Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



CONTRE LE COURANT

TROISIÈME PARTIE


XVII

(Villa Daphné)

 

Le revoir de Daphné avec son père fut un délire de joie chez elle, un bonheur contenu, niais intense chez lui.
- Tu sais, papa, lui disait-elle constamment, maintenant, je connais Dieu ! Je suis tellement plus heureuse ! Et Jésus aussi ! Oh ! papa, c'est si beau !

Et un jour, elle ajouta, tout bas, en cachant sa tête blonde sur la poitrine de son père :
- Oh ! si maman avait su tout ça !

Avec le singulier tact de l'enfance, elle ne lui dit jamais : « Pourquoi m'as-tu laissé ignorer tant de choses ? », mais il sentait qu'elle le pensait et s'étonnait secrètement de ce que lui, qui l'aimait tant, eût, négligé de lui fournir ces éléments de. si grand bonheur.
Daphné fut, de suite, sur un pied de grande amitié avec John Meyling. L'habitude que celui-ci avait des enfants, le rendait accessible à toutes leurs idées et le fait "qu'il était chrétien intéressait prodigieusement la fillette.
- Vous ferez croire papa, n'est-ce pas, M. Meyling ? lui disait-elle souvent. Dites-lui bien que c'est le Seigneur qui m'a guérie. C'est le Dr Lenoir qui l'a dit.

Une ou deux fois, pendant que M. Barrett se reposait, Miss Duncan et son élève sortirent, accompagnées de John Meyling, ravi d'échapper ainsi, pour quelques semaines, aux brouillards de Londres, et de se laisser baigner dans la grande lumière méridionale.
Miss Duncan raconta sa conversion à ce nouvel ami et il lui raconta, la sienne. Comme toujours, l'histoire était longue et. douloureuse, et le chemin sombre. Mais quelle joie, à la sortie du tunnel et avec quelle émotion chacun pouvait parler du jour où il avait pu dire : « J'étais mort et suis revenu à la vie, j'étais perdu et Christ m'a retrouvé ».
Un matin, pendant une de ces promenades, ils passèrent devant un grand portail qui fermait un mur élevé entourant une belle propriété. Tous les arbres du Midi y déployaient leurs opulentes frondaisons : palmiers, eucalyptus, poivriers, etc... À travers la grille, on voyait une vaste maison blanche, au milieu des pelouses fleuries.
Et aux piliers du portail, sur une plaque de marbre et en lettres d'or, ces mots : Villa Daphné. À vendre.
- Oh ! cria la fillette, stupéfaite, en s'arrêtant. Qui a mis mon nom là ?

Miss Duncan et John Meyling s'étaient arrêtés aussi, amusés.
- Pensez-vous être seule propriétaire de ce nom ? demanda-t-il.
- Non, mais....
- Mais quoi ? interrogea Miss Duncan.
- C'est drôle. je veux le dire à papa... puisqu'il dit toujours qu'il veut acheter une, maison.

Ce qui fit que le lendemain, M. Barrett, M. Duclavel, John Meyling et Daphné, accompagnés d'un employé d'agence avec les clés, pénétraient dans la villa au nom prédestiné.
Elle était très grande, composée de deux ailes et d'un centre, presque neuve, son propriétaire étant parti pour les pays lointains, après la mort de sa jeune femme pour laquelle il l'avait construite.
Le jardin surtout enchantait Daphné, car il possédait une volière comme le parc des Vateau à Meirage.
- Oh ! papa, c'est ma villa ! Tu vois, elle s'appelle comme moi ; achète-là, papa, je t'en supplie !

M. Barrett était homme d'affaires trop avisé pour se décider si vite, mais, après en avoir parlé avec les amis présents, surtout avec M. Duclavel, qui était du pays, et après deux ou trois visites, l'affaire fut conclue à la satisfaction générale.
La maison était toute meublée, de sorte que l'on put s'y installer de suite et « pendre la crémaillère », dès la première quinzaine de janvier, avant le départ de John Meyling.
La « crémaillère » consistait en un dîner de famille, où seuls, les Duclavel (Roseline avait pu s'échapper), Mireille et Claude, avaient été conviés. Miss Duncan et Daphné s'étaient distinguées par une décoration florale de la table, qui aurait pu rendre jalouse une fleuriste professionnelle et John Meyling s'était multiplié de toutes manières.
Au dessert, M. Barrett se leva :

« Mes chers amis, prononça-t-il d'une voix que l'émotion faisait trembler, c'est la première fois de ma vie que je puis, sans arrière-pensée, me dire que je suis vraiment au milieu d'amis. Vous m'avez témoigné, tant d'affection désintéressée, ainsi qu'à ma petite Daphné, que je me sens comme dans un monde nouveau. Et pourtant, je ne partage pas encore votre foi, qui est celle de toutes les personnes présentes ici. Malgré cela, vous m'avez aimé et aidé, vous avez tous prié pour moi. Peut-être un Jour, Dieu exaucera-t-il vos prières.
« Mais en attendant, je dois vous dire que votre dévouement à tous, votre amour pour le prochain, votre souci constant des souffrances d'autrui, m'ont fait réfléchir. J'ai eu horreur de ma vie d'égoïsme et d'indolence, Ma pauvre santé ne me permet pas de me Mettre moi-même à la tête d'une oeuvre quelconque. Mais voici ce que j'ai pensé, au sujet de la maison que nous inaugurons ce soir. je dois dire que c'est à l'exemple de mon ami Meyling.
« Daphné et moi n'occuperons jamais qu'une petite partie de cette demeure. Nous nous contenterons donc de l'aile gauche, et la partie centrale et l'aile droite pourront être consacrées à recevoir en convalescence ou en repos, les enfants que Mlle Roseline a si souvent l'occasion de rencontrer, dans son oeuvre de charité, et qu'elle nous enverra. Nous réglerons plus tard les détails, mais en principe, c'est là mon désir le plus cher. Qu'en dis-tu, Daphné? ».

La fillette avait écouté son père avec ravissement, et, en un instant, fût dans ses bras :
- Oh ! papa, que tu es gentil ! Que tu es bon ! Des enfants ? ... Ici ? ... Comme le petit Jean ?

Et elle le couvrit de baisers.
Au milieu des félicitations et après de chaleureuses poignées de mains, M. Barrett se rassit. Il était, en. effet, vraiment heureux. Il proposa ensuite, d'envoyer -un télégramme collectif au Dr Lenoir, pour l'associer à la joie générale et lui témoigner, une fois de plus, sa gratitude personnelle.
Meyling, lui aussi, débordait d'une allégresse immense.
- Que les plans de Dieu sont merveilleux ! et que ne peut-Il pas faire sortir d'une rencontre sur un banc de Hyde-Park ! disait-il à M. Duclavel, le jour où celui-ci l'accompagna à la gare, avec M. Barrett.

Quelques semaines s'écoulèrent.
Un matin, une lettre arriva à la Villa Daphné, venant de Londres.
- « Mon cher ami », écrivait John Meyling, après avoir lu ces lignes, vous allez peut-être regretter votre trop généreuse invitation de Noël. je crains de vous avoir fait un tort immense, malgré, les choses aimables que vous m'avez dites. Vous savez que j'avais renoncé. a me marier, mais ma santé est si bien rétablie et ma situation améliorée au point que je 'puis, sans scrupule, envisager la fondation d'un foyer.
« Et c'est ici, mon cher ami, que mes aveux deviennent pénibles, quoique réjouissants pour moi. Pendant mon séjour avec vous, j'ai cru que Dieu me destinait comme la plus désirable des compagnes; la charmante amie de votre fillette, Miss Duncan. Je lui ai écrit d'ici et elle a acquis la' même conviction. M'en voudriez-vous de vous l'enlever ?

M. Barrett ne fut pas absolument surpris. Il avait vu, dans le courrier, passer deux ou trois lettres, de l'écriture de John Meyling, adressées à Miss Duncan et avait deviné la vérité. Bien loin de s'en désoler et malgré la perte qu'il faisait quant à Daphné, il ne pouvait que s'en réjouir pour son ami et pour Miss Duncan, qu'il avait appris à estimer encore davantage.

« Il n'y a pas à dire, pensa-t-il, en lisant ces lignes, ceux qui se confient en Dieu finissent par avoir leur récompense, même ici-bas. Mais moi, je suis indigne de toute bonté de la part de Dieu. je n'ai jamais rien fait pour les autres, encore bien moins pour Lui ! ».
Mais voici ce qu'il répondit à Meyling, après l'avoir rassuré et félicité.
« Il y a bien des gens en Angleterre pour diriger des oeuvres. Pourquoi, ne viendriez vous pas diriger celle que je veux fonder ici et pour laquelle Miss Duncan et vous seriez si bien qualifiés ? Vous savez que personnellement, j'aurais aussi grand besoin de vous. Vous m'aideriez, non seulement à trouver le Sauveur qui vous a rendu si heureux, mais à utiliser ma fortune d'une manière intelligente et fructueuse.
« Pensez-y et si Ion peut vous trouver un remplaçant là-bas, cela pourrait peut-être s'arranger pour que nous commencions l'oeuvre, l'automne prochain. »

Cette missive plongea John Meyling dans l'étonnement. Jamais cette pensée ne lui était venue. Quitter ces enfants qui le considéraient comme un père, pour aller dans l'inconnu d'une oeuvre encore inexistante ?
Comment connaître la volonté de Dieu ?
Il se mit à prier avec ferveur.
Peu de temps après, des amis qui ignoraient tout de ceci, lui écrivirent, lui demandant s'il connaîtrait une situation pour un couple de missionnaires qui devaient rentrer des Indes à cause du climat et qui avaient dirigé là-bas une grande oeuvre d'enfants.
C'était là la réponse. Meyling écrivit donc tous ces détails à M. Barrett.
Quant à Miss Duncan, son émerveillement fut sans bornes. Elle n'était pas encore habituée aux. délivrances que Dieu accorde à ses enfants et elle se demandait si elle rêvait.
La grande ombre au tableau, lorsqu'elle s'était aperçue de l'amour de John Meyling et de celui qui grandissait dans son coeur à elle, avait été la séparation d'avec Daphné.
Le problème ainsi résolu, lui apparut comme un miracle véritable. Daphné elle-même avait poussé des cris de joie à cette nouvelle et ne cessait de faire des plans pour la « noce » qui devait avoir lieu à Nice, puisque la fiancée était orpheline.

Il va sans dire que la famille Duclavel se réjouissait aussi de ces événements.
Et de son côté, M. Duclavel reçut du Dr Lenoir -une lettre à laquelle il s'attendait, depuis le dernier séjour a Meirage. Elle était ainsi conçue

« MON CHER AMI,
Vous savez que, Par goût et par métier, je n'aime pas les longs, préambules. Aussi laissez-moi vous dire tout de suite : J'aime votre fille Roseline. je l'aime, depuis la première fois que je l'ai vue. Mais je me demandais si son coeur ne dormait pas pour toujours là-haut, dans la tombe de Louis Breton. Et d'ailleurs, elle aurait eu avec moi les mêmes raisons de refus qu'avec lui. Une femme comme celle-là ne change pas.
Mais en la revoyant à Meirage, moi, dans une foi Pareille à la sienne, et l'espérance que son coeur pourrait revivre, j'ai beaucoup prié ; puis, j'ai tenté ma chance, en lui écrivant mon amour. Elle a dû vous dire qu'elle a répondu de la manière la plus satisfaisante pour un pauvre être comme moi, depuis si longtemps privé d'affection. Me la donnez-vous ?
Je sais que c'est un précieux trésor pour vous, mais elle ne sera pas perdue. je vous connais assez pour savoir que vous n'en êtes plus à regarder aux sacrifices personnels lorsqu'il s'agit du bonheur des autres. Et à vous et à Mme Duclavel, je dis merci d'avance. Et que Dieu m'aide à être digne d'une pareille compagne !
« A. LENOIR. »


.
XVIII

Mariages

 

Il fut décidé que les deux mariages seraient célébrés le même jour, et que le repas de noces, tout intime, aurait lieu dans le jardin de la Villa Daphné.

C'était l'Avril de nouveau.
La merveilleuse floraison des roses de la Côte d'Azur, étendait ses manteaux parfumés sur les murs et les pelouses, escaladait les balcons, enveloppait les terrasses.
Tout était beauté, paix et joie dans la nature, comme, dans les coeurs.
Les deux mariées, aux couronnes de roses blanches, avaient déposé leur voile ; et leur visage lumineux semblait avoir reçu un pur rayon du ciel.
Elles avaient assez souffert pour apprécier leur calme bonheur. Et ceux qui les entouraient avaient connu des chemins bien sombres et rocailleux des jours d'angoisse et même de désespérance.
Mais tous avaient courageusement résisté au courant du monde et recevaient aussi l'accomplissement des promesses divines pour ceux qui ont mis en Dieu une complète et inébranlable confiance.
M. Barrett lui-même devait mettre le comble à la joie générale.
Comme le soir de la prise de possession de la maison, il se leva au dessert :

« Mes chers amis », dit-il, après avoir fait un toast chaleureux aux nouveaux mariés, « je vous dois à tous beaucoup. je vous l'ai déjà dit dans une autre circonstance. Mais aujourd'hui; je désire vous dire davantage. Vos paroles et votre exemple, Madame (il se tourna vers Roseline) ont commencé à me faire réfléchir vos encouragements m'ont sauvé du désespoir votre sympathie, à une heure terrible de ma vie, m'a donné le désir de continuer la lutte. Vous m'avez apporté la lumière du grand salut qui est en Christ, et j'ai la joie de vous annoncer que je l'ai enfin reçue et suis devenu enfant de Dieu. Vous tous, et en particulier, M. Duclavel, 'm'avez instruit et entouré, de vos prières. En cet instant, vous êtes récompensés ».

Il s'assit, vaincu par l'émotion.
Dans ses bras, Daphné, se mit à sangloter de joie.
Dans ce jardin fleuri, autour de cette table d'hyménée, un cantique d'adoration et d'allégresse s'élevait de chaque coeur vers le ciel, où les anges se réjouissaient aussi.

M. et Mme John Meyling partaient ce même soir pour l'Italie, et Roseline et son mari pour Paris, puis pour Strasbourg où des 'amis du chirurgien les avaient invités au cours de leur voyage de noce.
Une fois dans le train, seuls dans leur compartiment, le Dr Lenoir passa son bras autour de sa femme.
- Roseline, ma bien-aimée, dit-il, j'ai attendu à cette heure pour te demander une faveur. je voudrais que nous passions de nouveau, par cette petite gare de M... où, un soir de la grande étions rencontrés. Je voudrais refaire ce trajet pendant lequel tu m'avais confie une page douloureuse de ta vie... et où je t'avais dit que je voudrais mourir en tenant ta main... ou celle de quelqu'un possédant la même foi... Tu te rappelles ?
- Oui, dit-elle, la voix tremblante, mais en souriant.

Quelle étrange requête, pensait-elle, pour un homme aussi positif que le Dr Lenoir, si peu adonné aux fantaisies sentimentales ! Mais elle venait de découvrir en lui, tout un monde de délicate sensibilité de besoin intense de consoler, d'aimer, de donner du bonheur, en proportion. des souffrances passées !
- Ce n'est pas tout, poursuivit-il. J'aimerais que nous allions ensemble, rechercher la tombe de Louis Breton.

Elle le regarda, stupéfaite.
Requête encore plus étrange que la première !
Il fallait être le Dr Lenoir, pour proposer à une jeune femme, en voyage de noce, d'aller visiter la tombe d'un homme qu'elle avait aimé !...
Mais devant son regard d'amour. infini et de tranquille assurance, elle acquiesça, sûre qu'elle comprendrait mieux là-bas.
Ils l'avaient enfin trouvée, la petite croix de bois, au milieu des allées régulières de l'immense cimetière de soldats. Toutes pareilles, humbles et blanches, elles sèment de leur symbole de sacrifice, la plaine verdoyante.
M. et Mme Lenoir s'arrêtèrent.
Il se découvrit et tous deux inclinèrent la tête.
Dans leurs coeurs, le remontait comme une marée triste et douce, tout à la fois.
- Roseline, dit le Docteur, c'est dans le petit billet froissé de Louis Breton, que tu m'avais donné à lire, que j'ai tu le premier rayon d'en-Haut. Il parlait « des choses qui passent et de celles qui sont éternelles ». Il disait que ton exemple, ta résistance à l'entraînement du monde, lui avaient révélé la Vérité. Et j'ai souvent réfléchi à cela. Voilà donc ce que font ceux qui remontent courageusement le fil de l'eau, non seulement ils sont sauvés, mais ils en aident 'd'autres !
- Agenouillons-nous, dit Roseline à voix basse.

Devant la croix de bois, il y avait un petit espace, assez grand pour deux.
- Oh ! Christ, balbutia la jeune femme, Sauveur et Maître adorable, aide-nous à remonter toujours plus résolument le courant, et à en entraîner d'autres. Notre vie est à Toi...
- Notre vie est à Toi, Seigneur, répéta le Dr Lenoir, en attendant que Tu viennes.

Hedgar PLUVIANNES.

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