LE PÈLERINAGE
DOULOUREUX
de
L'ÉGLISE A
TRAVERS LES ÂGES
CHAPITRE VII
Lollards, Hussites et les
Frères de l'Unité
(1350-1670)
Wicleff. - La révolte des paysans. -
Persécution en Angleterre. - Sawtre, Badley, Cobham. -
Interdiction de lire la Bible. - Les congrégations. - Huss. -
Ziska. - Tabor. - Guerres hussites. - Les Utraquistes. - Jakoubek. -
Nikolaus. Cheltschizky. - Le Filet de la foi. - Rokycana,
Grégoire, Kunwald. Reichenau, Lhota. - Les Frères de
l'Unité. - Lukas de Prague. - La nouvelle de la
Réformation allemande parvient en Bohême. Jean Augusta.
- Guerre de Smalkalde. - Persécution et émigration.
Georges Israël et la Pologne. - Retour des Frères en
Bohême. - Charte bohémienne. - Bataille de la
Montagne-Blanche. - Coménius.
1. Wicleff et la Bible anglaise.
Premières persécutions
Des circonstances semblables à celles
des pays continentaux conduisirent aussi l'Angleterre à
reconnaître les erreurs de l'Église dominante et
à mettre en question la valeur de la doctrine romaine. On
donna par dérision le nom de Lollards (48)
(bavards) à ceux qui parlèrent d'une
meilleure route à suivre. Les maux politiques et
économiques se mêlèrent aux questions
religieuses, surtout au début du mouvement. On s'attaqua
d'abord à l'opulence et à la corruption du
clergé, mais on s'aperçut bientôt que la doctrine
était à la racine du mal, et ce fut sur elle que se
concentra le conflit. En Angleterre, on n'avait pas
persécuté ceux qu'on appelait hérétiques
avec la même violence que sur le continent. Cependant au
début du quinzième siècle et du règne
d'Henri IV, les Lollards augmentèrent en nombre et le
souverain, pour plaire au parti clérical,
décréta qu'ils seraient punis de la mort par le
feu.
Dans la lutte, le premier rang appartient
à John Wicleff, le plus éminent des lettrés
d'Oxford. Ses attaques contre les pratiques corrompues de
l'Église l'entraînèrent d'abord dans la lutte
politique qui faisait rage. Toutefois ceux qui pensaient l'employer
comme un important allié pour servir leurs buts,
s'éloignèrent de lui lorsqu'ils comprirent quelles
seraient les conséquences des principes qu'il enseignait. Il
devint alors le chef des gens qui cherchaient la délivrance
dans un retour à l'Écriture et à Christ comme
Maître. Dans son traité, «Le Royaume de Dieu»
et dans d'autres ouvrages, Wicleff montre que «l'Evangile de
Jésus-Christ est l'unique source de la vraie religion» et
que «l'Écriture seule est la vérité».
La doctrine qu'il appelait «Dominion» établissait le
fait de la relation personnelle avec Dieu et de la
responsabilité directe de chaque homme envers lui. Toute
autorité, enseignait-il, vient de Dieu, et ceux qui exercent
l'autorité sont responsables envers Dieu de l'usage qu'ils en
font. Cette doctrine contredisait nettement les idées
prédominantes de l'autorité. irresponsable des papes et
des rois et de la nécessité de la médiation des
prêtres. Elle souleva donc une violente opposition qui
s'intensifia en 1381, quand Wicleff publia sa réfutation de la
doctrine de la transsubstantiation, attaquant ainsi à sa
racine la soi-disant puissance miraculeuse des prêtres, qui
leur avait si longtemps permis de dominer sur la
chrétienté. Sur ce point, il fut abandonné par
ses partisans politiques, et même par sa propre
université. Son ouvrage le plus important fut celui qui permit
au peuple anglais de puiser à la source de toute pure
doctrine. Sa traduction de la Bible accomplit une révolution
de la pensée anglaise, car la Bible anglaise est devenue l'une
des plus grandes puissances en faveur de la justice que le monde ait
connue. Wicleff trouva que les meilleurs moyens de répandre
les Écritures étaient d'écrire des
traités populaires et d'organiser des bandes de
prédicateurs itinérants. Son influence était si
grande que ses ennemis acharnés ne parvinrent qu'à le
chasser d'Oxford, d'où il se retira à Lutterworth,
centre duquel rayonnèrent sur tout le pays instruction et
encouragement.
Concernant l'autorité en matière
de religion, les scolastiques du temps de Wicleff (49) plaçaient les enseignements
des Pères, les décisions des anciens et les
décrets des papes sur un pied d'égalité avec les
Écritures. Étudiant la Bible plus à fond,
Wicleff dut reconnaître l'autorité exclusive du Livre,
tout autre écrit n'ayant de valeur que dans la mesure
où il concordait avec l'Écriture. Il voyait dans la
connaissance chrétienne une double source, la raison et la
révélation, entre lesquelles il ne discernait aucun
désaccord. Il admettait pourtant que la raison, ou
lumière naturelle, avait été affaiblie par la
chute et souffrait d'un degré d'imperfection que Dieu, dans sa
grâce, guérissait par la révélation venant
des Écritures, ces dernières restant donc
l'autorité suprême. L'autorité absolue et sans
condition de la Bible fut la grande vérité à
laquelle Wicleff rendit témoignage, et qui fut attaquée
par ses adversaires, car les deux partis réalisaient toutes
les conséquences qui découlaient de cette
doctrine.
Il exposa ce point vital dans son livre:
«Of the Truth of Holy Scripture» (De la
Vérité des Stes-Ecritures) (1378), où il
enseigne que la Bible est la Parole de Dieu, la Volonté ou le
Testament du Père. Dieu et sa Parole ne font qu'Un. Christ est
l'Auteur de la Ste-Ecriture, qui est sa loi. Lui-même est dans
les Écritures. Les ignorer c'est donc l'ignorer, Lui. Si la
Bible était plus détaillée, elle ne
s'appliquerait pas à toutes les circonstances; mais, telle
qu'elle est, elle s'adresse à tous et ne commande rien qui ne
puisse être observé. Les effets de l'Écriture
montrent sa source divine et son autorité. L'expérience
générale de l'Église prouve la suffisance et
l'efficacité de la Bible. En observant la pure loi de Christ,
sans y mélanger la tradition humaine, l'Église a grandi
rapidement, mais elle a constamment décliné depuis
l'introduction de la tradition dans son sein. D'autres formes de la
sagesse disparaissent. Seule demeure la sagesse communiquée
aux apôtres, à la Pentecôte, par le St-Esprit.
L'Écriture est infaillible. D'autres maîtres, même
le grand Augustin, sont sujets à erreur. Placer au-dessus de
l'Écriture et lui préférer des traditions, des
doctrines et des ordonnances humaines, est un acte d'aveugle
présomption. Une doctrine n'est pas justifiée parce
qu'elle renferme indirectement des éléments de bien et
de bon sens. Tout n'est pas mauvais dans les commandements et la vie
du Diable, autrement Dieu ne lui permettrait pas d'exercer un tel
pouvoir. L'histoire de l'Église montre que
l'éloignement de la loi évangélique et le
mélange de la tradition, presque imperceptibles au
début, produisirent, avec le temps, une corruption toujours
croissante.
Quant à l'interprétation de
l'Écriture, ce ne sont pas les théologiens qui peuvent
nous la donner. Seul le St-Esprit nous enseigne le sens des
Écritures. N'est-ce pas Christ qui les ouvrit aux
apôtres. Ce serait dangereux pour qui que ce soit de
prétendre posséder l'exacte interprétation des
Écritures par l'illumination du St-Esprit. Toutefois nul ne
peut les comprendre sans son secours. Nul ne peut comprendre s'il
n'est éclairé par Christ. Un esprit pieux, humble et
vertueux est nécessaire pour cela. L'Écriture doit
être interprétée par elle-même, pour en
bien saisir l'ensemble. Il faut éviter de la disséquer,
comme font les hérétiques. Prenons-la d'abord dans son
sens primordial et littéral, puis dans son sens figuré.
Il importe d'employer le terme juste. Paul usait prudemment des
prépositions et des adverbes. Christ est vrai Homme et vrai
Dieu, existant de toute éternité. Lors de son
incarnation Il réunit les deux natures en sa seule personne.
Sa grandeur est incomparable comme unique Médiateur entre Dieu
et les hommes. Il est le Centre de l'humanité, notre seul et
unique Chef.
L'application personnelle du salut accompli par
Christ se fait par la conversion et la sanctification. La conversion
consiste à se détourner du péché et
à s'approprier par la foi la grâce du salut en Christ.
Se convertir, c'est se repentir et croire. La repentance est
nécessaire et doit porter du fruit. Wicleff unit la foi
à la sanctification; il ne voit pas la foi sans les oeuvres.
Il ne voyait pas l'Église comme étant l'Église
catholique visible, ou la communion organisée de la
hiérarchie, mais comme le Corps et l'Épouse de Christ,
comprenant tous les élus et n'ayant dans le monde visible
qu'une manifestation temporaire. Elle est en pèlerinage ;
c'est dans le monde invisible, dans l'éternité, que se
trouvent sa demeure, son origine et son but final. Le salut,
disait-il, ne dépend pas d'une relation avec l'Église
officielle, ou de la médiation du clergé. Pour tous les
croyants, il y a un accès libre et immédiat à la
grâce de Dieu en Christ, et chaque croyant est un
sacrificateur. Il enseignait que le terrain de l'Église est
l'élection divine et qu'un homme ne peut avoir l'assurance
d'être en état de grâce à titre d'opinion
seulement. Il n'y a que la vie sainte qui en soit
l'évidence.
Ayant reçu l'ordre de comparaître
devant le pape, il refusa disant: «Durant sa carrière
terrestre, Christ a été le plus pauvre des hommes et Il
a rejeté toute autorité temporelle. J'en déduis
- et c'est mon avis personnel - que le pape devrait abandonner au
pouvoir civil toute autorité temporelle et conseiller à
son clergé de faire de même.» Il mourut
paisiblement à Lutterworth, le dernier jour de l'année
1384.
La révolte des paysans (1377-1381), qui
eut lieu dans les dernières années de la vie de
Wicleff, fit obstacle, pour un temps, au réveil religieux, en
provoquant une coalition de la noblesse et du clergé, rendant
les Wicleffites - comme ils les appelaient - responsables des
excès et des pertes provoqués par l'insurrection. Bien
que cela fût injuste, il existe pourtant une relation intime et
incontestable entre le vrai christianisme et la délivrance des
opprimés. Au début de son ministère, Christ
déclara qu'Il était envoyé «pour annoncer
la bonne nouvelle aux pauvres... pour guérir ceux qui ont le
coeur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance,
et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les
opprimés» (Luc 4. 18, 19). Ces paroles pouvaient
s'appliquer aux cultivateurs de l'époque, et la connaissance
des Écritures commença à éveiller en eux
le sentiment que: «Dieu ne fait point acception de
personnes» (Actes 10. 34), et que leur asservissement à
d'opulents seigneurs était irréligieux parce
qu'injuste. Ils étaient moins touchés par les sermons
scolastiques de Wicleff, tout empreints de la dignité
d'Oxford, que par les hymnes rudes et la prédication en plein
air de John Ball, l'un des leurs, qui s'écriait au sein de la
misère générale: «De quel droit ceux qui
s'appellent seigneurs, dominent-ils sur nous? A quel titre ont-ils
mérité cette position? Pourquoi nous traitent-ils comme
des serfs? Puisque nous descendons des mêmes parents, Adam et
Eve, comment peuvent-ils prouver qu'ils valent mieux que nous, si ce
n'est qu'en exploitant nos labeurs, ils peuvent satisfaire leur luxe
orgueilleux? » On entendait partout ce refrain de John Ball.
«Quand Adam labourait et qu'Eve filait, où était
alors le gentilhomme?» La révolte fut
écrasée et on décréta des lois iniques
pour maîtriser les paysans. Toutefois, lentement et
péniblement, ils obtinrent enfin gain de cause. Ce furent
encore les Écritures, agissant sur les consciences, qui
contribuèrent le plus puissamment à cet heureux
résultat.
La traduction de la Bible produisit des fruits.
Des hommes en grand nombre reconnurent en ce Livre le seul guide de
leur foi et de leur conduite. Différentes vues se
manifestèrent sur certains points; mais il y eut un accord
général sur l'autorité de l'Écriture, et
l'Église dominante fut dénoncée comme
infidèle et idolâtre. Quelqu'un dit alors que, sur deux
hommes, l'un était un Lollard et l'autre un Wicleffite, et que
l'Écriture était devenue chose vulgaire, plus
accessible aux laïques et aux femmes qui savent lire qu'aux
clercs eux-mêmes.»
Le premier qui monta sur le bûcher,
après la mise en vigueur de la loi contre les
hérétiques, fut William Sawtre, recteur dans le Norfolk
(1401). La Chambre des Communes présenta à Henri IV des
pétitions, lui demandant d'employer l'excédent des
revenus de l'Église à des buis utiles et de modifier la
loi contre les Lollards. Pour toute réponse, le roi signa la
condamnation au bûcher de Thomas Badly, tailleur à
Evesham, qui était accusé de nier la
transsubstantiation. Cet homme défendit courageusement sa foi
devant l'évêque de Worcester, fut jugé à
l'église de St-Paul par les archevêques de Canterbury et
d'York, devant de nombreux prêtres et nobles, puis
brûlé à Smithfield.
Sir John Oldcastle, Lord Cobham, vaillant
soldat, fut l'un des conducteurs des Lollards. Son château
était un asile pour les prédicateurs itinérants
et on y tenait des réunions, interdites alors sous peine de
sévères châtiments. Henri IV n'osa pas s'attaquer
à lui. Mais, dès qu'Henri V fut sur le trône, il
fit assiéger le château, s'en empara et arrêta le
châtelain. Ce dernier parvint à s'évader de la
Tour de Londres et, pendant quelques années, échappa
aux poursuites, alors que beaucoup d'autres étaient
arrêtés et exécutés, dans le nombre
trente-neuf des principaux Lollards. Sir John fut enfin
capturé dans le Pays de Galles et condamné au
bûcher. Il fut le premier des nobles anglais à mourir
pour la foi.
Après sa mort, une nouvelle loi fut
décrétée: quiconque lirait l'Écriture en
anglais le ferait au prix de sa vie et de ses biens, mobiliers et
immobiliers. Il serait condamné comme hérétique
envers Dieu, ennemi de la couronne et traître au royaume et
n'aurait aucun droit de refuge s'il s'obstinait dans son
hérésie. S'il retombait après avoir
été pardonné, il serait pendu pour trahison
envers le roi et ensuite brûlé pour
hérésie envers Dieu.
Cependant les frères, bien que vivant
cachés ou en exil, ne furent pas anéantis et certaines
congrégations continuèrent même à exister.
Ces croyants se trouvaient surtout à l'est de l'Angleterre et
à Londres. Lors de l'avènement d'Henri VI (1422), il y
avait de grandes congrégations aux environs de Beccles.
Quoique ces églises fussent fréquemment dissoutes, puis
reformées, quelques-unes existèrent durant de longues
périodes. Plusieurs, par exemple, dans le comté de
Buckingham, durèrent de soixante à septante ans et
restèrent en communion avec celles de Norfolk, du Suffolk, et
avec d'autres dans le pays. Écrivant en 1523 à Erasme,
l'évêque de Londres disait. «Il n'est pas question
de quelque nouveauté pernicieuse, mais plutôt de
nouveaux renforts ajoutés à la grande bande des
hérétiques wicleffites.»
2. Jérôme de Prague, Jean
Huss et le Concile de Constance
Jérôme de Prague (50)
fut l'un des étudiants étrangers qui
suivirent les cours de Wicleff à Oxford. Il revint dans sa
ville natale, plein de zèle pour les vérités
qu'il venait de saisir, se mit à enseigner hardiment que
l'Église de nome était déchue de la doctrine de
Christ et que tout homme, cherchant le salut, devait retourner aux
enseignements de l'Evangile. Parmi ceux qui furent
profondément touchés par Jérôme se
trouvait Jan Hus (Jean Huss) (51), docteur en théologie et
prédicateur à Prague, confesseur de la reine de
Bohême. Sa foi sincère, ses remarquables
capacités, unies à l'éloquence et au charme des
manières, agirent puissamment sur le peuple,
déjà préparé par les labeurs des Vaudois
dans le passé. Il écrivait et parlait en langue
tchèque, et la longue rivalité entre Teutons et Slaves,
représentés respectivement en Bohême par les
Allemands et les Tchèques, donna bien vite une tournure
politique au mouvement: l'élément germanique,
dévoué à la puissance de Rome, et les
Tchèques, soutenant l'enseignement de Wicleff, Le pape, par le
moyen de l'archevêque de Prague, excommunia Huss et fit
brûler publiquement les écrits de Wicleff, mais le roi
de Bohême, la noblesse, l'université et la
majorité du peuple soutinrent Huss et sa doctrine.
En 1414 (52),
commença à Constance, au bord du beau
lac de ce nom, un concile qui dura trois ans et demi, où l'on
vit assemblés un nombre extraordinaire de dignitaires
ecclésiastiques, de princes et de magistrats de divers
États, ainsi qu'une multitude de gens de toutes conditions.
Pendant ce temps, la ville devint le théâtre de
divertissements nombreux et d'une honteuse immoralité. Il y
avait alors trois papes rivaux, et le but du concile était de
remédier à la confusion et aux schismes que causait cet
état de choses. Les trois papes en fonction furent mis de
côté et Martin V fut élu à leur
place.
Le concile avait aussi pour objet de combattre
l'enseignement de Wicleff et de Huss. Ce dernier fut invité
à Constance et l'empereur Sigismond lui délivra un
sauf-conduit, lui promettant absolue sécurité s'il
venait au concile. Confiant dans la parole de l'empereur, Huss se
rendit à Constance à temps pour l'ouverture du concile
général, où il pensait profiter de l'occasion
d'exposer les doctrines scripturaires qu'il professait. Mais en
dépit de la promesse impériale, il fut
arrêté à son arrivée et jeté dans
un horrible donjon si~ tué sur une île. Pour justifier
cette action le concile promulgua un décret solennel (1415) -
soi-disant une décision infaillible dictée par le
St-Esprit - comme quoi l'Église n'est pas tenue de tenir
parole à un hérétique. Huss fut soumis à
des mauvais traitements de tous genres pour l'amener à
rétracter ce qu'il avait enseigné, notamment que le
salut, don de la grâce divine, est reçu par la foi, sans
les oeuvres de la loi; puis que ni titre ni position, si
élevés soient-ils, ne peuvent rendre un homme
agréable à Dieu sans la sainteté de la vie.
Humblement et avec grand courage, il maintint qu'il était
prêt à rétracter ce qui, dans son enseignement,
pourrait être contraire aux Stes-Ecritures, mais qu'il ne
pouvait renier ce qu'il savait être conforme à la Parole
de Dieu. Il refusa aussi de rétracter des opinions qu'il
n'avait jamais émises et qu'on lui attribuait faussement.
L'accusation d'être «infecté de la lèpre des
Vaudois» et d'avoir prêché les doctrines de Wicleff
montre que l'unité de la vérité enseignée
dans ces milieux divers, était reconnue par les ennemis des
frères. Huss fut brûlé sur le bûcher,
après un service solennel de dégradation. Deux semaines
auparavant, il avait écrit: «Je trouve un grand
réconfort dans cette parole de Christ: Heureux serez-vous,
lorsque les hommes vous haïront... C'est la meilleure des
salutations. Il n'est pas difficile de la comprendre, mais bien d'y
faire honneur, car nous devons nous réjouir dans ces
tribulations... Il est facile de lire de telles paroles et de les
expliquer, difficile de les mettre en pratique. Même le plus
brave des combattants, qui savait pourtant qu'Il ressusciterait le
troisième jour, fut «troublé en Son esprit»,
après le souper... Aussi les soldats du Christ, regardant
à leur Chef, le Roi de Gloire, ont-ils eu une grande lutte
à soutenir, pour pouvoir passer par le feu et par l'eau, sans
périr. Ils ont reçu la couronne de vie, cette couronne
glorieuse que le Seigneur m'accordera, j'en suis persuadé, -
et à vous aussi, sincères défenseurs de la
vérité, comme à tous ceux qui aiment le Seigneur
Jésus avec constance... 0 Très-Saint Christ, attire-moi
à toi, dans ma faiblesse, car, si tu ne nous attires, nous ne
pouvons te suivre. Fortifie mon esprit, afin qu'il soit prompt
à l'obéissance. Si la chair est faible, que ta
grâce vienne nous assister; entoure-nous par derrière et
par devant, car sans toi nous ne pouvons marcher à une mort
cruelle pour l'amour de toi. Donne-moi un coeur vaillant, une vraie
foi, une ferme espérance, un amour parfait, afin que, pour
toi, je puisse abandonner ma vie avec patience et avec joie. Amen.
Écrit en prison, dans les chaînes, la veille de
St-Jean-Baptiste.»
Jérôme de Prague mourut peu
après du même supplice, et la Bohême hussite se
divisa bientôt en trois camps. ceux qui luttèrent, ceux
qui essayèrent de transiger - appelés Utraquistes ou
Calixtins - et ceux qui acceptèrent de souffrir.
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