Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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SERMONS PAR ÉDOUARD ROBERT-TISSOT


V

Le salaire du péché.

 

Le salaire du péché, c'est la mort.

(Romains VI, 23.)


Cette parole de saint Paul s'adresse-t-elle aux inconvertis seulement ou aussi aux convertis ? Est-elle seulement une parole de sérieux avertissement destinée à montrer aux premiers les redoutables conséquences du péché et à les presser de rompre avec lui, et n'aurait-elle rien à dire aux seconds ? Une fois que le pécheur a reconnu son péché, l'a condamné, en a reçu le pardon, n'a-t-il plus à redouter ses retours, ses attaques, ses victoires, son salaire ? Est-il parvenu à un affranchissement tel que, quoi qu'il fasse, quoi qu'il arrive, cet affranchissement ne peut plus jamais être remplacé par la servitude du péché et ses conséquences de mort ? A ces questions, le réponds que si le croyant est mort au péché, le péché n'est pas mort en lui, et peut reprendre sa puissance, exercer son empire, asservir l'affranchi de Christ, le ramener dans la voie dont il était sorti, lui payer son salaire de mort; c'est ce que l'expérience et l'Écriture nous apprennent également. Par conséquent la parole de notre texte n'est pas une parole de redoutable avertissement pour les inconvertis seulement, à qui elle dévoile d'un mot l'abîme où le péché les entraîne et qu'elle presse de rompre avec un maître qui paye un tel salaire à ses misérables esclaves ; elle est aussi pour les convertis; elle les avertit que si le péché reprend vie en eux, que s'ils le tolèrent au lieu de le combattre et de le refouler par la puissance du Saint-Esprit, ce maître sous le joug duquel ils se sont replacés leur payera à eux aussi, quel qu'ait été le sérieux de leur conversion, quelle qu'ait été jadis la sincérité de leur foi, le salaire qu'il donne à tous ses serviteurs.

Et c'est parce que cette possibilité de retomber sous le joug du péché existe toujours pour le croyant pendant qu'il est sur la terre, et c'est parce que je sais quels efforts le péché fait continuellement pour ressaisir son empire dans le coeur du croyant, que je voudrais tenter de vous décrire ce salaire de mort que vous recevrez de ce maître, si vous lui permettez de demeurer en vous, si vous ne l'attaquez pas à sa première apparition et ne le refoulez pas, mais le laissez au contraire s'établir, s'enraciner, s'étendre. Puissiez-vous, redoutant un tel salaire, épouvantés de telles conséquences, comprendre que nous devons tendre à l'affranchissement du péché, tendre à demeurer et à vivre dans cet affranchissement, afin que nous ayons pour fruit la sainteté et pour fin la vie éternelle !

Qu'est-ce donc que ce salaire de mort que le péché paye à ses serviteurs ? Quand le péché - ce sentiment coupable, ce désir impur, cette convoitise, cette jalousie, cette haine - quand le péché s'est réveillé en vous, que vous le conservez et l'entretenez, que vous vous livrez avec de secrètes délices à son action délétère, et qu'il devient peu à peu l'inspirateur de telle de vos paroles, de telle de vos actions, qu'il prétend ressaisir déjà, d'une main timide encore, le gouvernement de votre vie, que vous ne lui opposez qu'une molle résistance et que vous consentez au partage de votre coeur entre Christ et Bélial, dans l'espoir que Christ saura maintenir ses positions et opposera à l'envahissement du péché que vous acceptez dans une certaine mesure des barrières qui ne lui permettront pas de s'établir en maître - quand le péché s'est réveillé en vous et s'étend, qu'arrive-t-il ?

De même, mes frères, qu'il est facile de suivre les progrès d'une maladie dans son lent et implacable développement jusqu'au moment où, son oeuvre de désorganisation étant achevée, elle la consomme par la mort, il est aisé aussi de suivre dans son développement le travail de mort qui s'accomplit en celui qui s'est replacé sous le joug du péché.

Ce salaire du péché, c'est d'abord, pour celui qui se replace sous sa domination, l'affaiblissement, puis si le péché n'est pas repoussé, la destruction de la vie spirituelle. Ce sont ceux qui ont le coeur pur, dit Jésus, qui voient Dieu; ce sont ceux qui demeurent en Jésus qui portent beaucoup de fruits; ce sont ceux qui gardent ses commandements qui demeurent dans son amour et jouissent de l'intimité et de la douceur de cet amour. Notre communion avec Dieu en Jésus-Christ est en rapport exact avec la pureté de notre coeur, avec notre fidélité et notre obéissance ; nous ne le connaissons, nous ne demeurons en lui, il ne demeure en nous, nous ne nous sentons enfants de Dieu, nous ne pouvons compter sur ses promesses, le prier avec une confiance filiale, que si entre lui et nous il ne s'élève aucune barrière. Mais laissez quelque chose se placer entre lui et vous, cette pensée coupable, cette convoitise, cette jalousie, ce désir impur ; au lieu de le repousser avec horreur, gardez-le, aimez-le, et aussitôt Dieu vous est caché, vous avez perdu sa communion, vous ne vous sentez plus aimés, vous ne l'aimez plus, ses promesses ne vous disent plus rien, ce n'est plus de tout votre coeur que vous le priez. Les arbres étaient en fleurs, la vigne promettait une belle récolte, un matin, il a fait froid et tout a été tué. Ce que la gelée fait aux fleurs de nos arbres, le péché le fait à notre vie spirituelle ; il la tue. Il y aura peut-être encore des apparences de vie, des feuilles, mais de fruit point ; il en sera de l'homme qui a cru, mais qui a permis au péché de le ressaisir, comme de ce figuier qui portait des feuilles, mais n'avait pas de fruit, et que le Seigneur a maudit pour qu'il nous servît d'avertissement.

Mes frères, le salaire du péché, du péché que vous conservez, c'est la mort spirituelle ; et je n'ai rien dit que votre expérience ne puisse confirmer. Le salaire du péché, c'est ensuite l'affaiblissement, puis la destruction de la vie morale. Si vous marchez dans la lumière, non seulement votre communion avec Dieu est réelle et bénie, mais encore vous discernez sans peine la volonté de Dieu, vous apercevez aisément le bien et le distinguez du mal, vous le pratiquez joyeusement, et l'accomplissement de votre tâche est un de vos bonheurs. Mais si vous permettez au péché de prendre pied chez vous, l'oeil de votre conscience ne voit plus ce qui est bien, comme l'oeil de votre esprit ne voit plus Dieu ; vous hésitez sur la route à suivre, vous trouvez des raisons pour expliquer, excuser, légitimer le mal, vous n'aimez plus votre devoir, vous n'éprouvez plus de joie à l'accomplir; votre coeur est ailleurs, une autre pensée que celle de la tâche à accomplir vous occupe et vous domine ; et si pour des yeux qui ne voient que le dehors, votre vie est toujours ce qu'elle a été, pour vous, pour ceux qui vous connaissent bien, pour Dieu, il y a entre ces deux périodes de votre existence une différence profonde : jadis, vous étiez tout à votre travail, le coeur libre et serein, aujourd'hui, vous n'y êtes plus que par contrainte; jadis, vous couriez dans la voie des commandements de Dieu, aujourd'hui, vous vous y trairiez péniblement. Le péché tue la vie morale, la vie de la soumission au devoir et fait perdre la joie dans l'accomplissement de la tâche quotidienne.

Le salaire du péché, c'est encore l'affaiblissement, puis si le péché continue son oeuvre, la mort des affections légitimes et saintes. Lorsqu'on a perdu la communion avec Dieu, on perd l'amour de ceux qu'on doit aimer. Autant l'amour que nous devons aux nôtres s'épanouit et se purifie dans un coeur pur, s'affirme et s'affermit, grandit et s'élève de tout ce que gagne en étendue et en profondeur notre amour pour Dieu, autant il s'affaiblit et s'étiole, et finit par s'éteindre quand le péché envahit le coeur.

C'est que le péché - cette pensée coupable, ce désir impur, cette convoitise, cette jalousie, - jette en nos coeurs de tout autres préoccupations, de tout autres soucis, de tout autres ambitions, de tout autres besoins que ceux que fait naître en nous une légitime affection pour les nôtres. Le péché n'a-t-il pas tué chez Caïn toute tendresse pour Abel, chez les fils de Jacob tout amour pour leur père et leur frère, chez judas toute affection pour son Maître ? Laissez-le agir et bientôt il aura métamorphosé un coeur qui savait aimer en un désert où l'on ne rencontre plus que la plante sèche et amère de l'égoïsme. Le péché tue la vie du coeur, et encore ici, je ne dis rien que ce que votre propre expérience vous a démontré maintes et maintes fois.

Le salaire du péché, c'est la mort de l'esprit par lequel nous connaissons Dieu, la mort de la conscience par laquelle nous connaissons notre devoir, la mort du coeur par lequel nous aimons ceux que Dieu nous a donnés à aimer. Est-ce tout ? Non, mes frères, le péché ne se borne pas à détruise ; il engendre ; mais ce qu'il engendre, c'est encore la mort, une mort vivante si on peut l'appeler ainsi. Voyez cet être que la mort vient de frapper ; il est gisant, sans mouvement et sans vie ; mais revenez un peu plus tard, et vous verrez la vie dans ce cadavre, une vie hideuse, plus repoussante, plus épouvantable que la mort. De même le péché tue en son esclave toute vie relevée, noble, pure, mais ne croyez pas qu'il le laisse à l'état de cadavre inerte, l'abandonne au néant, le livre à la destruction ; il crée la vie dans cette mort il remplace ce qu'il a détruit par ses fruits sur ces ruines, il élève son propre édifice. Qu'est-ce donc?

Ce que c'est ? Ah ! je peux vous le dire et vous le savez aussi. C'est le trouble de la conscience, le front assombri, le regard inquiet, la peur des hommes, l'effroi de l'avenir, les longues amertumes, la lutte sans trêve de l'oiseau enlacé dans le filet, le mal irréparable! ... Tout cela vit, mord, déchire, ronge le coeur ; tout cela, c'est la mort, salaire du péché. La fable nous parle d'un ennemi des dieux enchaîné sur un rocher et dont un vautour déchirait le coeur. Il y a sous cette fable une incontestable vérité : le péché est ce vautour qui déchire le coeur. On plaint, et on a raison, celui qui a perdu sa fortune, ou sa santé, ou ceux qu'il aimait ; ce sont là de grandes douleurs, mais douces après tout, en comparaison de celles que le péché accepté, gardé, aimé, fait goûter à son esclave. Connaissez-vous une situation plus épouvantable que celle d'un Judas qui, sa trahison accomplie, en découvre toute l'étendue, toute l'horreur, tout l'irréparable, et fou de douleur, ne trouvant sur cette terre aucun abri, aucun refuge, demande à la mort ce qu'elle ne pouvait pas lui donner, l'oubli, l'anéantissement ?

Ah ! c'est que, mes frères, quand il s'agit de ce salaire du péché, la mort même ne met pas un terme aux souffrances de ses esclaves. S'ils n'étaient condamnés qu'à quelques années de cette misère que j'ai essayé de vous présenter, et si la mort devait les en délivrer pour toujours, ce ne serait, après tout, qu'un faible mal. Mais la Parole de Dieu nous enseigne que les conséquences du péché accepté, voulu, aimé, ne s'étendent pas seulement sur la vie présente, mais sur la vie à venir qui en est la continuation, le prolongement, qui sera faite, si je peux ainsi dire, des matériaux que nous aurons préparés et accumulés dans l'existence présente. Ce que l'homme aura semé, dit saint Paul, c'est ce qu'il moissonnera aussi. Celui qui sème pour la chair, moissonnera de la chair la corruption, mais celui qui sème pour l'Esprit, moissonnera de l'Esprit la vie éternelle. Et cela est tellement évident, raisonnable, logique, c'est tellement une nécessité morale, qu'il est bien inutile d'avoir recours à de nombreux arguments pour démontrer que l'Écriture dit vrai, que Jésus ne ment pas, quand il parle de l'état futur du pécheur qui n'a pas rompu avec son péché, cette géhenne du feu, ces ténèbres du dehors où il y a des pleurs et des grincements de dents, ce dépouillement du serviteur infidèle, cette malédiction prononcée contre les ouvriers d'iniquité, cette porte fermée aux vierges folles.

Le salaire du péché, c'est-à-dire le salaire que le péché paye à ses esclaves, à ceux qui gardent leur péché, au lieu d'en chercher et d'en trouver l'affranchissement par le pardon et le relèvement, c'est donc la mort de l'esprit, la mort de la conscience, la mort du coeur, et dans cette mort, une vie qui est elle-même une mort, l'affliction et l'angoisse sur tout homme qui fait le mal, et qui se prolongera dans la vie à venir, où l'indignation et la colère seront sur tous ceux qui sont rebelles à la vérité et qui obéissent à l'injustice.

Voilà, mes frères, l'enseignement de l'Écriture, enseignement confirmé par l'expérience : Le salaire du péché, c'est la mort.

Nous disions en commençant que cette parole de saint Paul n'est pas à l'adresse seulement des inconvertis, mais des convertis, des croyants. je voudrais, en terminant, dire quelques mots aux uns et aux autres.

Y a-t-il ici quelqu'un qui, jusqu'à présent, soit demeuré en dehors de l'oeuvre de Christ, étranger à Christ, au pardon et au salut ? je ne peux que le presser de bien considérer la valeur de cette parole du grand apôtre : Le salaire du péché, c'est la mort. Le terme où aboutit fatalement la vole où vous marchez, et qui est une voie de péché, vous n'en pouvez pas disconvenir, quelque honnête que soit d'ailleurs votre conduite extérieure, ce terme, c'est la mort, la mort commençant dès maintenant son oeuvre que l'éternité achèvera et consommera. je vous demande, mes frères, d'examiner s'il est vraiment possible, raisonnablement possible, que le péché conduise à autre chose qu'à la mort, s'il est possible que la route qui se dirige en bas, qui descend, aboutisse au ciel.

Mais cette parole est aussi pour les croyants!

Ici, mes frères, deux cas se présentent : ou bien le péché a déjà repris sur vous un certain empire, vous cédez dans une certaine mesure à son influence, vous lui avez permis de prendre pied dans votre coeur, et dans votre vie, - ou bien vous êtes engagés dans la lutte contre l'ennemi, vainqueurs souvent par la grâce de Celui par qui nous sommes plus que vainqueurs, mais souvent aussi, hélas ! vaincus et succombant.

Avez-vous permis au péché de reprendre sur votre coeur et sur votre vie un certain empire ? L'avez-vous accueilli ? Le gardez-vous ? Mes frères, la position est infiniment grave. Votre complaisance, votre amour pour le péché a déjà certainement produit ses fruits de mort et en produira de nouveaux et de plus amers ; vous n'avez, mes frères, qu'une chose à faire : rompre avec ce péché. Peut-être trouvez-vous dans ce péché de malsaines jouissances; peut-être estimez vous avoir le droit de garder dans votre coeur ce mépris, cette rancune, cette jalousie qui s'y trouvent. Peu importe ! Il faut rompre avec ce péché ! Quoi qu'il vous en coûte, quelque douloureux que soit le sacrifice, quelque humiliation que vous impose, par exemple, une démarche de réconciliation auprès de celui que vous estimez avoir le droit de mépriser et de repousser, il faut rompre ! Car le salaire du péché, c'est la mort. La mort vous envahira tout entiers, si vous ne rompez pas, si vous ne cherchez pas auprès de Dieu votre pardon, si vous ne lui demandez pas de vous revêtir de toute sa force pour que vous puissiez demeurer fermes et triompher. Tout interdit conservé, voulu, est un obstacle qui arrête la bénédiction.

Êtes-vous engagés dans la lutte contre l'ennemi et avez-vous trop souvent à enregistrer des défaites humiliantes et douloureuses ? Mes frères, persévérez ! C'est celui qui persévérera jusqu'à la fin qui sera sauvé. Prenez toutes les armes de Dieu. Cherchez-le dans la prière. Cherchez-le dans sa Parole. Considérez la grandeur de la question qui s'agite: Que servirait-il à un homme de gagner tout le monde, s'il perdait son âme ? Considérez la force, l'habileté de l'ennemi. Considérez la puissance de Celui par lequel nous pouvons être plus que vainqueurs. Ne prenez pas votre parti de vos défaites. Ayez en vue, ayez pour but la sainteté. «Ne savez-vous pas, écrivait saint Paul aux Corinthiens, que quand on court dans la lice, tous courent, mais qu'il n'y en a qu'un qui remporte le prix ? Courez de manière que vous le remportiez. Quiconque combat s'abstient de tout, et il le fait pour une couronne corruptible, mais nous le faisons pour une couronne incorruptible. Je cours donc, ajoute-t-il, je traite durement mon corps et je le tiens assujetti, de peur qu'après avoir prêché aux autres, je ne sois moi-même rejeté. » Soutenons le bon combat ; persévérons dans la bonne guerre ; conservons la foi et la bonne conscience, de peur que, laissant le péché nous envahir, nous ne fassions naufrage en ce qui concerne la foi, car le salaire du péché, c'est la mort.

1884.


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