soleil est trop pâle, notre air trop lourd ; il mourrait ici ! Je vous le rends mais, je vous en supplie, prenez-moi avec lui pour que là-bas je l'entende encore !
- Viens, dit alors l'étranger, puisque tu as pris soin de l'oiseau que je t'avais donné, c'est toi qui me suivras dans la contrée divine d'où je suis venu tout exprès pour t'y conduire.


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