En Canot et en traîneau
À CHIENS
Parmi les Indiens CREE et SALTEAUX
EGERTON R. YOUND
PRÉFACE
Mon ami, M. Egerton Young, me demande
d'écrire quelques mots de préface
à son volume. J'accède bien
volontiers à son désir, quoiqu'il
n'ait aucun besoin de moi pour le présenter
aux lecteurs de la mère Patrie.
C'est par une radieuse journée de
mai, en 1887, que je rencontrai M. Young sur le
rivage du Golfe de Géorgie (Canada).
Après avoir traversé la
rivière au milieu d'une foule d'hommes et de
jeunes garçons activement occupés
à harponner les poissons qui arrivaient en
bancs du Lac Huron, et longé les quais, nous
atteignîmes la grève et, nous
asseyant, nous nous mîmes à causer. Je
fus de suite à l'aise avec ce
prédicateur méthodiste simple et
ouvert. Il se trouva qu'il avait été
missionnaire durant des années parmi les
Indiens Cree et Salteaux, là-bas dans la
« Terre
désolée ». Je n'avais
qu'à poser une question de temps en temps,
Puis à écouter ravi. Le pays, les
habitants, la froidure, les chiens, les ours, tout
l'environnement de sa vie s'animait devant moi et
l'après-midi s'écoula bien trop
rapidement à mon
gré, au milieu d'aventures invraisemblables
et de merveilleux récits de conversions.
Dès lors cette journée a vécu
parmi les trésors de mon
imagination.
Il me conduisit chez lui où je
fis la connaissance de son excellente femme et de
ses enfants. On m'y installa sur une fourrure qui
m'intéressa. « Qu'est
ceci ? » demandai-je. Mon hôte
se mit à rire : « C'est un
loup gris, féroce compagnon qui souhaitait
de dévorer mon Eddie et qui, sans la
miséricorde de Dieu, l'aurait certainement
fait. »
Alors commença un nouveau
récit: comme quoi auprès des
éléphants, des buffles ou d'autres
animaux qui vivent en troupes, il s'en trouve
souvent un qui, pour une raison quelconque - ou
sans aucune raison - vit isolé et devient de
tous ses pareils le plus dangereux et le plus
malfaisant. Parfois, et peut-être le plus
souvent, il est enragé. Dans ce cas-ci,
c'était un loup. Les Indiens coupaient du
bois dans la forêt pour la provision d'hiver
et le petit garçon les aidait en charriant
les bûches dans un traîneau à
chiens pour retourner ensuite à toute
vitesse à la maison sur le traîneau
vide. Il était en route sur le
véhicule chargé lorsque la bête
furieuse s'élança hors de la
forêt et se mit à courir à ses
côtés, cherchant à l'atteindre
sur son tas de bois, tandis que les chiens
effrayés galopaient éperdument. Une
minute d'écart, un heurt,
et c'en était fait de l'enfant, mais par la
bonté de Dieu il atteignit sa demeure.
L'instant d'après, le loup fut tué et
sa dépouille argentée s'allongeait
maintenant devant le foyer.
Avant de quitter mon hôte pour
m'acquitter de mes devoirs en ville, puis pour
regagner ma demeure en un long trajet à
rames à travers le lac, je lui fis promettre
de venir en Angleterre pour raconter l'histoire de
sa mission. C'est ce qu'il a fait et, soit lui,
soit sa compagne, ont ému des milliers et
des milliers de personnes en retraçant leurs
travaux et les grandes bénédictions
dont Dieu les a couronnés.
On a dit que les hommes qui font
l'histoire ne sont pas ceux qui l'écrivent.
Il est vrai que des années en canot et en
traîneau à chiens ne supposent pas de
longs loisirs pour s'exercer dans le maniement de
la plume, et surtout lorsque ce n'est que tous les
six mois que l'on peut communiquer avec le monde
des lettres. Si les souvenirs imprimés du
missionnaire n'ont pas la force et le charme de ses
allocutions, n'en est-il pas de même pour
tout ce qui vaut la peine d'être entendu
lorsque la voix de l'orateur fait
défaut ? Néanmoins, je suis
assuré que des milliers de ses auditeurs
seront heureux de posséder sous une forme
permanente ce qu'ils ont eu le privilège
d'entendre et qu'un grand nombre
de ceux qui n'ont pu l'entendre
jouiront de le lire. Je souhaite ardemment que ce
livre soit répandu comme il le mérite
et ma prière est qu'il soit en
bénédiction selon le désir de
son auteur.
M G. P.
|