HISTOIRE DES VAUDOIS. CHAPITRE
VII.
ORIGINE DU NOM DE
VAUDOIS.
Trois étymologies
proposées. - Valdenses dérivé à
tort de Valdo. - Qui fut Valdo. - Sa personne, - son nom,
son oeuvre, - sa mort. - Valdenses, dérivé de
vallis vallée. - Témoignage d'Eberard, - de
Bernard de Foncald. - Étymologie
préférable du mot Vaudois. - Cette
dernière origine justifiée.
La clarté historique, et ce qui
est plus important encore, la vérité,
réclament également une connaissance exacte de
l'origine du nom de Vaudois, donné aux
prétendus hérétiques du XlIe
siècle et des siècles suivants, en France, au
nord de l'Italie et en Allemagne.
Trois étymologies
principales en ont été données. Selon
quelques-uns, il dériverait de Valdo, dont les
disciples ont été appelés pauvres de
Lyon, et serait synonyme de cette dernière
dénomination. Selon d'autres, Vaudois
dériverait de vaux ou vallées, Comme
Vallenses, du mot latin vallis, vallée, et Valdenses
de plus généralement usité ), de
vallisdensa, vallée touffue. Pour d'autres, enfin, le
nom de Vaudois serait une épithète injurieuse,
synonyme de sorcier.
Reprenons chacune de ces
étymologies.
Alain de l'Ile ou de Lille,
qui vivait à la fin du XIIe siècle et au
commencement du XIIIe, selon l'opinion la plus commune
(1),
s'exprime comme suit . « Il y a certains
hérétiques qui feignent «être
justes, tandis qu'ils sont des loups couverts d'une peau de
brebis... Ils sont appelés Valdenses, du nom de leur
chef Valdus. »
Pierre de Vaux Cernay ou
Sernay, auteur connu du commencement du XIIIe siècle,
parle dans son Histoire des Albigeois, des Vaudois qui
auraient été répandus parmi eux. «
Il y avait outre cela, dit-il, des hérétiques
appelés Valdenses, du nom «un certain Valdius de
Lyon. » ( Petri MONACHl, caenobii vallium Cernaii,
etc., Historia Albigensium, cap. II, apud DUCHESNE.
)
Cet auteur indique, comme une
des quatre marques qui distinguent les Vaudois, les sandales
qu'ils portent à la manière des apôtres.
Mais cet usage remonte à une date plus ancienne que
celle qu'il lui assigne, en la rapportant à Valdo,
puisque les compagnons «Henri, promoteurs de la secte
des albigeois, en portaient déjà, aussi bien
que les missionnaires vaudois, appelés souvent
xabatatenses, de xabatata, comme il a été dit
dans le chapitre précédent.
Les auteurs catholiques
subséquents ont tous admis cette étymologie,
que nous rejetons avec raison, comme on le verra. Mais avant
de formuler notre preuve, nous devons faire connaître
Valdus ou Valdo et son oeuvre.
Pierre, marchand et citoyen de
Lyon, appelé aussi par les historiens Pierre Valdo,
Valdus, Valdius, Valdensis ou Valdecius
(2)
et Valdesius, vivement frappé de la mort subite de
l'un de ses amis, dans une réunion de plaisir, prit
la résolution de renoncer au monde et de travailler
désormais uniquement à son salut
(3).
Luther, le célèbre réformateur de
l'Allemagne, au XVII, siècle, entra au couvent et
chercha les choses du ciel, à la suite d'un
événement semblable
(4).
Pierre donna toute son attention à la lecture de la
Bible. On dit même qu'il en traduisit quelques livres
du latin en langue vulgaire. Il se livra aussi à
l'étude des Pères de l'Eglise. Etienne de
Borbone ou de Bellavilla, qui nous donne ces détails,
ajoute : « Ce citoyen (de Lyon), ayant lu souvent ces
sentences et les ayant gravées dans sa
mémoire, se proposa de suivre la perfection
évangélique comme les apôtres l'avaient
observée. Après avoir vendu tous ses biens,
par mépris du monde, il distribua aux pauvres
l'argent qu'il avait amassé, et osa usurper l'office
des apôtres ; prêchant, dans les rues et sur les
places publiques, l'Evangile et les choses qu'il avait
apprises de mémoire. Il encourageait hommes et femmes
à en faire de même, les rassemblant
auprès de lui, et les affermissant dans la
connaissance des Evangiles. Il envoyait même
prêcher dans les campagnes environnantes des hommes de
tous les métiers, même les plus vils. Ces
hommes et ces femmes, ignorants et illettrés,
parcourant les campagnes, pénétrant dans les
maisons de la ville et prêchant sur les places
publiques, même dans les églises, provoquaient
les autres à faire de même. » (Maxima
Biblioth. P. P., t. XXV, p. 264. - Stephanus de BORBONE,
alii de BELLAVILLA, Liber de septem Donis Spiritus Sancti,
IV,, part., cap. XXX, apud ECHARD, t. 1.)
Le détachement du monde
et le zèle pour l'avancement du règne de
Jésus-Christ, selon l'Evangile, sont les
caractères distinctifs du mouvement religieux
encouragé par Pierre, le marchand (le Lyon. C'est par
allusion au premier de ces caractères, le plus
saillant aux yeux des amis du monde et des richesses, que
les disciples d'un homme qui s'était appauvri pour
suivre Jésus, ont été appelés
pauvres de Lyon. Les grands succès qu'avait eus, pour
la conversion des âmes, la vie vraiment apostolique de
l'ancien négociant, attirèrent rapidement sur
lui et sur ses adhérents une vive persécution.
Anathématisé et poursuivi par Jean de
Bollesmanis ou de Belles-mains, archevêque de Lyon,
Pierre s'enfuit en Picardie, où il s'arrêta
quelque temps. Il se rendit ensuite dans la Vindelicie, la
Souabe et la Bavière actuelles, où il
séjourna longtemps, et enfin alla mourir en
Bohème. (USSERIUS, etc., p. 266, qui Cite DE THOU,
Histoire, etc., ch. V.)
Pierre, marchand de Lyon, peut
être considéré comme le plus
éminent continuateur de l'oeuvre de Pierre de Bruis
et d'Henri.
Reprenons maintenant notre
dissertation sur le nom de Vaudois, que les auteurs
catholiques font dériver de celui de Valdo, comme
s'il était le chef de la secte vaudoise et l'auteur
de cette prétendue
hérésie.
Les Vaudois, disent-ils, ont
reçu leur nom de celui de Valdo.
1° Nous observons que,
dans les canons des conciles et autres documents officiels,
relatifs aux disciples de Pierre, marchand de Lyon, ceux-ci
ne reçoivent jamais la qualification de Vaudois, mais
qu'ils sont toujours désignés par le nom de
pauvres de Lyon. Le nom de Valdo n'y est pas
mentionné davantage. Un traité d'un auteur
anonyme, cité dans Martène, sur
l'hérésie des paores de Lyon, ne donne jamais
aux disciples de Pierre le nom de Vaudois; bien plus, il ne
donne pas à lui-même le nom de Valdo, mais
celui de Valdensis (5),
ce qui est bien différent ; car cette
désignation, équivalant à un adjectif,
signalerait l'origine des opinions religieuses de celui au
nom duquel elle est ajoutée.
2° Nous observons ensuite
que Pierre, marchand de Lyon, n'a pas été
l'auteur du mouvement religieux qui se manifesta en France
dès avant le commencement du XlIe siècle,
puisqu'il ne prêcha que vers l'an 1180, et que, si les
prétendus hérétiques de l'Agenois, de
Toulouse, d'Albi et d'ailleurs, ont été
appelés Vaudois, ce nom n'a pu leur être
donné à cause de Valdo, celui-ci n'ayant point
été leur chef.
3° Le nom de Vaudois ne
peut pas venir de celui du marchand de Lyon, car le nom de
Valdo ne fut jamais le sien. Au temps où il vivait,
vers l'an 1180, c'était encore l'usage de n'avoir
qu'un nom, celui de baptême; les noms de famille
n'avaient pas pris naissance. Au nom de baptême on
ajoutait souvent, il est vrai, une désignation
particulière, par exemple, le nom du domicile ou de
la profession. Par cette qualification, l'individu en
question était suffisamment distingué de tout
autre. Or, notre prétendu chef de la secte des
Vaudois, dont le nom était Pierre, est ordinairement
désigné par l'un des qualificatifs suivants :
Pierre, citoyen de Lyon; Pierre, marchand ou
négociant de Lyon.
On a dit que le qualificatif
Valdo, donné quelquefois et postérieurement
à Pierre, indiquait son lieu d'origine, et on l'a
voulu faire synonyme de, natif de Vaud, ou de Valdum, ou de
Vaudram, qui aurait été un bourg du Lyonnais.
Mais pourquoi cette double désignation de lieu?
Pierre était déjà suffisamment, et
à bon droit, distingué par celle de citoyen ou
de marchand de Lyon, comme il l'était
réellement. D'ailleurs, Valdo serait un bien mauvais
dérivé de Valdum ou de Vaudram, dans lit
supposition gratuite qu'il fût originaire d'un tel
bourg. Il aurait du moins fallu dire Valdunensis,
Vaudramensis. Et même, si ce nom de Valdo
dérivait de son lieu d'origine, pourquoi cette
incertitude dans la désignation et dans
l'orthographe? Car, Pierre est appelé Valdo, Valdus,
Valdius, Valdensis, Valdecius et Valdesius etc. (USSERIUS P.
159.)
Un surnom aussi
indécis, aussi varié dans sa forme, aussi
rarement employé, du vivant de Pierre
(6),
marchand de Lyon, pour le désigner, ne saurait
être considéré comme la racine d'un nom
aussi précis et aussi invariable que celui de
Vaudois, donné à la prétendue secte qui
envahit la France, l'Allemagne, l'Italie, 'l'Espagne, etc.,
au XII, siècle ; tandis que cette indécision,
dans la prononciation et l'orthographe du nom appellatif
Valdo, s'explique assez facilement lorsqu'on y voit un
surnom synonyme de Vaudois, un adjectif équivalant de
celui-ci : le Vaudois.
4° Un rapprochement de
dates nous conduit au même résultat, en nous
montrant que des hérétiques vaudois, en latin
Vallenses ou Valdenses, étaient connus et
signalés avant le temps de Valdo.
Il est authentiquement reconnu
que c'est l'archevêque Jean de Bollesmanis ou de
Belles-mains, qui a anathématisé Valdo et ses
disciples, et il est constant que ce prélat a obtenu
le siège de Lyon, en 1181. Cette date coïncide
d'ailleurs avec celle de 1184, date de la réunion,
à Vérone, du concile qui, sous Lucius III,
condamna les pauvres de Lyon pour la première
fois.
Ce n'est donc, au plus
tôt, que dès l'an 1181, que les
hérétiques auraient été
appelés Vaudois, de Valdo, leur prétendu chef.
Or, nous pouvons citer deux auteurs qui font mention des
Vaudois avant la date de 1181. Ce sont les deux suivants :
Eberard de Béthune qui, selon Dupin, florissait l'an,
1160, et qui, parlant des hérétiques, dit :
« Certains d'entre eux s'appellent Vallenses, parce
qu'ils habitent dans une vallée de douleurs ou de
larmes, et exposent à la risée les
apôtres, etc. » (Maxima Biblioth., P. P., t.
XXIV.)
Bernard, abbé de
Foncald, déjà cité, s'exprime ainsi sur
le même sujet: « Pendant que le pape Lucius, de
glorieuse mémoire, était chef de la sainte
Eglise romaine, de nouveaux hérétiques
levèrent subitement la tête. Ils
reçurent un nom qui était le présage de
leur avenir.ils furent appelés Valdenses, d'une
vallée sombre (touffue), parce qu'ils sont
enveloppés de ténèbres profondes et
épaisses. Ces hérétiques, quoique
condamnés par le souverain pontife que l'on vient de
nommer, ne cessèrent pas de vomir leur perfide
poison, en tous lieux, dans le monde, avec une audace
téméraire. ». L'auteur de ces lignes,
ayant dédié le livre dont elles sont
tirées à Lucius III, qui fut pape de 1181
à 1185), et y faisant mention d'un autre pape du
même nom, déjà défunt, Lucius, de
glorieuse mémoire, parle donc de faits arrivés
avant 1144, date de la mort de Lucius Il
(7).
Les Valdenses ou Vaudois
étaient donc déjà connus sous ce nom,
avant 1144, et par conséquent bien avant Pierre
Valdo, puisque celui-ci ne fut poursuivi comme
qu'après 1181, sous Jean de Belles-mains qui
l'anathématisa, et qui n'avait été
nommé archevêque de Lyon qu'à cette
dernière date. (V. BERNARD ..., in, Maxima Biblioth.,
P. P., t. XXV.)
Mais, dans les rapprochements
que nous faisons, il y a plus qu'une affaire de dates. Le
témoignage d'Eberard de Béthune et de Bernard
de Foncald démontre, d'une autre manière
encore, le peu de fondement, la vanité, le
néant de l'opinion catholique, qui fait
dériver de Valdo l'hérésie vaudoise et
le nom de Vaudois. Alors même que l'on. pourrait
affaiblir la preuve précédente, en arguant de
l'incertitude de telle ou telle date, il n'en resterait pas
moins certain que deux auteurs antérieurs à
Pierre Valdo (ou contemporains ou même
postérieurs, si l'on veut, peu importe), en nommant
la secte des Vaudois, ne font nullement mention de Valdo, et
que, loin de faire dériver le nom des sectaires du
nom d'un de leurs chefs, ils lui assignent une origine toute
différente et locale.
Nous dirons donc à nos
antagonistes : Si vous reconnaissez que les écrits
d'Eberard et de Bernard sont antérieurs à
Valdo et à son oeuvre, avouez donc que, puisque ces
auteurs nomment la des Vaudois, celle-ci est
antérieure à Valdo, et que le nom de, Vaudois
'ne dérive point du sien. Ou, si vous soutenez
qu'Eberard et Bernard sont contemporains de Valdo ou
postérieurs, avouez que puisqu'ils reconnaissent
à la secte des Vaudois une autre origine, eux qui
pouvaient être mieux informés de la
vérité que vous, le nom de Vaudois ne
dérive point de Valdo.
Nous croyons donc avoir
prouvé que le nom de Vaudois, donné par les
écrivains catholiques aux chrétiens
prétendus hérétiques du XIIe
siècle, ne dérive point du nom de Valdo. Nous
croyons plutôt, que Pierre, citoyen et marchand de
Lyon, a été appelé Valdo, a cause de la
ressemblance de son oeuvre avec celle des VAUDOIS, et
peut-être aussi, parce qu'il leur aurait
été affilié, et aurait
été instruit en partie par eux; conjecture qui
n'est ni impossible, ni improbable, mais que nous ne
développons pas davantage
(8).
L'opinion catholique sur
l'origine du nom de Vaudois est donc
erronée.
On a donné une autre
étymologie du nom de Vaudois. Eberard de
Béthune, vers l'an 1160, dit : « Certains
hérétiques s'appellent Vallenses (de vallis,
une vallée), parce qu'ils habitent dans une
vallée de douleur ou de larmes; » Bernard de
Foncald, vers l'an 1180, dit : « Ils furent
appelés Valdenses (de vallis-densa, vallée
ombragée), d'une vallée sombre, parce qu'ils
sont enveloppés de ténèbres profondes
et épaisses. » Parmi les modernes, Léger,
dans son Histoire générale des Vaudois, fait
dériver de Vaux ou de Val, le nom de Vaudois; et un
vieux pasteur de la vallée de Saint-Martin, dans le
territoire actuel des Vallées Vaudoises, a
déclaré que, selon la tradition, la
vallée qu'il habite s'appelait, autrefois,
Val-Ombreuse. Sans repousser absolument une
étymologie qui repose sur la nature des lieux
qu'habitent les Vaudois, et même en reconnaissant
qu'elle a pour elle une apparence de fondement pour les mots
latins Vallenses et Valdenses, cependant, quant au mot
français Vaudois, nous nous rangeons à celle
que donne la Noble Leçon.
En effet, la Noble
Leçon, ce monument vénérable et
original de l'antique Eglise vaudoise, assigne au nom de
Vaudois une autre étymologie, la troisième que
nous indiquions et la dernière que nous ayons
à examiner. Ce précieux témoin de la
foi des Vaudois, qui date de l'an 1100, s'exprime comme
suit, dans les vers 368 à 372, que nous allons
traduire : « Que s'il y a quelqu'un qui aime et craigne
Jésus-Christ, qui ne veuille maudire, ni jurer, ni
mentir, ni paillarder, ni tuer, ni prendre le bien d'autrui,
ni se venger de ses ennemis, - ils disent qu'il est
vaudès et digne de punition (châtiment).
»
Pendant longtemps, on n'a vu
dans cette dénomination de vaudès, que le nom
de Vaudois. Mais on a reconnu aujourd'hui qu'elle renferme
une sanglante injure, et qu'elle équivaut à
une accusation de sorcellerie. Le nom de vaudès a
bien, en effet, dans la langue romane, le sens de sorcier :
il n'est pas encore hors d'usage avec cette signification
dans le patois du canton de Vaud.
Cette interprétation
s'appuie sur «autres preuves encore. Rubis, cité
par Perrin, dit en propres ternies : « Quand on parlait
d'un sorcier, on l'appelait vaudès. » On lit
dans Mezeray, Histoire de France, au sujet de Jeanne d'Arc,
alors au pouvoir des Anglais, l'an 1430 : « Cette
partie de l'université, qui était
demeurée à Paris, lâche esclave de la
tyrannie anglaise, fit aussitôt instance qu'on la mit
entre les mains des gens d'église pour lui faire son
procès, comme à une vaudoise, enchanteuse,
hérétique, abuseuse, etc. »
L'épithète de vaudoise est placée
côte à côte de celle d'enchanteuse, etc.
( MEZERAY.... p. 17. )
Le moine
Belvédère, dans sa relation à la
très-illustre congrégation de la Propagande de
la foi (de propaganda fide), imprimée à Turin,
en 1631, attribue la sorcellerie aux Vaudois, dans ce
passage (9):
« Les infortunées vallées de Luserne,
Angrogne, Saint-Martin et Pérouse, par l'effet du
voisinage de la France avec l'Italie, soit par l'effet des
montagnes qui les rendent naturellement très-fortes,
ont toujours été sujettes à divers
fléaux, soit de sauterelles hérétiques,
soit de chenilles infidèles ( sans foi ), de rouille
ou de sorcellerie. » (BELVÉDÈRE..., eh.
XIV, p. 242. )
On le voit clairement par ce
rapport d'un inquisiteur de Rome, les Vallées,
où se trouve actuellement le principal résida
de l'Eglise vaudoise, sont accusées d'avoir toujours
été entachées de sorcellerie,
etc.
Dans les temps d'ignorance,
des prêtres fanatiques ont accusé de rapports
secrets avec les esprits de ténèbres ceux
qu'une foi éclairée ou
l'incrédulité éloignaient des temples
catholiques (10). La superstition romaine et un cruel
système de persécution
désignèrent trop et trop souvent, comme
sorciers, aux fureurs d'un peuple ignorant, des hommes, dont
la vie n'avait aucun rapport avec les sentiments et les
actes qu'on leur attribue (11). Or, puisque c'est un fait certain que les
Vaudois ont été souvent désignés
comme sorciers à la haine populaire, faut-il
s'étonner qu'au temps où la superstition et
l'ignorance arrivèrent à leur comble, aux Xe
et Xle siècles, un nom aussi odieux leur ait
été généralement donné et
qu'il leur soit resté ? Comment se refuser de croire
à un tel abus de la parole, lorsqu'on lit dans
Fauteur anonyme, cité par Martène et Durand,
et qui a écrit vers l'an 1447, que les Vaudois, au
moyen de maléfices diaboliques, s'assemblaient
subitement de nuit, étant transportés
promptement en grand nombre, dans quelque forêt, ou
lieu désert, etc. » ( Veterum Sciptorurn et
Monumentorum, à ( MARTÈNE et DURAND, t. V,
Col. 501.)
L'origine attribuée au
nom de Vaudois par la Noble Leçon nous parait donc
justifiée par les faits. Il serait intéressant
et précieux, sans doute, de savoir à quelle
époque la petite Eglise fidèle a reçu
un nom aussi injuste et aussi odieux; mais nous manquons de
données sur ce point. Tout ce que nous savons, c'est
qu'il est antérieur au XIIe siècle,
étant déjà mentionné dans la
Noble Leçon, écrite l'an 1100, comme l'indique
l'auteur lui-même.
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