SECTION III - Introduction spéciale aux Epîtres , depuis la première aux Thessaloniciens jusqu'à Jude. ( Suite)

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 § 188. Seconde épître de Pierre ( an 64 ou 65). - L'épître est adressée à tous les croyants ( I, 1) et spécialement aux mêmes personnes que la première (III, 1). Elle fut écrite peu avant le martyre de l'apôtre (1, 14), circonstance qui contribue à lui donner un solennel intérêt.

De même que dans la première épître l'apôtre exhortait à la patience sous la persécution , il exhorte ici à la persévérance dans la vérité au milieu de l'erreur dominante et de l'infidélité pratique.

Le meilleur préservatif est , comme il le dit lui-même, une piété progressive (I , 3 -11) ; il montre une preuve décisive de la vérité de la doctrine de l'Ecriture dans l'irréfragable témoignage et dans l'accomplissement de la prophétie (I , 16-21). Il avertit, dans les termes les plus énergiques et les plus redoutables , les faux docteurs et ceux qui commencent à se laisser séduire par eux , et leur signale leur péché et le danger qu'il entraîne (II, 1-22). Il leur proteste que le second avènement du Seigneur, quoique différé par sa longue patience, est aussi certain que le fait du déluge (III, 1-13). Il leur montre tout ce qu'il y a aussi de beau et de consolant dans ce fait, et il invite les chrétiens à la vigilance et à la sainteté (III, 14,18) Il invoque les enseignements de Paul en confirmation de ses vues, et fait remarquer comment les hommes ont tordu ces enseignements au point d'en déduire les pratiques les plus pernicieuses, mal auquel il faut remédier , non en négligeant ces Ecritures , mais en redoublant d'attention , de docilité et d'humilité (III, 15 , 16).

On ne sait pas au juste à quelle secte ou à quels hommes l'apôtre fait ici allusion. Il est parlé de leurs pratiques licencieuses ( Il , 10-15) , de leur cupidité, de leur reniement du Seigneur (II, 1) , de leurs promesses d'une fausse liberté (II, 19) , caractères qui permettent de les confondre avec ceux qui sont mentionnés presque dans les mêmes termes par Jude et par Jean (Apoc. , II, 14 , etc.).

Sur l'authenticité de cette épître , et des autres antilègomènes, voyez § 172, et première partie, §§ 49 et 53.

Que les hommes sont donc enclins à pervertir la vérité ! Les Thessaloniciens supposaient que la venue du Seigneur devait être immédiate; ceux dont parle Pierre supposent au contraire qu'elle doit être indéfiniment différée. Au milieu de ces tendances diverses, il ne fallait rien moins que l'Esprit saint pour maintenir les apôtres dans une vigilante et patiente conduite, et rien moins que la force de ce même Esprit pour enseigner à de pauvres pécheurs à parler comme ils le font de Dieu, du péché et du jugement à venir. La sublimité, la spiritualité et l'harmonie de ces révélations comptent parmi les preuves les plus décisives d'une inspiration divine.

Nous recueillons comme un trésor les dernières paroles des grands hommes. En voyant s'approcher rapidement l'heure du martyre, Pierre est frappé surtout de l'extrême importance de la sainteté , et il voit dans la persévérance la plus précieuse bénédiction. Son dernier précepte est « croître dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, » et son dernier témoignage est en faveur de la divinité de son Seigneur; « à lui soit gloire maintenant et jusqu'au jour d'éternité, amen. » (2 Pierre , III, 18.)

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§ 189. Seconde épître à Timothée (Rome, an de J.-C. 65 ou 66). - Cette épître fut écrite pendant que Paul était prisonnier à Rome (voyez I, 8, 16; IV, 6), et probablement pendant sa seconde captivité, peu avant son martyre. Ce qui fait supposer qu'elle ne le fut pas pendant la première , c'est en partie l'absence de quelques-uns de ceux qui étaient avec lui à cette époque (voyez Philip., I, 1. Col., I, 1. Phil., 1. Héb., XIII , 23. Comp. aussi IV, 10 , 11 avec Col., IV, 10, 14); la différence qu'il y a dans la manière dont l'Apôtre exprime ses espérances, maintenant fixées , au sujet de son prochain délogement (comp. IV, 6 avec Philip., I, 25; II, 24. Phil., 22. Héb., XIII, 23); puis enfin sa position toujours plus isolée et son délaissement plus entier (comp. I, 17, 18 avec Actes, XXVIII , 30, 31 , et Philip., 1, 13). Mais il y a une preuve plus décisive encore dans quelques allusions incidentes à des faits qui se sont manifestement passés peu de temps avant que cette épître ne fût écrite. L'Apôtre fait mention d'un manteau et de parchemins laissés à Troas (IV, 13), ville que Paul n'avait pas visitée depuis cinq années lors de sa première captivité; il parle de Trophime, qu'il avait laissé malade à Milet (IV, 20) ; or, ce Trophime avait été avec Paul à Jérusalem à l'époque de sa première captivité (Actes, XXI, 29) ; d'Eraste qui était resté à Corinthe (IV, 20), où Paul n'était pas allé depuis la visite qu'il y avait faite cinq ans auparavant dans la compagnie de Timothée (Actes, XX , 4). Toutes ces circonstances semblent montrer que cette épître doit avoir une date plus récente, probablement l'au 65 ou 66, deux ans plus tard que la première épître.

L'intervalle entre ses deux emprisonnements, Paul parait l'avoir passé d'abord en Asie (Phil., 22. Philip., II, 24; I, 25), puis en Macédoine (1 Tim., I, 3), enfin à Nicopolis où il a hiverné (Tite, III, 12). Pourquoi retourna-t-il à Rome? C'est ce qui ne nous est pas dit; mais il y fut bientôt mis en prison comme un malfaiteur (2 Tim., II, 9); parmi ses accusateurs était Alexandre, le docteur judaïsant d'Ephèse, « qui lui avait fait beaucoup de mal, » (IV, 14.)

Si cette manière de voir est exacte, et si cette épître fut la dernière que l'Apôtre écrivit avant son martyre, elle acquiert un intérêt particulier comme contenant les suprêmes conseils d'un homme qui « n'est en rien inférieur au premier des apôtres. »

Un des objets de cette épître était de prier Timothée de venir promptement auprès de lui (IV, 9), parce que ses autres amis l'avaient abandonné (voyez IV, 10-12). Il désirait la présence de Timothée et de Marc, qui pouvaient tous deux lui être précieux dans ses afflictions et le soulager dans l'oeuvre du ministère (voyez verset 11 ). L'absence de toute allusion à Pierre jette du jour sur la question soulevée à propos du lieu du martyre de ce dernier (voyez §185) ; on voit tout au moins que Pierre n'était pas à Rome.

Paul débute par des expressions pleines de force et d'une tendre affection ; il adresse à son fils Timothée de vives exhortations à la persévérance , à la vigilance , à la patience dans son oeuvre, au courage et à la constance dans les persécutions, et à l'exercice de toutes les vertus particulières; il l'encourage à se souvenir de sa première éducation dans la piété et la connaissance des Ecritures , et lui rappelle quelques exemples d'hommes qui se sont montrés infidèles à l'heure de l'épreuve. Il met en garde Timothée et son troupeau contre les faux docteurs, les vaines controverses et les fauteurs d'erreurs dont il prédit que le nombre ira en augmentant; il annonce les temps graves et difficiles qui se préparent, et termine en exhortant solennellement Timothée à être vigilant, fidèle et zélé dans l'exercice de son ministère; il l'encourage en lui rappelant que notre course sera bientôt terminée et que le temps de notre départ approche.

Dans toute cette lettre à son disciple bien-aimé, Paul manifeste sa forte et constante conviction de la vérité des principes qu'il a embrassés et proclamés, l'heureuse certitude qu'il sera plus fort que toutes les souffrances qu'il aura encore à supporter pour leur défense, et l'espoir triomphant qu'il recevra l'approbation et la récompense de son grand Maître dans les cieux.

Lisez et comparez I, 1 , 3, 6, 8, 13, 15 ; II , 1, 8, 14, 19, 22; III, 1 , 10 , 14 ; IV, 1 , 6, 9, 14 , 16, 19, 22.

Cette épître présente un beau tableau de la consolation dont jouissent les chrétiens au milieu des souffrances et en présence de la mort (I, 9-18; II, 9-13 ; IV, 6-8, 16-18). Non-seulement l'amour le plus spirituel envers Dieu et envers Christ s'allie avec les affections humaines , mais encore il les produit (I, 2-5; IV, 9, 21). Nulle part ailleurs on ne trouve mieux combinés le privilège et le devoir, la grâce et la sainteté , que dans 2 Tim., II, 19. Au moment où le christianisme commence à se corrompre, Paul donne à Timothée des directions sur le véritable principe qui peut en conserver la pureté; non point les miracles ni une révélation nouvelle, mais la doctrine dans laquelle Timothée a été instruit, et ces Ecritures qui rendent l'homme de Dieu parfait et entièrement accompli pour toute bonne oeuvre (III, 14-17. 2 Thes., Il. 2 Pierre, I, 15-21 ; III, 1-4, 14-17. Combien il est instructif de voir que dans les derniers écrits de Pierre , aussi bien que dans ceux de Paul et, de Jean (Apoc., XXII), et à l'approche des hérésies qui devaient s'élever dans l'Eglise, nous soyons poussés vers l'étude de la Bible, et qu'ainsi nous soyons conduits à ne pas attendre d'autre révélation de la volonté divine. La CROIX, notre espérance, notre modèle , notre mobile; la COURONNE, sa pureté, sa certitude, sa bénédiction; la PAROLE, ses promesses , ses préceptes , sa doctrine complète font partie des dernières recommandations du volume sacré. Laissons-leur seulement la place qui leur est due, et l'Eglise n'aura rien à craindre.

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§ 190. Epître catholique de Jude (Syrie, an de Jésus-Christ 75 ou 64). - Jude, l'auteur de cette épître, était appelé aussi Lebbée ou Thaddée (Matth. , X , 3. Luc, VI , 15). Il était frère ou proche parent de notre Seigneur, et l'un des douze apôtres. Nous ne connaissons guère plus de lui, dans les Evangiles, que la question qu'il adressa à notre Seigneur, à savoir, pourquoi il se faisait connaître à ses disciples et non pas au monde (Jean, XIV, 22). On suppose que son épître fut écrite pour les Juifs chrétiens de Syrie et d'Arabie, où l'on place son champ de travail, de même que la seconde épître de Pierre fut écrite pour les personnes du même caractère qui habitaient l'Asie-Mineure. Il est très-probable que l'un des apôtres a connu les écrits de l'autre (comp. 2 Pierre, II). Ceux qui pensent que Pierre avait vu l'épître de Jude assignent à cette dernière la date de 64 ou 65 (comme le fait Lardner), ou même une date plus ancienne , tandis que les autres pensent qu'elle fut écrite vers l'an 75 ou même un peu plus tard.

Le but de cette épître est évidemment de préserver l'Eglise chrétienne de ces faux docteurs qui faisaient consister toute la religion dans une foi spéculative et dans une profession extérieure, et poussaient les disciples dans l'insubordination et la licence. On peut là diviser en deux parties . la première décrit le châtiment (5-7); la seconde le caractère de ces séducteurs (8-19). Pour garder les disciples de leurs embûches, l'apôtre leur rappelle l'exemple des Israélites qui périrent au désert , celui des anges qui déchurent de leur dignité primitive, et les villes de la plaine qui furent un exemple de la vengeance divine; il montre qu'un sort semblable est réservé aux impies séducteurs. Il leur rappelle qu'il a été prédit que de telles gens se lèveraient dans la dernière période du monde; il les exhorte à rester fermes , à prier et à travailler au salut des autres; et il termine par une expression de louange envers Celui qui peut seul les préserver de toute chute (voyez 2 Pierre , II, 3. 2 Thes. , Il. 2 Tim., III).

Les impies sont toujours avertis de se mettre en mesure pour arrêter les effets du jugement. « Ils ont été délivrés ; » mais Israël le fut aussi (verset 5). « Ils ont vécu auprès de Dieu , et sa faveur les a élevés; » ainsi firent également les anges rebelles (verset 6). « ils se sont abandonnés à leurs penchants; » ainsi fit Sodome (verset 7).

C'est ainsi que l'Ancien-Testament peut servir à expliquer le Nouveau , et que les principes peuvent s'appuyer sur les faits. -Voyez Arnaud, Recherches critiques, etc.


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