Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

PERSÉCUTION DE L’ÉGLISE CHRÉTIENNE SOUS NÉRON.

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Paul Orose (Paul Orose, historien du cinquième siècle ap. J.-C, disciple de saint Augustin, a laissé: Historiarum adversus paganos libri septem.), historien et auteur ancien qui a vécu du temps de saint Augustin , auquel il dédia les sept livres de son histoire, commence à raconter les persécutions de l'Église Chrétienne à la persécution sous Néron. Il l’a prend pour la première ainsi que l’ont fait les autres historiens qui ont écrit après lui; nous suivrons le même ordre pour le présent.

Ainsi donc il écrit, touchant cette persécution, que Néron, sixième Empereur Romain, commanda qu'on tourmentât et tuât tous les chrétiens qui étaient dans la ville de Rome, et dans toutes les provinces de l'empire. Il avait délibéré d'extirper de tous lieux la Religion chrétienne, et tous les chrétiens.

Les histoires rapportées par des païens (comme Suétone dans la vie de Néron, et Cornélius Tacitus, li. 15.) expriment mieux les raisons qui poussèrent Néron à cette persécution que ne le font les histoires des chrétiens.

L'Empereur était un gouffre plein de toutes sortes de vices et de méchancetés, mais principalement de souillures. Il était le plus abominable incestueux et exécrable sodomite qu'on saurait trouver dans toutes les histoires! Il commettait toutes souillures sans aucune honte dans la ville de Rome, devant les yeux du Sénat et du peuple romain, sans que personne n’en dit mot par crainte d’un châtiment. Chacun le regardait simplement faire si bien que ce monstre vivait selon son plaisir. À cause de cela, Dieu se courrouça contre Rome et la châtia par feu tout comme Sodome et Gomorrhe. Il le fit par la personne Néron que l’on supportait quoiqu’il eut mérité d'être lui-même brûlé à cause de ses infamies horribles.

Néron mit donc le feu dans la vilaine ville de Rome. Il y avait un quartier de la ville qui lui déplaisait d'autant plus que les maisons étaient petites et les rues étroites: il fit commencer par là pour y faire ensuite de beaux bâtiments. Le feu montant bien haut, Néron, quant à lui, s'assit dans la tour de Mecenas. Il prenait fort grand plaisir à ce feu en disant qu'il avait désiré maintes fois de voir une représentation de l'embrasement de Troie! Maintenant il jouissait parfaitement de son désir dans l'embrasement de Rome tout en chantant des vers composés sur le sujet de la destruction de Troie.

Suétone dit que la ville de Rome ne reçut jamais un si grand dommage et de si grande perte à cause de ce feu, car il dura six jours entiers et six nuits. Tacitus le décrit aussi fort largement. Ce feu, soufflé de la colère de Dieu, s'étant embrasé plus fort que Néron ne pensait, et ayant fait un dommage irréparable à la ville, les citoyens de Rome, touchés par cette perte, en furent profondément irrités. Néron, voulant détourner de lui cette malveillance, sema partout que les chrétiens, ennemis de la religion et des dieux romains, étaient les incendiaires qui avaient ainsi endommagé la ville. Afin que cela eût plus d'apparence et fût plus croyable, il fit prisonniers plusieurs chrétiens, et les fit soumettre cruellement à la torture pour leur faire avouer qu'ils avaient mis le feu dans la ville. Il y en eut quelques-uns qui, aimant mieux mourir qu'endurer un tel tourment, mentirent contre eux-mêmes, et contre les chrétiens, confessant qu'ils avaient été la cause de l'embrasement de la ville de Rome.

Nous ajouterons ici les propres mots de Tacite, selon qu'ils sont traduits du Latin dans son 15e livre d'Annales.

«Néron voulant éviter ce bruit, que Rome avait été brûlée par son commandement, et pour éviter la fureur du peuple, en chargea faussement certains qu'il fit punir bien sévèrement, lesquels étant déjà haïs par le commun du peuple qui les appelait chrétiens. L'auteur de ce nom, appelé Christ, durant l'Empire de Tibère fut crucifié par Ponce Pilate gouverneur. Et quoique cette Religion eût été empêchée de se développer, elle se renforça (Exitiabilis supersiitio erumpebat.), non seulement par la Judée où elle avait pris commencement, mais aussi dans la ville de Rome, où toutes choses arrivant de tous endroits, y sont bien généralement bien estimées. Ainsi donc ayant d’abord pris ceux qui confessaient être chrétiens, par la suite et sur la confession d’une grande multitude, on fut bien aise de les tourmenter simplement parce qu'ils étaient haïs de chacun plutôt que de chercher à les convaincre d'avoir mis ce feu.

De plus, en les exécutant on leur faisait beaucoup d'outrages et de moqueries, allant même jusqu’à les couvrir de peaux de bêtes, pour les faire déchirer et ainsi mourir entre les dents des chiens, ou bien, on les attachait en croix. Les autres étaient grillés; et quand le jour venait à décliner, on en faisait des feux tels qu'ils éclairaient toute la ville.

Néron offrit ses jardins au peuple pour se divertir de ce massacre, et fit faire des jeux de courses de chevaux, étant lui-même parmi le peuple vêtu en cocher, et fouettant les chevaux qui courraient pour gagner le prix. Ainsi ces gens fussent estimés coupables de mort, sans que l’on ait pitié d'eux quoique n'étant pas condamnés pour le bien et repos public, mais pour assouvir seulement la cruauté d'un seul homme.»

Non seulement dans la ville de Rome, mais aussi en toutes les provinces de l'Empire Romain , il fut commandé qu'on exterminât les chrétiens, comme ennemis de Dieu et de la religion Romaine, et comme incendiaires.

Tout le monde fut alors excité contre les fidèles de Rome et d’ailleurs, avec tant de cruautés que tous ceux de Rome, ainsi que Tacite l'écrit, en avaient grande compassion. Quant à Néron il n'en était aucunement ébranlé, mais continuait à inventer de nouveaux tourments.

Les histoires témoignent que saint Pierre et saint Paul furent mis à mort dans cette persécution, comme il a été dit auparavant. Aussi les chroniqueurs font mention de plusieurs saints personnages et gens de qualité, qui, après de grands outrages, de nombreuses douleurs et des tourments sans nombre, furent misérablement tués dans cette persécution qui dura quatre ans, (à savoir depuis l’an 10 de l'Empire de ce monstre jusqu’à sa malheureuse mort,) non seulement dans la ville de Rome, mais aussi partout dans l'Empire Romain.

Or quoique cette persécution procède d'une cause bien plus sale et plus abominable qu’on ne saurait dire ni penser, qui est celui qui osera disputer contre Dieu, de ce qu'il donna une telle puissance à cet horrible et exécrable sodomite, contre un si grand nombre de gens de bien et innocents, et contre ses bien-aimés? Pourquoi permit-il que les chrétiens fussent brûlés comme incendiaires, au lieu que ce soit ce vrai pyromane et sodomite de Néron qui méritait d'être déchiré du peuple?

Pourtant s'il en ait de même aujourd'hui, que chacun s'humilie sous la main puissante de Dieu en portant patiemment la croix que Dieu lui met sur les épaules. Qu’il le loue et le bénisse en se tenant fermement à sa parole, laquelle était aussi une parole de Dieu du temps de Néron, quoique les fidèles eurent à souffrir, et que Néron, avec sa religion païenne, eût la victoire et dominât sur eux.


SECONDE PERSÉCUTION DE l'ÉGLISE, SOUS DOMITIEN.


L'Empereur Domitien, fils de Vespasien, et frère de Tite (lesquels avaient détruit Jérusalem, vaincu et asservit les juifs) s’éleva avec une arrogance insupportable et diabolique! Environ septante-neuf ans après la naissance de Christ, il eut l’impudence de se faire nommer Dieu! Il voulait que chacun le tînt et l’adorât comme tel, commandant qu'on lui baisât les pieds; ce que nul autre des Empereurs avant lui n'avait fait et que personne après lui n’a fait, sinon Dioclétien, ce cruel tyran et meurtrier des fidèles.

Or ce Domitien lança la seconde persécution contre les chrétiens, durant laquelle plusieurs saints personnages furent bannis tandis que d’autres furent tués ou privés de leurs biens, après avoir été cruellement tourmentés. L'apôtre et évangéliste saint Jean fut du nombre de ceux-ci lequel fut mené prisonnier d'Éphèse à Rome vers l'Empereur, où il fut tourmenté. Plusieurs disent aussi que Timothée, Onésime et Denis l’Aréopagite furent mis à mort au temps de Domitien. Flavia Domicilia, dame des plus illustres maisons de Rome, fut avec plusieurs autres, à cause de la religion chrétienne, envoyée en exil par ce tyran. Mais saint Jean retourna d'exil à Éphèse [dans l’île de Patmos|, où il mourut cent deux ans après la nativité de Jésus Christ, l'an troisième de Trajan.


TROISIÈME PERSÉCUTION SOUS TRAJAN.

(Les éditions de 1608 et de 1619 portent le titre fautif: Troisième persécution sous Adrien Antonin. Nous rétablissons le vrai d'après celle de 1597.)

L'Empereur Trajan, Prince autrement puissant et victorieux, commença la troisième persécution contre les chrétiens à Rome, et dans tout l'Empire Romain, environ l'an cent dix après la nativité de Jésus Christ. Les causes principales qui poussèrent cet Empereur, et la plupart de ses successeurs, à persécuter les Chrétiens, étaient qu’ils ne voulaient pas qu'il y eût de division dans l'Empire, et principalement dans la Religion, mais qu'on suivit seulement la religion de leurs ancêtres: car la diversité de religion ne produit que débat, querelle et discorde, ce qui n'est pas supportable pour un gouvernement. En plus de cela, il fallait craindre de grandes catastrophes et de nombreux châtiments, si on n'invoquait ni n’adorait les dieux comme le voulait la coutume. Or les chrétiens n'avaient pas seulement en horreur les temples, autels, sacrifices, idoles et fêtes des dieux dont ils ne tenaient aucun compte, mais aussi ils méprisaient les dieux des Romains et leur service, et pourtant ils ne devaient nullement les subir.

Quand il venait quelque calamité sur la ville ou dans l’empire de Rome, comme des tempêtes, la cherté de la vie, la famine, la guerre, les séditions, pestes, maladies, ou autres choses semblables, les Romains disaient:

«D'où nous viennent tout ceci sinon des chrétiens qui méprisent nos dieux et leur service? Car, contrairement à nous, ils invoquent un seul Dieu, et honorent un seul Christ Fils de Dieu, comme leur Sauveur unique. Ils maintiennent ouvertement que notre religion est fausse et diabolique, et que leur foi en Christ est vraie et infaillible, et qu'il ne faut point adorer Dieu au travers des idoles et des temples ou par des sacrifices et des fêtes et d’autres choses semblables: mais seulement en esprit et vérité, comme il l’a commandé dans sa parole.»

Or les Romains et les autres païens, partout dans le monde, étaient fort enracinés dans leur superstition, aussi employaient-ils leur bien et leur vie pour maintenir leur religion, s'exhortant l'un l'autre à ne pas la quitter, alléguant qu'ils l'avaient reçue de leurs prédécesseurs qui avaient été des gens sages qui ne se laissaient pas tromper. Qu'ils avaient aussi des gens savants, des collèges et des prêtres. Que leur religion avait été confirmée par des grands signes et miracles, et qu'en adhérant à elle ils avaient obtenu la victoire et asservi tout le monde. Que tout leur bonheur et leur félicité provenaient de leur religion, laquelle avait duré mille ans, et n'était point nouvelle comme celle des chrétiens qui n’existait que depuis trente ans. Que leurs dieux se montraient envers eux gracieux, libéraux, et secourables, tellement qu'ils ne manquaient d'aucune chose.

Au contraire, les chrétiens étaient toujours pauvres et malheureux! Cela n'était donc pas une raison pour qu'on leur laissa ainsi la place, et qu’eux-mêmes acceptent que les chrétiens (lesquels ils appelaient sacrilèges) eussent la victoire sur leur religion ancienne.

Pour ces raisons les chrétiens étaient persécutés par les Empereurs romains. Si on veut encore aujourd'hui bien peser et sonder toutes choses, il se trouvera qu'on persécute les fidèles toujours et uniquement pour les mêmes raisons.

En cette persécution de Trajan fut répandu du sang chrétien sans fin ni mesure.

- Siméon, évêque de Jérusalem, âgé de 120 ans, fut crucifié.

- Ignace, excellent serviteur de Jésus Christ , et disciple des Apôtres, fut mené d'Antioche (où il était évêque) à Rome, et exposé aux bêtes sauvages par lesquelles il fut déchiré.

- Phocas, évêque du Pont, Evaristus , docteur chrétien, Clément, Alexandre, Quirin, Sulpice, Servilian et bien d’autres encore furent emportés par cette persécution durant laquelle les bons pasteurs de l'Église se consolent, et exhortent leurs troupeaux à rester patients et confiants.

On voit au 5e livre de l'histoire d'Eusèbe, chap. 56. ce qu'Ignace disait de lui:

«Que ne suis-je déjà entre les pattes des bêtes qu'on prépare contre moi. Je désire qu'elles accourent impétueusement vers moi, je les exciterai, afin qu'elles me dévorent promptement, et qu'elles ne s’éloignent pas comme elles l’ont fait pour d'autres. Je les contraindrai de me courir après. Pardonnez-moi, mais je sais ce qui m'est propre. Je commence maintenant d'être un disciple de Christ; il m’importe peu de n’avoir aucune chose quelconque, car je rejette tout et ne veux que Jésus Christ.»

En fin de compte, il fut livré à dix soldats, pour le mener à Rome; lui-même écrit encore:

«Depuis la Syrie jusqu’à Rome, je combats contre les bêtes, étant lié et conversant en mer, en terre, jour et nuit entre dix léopards. Plus je leur fais de bien, plus deviennent méchants! Mais leurs outrages m'éveillent et me rendent plus sage, mais je ne suis pas justifié pour autant.»

Au lieu de perdre le moral en chemin, il écrivit des lettres de consolation à diverses églises, recommanda celle d'Antioche à Polycarpe, ministre de l'église de Smyrne, puis, étant amené à Rome, il eut cette belle sentence dans la bouche jusque à la mort: «Puisque je suis froment de Christ, il faut que les dents des bêtes me broient, afin que je sois trouvé pain net et savoureux du Seigneur.»

Le massacre des chrétiens était si grand qu'un gouverneur pour l'Empereur, nommé Pline Second, homme prudent, en écrivit à l'Empereur en rendant un excellent témoignage de l'innocence des chrétiens. On trouve cette lettre au dixième livre de ses Épîtres (Voici quelques fragments de cette lettre de Pline souvent citée : «Les chrétiens se réunissent un certain jour dès l'aurore chantant ensemble un cantique en l'honneur de Christ comme en l'honneur d'une divinité. Ils s'astreignent par serment à ne commettre aucun crime, ni vol, ni larcin, ni adultère.»). Par ce moyen les chrétiens eurent quelque relâche.

La longue durée de cette persécution, et la perte de tant de pauvres chrétiens ne rendait pas pour autant la religion chrétienne mauvaise et la païenne bonne; car il n'y a au monde que la foi et la religion chrétienne qui soit la vraie et certaine.

Dieu n'a point failli en permettant que tout ceci arrivât contre les fidèles, car par le martyre et sang des innocents il a augmenté la vraie foi dans bien des pays. Tellement que les anciens avaient toujours en bouche cette belle sentence: «Que le sang des chrétiens était la graisse du champ de l'Église.»

Ayons donc une bonne espérance aujourd'hui alors que nous sommes au milieu des persécutions et parmi l'effusion du sang innocent des chrétiens.


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