Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



LA PUISSANCE DE LA PRIÈRE


À SES PAROISSIENS, LECTEURS, ANCIENS ÉLÈVES ET AMIS

Ouchy, Pâques 1920.

 

Depuis cinquante-cinq ans notre cher disparu était à la brèche.
Brusquement enlevé à sa tâche quelques semaines avant les fêtes des Rameaux et de Pâques qu'il aimait tant et qu'il appelait le printemps spirituel, par le présent message il s'adresse une fois encore à ses paroissiens, à ses catéchumènes, à ses auditeurs, à son Église, avec l'autorité de celui qui a subi l'épreuve de la mort et qui est promu. Une fois encore il veut encourager, consoler, affermir.

Parmi les nombreux travaux inédits laissés par l'infatigable ouvrier de la plume que fut Paul Vallotton, ses proches ont trouvé un manuscrit : La Puissance de la Prière, vrai testament spirituel du fidèle pasteur, explication profonde de la force d'amour et de foi qui anima, soutint sa vie et qui fit de cet homme, d'une infinie bonté, un vaillant, un lutteur, un fort.
Fort, il l'était, par cette puissance de Dieu dont il entendait être toujours et partout le serviteur, le porte-parole.
Fort par la certitude absolue, par cette conviction inébranlable qui est la lumière de chaque jour.
Fort aussi par la consécration du coeur, par la dépréoccupation de lui-même, par l'amour de sa tâche, par « l'amour des âmes » et par « l'amour du peuple », comme il disait souvent, affections profondes sans cesse vivifiées par l'amour du Dieu Vivant.
Fort par la belle vaillance physique qui lui permettait encore, sans arrêt, sans défaillance, sous les cheveux blancs, de se dépenser avec une juvénile énergie, d'affronter les vastes édifices et d'adapter sa parole aux moindres réunions familières ; de porter, par tous les temps, le message de la Résurrection et de la Vie au bord des tombes - ainsi neuf fois en quinze jours, en janvier 1920 ; d'exhorter, d'instruire près de deux cents catéchumènes ; et enfin de poursuivre régulièrement, dans une paroisse très populeuse, tout un ministère de secours et de consolation.

Cette vaillance lui permettait, au terme de journées pénibles, de veiller chaque soir bien des heures, souvent très au delà de minuit, près de sa petite lampe fidèle, expédiant vivement, de son écriture rapide, correspondance de paroisse, messages affectueux, conseils, affaires de pauvres, avec quelle touchante sollicitude, ces lettres-là ! Et puis, ce courrier quotidien achevé - dix, vingt, parfois trente lettres -, méditant, le crayon à la main, l'Ancien Testament, les Évangiles, lisant journaux et revues, livres et brochures, les annotant, y puisant idées et arguments pour ses discours ou son prochain volume, car il voulait suivre l'évolution « de la grande, douloureuse et noble humanité » - c'étaient les mots de son coeur - et fonder son message sur les vérités éternelles tout en l'adaptant aux temps modernes, aux préoccupations du jour.

Fort, le pasteur d'Ouchy l'était enfin et surtout par son amour de la justice qui lui fit vivre les cinquante mois de guerre avec toutes les forces de son coeur ; par sa transparente sincérité et sa foncière droiture, par sa profonde, sa totale humilité d'âme :
- cette humilité candide comme celle d'un enfant, jointe à l'expérience d'un ancien, cette humilité qui est la grande force puisqu'elle fait qu'on ne compte pas sur soi-même, mais que l'on s'appuie tranquillement sur la force et la sagesse d'En Haut.

Pendant toute une longue carrière, par la grâce du Ciel, de toutes ces forces-là le serviteur de Dieu fut fort.

... Et voici, à l'heure marquée, après trois jours de maladie, - le vendredi 6 février il donnait encore son catéchisme et faisait gaîment une longue tournée de visites, - le mardi 10 février 1920, trente et un ans, jour pour jour, après son élection pastorale à Lausanne, ce courageux était enlevé à l'affection des siens et de sa paroisse.

Le dimanche matin, ne pouvant plus guère parler, notre cher disparu a eu ces deux pensées pour ses paroissiens : l'une, un message de sollicitude pour les déshérités ; il a pris grand intérêt à une question d'assistance, il s'est réjoui d'un secours accordé sur sa demande, et il a souri. Et l'autre un message de foi, de louange, d'adoration, adressé à tous, quand il a demandé qu'on lui lise les paroles d'un cantique qu'il aimait :

Grand Dieu, nous te bénissons,
Nous célébrons tes louanges....
Sauve ton peuple, Seigneur,
Et bénis ton héritage !
Conduis-le, par ton Amour,
Jusqu'au Céleste Séjour !...

Peu d'instants avant la fin, il dit : « La délivrance ! » Sur la petite table où sa main avait tracé tant de pages, un plan d'article pour le journal de la paroisse était là :

« Coin des Jeunes : A côté des sommets, les abîmes. tomber. Danger. Repérer les marais. Atteindre les cimes !... Quelque chose de cordial pour les deuils récents.... Les difficultés.... -- À ceux qui ne sont plus jeunes : Tirsis, il faut songer à la retraite, La course de nos jours est plus qu'à demi faite... Le coin des hirondelles : L'âme est une hirondelle. Envol. Des ailes !... Fuir l'hiver. »

Envol ! Des ailes !... Le visage éclairé d'une magnifique clarté, ayant adressé aux siens ce sourire qui dit tout, qui est un adieu et une promesse, le regard dirigé en haut, quatre heures et demie ayant sonné à l'horloge qui si longtemps rythma son travail, le fidèle soldat de Dieu s'en allait à la promotion suprême, visiblement soutenu, jusqu'à la dernière seconde, par une communication de la force d'En Haut.

Tout près, l'unique inscription biblique de la chambre de travail disait : Christ est ma vie. Et ces mots planaient encore sur ce lumineux départ :

Conduis-le par ton Amour
Jusqu'au Céleste Séjour.

Les mains jointes, celui qui avait pris son envol pour fuir l'hiver souriait encore, transporté de la vie passagère de l'homme, par la puissance de la prière, à la clarté de la vie éternelle.

... Et maintenant, vous tous qu'il aimait, ces pages sont pour vous.

CH. V. - B. V.


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