Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Sermons et Méditations




Un Sauveur !

DISCOURS POUR LE JOUR DE NOËL

 C'est aujourd'hui, dans la ville de David, qu'un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur, nous est né.
Luc II, 11.

Un Sauveur nous est, né ! Mes frères, il n'est pas de nouvelle plus grande que celle-là ; il n'en est pas non plus qui soit plus accessible aux intelligences même les plus bornées. Elle est si grande, si divine, qu'il a fallu la multitude de l'armée céleste pour la proclamer ici-bas ; elle est si simple et si facile à comprendre que quelques pauvres bergers, hommes croyant au Dieu d'Israël, sans doute, mais hommes sans culture d'esprit, sans instruction, ont été à même de l'accueillir et de l'annoncer à leur tour. Aujourd'hui, Dieu met ce message de son amour sur les lèvres de ses serviteurs d'ici-bas. Ce sont de pauvres pécheurs auxquels il permet de redire à leurs frères qu'un Sauveur nous est né. Ils annoncent le don de Noël, non pas sous un rayonnement céleste, mais dans les temples et les chapelles que la foi chrétienne a consacrés au service de l'enfant du ciel né à Bethléhem. Qu'importe ! Pourvu que Dieu les assiste de son Esprit, leur témoignage ne sera pas vain. Pourvu encore qu'il y ait, dans ceux qui les écoutent, un coeur simple, leurs paroles auront leur effet. Le mystère de piété, Dieu manifesté en chair, restera caché aux sages et aux intelligents, mais il sera révélé aux enfants.

I

Aujourd'hui, dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur, nous est né. Les temps sont accomplis ; le Dieu de la promesse réalise sa parole donnée aux pères : il se souvient de son alliance ; il donne le Sauveur attendu.

Un immense soupir a rempli les siècles écoulés depuis la chute de l'homme jusqu'à la grande nuit dont nous célébrons aujourd'hui le souvenir. Depuis l'heure où le chérubin, à l'épée flamboyante, s'est placé à l'entrée de l'Eden fermé ; depuis que cette terre, autrefois jardin de l'Éternel, s'est transformée en un champ couvert de ronces et d'épines ; depuis que, dans le coeur de l'homme, la confiance a fait place à la crainte, et l'amour à l'envie, à la jalousie et à la haine ; depuis que la mort, avec ce qui la prépare et l'accompagne, maladie, souffrance, séparation et deuil, - a jeté dans la poussière l'homme destiné à gouverner le monde et à y représenter l'Éternel ; depuis le jour où tout cela est arrivé, l'humanité n'a cessé de demander un Sauveur. Les nations l'ont recherché, chacune à sa façon, et en tâtonnant dans les ténèbres. Le peuple élu a formulé son désir : Quand nous consoleras-tu ? Oh ! qui donnera à Sion la délivrance d'Israël ; oh ! si tu ouvrais les cieux et si tu descendais ! Mon âme attend le Seigneur plus que les sentinelles n'attendent le matin !

À ce cri de l'homme, Dieu a répondu. Il a promis un Sauveur avant même que sa pauvre créature eût bien senti à quel point elle avait besoin d'un Sauveur. Il a renouvelé sa promesse sous des formes et par des bouches toujours nouvelles. Lisez les prophètes. Chacun à sa manière, ils parlent, au nom de l'Éternel et sous l'inspiration du Saint-Esprit, de ce Sauveur promis, et ils signalent sa nature, son caractère, son oeuvre et ses grâces excellentes. Hélas ! malgré tout cela, c'est l'attente, toujours l'attente ! Les générations disparaissent ; d'autres viennent prendre leur place. Attendre, voilà le sort qui leur est commun à toutes.

Attendre ! on dirait que le coeur de l'homme n'est pas fait pour cela et que rien ne lui est plus difficile. Attendre, c'est bien souvent souffrir, c'est devoir lutter contre le découragement, c'est risquer quelquefois de faire naufrage quant à la foi. Attendre, ce sera d'autant plus pénible que l'objet attendu est plus indispensable au coeur, et que la lacune à remplir est plus grande. Attendre ! réussirons-nous à nous dire ce que cela doit avoir été pour les fidèles d'autrefois ? Pour pouvoir nous mettre à leur place, il nous faudrait être privés, ne fût-ce que pour quelque temps, de tout ce qui, pour nous, se rattache au nom béni de Jésus. Effacez, si vous le pouvez, du livre de vos vies et de vos expériences spirituelles, le nom de Jésus ; considérez ce qui vous reste, lui disparu avec ses consolations, ses pardons, ses grâces, comme aussi avec ses instructions et sa puissance ; essayez de vous dire ce que vous seriez sans lui, sans sa main de bon Berger, sans son précieux sang répandu en expiation de nos fautes, sans son intervention devant le trône de Dieu, sans son amour nouveau pour vous tous les jours, sans les rayons d'espérance et de lumière qu'il verse sur votre route, sans le ciel qu'il vous promet et vous garantit ; - essayez, dis-je, de vous représenter ce que serait votre vie sans lui, et peut-être comprendrez-vous quelque peu le sort de ces millions qui ne l'ont pas vu ! Vous saurez, en même temps, ce qu'ont dû éprouver les bergers, auxquels l'ange cria du ciel : Un Sauveur vous est né ! Un Sauveur !

Mais n'était-ce pas l'exaucement accordé à ceux qui avaient prié ? n'était-ce pas le salut descendu sur la terre ? n'était-ce pas la délivrance et la paix ? n'était-ce pas le ciel rendu aux pécheurs, et le Père serrant dans ses bras son enfant perdu ? Un Sauveur ! Quelle parole, quel bienfait, quel don céleste ! Un Sauveur vous est né, aujourd'hui, à Bethléem, dans Ici ville de David ! 0 bonheur inespéré et grand entre tous ! Heureux bergers, je comprends votre étonnement et votre hâte à accourir dans la ville de David ; je comprends qu'il vous ait semblé impossible de taire les grandes choses que Dieu vous avait faites !

II

Quant à nous, mes frères, qui connaissons l'Évangile depuis longtemps déjà, le don de Noël n'est pour nous rien de nouveau ; nous ne l'avons pas attendu ; c'est lui plutôt qui nous attendait à notre entrée en ce monde. Mais serait-ce là une raison pour ne pas redire à notre tour, dans ce jour qui nous le rappelle si vivement, que nous avons un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur ? Oh ! que le souvenir de l'événement qui a jeté les bergers de Bethléhem dans l'admiration et dans l'étonnement se réveille avec force dans nos coeurs! Un jour, Dieu a dit : J'ai encore un Fils bien-aimé, je le leur enverrai, et la naissance de Jésus à Bethléhem nous prouve que Dieu n'a point épargné son propre Fils, mais qu'il l'a livré pour nous tous. En remontant le cours des temps, on arrive à une heure où la Parole a été faite chair et où elle est venue habiter parmi nous, pleine de, grâce et de vérité. C'est pourquoi nous avons un Sauveur ! Et ce que Dieu a donné, personne ni rien ne peut nous le reprendre. Il s'est trouvé des chrétiens auxquels les hommes et les événements ont réussi à tout ravir, tout, sauf le Sauveur, en qui ils espéraient et qui les soutenait. Lui leur est resté jusqu'au milieu de leur complet dépouillement. Et ce que Dieu leur avait donné en leur donnant Jésus, a suffi, non moins certainement, à leurs besoins, souvent si grands. Leur chemin s'est-il rétréci, les difficultés se sont-elles accumulées sur leur route, c'est lui qui s'est tenu à leur côté comme un guide fidèle et c'est lui encore qui a roulé la grosse pierre. Elle a été pour eux, comme elle a été un jour pour ses premiers disciples, cette parole à la fois si humiliante et si belle : Gens de petite foi, pourquoi avez-vous douté ? Qui donc aurait pu rassurer leur coeur tremblant, rendre le courage aux découragés, consoler les affligés, mieux que lui, si miséricordieux, si compatissant, lui qui, dans les jours de sa chair, a passé par où ils passent, lui qui s'est chargé de leur douleur et qui a porté leur langueur !

Nous avons un Sauveur : innombrables sont aujourd'hui les bouches qui le répètent dans des sentiments de reconnaissance pour des délivrances accordées, des fardeaux ôtés et des chemins ouverts devant les pas chancelants de l'homme ! Et si Jésus est un Sauveur pour la vie présente, lui, entre les mains duquel le Père à remis toutes choses, ne le serait-il pas aussi pour les affaires de l'âme ? Nous avons un Sauveur, cela est vrai là surtout où, plus que partout ailleurs, le secours de l'homme est impuissant et vain, je veux dire en présence du péché. Mes frères, l'homme dont les yeux se sont ouverts sur son péché, l'homme effrayé à la vue de sa souillure, l'homme qui sait que chaque jour ajoute quelque nouvelle faute à toutes celles qui l'accusent et le condamnent déjà, l'homme qui voudrait pouvoir faire le bien et qui a compris, avec consternation, que le mal s'attache à ses pas ; celui qui s'écrie : Misérable que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort ? - ce pécheur humilié et attristé, repentant, comprendra seul dans toute sa beauté et répétera avec les accents d'une profonde gratitude, cette parole de l'Évangile : Nous avons un Sauveur ! Ce Jésus dont nous célébrons la naissance, qu'est-il venu faire ici ? Pourquoi cette étable où vous le voyez couché, petit enfant, dans une crèche ? Pourquoi cette vie de renoncements et de douleur qui a commencé dans un jour semblable à celui-ci ? Pourquoi les combats et les luttes dont elle est pleine ? Pourquoi la croix où elle finit dans une suprême douleur ? Pourquoi tout cela ? C'est afin que les victimes du péché puissent se dire : Nous avons un Sauveur !

III

C'est ainsi que l'Évangile est là, aussi grand et aussi complet qu'au premier jour de Noël. On aura raison même de dire qu'il rayonne aujourd'hui d'un éclat plus beau qu'alors. Il a fait ses preuves dans le monde. Il a guéri, jusqu'aux bouts de la terre, dans des milliers de coeurs et dans des milliers de lieux, les épouvantables ravages du mal. Après cela, il ne me reste plus à poser, au nom du Dieu de notre salut, qu'une seule question, la question personnelle : Mon frère, qui lis ces lignes, peux-tu dire, toi aussi : J'ai un Sauveur ?

Je ne demande pas si Jésus veut être aussi ton Sauveur. Pas de doute à cet égard : il n'y a pas d'exclus ; le salut descendu du ciel dans la personne de Jésus est pour tous : la grande joie est pour tout le peuple. Mais ce qui est possible, c'est que l'un ou l'autre d'entre ceux auxquels Dieu a donné un Sauveur, ne se soit pas encore approprié par la foi le don de Dieu, et que Jésus ne soit pas encore devenu, en toute vérité, celui qui le sauve ! S'il en était ainsi pour toi, oh ! laisse-moi te supplier d'écouter le Saint-Esprit de Dieu qui te dit que Jésus t'attend avec le salut qu'il apporte. Il fait bon, il fait beau le connaître, le posséder, crois-le ! Il fait bon pouvoir verser dans le coeur de cet invisible Ami la peine et le chagrin de chaque jour, et savoir qu'il ne se refusera pas à ceux qui l'appellent. Il fait bon déposer chaque jour, entre ses mains et à ses pieds, le fardeau écrasant du péché et recevoir de sa bouche cette parole qui rassure : Mon fils, ma fille, tes péchés te sont pardonnés ! Acceptez donc, vous qui ne l'avez pas encore accepté, le don de Noël. Permettez au Seigneur de mettre dans votre coeur et sur vos lèvres cette parole : J'ai un Sauveur, moi, pauvre perdu ; un Sauveur qui m'aime, me délivre, me bénit, me pardonne et dont la main me tiendra ferme jusqu'à la fin. Bénie, mille fois bénie serait la fête de ce jour, si, de la sorte, elle ajoutait, ne fût-ce qu'un seul pécheur, au nombre de ceux dont Jésus est le Sauveur personnel !

Et vous, chrétiens, qui dites, dans des sentiments de reconnaissance et de joie, que dans la ville de David un Sauveur, qui est le Christ, le Seigneur nous est né, demandez à Celui qui a annoncé cette bonne nouvelle aux bergers de Bethléhem, de répéter aujourd'hui lui-même, par son Esprit, dans le coeur et la conscience de plusieurs, ce message sans égal ; et que la terre tout entière se réjouisse du salut qui est en Jésus-Christ ! Amen,



En Gethsémané.

Et il disait : Abba, mon Père, toutes choses te sont possibles détourne cette coupe de moi ! Toutefois qu'il en soit non ce que je voudrais, mais ce que tu veux.
Marc XIV, 36.

Mes frères,
Il n'y a guère, dans les Saintes Écritures, de parole qui nous initie mieux que celle que je viens de vous rappeler aux luttes qui se sont livrées, pour notre salut, dans la vie et dans le coeur de Jésus, et nous révèle au même degré son amour, sa fidélité et sa soumission en toutes choses. Désirez-vous savoir quel est le Sauveur que Dieu nous a suscité, il y a de longs siècles, et que, journellement, il nous offre par son St-Esprit, retracez à votre esprit et à votre âme la scène inoubliable du jardin des Oliviers. Demandez au Seigneur que ces détails, que vous avez lus et relus, et dans lesquels il n'y a rien que vous ne connaissiez, se présentent à vous avec une nouvelle fraîcheur, et que sur vous tombe un de ces rayons d'en haut qui illuminent ce qui, sans la clarté divine, resterait toujours caché à l'homme. Cherchons sa main, les uns et les autres, pour qu'elle nous introduise dans le sanctuaire de cette heure où Jésus a consommé la consécration de son être à Dieu et où, pour nous sauver, il a accepté à deux genoux la mort de la croix, parce que telle était pour lui la volonté mystérieuse du Père.

I

Jamais plus qu'à la veille de sa mort, dans le jardin de Gethsémané, Jésus n'a été véritablement homme. Nulle part il n'a été appelé à sentir plus cruellement qu'il était sur notre pauvre terre où la lutte et la douleur ont élu domicile. Devant ce Sauveur saisi de tristesse jusqu'à la mort, s'ouvre un abîme de souffrances morales qu'il avait ignoré jusqu'au jour où il y fut précipité et dans lequel, probablement, les angoisses même du Vendredi saint ne l'ont pas fait descendre une seconde fois. - Sa vie, qui ne le saurait ? avait été pauvre en joies, riche en tristesses. Sa vie publique, surtout, avait été remplie de peines accumulées sur son chemin. Et cependant, parmi ces jours mauvais qu'avait dû traverser le Bien-aimé du Père, il ne s'était pas trouvé d'heure égale à celle de Gethsémané. Toutes les douleurs qui avaient assombri son passé l'attendaient, une fois de plus, en colonnes serrées, au delà du Cédron, où il allait chercher, dans la prière, la force pour soutenir le dernier combat. C'est ici que la haine de la vérité et l'inimitié contre Dieu allaient saisir leur victime. C'est ici que devait se dresser devant lui, avec ces détails qui font frissonner la chair, la croix de Golgotha. C'est ici que Celui en qui nous avons la vie, devait être aux prises avec la mort. Vraiment, cette heure était bien l'heure des ténèbres, l'heure du suprême débordement.

Jésus l'a profondément senti. Il est un détail qui le prouve et auquel nous ne saurions songer sans émotion. C'est qu'en pénétrant sous les ombrages du jardin où lui était préparée une lutte cruelle entre toutes, il a éprouvé le besoin d'être entouré de la prière des siens. Que de fois, en les voyant faiblir, n'avait-il pas prié pour eux ! J'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point. - Mais aujourd'hui, c'est lui qui demande à être soutenu par eux. Demeurez ici, veillez avec moi ! Il y a là une révélation qui me confond et qui me jette, humilié, dans la poussière. Eh quoi ? ô mon Sauveur, toi, Fils du Dieu vivant, il s'est trouvé, dans ta vie, un moment où tu as dit à quelques hommes pécheurs que tu avais besoin d'eux ? Toi, par la main duquel ont été créées toutes choses, toi, qui avais accompli des miracles plus grands les uns que les autres, qui avais guéri les malades, chassé les démons, ressuscité les morts, toi, auquel avaient obéi la mer et les vents, toi, tu as demandé des soutiens humains ? Maintenant je comprends que comme les enfants participent à la chair et u sang, tu y as de même participé. Dépouillé de la gloire de Dieu, paru comme un simple homme, revêtu d'une forme de serviteur, semblable à les frères eu toutes choses : ô mon Sauveur, c'est ainsi qu'aujourd'hui tu te montres à mes yeux !

Après cela, ne saurons-nous pas où aller, où nous réfugier à l'heure où les ténèbres nous envahiront, nous aussi, à l'heure des cruels embarras, des souffrances multipliées, des angoisses poignantes ? Voyez, Celui que Dieu nous a donné pour Sauveur, nous a suivis, que dis-je ? nous a précédés dans ces chemins étroits, tortueux, obscurs que la terre tient en réserve pour l'homme et dans lesquels, si souvent, elle place l'enfant de Dieu, le racheté de Christ. Jésus y est avec nous et Jésus nous comprend. Il ne s'étonne pas que la chair frissonne et recule, effrayée, au bord du précipice ouvert. Il nous permet d'être faibles, après que, oserai-je le dire ? - il s'est senti faible lui-même. Ce qui l'étonnerait, ce serait de voir ceux que la volonté du Père appelle à prendre la croix et à souffrir, faire cela d'un coeur léger et comme avec joie. On a vu tel chrétien pousser ses exigences jusque-là. Tel homme qui prétendait marcher au premier rang des croyants, a cru devoir s'écrier : On ne traîne pas sa croix, on la porte ! 0 erreur ! ô subtil orgueil ! Le serviteur voudra-t-il faire plus que soit Maître ? Ne lui suffira-t-il pas de lui ressembler, de trembler et de souffrir comme Jésus qui appelle à son secours des amis auxquels il dira : Veillez avec moi, j'ai besoin de vous, moi qui succombe. Un faux spiritualisme, une fausse conception de l'Évangile voudrait supprimer, pour le chrétien, les douleurs et les luttes de Gethsémané pour le transporter sur quelque montagne de la transfiguration. Mais ce n'est pas la gloire qu'il nous faut pour l'heure présente. Ce ne sont pas les visions célestes qui nous feraient mûrir spirituellement. Ce ne sont pas les ravissements qui nous feraient faire un pas en avant dans la vie divine. Ce dont nous avons besoin, l'exemple de Jésus nous le dira. Qu'il nous instruise à l'égard de la volonté de Dieu. Qu'il nous apprenne quelles sont les vertus qui ont de la valeur aux yeux du Seigneur. Et nous, au lieu de nous détourner, de chercher je ne sais quel autre Sauveur, quelle vie différente de la sienne, approchons-nous du martyr de Gethsémané. Recueillons les paroles qui sortent de sa bouche. C'est ici qu'il y a les leçons de la vie éternelle.

II

Qui ne connaîtrait cette parole dans laquelle un homme de Dieu a fait allusion à la lutte de Jésus dans le jardin de Gethsémané : Quoiqu'il fût Fils, il a appris l'obéissance par les choses qu'il a souffertes. Apprendre l'obéissance, voilà la volonté de Dieu pour Jésus. Tout ce qui rappelle les combats du Maître dans l'existence de ses rachetés vise au même but.

C'est en Gethsémané, en effet, c'est dans ces moments d'inexprimable angoisse, que mon Sauveur m'a montré ce qu'il faut faire pour plaire à Dieu. Abba, mon Père, toutes choses te sont possibles, détourne cette coupe de moi : c'est la crainte, c'est la détresse, c'est la prière de la foi. Toutefois, qu'il en soit non ce que je voudrais, mais ce que tu veux : c'est l'obéissance, c'est la soumission simple, enfantine, aveugle. Dans n'importe quel jour et quelle circonstance de sa vie, sa nourriture avait été de faire la volonté du Père. Mais ici où l'épreuve était arrivée à son comble où les exigences de Dieu avaient revêtu les proportions les plus grandes et les plus cruelles, l'obéissance, la soumission, disent, en Jésus, leur dernier mot. Le Fils ne refusera rien de ce que le Père demandera de lui. Il souffrira, il se laissera crucifier, il mourra parce que le Père le veut ainsi. Il boira, sans la repousser, cette coupe qui s'approche de ses lèvres tremblantes. Ce Jésus que, tout à l'heure, nous avons vu s'associer en plein à notre pauvre humanité, s'élève ainsi au-dessus d'elle, au-dessus de notre péché, de nos désobéissances et de nos révoltes. C'est ainsi qu'il s'acquiert le droit d'être notre grand souverain sacrificateur et d'offrir à Dieu, lui, le Juste, le sacrifice pour les injustes. C'est en Gethsémané qu'il s'est définitivement sacrifié pour nous, afin de pouvoir mourir, quelques heures plus tard, sur la croix, victime d'agréable odeur, en expiation de nos fautes.

Mes frères ! Ce qui s'est passé dans l'âme, le coeur de Jésus, pendant qu'il jetait ce cri trois fois répété : Que ta volonté soit faite et non la mienne ! qui le dira ? Les déchirements au travers desquels ce mot s'est frayé la route, qui les analysera ? Qui expliquera le secret de ces moments dont naquit, inondée de larmes, la grande parole de soumission de notre céleste Frère et Sauveur ?

Mais s'il y a ici des mystères, si l'homme qui réfléchit se trouve réduit à avouer qu'il y a eu sous les oliviers de Gethsémané des choses que la raison ne sondera jamais, - ne comprendra-t-il pas d'autant mieux ce que lui disent, à lui, l'exemple et la parole de Jésus ? - Obéir, nous soumettre, apprendre à nous écrier : Ce sera non comme je le voudrais, mais comme tu le veux ! renoncer à vouloir prescrire à Dieu ce qu'il doit faire ou laisser, renoncer à nous croire quelque chose et à suivre secrètement ou ouvertement le chemin de notre sagesse : voilà la route qu'en Gethsémané Jésus a tracée devant nous ; voilà le sentier étroit que ses larmes et ses angoisses ont ouvert devant ceux qui confessent lui appartenir. Voilà ce qu'il faut savoir et faire pour être propre pour le royaume de Dieu.

L'homme, de tout temps, a trouvé à redire à ce décret divin. Il s'est flatté, dans sa folie, de pouvoir plaire à Dieu en lui offrant n'importe quel sacrifice ; il n'a pas pris garde à ce mot du prophète : l'obéissance vaut mieux que le sacrifice. Il a pensé pouvoir substituer je ne sais quelle oeuvre de son choix et quelles créations de son imagination au seul sacrifice qui soit agréable au Seigneur : l'obéissance et la soumission. Il a oublié que le chrétien le plus parfait aux yeux de Dieu, ce sera non pas celui qui aura accompli les plus grandes choses selon le monde ou selon l'Eglise, mais celui-là plutôt qui, même dans de toutes petites choses aura le mieux obéi à Dieu et laissé la plus grande place à Jésus-Christ. La faiblesse morale de la génération chrétienne actuelle ne se montre-t-elle pas surtout dans ce fait qu'elle ne sait pas obéir ? Demandez-lui des efforts, des travaux, des renoncements, elle les fournira largement, aussi longtemps qu'elle y retrouvera la satisfaction d'un désir, d'un choix du coeur. Mais ce qui lui semble difficile, c'est d'offrir à Dieu et pour le service de Dieu sa propre volonté avec ce que cette volonté avait combiné et trouvé bon. C'est là cependant la leçon qu'avant de mourir, à l'heure la plus difficile de sa vie, le Sauveur a donnée à ses rachetés. Ayant compris mieux que nous ce que Dieu demande, il offre ce que nous avons refusé, il obéit, il se soumet. Comment nous pardonner de ne pas y avoir pensé plus souvent et plus consciencieusement ? Comment excuser nos coeurs, émus de compassion à la vue du martyr divin, mais négligeant d'écouter ce que devait leur apprendre, pour leur salut, cette scène de douleur ?

Jésus aurait pu se passer de nos pieuses émotions, mais ce qu'il aurait voulu trouver en nous, c'est une obéissance semblable à la sienne, c'est le désir de connaître et de faire la volonté de Dieu, là même où cela ne rapporte rien si ce n'est la souffrance.

Hélas ! au lieu de nous conformer au modèle qu'il nous a laissé, nous avons été ingénieux à éluder ses ordres, habiles à concilier notre volonté avec la sienne, ce qui revient à dire que c'est la nôtre qui a passé en premier lieu ; habiles, jusqu'à convaincre nos coeurs que, tout en vivant nous pourrions servir Dieu et vivre pour Christ. En face du sacrifice d'obéissance si grand, si absolu du Fils de Dieu, ayons honte de notre conduite, avouons nos torts. Jetons-nous à ses pieds, dans le jardin, contemplons cette lutte si terrible, que la Bible appelle une agonie, et demandons, le front courbé, s'il y a pardon pour de si grands pécheurs ?

IlI

Il est dans la scène sur laquelle se sont arrêtés nos regards, un détail émouvant entre tous. Le combat se prolongeant, Jésus priait plus instamment avec de grands cris et avec larmes, quand jaillit de son front une sueur comme des grumeaux de sang qui tomba goutte à goutte sur la terre de Gethsémané.

Par là, l'homme obéissant jusqu'à la mort, le Juste consacré pour être l'auteur de notre salut, offrit à Dieu, pour la première fois, du sang en expiation de la désobéissance des injustes. Son obéissance à elle seule, après nous avoir prêché notre devoir et montré notre péché, aurait achevé de nous condamner. Mais arrosée de son sang, elle nous parle de pardon et de grâce. C'est ainsi qu'à l'heure même où, avec frayeur, nous apprenons ce que nous aurions dû être, et ce que nous n'avons pas été, se présente aux yeux de notre foi ce sang qui lave et qui justifie le pécheur. Dès ce moment, il continue à couler, à de courts intervalles, durant les quelques heures de vie qui restent à Jésus. Ce sang rougit, pendant la flagellation, les dalles du prétoire de Pilate ; il rougit, jaillissant sous les épines, la tête de l'Homme de douleur ; il rougit le bois de la croix et la lance du soldat. Et maintenant encore, à cette heure où Dieu nous a parlé de l'obéissance du Sauveur et de notre désobéissance à nous, maintenant encore le sang de l'éternelle alliance, versé un jour pour nous tous, parle pour nous dans les cieux. Pécheurs, qui voulez être sauvés, frères et soeurs désobéissants comme moi, couvrons-nous de ce sang divin dont il nous est dit qu'il purifie de tout péché. Il n'y a, dans le monde entier, rien d'autre qui nous fasse subsister devant Dieu. Seul. le sang de l'Agneau sans défaut et sans tache nous fait trouver grâce à jamais. Amen.


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